Cour d'appel de Versailles, 13ème chambre, 17 octobre 2013, n° 11/07740

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Chronologie de l’affaire

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Lettre des Réseaux · 17 décembre 2021

Le seul fait pour le franchisé de ne pas réaliser les chiffres d'affaires mentionnés dans le prévisionnel remis par le franchiseur ne suffit pas à fonder une action, le franchisé devant démontrer le caractère grossièrement erroné ou manifestement irréaliste du prévisionnel. Ce qu'il faut retenir : Le seul fait pour le franchisé de ne pas réaliser les chiffres d'affaires mentionnés dans le prévisionnel remis par le franchiseur ne suffit pas à fonder une action, le franchisé devant démontrer le caractère grossièrement erroné ou manifestement irréaliste du prévisionnel. Pour approfondir : …

 
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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 13e ch., 17 oct. 2013, n° 11/07740
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 11/07740
Décision précédente : Tribunal de commerce de Versailles, 4 octobre 2011, N° 09/F02816
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 53I

13e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 17 OCTOBRE 2013

R.G. N° 11/07740

AFFAIRE :

XXX

C/

A B C

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 05 Octobre 2011 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 09/F02816

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 17.10.2013

à :

Me Franck LAFON,

Me Fabrice HONGRE-BOYELDIEU

Me Emmanuel JULLIEN

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX SEPT OCTOBRE DEUX MILLE TREIZE,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

XXX prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

N° SIRET : 401 950 308

XXX

XXX

Représentée par Maître Franck LAFON, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20110978 et par Maître S.RICHARD, avocat plaidant au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

Monsieur A B C

né le XXX à XXX

XXX

XXX

Représenté par Maître Fabrice HONGRE-BOYELDIEU de l’Association AARPI AVOCALYS, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES et par Maître V. SELLAN BENISTY, avocat plaidant au barreau de PARIS

SA CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE ILE DE FRANCE Banque Coopérative, régie par les articles L512-85 et suivants du Code monétaire et financier,

N° SIRET : 382 900 942

XXX

Représentée par Maître Emmanuel JULLIEN de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, avocat Postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20111317 et par Maître SOLA, avocat plaidant au barreau de PARIS

INTIMES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 18 Juin 2013 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Annie VAISSETTE, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur A BESSE, Conseiller faisant fonction de président,

Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,

Madame Annie VAISSETTE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Monsieur A-François MONASSIER,

A la suite du salon de la franchise édition 2006, M. Y a rempli le 31 mars 2006 une fiche de candidature pour rejoindre le réseau de franchise Rapid’flore qui regroupait des magasins de libre service de fleurs.

Le 5 septembre 2006, M. Y a constitué, avec Mme X, la Sarl Rapid’flore Paris 12e.

Le 8 septembre 2006, la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile de France (laCaisse) a consenti à la société Rapid’flore un prêt d’un montant de 167.000 euros remboursable sur 7 ans, pour lequel M. A-B Y s’est porté caution solidaire de la société, dans la limite de 217.000 euros.

Le 21 février 2007, un contrat de franchise était conclu entre la société Floria Création, franchiseur et la société Rapid’flore Paris 12e, franchisé.

Par jugement du tribunal de commerce de Paris du 5 février 2009, la société Rapid’flore a été mise en redressement judiciaire, puis le 30 juillet 2009, en liquidation judiciaire.

Le 19 février 2009, la Caisse a déclaré sa créance pour un montant à titre privilégié de 144.935,64 euros et, par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 24 février 2009, a mis en demeure M. A-B Y de lui rembourser cette somme. Cette mise en demeure étant restée infructueuse, la Caisse a saisi le tribunal de commerce de Versailles par assignation du 24 avril 2009.

Par jugement du 5 octobre 2011, le tribunal de commerce de Versailles a :

— condamné M. A-B Y à payer à la société Caisse d’épargne d’Ile de France la somme de 144 935.64 € majorée des intérêts calculés au taux de 6,95% l’an à compter du 24 février 2009 jusqu’à parfait paiement ;

— ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1154 du code civil;

— dit que M. A-B Y pourra s’acquitter de sa dette en 24 mensualités égales et consécutives et qu’à défaut de paiement de l’une quelconque des échéances à son terme, la totalité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible, sans autre formalité ;

— reçu M. A-B Y en sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts à l’encontre de la SA Caisse d’épargne d’Ile de France, mais l’en a débouté ;

— débouté M. A-B Y de sa demande de condamner la société Floria Création ès-qualités de franchiseur à verser en ses lieu et place toutes sommes auxquelles il pourrait être condamné, à l’égard de la Caisse au titre de son engagement de caution personnelle et solidaire ;

— reçu M. A-B Y en sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts à rencontre de la société Floria Création, l’y dit partiellement bien fondé et a condamné la société Floria Création à lui payer la somme de 100.000 € à titre de dommages et intérêts ;

— mis hors de cause la société Hauraunize ;

— condamné M. A-B Y à payer à la SA Caisse d’épargne d’Ile de France la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné la société Floria Création à payer à M. A-B Y la somme de de 1.000,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— débouté la société Hauraunize de sa demande au tire de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné M. A-B Y et la société Floria Création aux dépens par moitié.

Par déclaration au greffe de la cour d’appel de Versailles du 28 octobre 2011, la société Floria Création a interjeté appel du jugement.

M. Y a formé appel incident.

La société Floria Création, par dernières conclusions du 17 avril 2013 demande à la cour, au visa des articles L. 330-3 et R. 330-1 du code de commerce :

— d’infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a reçu M. A-B Y en sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts à l’encontre de la société Floria Création, et a condamné cette dernière à lui verser à ce titre la somme de 100.000 euros ; en ce qu’il a condamné la société Floria Création à payer à M. Y la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens ;

statuant à nouveau de ce chef, de :

— déclarer M. A-B Y irrecevable ;

— débouter M. Y de l’intégralité de ses demandes ;

— condamner M. Y, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, au paiement de la somme de 15.000 euros;

— condamner M. Y aux entiers dépens de première instance et d’appel.

M. A-B Y, par dernières conclusions signifiées le 16 mai 2013, demande à la cour, au visa des articles L. 650-1 du code de commerce, L. 341-4 du code de la consommation, 1147 et 1382 du code civil, et 559 du code de procédure civile de :

— infirmer partiellement le jugement dont appel du 05 octobre 2011 ;

A l’égard de la société Floria Création

— confirmer partiellement le jugement du 5 octobre 2011 en ce qu’il a retenu la responsabilité du franchiseur et a condamné la société Floria Création à lui payer la somme de 100.000 euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens;

— le relever et le garantir de toute condamnation éventuelle prononcée à son encontre ;

— condamner en tant que de besoin la société Floria Création à verser en ses lieu et place toutes sommes auxquelles il pourrait être condamné à l’égard de la Caisse au titre de son engagement de caution personnelle et solidaire ;

— condamner la société Floria Création à lui verser :

50.000 euros en remboursement du compte courant d’associé,

48.000 euros au titre des revenus non perçus de 2.000 euros x 24 mois

35.000 euros en remboursement du droit d’entrée

7.000 euros en remboursement des frais de formation

30.000 euros en réparation du préjudice moral distinct et additionnel;

A titre incident,

— condamner la société Floria Création es-qualité de franchiseur à lui verser 25.000 euros à titre de dommages et intérêt pour appel abusif au visa de l’article 559 du code de procédure civile ;

— débouter la société Floria Création de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions à son encontre ;

A l’égard de la Caisse

— infirmer le jugement du 5 octobre 2011 en ce qu’il a condamné M. Y au paiement du solde de sa dette de 144.935,64 euros majorée des intérêts calculés au taux de 6,95% l’an à compter du 24 février 2009 jusqu’à parfait paiement ;

— débouter la Caisse de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions à son encontre;

— le décharger en totalité de son engagement de paiement du cautionnement souscrit avec la Caisse ;

— condamner la Caisse à lui payer 144.935, 656 à titre de dommages-intérêts pour manquement à son obligation contractuelle de mise en garde ;

A titre subsidiaire,

— limiter le solde de la créance réclamée par la Caisse à la somme rectifiée de 123.091,13 euros ;

— ordonner la déchéance des intérêts contractuels et des pénalités éventuelles qui se rapporteraient à la créance de la Caisse conformément aux dispositions des articles 378 et 379 du code de procédure civile ;

— confirmer le jugement du 5 octobre 2011 en ses dispositions qui lui accordent le bénéfice du principe d’un délai de 24 mois pour s’acquitter du solde de son prêt ;

— lui accorder un report de 24 mois à compter de l’arrêt à intervenir pour s’acquitter du solde des sommes éventuellement mises à sa charge ;

— condamner la Caisse à lui verser la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

— condamner la société Floria Création es-qualité de franchiseur à lui verser la somme de 15.000¿ au titre de l’article 700 du code de procédure civile .

La Caisse, par dernières conclusions signifiées le 16 avril 2013, demande à la cour, au visa des articles 1134 et suivants, 1154 et 2288 et suivants du code civil, de :

— confirmer le jugement rendu le 5 octobre 2011 par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a condamné M. A-B Y à lui payer, au titre du prêt n° 30601848 renuméroté n°2046070, la somme de 144.935,64 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 6,95% à compter du 24 février 2009, avec capitalisation des intérêts et en ce qu’il a condamné M. A-B Y à lui payer la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens de première instance ;

— infirmer le jugement rendu le 5 octobre 2011 par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il dit que M. A-B Y pourra s’acquitter de sa dette en vingt-quatre mensualités égales et consécutives ;

Statuant à nouveau :

— condamner M. A-B Y à lui payer, au titre du prêt n°30601848 renuméroté n° 2046070 la somme de 144.935,64 euros, outre les intérêts au taux contractuel de 6,95% à compter du 24 février 2009, avec anatocisme, et ce, sans délai ;

— condamner M. A-B Y à lui payer la somme de 8.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens .

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie aux dernières conclusions signifiées conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le cautionnement de M. Y

M. Y invoque de nombreux moyens pour faire échec à la demande de la Caisse.

Le moyen tiré de la disproportion et fondé sur l’article L. 341-4 du code de la consommation doit être examiné en premier lieu car il est préalable.

M. Y soutient que lorsqu’il a signé le cautionnement, il sortait d’une période de chômage et ne disposait que du tiers indivis du domicile conjugal estimé à 225 000 euros soit 75 000 euros .

La Caisse rétorque que, pour apprécier le caractère disproportionné d’un engagement, il convient de prendre en compte les revenus de la caution mais aussi le patrimoine personnel de celui qui s’oblige et les profits escomptés par l’opération financée. En l’espèce, la banque fait valoir le défaut d’élément de preuve apporté par M. Y pour démontrer la disproportion. Elle relève qu’au contraire, M. Y communique ses avis d’imposition sur les revenus de 2005 à 2007, un plan d’investissement de 2005 démontrant qu’il a fait un apport personnel de 50.000 euros et note que , d’après ses écritures, M. Y était propriétaire d’un tiers indivis d’un bien immobilier d’une valeur estimée à 225.000 euros en juillet 2006. La Caisse demande à la cour de prendre en considération les profits escomptés par M. Y dans l’appréciation du caractère excessif de l’engagement et relève qu’il ressort du plan d’investissement du 11/07/2006 remis par M. Y à la banque, qu’une fois le prêt litigieux payé ainsi que l’impôt sur les sociétés et toutes les charges, le résultat net comptable de la première année devait s’élever à 31.572 euros, soit 2.631 euros par mois.

' Sur ce :

Il résulte des dispositions de l’article L. 341-4 du code de la consommation applicable en la cause, qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

La disproportion de l’engagement de caution s’apprécie à la date de la conclusion du cautionnement.

En l’espèce, le cautionnement a été souscrit au sein de l’acte de prêt et la Caisse ne fournit aucun questionnaire rempli et signé de la caution faisant état de sa situation financière et patrimoniale ou de ses charges.

La caution communique son avis d’imposition sur les revenus de 2006 dont il résulte que les revenus annuels de M. Y se sont élevés à 20 688 euros et il convient de noter que l’avis d’imposition sur les revenus 2005 témoigne de revenus annuels de 30 376 euros .

Ainsi, que l’on prenne en considération les revenus de l’année 2005 antérieure à la souscription du cautionnement ou ceux de l’année de signature de l’acte en 2006, la disproportion est manifeste entre le montant de l’engagement de la caution à savoir 217 000 euros et celui de ses revenus.

Lors de la souscription de son engagement le 8 septembre 2006, M. Y possédait en indivision avec son épouse à hauteur d’un tiers des droits, un appartement situé XXX. La valeur totale du bien immobilier était estimée, en juillet 2006, à la somme de 225.000 euros, soit pour le tiers, 75.000 euros, ce qui n’est pas contesté par les parties.

Le moyen soulevé par la Caisse selon lequel le prix du mètre carré aurait favorablement évolué au Chesnay est inopérant , la valeur du patrimoine de la caution devant s’apprécier au jour de la souscription de l’engagement .

En outre, M. Y avait la charge du remboursement des échéances d’un prêt de 140.000 euros, consenti aux deux époux lors de l’acquisition du logement familial au Chesnay en 2003.

La banque fait valoir que la fiche candidature remplie par M. Y en mars 2006, dans le but d’intégrer le réseau Rapid’flore, mentionne qu’il disposait de 50.000 euros en fonds propres, hors emprunts. Ce document est une déclaration au futur franchiseur et non à la banque, cette dernière n’ayant pas fait remplir à M. Y de questionnaire de caution. Cette déclaration n’apporte pas la preuve de la proportionnalité de l’engagement pris par la caution, dans la mesure où cette somme n’avait pas vocation à rester disponible dans le patrimoine de M. Y mais apparaît dans le plan d’investissement produit par la Caisse comme le montant de l’apport personnel mis dans le projet de création du fonds de commerce sous franchise .

La Caisse prétend avoir vérifié les capacités financières de la caution en consultant le plan d’investissement du 11 juillet 2006 qui lui a été remis par M. Y, laissant apparaître un chiffre d’affaires escompté de 479.250 euros pour la première année et de 505.875 euros pour la seconde année. Cette analyse revient à prendre en compte les profits escomptés de l’opération financée pour l’appréciation de la disproportion ce qui est contraire aux prévisions de l’article L. 341-4 du code de la consommation .

La disproportion de l’engagement de caution pris par M. Y à ses biens et revenus existants lors de la signature du cautionnement est en conséquence manifeste.

A toutes fins, la cour constate que la banque n’allègue pas qu’au jour où la caution a été appelée, son patrimoine lui aurait permis de faire face à son obligation, comme il en résulte de l’alinéa 2 de l’article L. 341-4 du code de la consommation et relève en tout état de cause que les éléments versés aux débats par M. Y démontrent le contraire.

Ainsi, conformément aux prévisions de l’article L. 341-4, il y a lieu de conclure que

la Caisse ne peut se prévaloir du cautionnement souscrit par M. Y le 8 septembre 2006. Mais sa nullité invoquée ne peut être prononcée en l’absence de texte prévoyant une telle sanction en cas de disproportion.

Par conséquent, les autres moyens soulevés par M. Y au sujet du cautionnement relatifs aux prises de garanties excessives au sens de l’article L. 650-1 du code de commerce, au quantum de la créance de la Caisse, à la déchéance des intérêts contractuels en raison du défaut d’information de la caution et aux délais de grâce se trouvent privés d’objet.

Il en va de même de la recherche de la responsabilité de la banque pour manquement à ses obligations d’information et de mise en garde qui n’a pas davantage lieu d’être examinée, M. Y déchargé de ses obligations de caution ne pouvant plus se prévaloir d’aucun préjudice envers la Caisse.

— Sur les demandes de M. Y à l’encontre de la société Floria création

Au soutien de son appel, la société Floria création rappelle d’abord que le franchisé n’a formulé aucun reproche à son égard avant décembre 2009, époque à laquelle il l’a assignée en garantie.

Elle soulève l’irrecevabilité des demandes de la caution au titre de fautes imputées au franchiseur au cours de la période précontractuelle en faisant valoir que la caution ne peut invoquer la nullité relative tirée du dol affectant le consentement du débiteur principal qui constitue une exception purement personnelle à ce dernier.

Subsidiairement, elle indique n’avoir commis aucune faute au cours de la période précontractuelle et soutient que le document d’information précontractuelle (DIP) remis était complet . Elle ajoute qu’elle a remis la présentation de l’état général et local du marché des articles L. 330-3 et R.330-1 du code de commerce seule exigée, ce qui diffère d’une étude du marché local qui incombe au seul franchisé et s’est donc ainsi conformée aux exigences de la loi et de la jurisprudence.

Elle souligne que M. Y ne rapporte aucune preuve du fait que le choix du local et du bailleur viendraient du franchiseur, ni du fait que l’emplacement était inadapté.

S’agissant des comptes prévisionnels, elle rappelle qu’elle n’était même pas tenue en l’espèce d’une obligation de moyens puisqu’elle avait clairement indiqué la mention 'non contractuel’ sur le document prévisionnel transmis. Elle ajoute que les comptes prévisionnels transmis n’étaient pas grossièrement erronés ni manifestement irréalistes et soulignent que des comptes prévisionnels sont toujours soumis à un aléa tandis qu’en l’espèce, les chiffres fournis étaient réalistes au regard des chiffres réalisés dans le réseau Rapid’Flore et au regard des chiffres d’affaires réalisés en 2005 par la concurrence dans le 12e arrondissement de Paris ou par des fleuristes Monceau fleurs de Paris et qu’ils devaient être complétés par une étude prévisionnelle du franchisé que ce dernier n’a pas réalisée. Selon la société Floria création, les difficultés rencontrées par le franchisé proviennent largement des travaux nécessités par l’état du local qui ont différé de plusieurs mois l’ouverture du magasin.

Elle insiste enfin sur l’expérience des affaires dont disposait M. Y et sur l’importance du délai de réflexion dont il a bénéficié du 11 juillet 2006, date de transmission du prévisionnel d’exploitation, au 22 février 2007 date de la signature du contrat de franchise.

Par ailleurs, elle relève que le lien de causalité entre les fautes qui lui sont imputées et les préjudices avancés n’est pas établi puisque le franchisé avait irrévocablement signé le bail et le crédit avant la remise des comptes prévisionnels par le franchiseur.

Elle conteste avoir commis des fautes dans l’exécution du contrat de franchise et prétend avoir pleinement exécuté ses obligations d’assistance lors de l’ouverture du point de vente puis à plusieurs occasions et n’avoir donc commis aucune faute délictuelle à l’encontre du gérant de la société Rapid’Flore Paris 12e.

M. Y fait valoir qu’il a subi, du fait des fautes précontractuelles et contractuelles du franchiseur, un préjudice personnel qui doit être réparé et qu’il est donc recevable dans ses demandes.

Il soutient que le DIP remis en trois phases et en dernier lieu postérieurement à la signature du bail le 11 septembre 2006 était incomplet . Il fait également valoir l’absence d’étude et d’un état réaliste du marché du 12e arrondissement et prétend que le choix du local et les conditions locatives ont été imposées par le franchiseur, souligne que la liste nominative des entreprises du réseau avec indication de leur mode d’exploitation et la liste des entreprises ayant cessé de faire partie du réseau avec mention du motif étaient absentes du DIP. Il dénonce le fait que la liste fournie constituant prétendument un état local du marché n’est qu’un document de l’INSEE sur la population du 12e sans rapport avec la réalité du marché de la fleur coupée discount, alors que le document aurait dû contenir une analyse de la zone de chalandise, une description de la concurrence locale et un examen de la configuration de la situation.

En outre, il demande la confirmation du jugement en ce qu’il a retenu l’absence de comptes prévisionnels réalistes, sérieux, fiables et sincères en rappelant que le prévisionnel a surestimé de 56, 3 % le chiffre d’affaires attendu et n’a pas pris en considération la proximité de 4 fleuristes concurrents préexistants situés à proximité immédiate de la boutique. Il souligne que les chiffres communiqués étaient en réalité fondés sur une moyenne des chiffres d’affaires obtenus en province ou en banlieue dans des villes plus petites, le réseau étant absent de la capitale, le seul magasin Rapid’Flore du réseau, le Bouquet de Z, n’ayant pas renouvelé le contrat de franchise, ce qui n’a pas été révélé au candidat.

S’agissant de l’obligation d’assistance du franchiseur au franchisé, M. Y fait valoir qu’elle a été insuffisamment remplie tant quantitativement que qualitativement .

'Sur ce :

Les fins de non-recevoir peuvent être opposées en tout état de cause. La société Floria création est en conséquence recevable à invoquer l’irrecevabilité des demandes de M. Y pour la première fois en cause d’appel.

La fin de non-recevoir est fondée sur l’impossibilité pour la caution d’opposer des exceptions purement personnelles du débiteur principal, comme un vice du consentement.

Mais eu égard à la décision de la cour de déclarer le cautionnement disproportionné et de dire en conséquence que la Caisse ne peut s’en prévaloir, M. Y peut rechercher la responsabilité du franchiseur sur le fondement de l’article 1382 du code civil, non en qualité de caution du franchisé, mais au titre des préjudices personnels qu’il a pu subir du fait de l’opération comme associé et gérant de la société Rapid’Flore.

Et M. Y, tiers au contrat de franchise conclu entre la société Floria création et la société Rapid’Flore 12e, est recevable à invoquer sur le fondement de la responsabilité délictuelle des manquements du franchiseur à ses obligations précontractuelles et contractuelles, dès lors que ces manquements lui ont causé un dommage.

Il convient donc d’examiner les manquements invoqués par M. Y.

Il soutient en premier lieu que le DIP remis était incomplet. Au vu des documents produits, il est établi qu’un premier DIP a été remis à M. Y le 29 juin 2006 (remise signée par lui) puis un second plus complet et personnalisé le 28 septembre 2006 dont il a également accusé réception.

L’examen de ces documents montre que l’ensemble des informations et pièces requises par les articles L. 330-3 et R.330-1 du code de commerce figurent sur le DIP remis le 28 septembre 2006, y compris la liste des membres du réseau contrairement aux allégations de M. Y, mais à l’exception comme il le soutient justement de la liste des entreprises du réseau ayant cessé d’en faire partie l’année précédant celle de la remise du DIP avec la précision du motif (contrat venu à expiration, résiliation, annulation), liste exigée par l’article R.330-1 5° c). Ce défaut d’information est établi et M. Y fait pertinemment observer que le fait que le seul commerce du réseau Rapid’Flore implanté à Paris 'le Bouquet de Z’ n’avait pas souhaité renouveler le contrat de franchise devait être porté à ce titre à sa connaissance.

Les articles L.330-3 et R.330-1 du code de commerce n’imposent pas au franchiseur de fournir une étude du marché local au sein du DIP mais seulement 'l’état et les perspectives de développement du marché’ selon le premier texte et 'un état général et global du marché des produits et services devant faire l’objet du contrat et des perspectives de développement de ce marché’ selon le texte réglementaire .

La remise des informations générales n’est pas contestée. Le document critiqué remis par la société Floria création s’intitule 'état du marché local’ et comprend la liste de tous les magasins de fleurs installés sur le 12e arrondissement complétée par un 'portrait du territoire’ réalisé par l’INSEE comportant une description sociologique,, démographique et économique de la population du 12e ainsi que des activités économiques , du taux d’emploi de la zone.

La société Floria création, qui n’était pas tenue de réaliser une étude de marché et qui n’a pas présenté le document remis comme tel, ne peut donc se voir reprocher de ne pas avoir réalisé d’analyse précise de la chalandise ou de la concurrence locale, d’autant qu’elle mettait en garde le franchisé en lui transmettant l’état du marché local sur la nécessité de remplir le document intitulé 'étude du marché local’ ce qui signifiait expressément que cette étude était à la charge du franchisé .

S’agissant des comptes prévisionnels fournis pour les trois premières années d’exploitation par la société Floria création au titre de l’information précontractuelle, s’ils ne figurent pas parmi les éléments obligatoirement exigés au titre de cette information , ils doivent, lorsqu’ils sont communiqués, présenter un caractère sérieux et sincère et l’indication du 'caractère non contractuel’ du document par le franchiseur ne peut l’exonérer de cette obligation , étant entendu qu’aucune obligation de résultat n’est bien sûr attendue quant à l’exactitude des résultats annoncés.

En l’espèce, pour un chiffre d’affaires annoncé pour la première année de 479 250 euros, le chiffre d’affaires effectivement réalisé a été de 217 000 euros ; ce très important écart ne peut être imputé à des défaillances du franchisé dans l’exploitation du commerce alléguées par la société Floria création mais nullement caractérisées, ni démontrées ; l’audit réalisé par ses soins en février 2007, outre qu’il émane de ses services, n’étant pas démonstratif à cet égard et l’écart constaté ne peut pas davantage avoir été causé par les travaux exécutés dans le local qui n’ont fait que retarder l’ouverture du commerce mais n’en ont pas entravé l’exploitation.

Comme l’ont retenu les premiers juges, il apparaît que l’impact de la concurrence préexistante particulièrement fournie sur l’arrondissement n’a pas été pris en compte, spécialement quant à la présence de quatre fleuristes déjà installés à 50, 150, 200 et 300 mètres de la boutique de la société Rapid’Flore.

La société Floria création soutient avoir annoncé le chiffre d’affaires prévisionnel et celui correspondant au seuil de rentabilité en fonction des moyennes de chiffres d’affaires de plusieurs commerces de son réseau et de fleuristes

Mais les chiffres communiqués témoignent de gros écarts , ne sont guère pertinents s’agissant des magasins franchisés situés en province ou en banlieue dont la taille et les conditions d’exploitation sont ignorés. S’agissant des fleuristes parisiens, il ne peut s’agir de membres du réseau Rapid’Flore, le magasin du 12e étant le seul implanté lors des faits litigieux, et les chiffres donnés pour des fleuristes parisiens, outre qu’ils comportent de larges écarts, ne permettent pas de connaître l’implantation précise du magasin à Paris, ni sa taille. Les chiffres communiqués a posteriori concernant les fleuristes du réseau Monceau fleurs appellent les mêmes réserves.

Le sérieux des comptes prévisionnels n’est donc pas justifié par ces éléments .

Les griefs de M. Y tenant au fait que le choix du local pris à bail lui aurait été imposé par le franchiseur ne sont aucunement établis, aucune pièce du dossier n’apportant le moindre élément de preuve à cet égard.

De même, une insuffisance du franchiseur dans ses obligations d’assistance au franchisé n’est pas davantage prouvée par M. Y, tandis que le franchiseur rapporte la preuve de plusieurs interventions à ce titre.

Finalement, aucun manquement dans l’exécution du contrat ne peut être retenu à l’encontre de la société Floria création .

En revanche, elle a manqué à son obligation de délivrer une information précontractuelle complète, sérieuse et sincère dans la période précontractuelle à deux titres, en ne remettant pas la liste des entreprises du réseau ayant cessé d’en faire partie l’année précédant celle de la remise du DIP , et en fournissant un compte prévisionnel dépourvu de caractère sérieux et réaliste au franchisé.

Du fait de ces manquements, la société Rapid’Flore a perdu une chance de ne pas contracter avec le franchiseur ou de contracter à des conditions plus avantageuses.

Et le seul fait que la société Rapid’Flore ait signé le bail commercial avant de signer le contrat de franchise ne supprime pas le lien de causalité entre les manquements précontractuels du franchiseur et la perte d’une chance de ne pas contracter avec la société Floria création puisqu’il était loisible à la société Rapid’Flore d’exploiter dans le local loué un commerce indépendant du réseau de franchise de la société Floria création.

M. Y, gérant et associé de la société Rapid’Flore, peut se prévaloir de cette perte de chance pour voir indemniser le préjudice qui en est directement et personnellement résulté pour lui.

Il fait valoir les dommages suivants:

— remboursement de son compte courant d’associé 50 000 euros,

— perte de chance de percevoir un revenu mensuel de 2 000 euros durant 24 mois au titre du salaire non perçu,

— remboursement du droit d’entrée de 35 000 euros,

— remboursement des frais de formation de 7 000 euros,

— réparation de son préjudice moral additionnel et distinct de 30 000 euros aggravé par la procédure de divorce initiée par son épouse.

Les demandes relatives au remboursement du droit d’entrée et aux frais de formation dont le contrat stipule qu’ils sont à la charge du franchisé, c’est-à-dire de la société Rapid’Flore, ne peuvent être prises en considération, M. Y ne justifiant pas avoir acquitté ces frais.

Le préjudice résultant du manquement à une obligation précontractuelle d’information est constitué par la perte de chance de ne pas contracter, et s’agissant de M. Y de ne pas apporter de fonds dans la société qu’il a constituée pour les besoins de la franchise, ou de s’y impliquer dans de meilleures conditions. En conséquence, seule la perte de chance de ne pas apporter dans ces conditions la somme de 50 000 euros en compte courant d’associé peut être prise en compte, à l’exclusion de la perte de chance de percevoir les gains attendus.

Cette perte de chance, en fonction des éléments de l’espèce précédemment analysés, sera réparée par l’octroi d’une somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts.

Le lien de causalité entre les manquements retenus à l’encontre de la société Floria création et le préjudice moral invoqué par M. Y n’est aucunement établi et la demande d’indemnisation à ce titre ne peut qu’être rejetée.

La société Floria création en relevant appel du jugement n’a commis aucune faute susceptible de faire dégénérer son droit d’exercer un recours en abus, de sorte que M. Y doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts de ce chef.

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,

Confirme le jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 5 octobre 2011 en ce qu’il a déclaré M. Y recevable en sa demande de dommages-intérêts à l’encontre de la société Floria création et partiellement fondé, en ce qu’il a mis la société Hauraunize hors de cause et en ce qu’il a condamné la société Floria création à payer à M. Y la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Le réforme pour le surplus et statuant à nouveau,

Constate la disproportion manifeste du cautionnement souscrit par M. Y le 8 septembre 2006 et dit que la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile de France ne peut s’en prévaloir,

Déboute en conséquence la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile de France de toutes ses demandes,

Condamne la société Floria création à payer à M. Y la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts,

Déboute M. Y du surplus de ses demandes envers la société Floria création,

Ajoutant au jugement,

Condamne la société Floria création à payer à M. Y une indemnité complémentaire de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ,

Rejette les autres demandes formées en cause d’appel au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Fait masse des dépens et ordonne leur partage par moitié entre la Caisse d’épargne et de prévoyance Ile de France et la société Floria création, accorde aux avocats de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Madame Annie VAISSETTE, Conseiller, conformément aux dispositions de l’article 456 du Code de procédure civile, et par Monsieur MONASSIER, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le CONSEILLER,

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Cour d'appel de Versailles, 13ème chambre, 17 octobre 2013, n° 11/07740