Cour d'appel de Versailles, 20 septembre 2016, n° 16/05166

  • Électricité·
  • Énergie·
  • Union européenne·
  • Achat·
  • Aide·
  • Tarifs·
  • Commission européenne·
  • Sociétés·
  • État·
  • Illégalité

Chronologie de l’affaire

Commentaires3

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Arnaud Gossement · 21 mars 2017

Par une ordonnance du 15 mars 2017, n°C-515/16, dans le cadre d'un renvoi préjudiciel, la Cour de justice de l'Union européenne s'est prononcée sur un volet de la question de l'articulation entre le dispositif français de l'obligation d'achat en matière de production d'énergie solaire et le droit des aides d'Etat. Une décision sans portée concrète à court terme. Le litige principal oppose un exploitant d'une installation solaire à la société ENEDIS (ex ERDF) et son assureur concernant le dépassement du délai de raccordement. Le dépassement de ce délai de la part d'ERDF aurait fait perdre …

 

www.iroise-avocats.fr · 10 janvier 2017

Les arrêtés ministériels fixant le prix d'achat de l'énergie photovoltaïque constituent-ils des aides d'Etat au sens du droit de l'Union ? Irrecevabilité de la question préjudicielle renvoyée à la CJUE. Estimant que le renvoi tardif de la proposition technique et financière par ERDF l'avait empêché de bénéficier d'un tarif d'achat d'électricité plus avantageux (fixé par l'arrêté ministériel du 10 juillet 2006), la société Ombrière Le Bosc, producteur d'énergie photovoltaïque, a assigné ERDF en réparation du préjudice financier subi. Par jugement en date du 27 mars 2014, le Tribunal de …

 

www.iroise-avocats.fr · 10 janvier 2017

Les arrêtés ministériels fixant le prix d'achat de l'énergie photovoltaïque constituent-ils des aides d'Etat au sens du droit de l'Union ? Irrecevabilité de la question préjudicielle renvoyée à la CJUE. Estimant que le renvoi tardif de la proposition technique et financière par ERDF l'avait empêché de bénéficier d'un tarif d'achat d'électricité plus avantageux (fixé par l'arrêté ministériel du 10 juillet 2006), la société Ombrière Le Bosc, producteur d'énergie photovoltaïque, a assigné ERDF en réparation du préjudice financier subi. Par jugement en date du 27 mars 2014, le Tribunal de …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 20 sept. 2016, n° 16/05166
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 16/05166
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 26 mars 2014, N° 11F00823

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

AP

Code nac : 56C

12e chambre section 2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 20 SEPTEMBRE 2016

R.G. N° 16/05166

AFFAIRE :

XXX DE FRANCE SA)

C/

XXX

Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 27 Mars 2014 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 11F00823

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Bertrand ROL

Me Christophe DEBRAY

Me Pierre GUTTIN

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT SEPTEMBRE DEUX MILLE SEIZE,

La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

XXX DE FRANCE SA)

N° SIRET : 444 608 442

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me Bertrand ROL de l’AARPI INTER-BARREAUX JRF AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 617 – N° du dossier 20140251

Représentant : Me Michel GUENAIRE, Plaidant, avocat au barreau de PARIS

APPELANTE

****************

XXX

N° SIRET : 399 227 354

XXX

XXX

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 14153

Représentant : Me Olivier LOIZON de l’AARPI SCEMLA LOIZON VEVERKA & de FONTMICHEL, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0564 Représentant : Me Matthias PUJOS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : A0288

XXX

XXX

XXX

XXX

Représentant : Me Pierre GUTTIN, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 623 – N° du dossier 14000145

Représentant : Me Séverine HOTELLIER-DELAGE de la SCP LEFEVRE PELLETIER ET ASSOCIES, Plaidant avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0238

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue en audience publique le 01 Septembre 2016, Monsieur Alain PALAU, Président, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Monsieur Alain PALAU, Président,

Mme Véronique CATRY, Conseiller,

Monsieur Denis ARDISSON, Conseiller,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Madame Lise BESSON,

Afin de développer la production d’électricité à partir de sources d’énergie renouvelable, la loi du 10 février 2000 a prévu l’obligation pour la société EDF d’acquérir l’électricité produite par divers producteurs à un prix supérieur à celui du marché.

Un arrêté ministériel du 10 juillet 2006 a fixé de nouvelles conditions tarifaires pour l’achat de l’électricité à partir de l’énergie radiative de soleil.

La SA ERDF, désormais Enedis, filiale à 100% d’EDF, instruit les demandes de raccordement en vue d’élaborer une offre de raccordement qu’elle adresse au producteur.

Par courrier reçu le 1er avril 2009, la société JMB Solar, mandataire de la société CS Ombrière le Bosc, a adressé à la société ERDF une demande de Proposition Technique et Financière, ci- après dénommée PTF, pour le raccordement d’une centrale implantée sur le territoire de la commune de Vias (34).

Par lettre du 3 avril 2009, la société ERDF lui a indiqué que sa demande était complète et qu’une PTF, lui serait adressée «'dans un délai de trois mois au plus tard le 01/07/2009'».

Par courrier du 22 janvier 2010, la société ERDF a adressé à la société CS Ombrière le Bosc la PTF.

Le 8 février, la société ERDF a accusé réception du chèque d’acompte des travaux de raccordement et de la PTF.

Par arrêté ministériel du 12 janvier 2010, l’arrêté ministériel du 10 juillet 2006 fixant le prix d’achat de l’électricité photovoltaïque a été abrogé et de nouveaux tarifs, inférieurs, ont été fixés.

Par arrêtés du 16 mars 2010, les conditions d’application dans le temps des arrêtés tarifaires des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 ont été précisées.

Par acte du 8 février 2011, la société Ombrière le Bosc a fait assigner la société ERDF devant le tribunal de commerce de Nanterre afin que celle-ci soit condamnée à lui payer la somme principale de 4.936.897 euros ou, subsidiairement, le différentiel constaté à l’échéance de chaque facture adressée par EDF entre le niveau des deux tarifs de rachat.

Par jugement du 27 mars 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a’ condamné la société ERDF à payer à la société CS Ombrière le Bosc, à titre de dommages et intérêts, à compter du 3 juin 2010 et jusqu’au 2 juin 2030, pour chaque kWh acheté par la société EDF, une somme égale à 80% de la différence entre, d’une part, le prix de ce kWh calculé en application des Conditions Particulières du contrat d’achat telles que signées le 19 novembre 2010 entre la société EDF et la société CS Ombrière le Bosc et, d’autre part, le prix de ce même kWh calculé selon les dispositions de l’arrêté du 10 juillet 2006 appliquées à l’installation de la société CS Ombrière le Bosc

Le tribunal a condamné la société Axa CS à garantir la société ERDF des condamnations en principal, frais, intérêts et accessoires au-delà du seuil de 1.500.000 euros.

Il a condamné la société ERDF à payer à la société CS Ombrière le Bosc la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 2 avril 2014, la société ERDF a interjeté appel.

Par déclaration du 2 mai 2014, la société Axa CS a interjeté appel.

Par arrêt du 8 décembre 2015, la cour d’appel a, sur le fondement de l’article 267 du traité de fonctionnement de l’Union européenne, saisi la Cour de justice de l’Union européenne de la question préjudicielle suivante':

«'Les arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, pris en application du décret 2000-1196 du 6 décembre 2000 et du décret 2001-410 du 10 mai 2001, eux-mêmes pris en application de la loi 2000-108 du 10 février 2000, sont-ils contraires aux articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (anciennement 87 et 88 du traité de la communauté européenne), en ce qu’ils constitueraient une aide d’Etat, laquelle, si c’est le cas, dès lors qu’elle n’a pas été notifiée préalablement à la Commission en application de l’article 108 paragraphe 3 dudit traité, affecterait leur légalité''».

Elle a sursis à statuer sur toutes les demandes dans l’attente de la décision de la cour de justice.

La procédure a été retirée du rôle.

Par ordonnance du 30 juin 2016, la CJUE a déclaré la demande manifestement irrecevable.

Par conclusions du 7 juillet 2016, la société Axa Corporate Solutions a demandé le rétablissement de la procédure au rôle de la cour d’appel.

Par ordonnance du 8 juillet 2016, les débats ont été fixés, en application de l’article 905 du code de procédure civile, au 1er septembre 2016.

Dans ses dernières conclusions portant le numéro 7, en date du 26 juillet 2016, la société Enedis, anciennement ERDF, demande, en principal, qu’il soit fait droit à la demande de renvoi préjudiciel et que soit renvoyée à la CJUE, dans des conditions garantissant sa recevabilité, la question suivante :

«'Les arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010, pris en application du décret 2000-1196 du 6 décembre 2000 et du décret 2001-410 du 10 mai 2001, eux-mêmes pris en application de la loi 2000-108 du 10 février 2000, sont-ils contraires aux articles 107 et 108 du traité sur le fonctionnement de l’union européenne (anciennement 87 et 88 du traité de la communauté européenne) en ce qu’ils constitueraient une aide d’Etat laquelle, si c’est le cas, dès lors qu’elle n’a pas été notifiée préalablement à la Commission en application de l’article 108 paragraphe 3 dudit traité, affecterait leur légalité''».

Elle conclut à l’infirmation du jugement et au rejet des demandes formées à son encontre.

Subsidiairement, elle conclut à la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné la société Axa CS à la garantir.

Elle demande la condamnation de la société Ombrière le Bosc à lui payer la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appelante rappelle l’arrêt du 8 décembre 2015 et demande que la CJUE soit de nouveau saisie. Elle affirme qu’elle ne s’est pas prononcée au fond et fait valoir qu’elle a différé l’examen de la question préjudicielle pour des raisons procédurales liées à son fonctionnement interne. Elle relève que la CJUE considère que les questions préjudicielles posées par les juridictions nationales «'bénéficient d’une présomption de pertinence'».

Sur le fond, elle soutient que, dans ses arrêts des 9 juin 2015 et 30 mars 2016, la cour de cassation ne s’est prononcée ni sur le lien de causalité ni sur le préjudice et considère que les arrêts du 9 juin 2015 concernent des circonstances d’espèce bien particulières.

Elle admet que, dans ses arrêts du 30 mars 2016, la cour de cassation a jugé que le délai de trois mois de transmission par elle d’une PTF constituait une obligation mais réfute tout lien de causalité entre l’inobservation de ce délai et le préjudice invoqué et tout préjudice, les opérateurs n’ayant pas un droit acquis au maintien des règlementations.

L’appelante demande la garantie de la société Axa CS.

Elle excipe de la police souscrite auprès d’elle et de la nullité de la clause d’exclusion de garantie au surplus non applicable.

Dans ses dernières écritures en date du 1er août 2016, la société Axa Corporate Solutions conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a fait droit aux demandes de la société Ombrière le Bosc.

Subsidiairement, elle demande que la CJUE soit saisie de la question préjudicielle suivante :

«- 'Si l’article 107 § 1, TFUE, doit être interprété en ce sens que le mécanisme d’obligation d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d’électricité, tel que ce mécanisme résulte des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 (JORF n°171 du 26 juillet 2006 p XXX et 12 janvier 2010 (XXX du 14 janvier 2010 p 727) fixant les conditions d’achat de cette électricité, lus en combinaison avec la loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation at au développement du service public de l’électricité, le décret n°2000-1196 du 6 décembre 2000 et le décret n° 2001-410 du 10 mai 2001, constitue une aide d’Etat;

et si, dans l’affirmative, l’article 108§3, TFUE, doit être interprété en ce sens que le défaut de notification préalable à la Commission européenne de ce mécanisme affecte la validité des arrêtés susvisés comportant mise à exécution de la mesure d’aide litigieuse'».

Très subsidiairement, elle demande que le jugement soit infirmé en ce qu’il a condamné ERDF.

En tout état de cause, elle demande qu’il soit infirmé en ce qu’il l’a condamnée à garantir la société ERDF.

Subsidiairement, elle demande que soit appliqué le seuil d’intervention de 1.500.000 euros.

Elle réclame le paiement par la partie succombante d’une somme de 10.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société conclut au rejet des demandes de la société CS Ombrière le Bosc en raison de l’illégalité des arrêtés pris les 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 sur lesquels sont fondées les demandes et calculé le préjudice.

Elle soutient que la perte d’un avantage dont l’obtention serait contraire au droit ne peut être considérée comme un préjudice réparable et estime que tel est le cas en l’espèce.

Elle déclare que, s’agissant du respect d’une disposition du droit européen, le juge judiciaire est compétent pour constater l’illégalité des arrêtés et excipe, notamment, d’une décision du tribunal des conflits du 17 octobre 2011.

Elle soutient que les arrêtés ministériels fixant les tarifs d’achat par EDF constituent une aide d’Etat au sens de l’article 107 du Traité sur le fonctionnement de l’union européenne et qu’ils auraient donc dû faire l’objet d’une notification préalable à la Commission européenne ce qui n’a pas été fait.

Elle rappelle la définition des aides d’Etat et déclare que, saisie par le conseil d’Etat en ce qui concerne le mécanisme de soutien à la filière éolienne, la cour de justice de l’union européenne a jugé le 19 décembre 2013 que l’obligation d’achat constituait une intervention au moyen de ressources d’Etat. Elle indique que le conseil d’Etat a jugé, le 28 mai 2014, en conséquence, que l’achat de l’électricité produite par les installations éoliennes à un prix supérieur à la valeur de marché avait le caractère d’une aide d’Etat et a annulé les arrêtés pris en l’absence de notification préalable à la commission européenne.

Elle considère que le mécanisme est identique en ce qui concerne la compensation des surcoûts imposés à EDF par l’obligation d’achat de l’électricité d’origine photovoltaïque à un prix supérieur à celui du marché ce qui rend illégaux les arrêtés pris sans notification préalable à la commission européenne et donc en violation de l’article 108§3 actuel du TFUE.

Elle déclare justifier de cette absence de notification et affirme que toute notification postérieure à la publication des arrêtés serait vaine.

Elle souligne que la cour de cassation a jugé, le 23 septembre 2008, qu’il appartenait aux juridictions nationales d’examiner si les projets tendant à instituer des aides d’Etat n’auraient pas dû être notifiés à la commission européenne et de tirer toutes conséquences de la méconnaissance de cette obligation.

En réponse à la société Ombrière le Bosc, elle conteste que la CJUE se soit, dans l’ordonnance du 30 juin 2016, prononcée sur le fond.

Elle ajoute que, par ses développements sur la conformité du régime d’aide mis en application par ces arrêtés avec les objectifs poursuivis par les institutions européennes, la société reconnaît implicitement que les arrêtés litigieux participent d’un régime d’aide d’Etat.

Elle rappelle l’arrêt du 23 septembre 2008 et celui du conseil d’Etat. Elle estime suffisante la constatation de l’illégalité de l’aide pour déclarer non réparable le préjudice fondé sur cette aide.

Elle rappelle que la commission européenne ne s’est pas prononcée sur ces arrêtés et estime hasardeux de se fonder sur sa décision du 27 mars 2014 relative aux «'arrêtés éoliens'» pour en déduire que les tarifs fixés par les «'arrêtés photovoltaïques'» seraient compatibles avec le marché commun.

Elle fait valoir que le principe de «'confiance légitime'» n’est pas reconnu en droit interne et que la CJUE n’en a fait application que dans des circonstances exceptionnelles.

Elle expose que si la cour ne se prononce pas sur l’existence d’une aide d’Etat, elle devra de nouveau saisir la CJUE et relève que tel est l’avis du ministère public.

Elle fait valoir, en tout état de cause, que la société Ombrière le Bosc est mal fondée en ses demandes.

La société refuse de garantir la société ERDF.

Elle soutient que les faits reprochés entrent dans le champ de la clause, valable, d’exclusion de garantie de l’article 2.1.8.

Dans ses dernières écritures en date du 26 août 2016, la SAS CS Ombrière le Bosc conclut à la confirmation du jugement sauf en ce qu’il a retenu une part de responsabilité à sa charge.

Elle conclut au rejet des demandes de la société Axa et de l’avis du ministère public.

En tout état de cause, si la cour décidait de se prononcer sur l’illégalité de l’arrêté du 10 juillet 2006 ou de saisir la CJUE, elle demande que l’Etat soit invité à faire valoir ses observations notamment au regard des conséquences que pourrait avoir cette illégalité sur les contrats d’achat en cours.

A titre principal, elle demande que la responsabilité de la société ERDF soit retenue et qu’elle soit condamnée, in solidum avec la société Axa CS si la garantie de celle-ci est jugée acquise, à lui verser la somme de 4.936.897 euros ht sous déduction de la somme de 135.770 euros déjà versée, outre intérêts légaux à compter de l’assignation.

A titre subsidiaire, elle demande que la société ERDF soit condamnée, in solidum avec la société Axa CS si la garantie de celle-ci est jugée acquise, à lui rembourser le différentiel entre les sommes issues de la facturation mensuelle auprès d’EDF en application du contrat d’achat et celles qui auraient été recouvrées en application du tarif d’achat issu de l’arrêté du 10 juillet 2006.

Subsidiairement, elle sollicite la désignation d’un expert financier, aux frais de la société ERDF in solidum avec la société Axa CS si sa garantie est retenue, pour examiner son préjudice courant du 3 juin 2015 à l’issue de la durée de 20 ans du contrat d’achat.

Elle réclame la capitalisation des intérêts.

Elle sollicite la condamnation in solidum des appelantes à lui payer la somme de 80.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle soutient que l’illégalité prétendue de l’arrêté du 10 juillet 2006 n’affecte pas la réalité de son préjudice.

Elle distingue la licéité de son préjudice et la légitimité de son intérêt à agir et soutient que l’argumentaire de la société Axa doit être placé sur le terrain de la licéité du préjudice. Elle fait valoir que l’exigence de licéité tend essentiellement à éviter que soient rétablis, par le biais de la responsabilité civile, des avantages dont l’ordre public prohibe l’obtention. Elle estime que tel n’est pas le cas.

Elle considère qu’il résulte de l’ordonnance du 30 juin 2016 que la CJUE a reconnu que le lien entre les arrêtés de 2006 et 2010 et les dispositions du TFUE sur les aides d’Etat n’était pas établi ce dont il ressort que l’argument tiré de l’illégalité de l’arrêté du 10 juillet 2006 est inopérant dans le cadre du litige purement indemnitaire initié par elle.

Elle fait valoir que l’illégalité de l’arrêté du 10 juillet 2006, si elle était prononcée, serait de pure forme et n’affecterait pas la licéité de son préjudice.

Elle affirme que l’absence de notification de l’aide d’Etat à la commission européenne, si la cour jugeait qu’il s’agit d’une aide d’Etat, constituerait une irrégularité de forme car ce régime d’aide est conforme aux objectifs poursuivis en matière de protection de l’environnement par les institutions européennes. Elle en infère que, par analogie avec la jurisprudence et la législation rendue en matière d’énergie éolienne, il peut y être remédié et que cette irrégularité n’a pas de conséquence sur le tarif d’achat de l’électricité.

Elle cite les règles et objectifs européens et affirme que les arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 reposent sur de tels principes.

Elle considère que, également par analogie avec la jurisprudence rendue en matière d’énergie éolienne, le nouveau régime d’aide d’Etat pourrait être soumis à la Commission européenne qui le déclarerait compatible, une déclaration de compatibilité postérieure étant possible.

Elle sollicite, en tout état de cause, le maintien du bénéfice du tarif issu de l’arrêté du 10 juillet 2006. Elle souligne qu’en matière d’énergie éolienne, un nouvel arrêté tarifaire, rétroactif, reprenant les conditions tarifaires des contrats d’achat conclus en application des arrêtés censurés a été pris le 17 juin 2014.

Elle soutient que la seule sanction d’une aide d’Etat illégale pour absence de notification préalable jugée compatible postérieurement consiste dans la restitution des intérêts, sans incidence dans le présent litige.

Elle distingue les conséquences d’une déclaration d’incompatibilité d’une aide d’Etat aux règles de l’union européenne de celles d’une déclaration, postérieure, de compatibilité.

Elle invoque le principe de confiance légitime et une atteinte à son espérance légitime et estime inopérant le raisonnement contraire de la société Axa CS.

Elle fait enfin état d’un risque de contrariété au principe d’égalité de traitement, des arrêts du 11 février 2014, définitifs, ayant retenu un préjudice.

Elle soutient qu’en tout état de cause, avant de se prononcer sur l’illégalité de l’arrêté ou la saisine de la CJUE, la cour devrait inviter un représentant de l’Etat à faire valoir ses observations.

L’intimée soutient que la société ERDF a commis une faute, ce qu’elle reconnait désormais, conteste avoir commis une faute et invoque un préjudice direct et certain.

Par écritures du 26 juillet 2016, le ministère public, saisi pour avis en application de l’article 431 du code de procédure civile, est d’avis que la cour sursoie à statuer et saisisse la cour de justice de l’union Européenne de la question préjudicielle suivante :

«'L’arrêté du 12 janvier 2010, pris en application du décret 2001-410 du 10 mai 2001, lui-même pris en application de la loi 2000-108 du 10 février 2000, est-il contraire aux articles 87 et 88 du traité de Rome, en ce qu’il constituerait une aide d’état, laquelle, si c’est le cas, dès lors qu’elle n’a pas été notifiée préalablement à la Commission en application de l’article 108 paragraphe 3 du traité, affecterait sa légalité''».

Il considère en outre que la cour doit se conformer aux demandes de la CJUE.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 1 er septembre 2016.

Considérant que, pour un exposé complet des faits et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit par l’article 455 du code de procédure civile';

Sur les conséquences de l’ordonnance du 30 juin 2016

Considérant que la CJUE a déclaré «'manifestement irrecevable'» la demande de question préjudicielle posée le 8 décembre 2015';

Considérant qu’elle a rappelé les exigences posées par l’article 94 du règlement de procédure et le point 22 des recommandations de la cour à l’attention des juridictions nationales';

Considérant qu’elle a jugé que ces exigences n’avaient pas été respectées ce qui ne permettait pas le dépôt d’observations utiles et ne lui permettait pas davantage de fournir une réponse utile';

Considérant qu’elle a également considéré que les explications sur le lien entre les dispositions du droit de l’Union dont l’interprétation était demandée et la législation nationale applicable au litige étaient insuffisantes';

Considérant qu’à cet égard, elle a relevé que les arrêtés litigieux ne fixaient que les tarifs d’achat et estimé que, «'de prime abord'», ils ne présentaient pas de lien avec les dispositions du TFUE relatives aux aides d’Etat dont l’interprétation était sollicitée'; qu’elle a considéré que l’arrêt ne fournissait pas d’indication relative au lien qui pourrait être établi entre ces arrêtés et la qualification d’aide d’Etat';

Considérant qu’il résulte des termes de cette ordonnance que la demande a été déclarée irrecevable aux motifs que son contenu ne répondait pas aux dispositions du règlement de procédure et ne précisait pas suffisamment le lien entre les arrêtés et la qualification d’aide d’Etat';

Considérant, d’une part, que la demande n’a pas été examinée au fond';

Considérant, d’autre part, qu’il ne résulte nullement du grief tiré de l’absence d’indication sur le lien entre les arrêtés et la qualification d’aide d’Etat que la CJUE a jugé que celui-ci n’existait pas'; que son appréciation aux termes de laquelle ces arrêtés ne semblent pas «'de prime abord'» présenter un lien avec les dispositions relatives aux aides d’Etat ne signifie pas que, lus en combinaison avec d’autres dispositions, ils ne peuvent recevoir ce qualificatif';

Considérant que l’ordonnance du 30 juin 2016 ne s’est donc pas prononcée au fond';

Considérant que la décision prise n’interdit donc pas une nouvelle saisine de la cour';

Sur le moyen tiré de l’illégalité des arrêtés

Considérant que l’indemnisation sollicitée par la société CS Ombrière le Bosc suppose que celle-ci rapporte la preuve d’une faute de la société ERDF, d’un préjudice et d’un lien de causalité entre ceux-ci';

Considérant que ce préjudice doit être réparable';

Considérant que la société Ombrière le Bosc fonde sa demande sur le fait que les tarifs auxquels la société EDF achète sa production sont moindres que si le contrat avait été conclu antérieurement';

Considérant que ces tarifs sont ceux fixés par des arrêtés';

Considérant que la demande est donc fondée sur la perte du droit de bénéficier des tarifs fixés par un arrêté du 10 juillet 2006 remplacés par ceux, moins avantageux, fixés par un arrêté du 12 janvier 2010';

Considérant que l’illégalité de l’arrêté du 10 juillet 2006 serait susceptible de priver sa demande de fondement';

Considérant qu’avant d’envisager les conséquences que pourrait avoir cette illégalité prétendue sur le préjudice de la société, il est nécessaire d’apprécier, au fond, l’arrêté litigieux'; que cette appréciation doit s’étendre à l’arrêté du 12 janvier 2010 sur le fondement duquel a été conclu le contrat en vigueur';

Considérant que cet examen est préalable'; qu’il n’y a donc pas lieu d’inviter l’Etat à faire valoir ses observations sur les conséquences d’une illégalité, non constatée';

Considérant que les arrêtés des 10 juillet 2006 et 12 janvier 2010 fixent «'les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l’article 2 du décret n°2000-1196 du 6 décembre 2000'»';

Considérant que le moyen est fondé sur une violation du droit de l’Union européenne';

Considérant qu’en application du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne et de l’article 88-1 de la constitution, le respect de ce droit constitue une obligation';

Considérant qu’il résulte du principe d’effectivité issu des dispositions de ces traités que le juge national chargé d’appliquer les dispositions du droit de l’Union européenne doit en assurer le plein effet'; qu’il doit, en conséquence, saisir la Cour de justice de l’Union européenne à titre préjudiciel ou, lorsqu’il s’estime en mesure de le faire, appliquer directement le droit de l’union en laissant inappliquée toute disposition contraire';

Considérant que l’article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne définit les aides d’Etat';

Considérant que les articles 88 § 3 du traité de la Communauté européenne applicable jusqu’au 1 er décembre 2009 et 108§3 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, applicable à compter de cette date, disposent que la «'Commission est informée en temps utile pour présenter ses observations des projets tendant à instituer ou à modifier des aides'»'; qu’ainsi, tout projet d’aide d’Etat doit être notifié à la commission';

Considérant que les arrêtés litigieux imposent à la société EDF d’acquérir l’électricité d’origine photovoltaïque à un tarif supérieur au prix du marché';

Considérant que la société bénéficie d’une compensation intégrale de ce surcoût';

Considérant que se pose donc la question de déterminer si ce mécanisme de compensation peut être regardé comme une intervention de l’Etat ou au moyen de ressources d’Etat';

Considérant que la cour ne s’estime pas en mesure de se prononcer sur cette qualification';

Considérant qu’il est donc nécessaire de saisir la Cour de justice de l’Union européenne de cette question préjudicielle’et des conséquences de l’absence de notification de cette éventuelle aide d’Etat sur la légalité de l’arrêté ;

Considérant qu’il appartiendra à la juridiction, après la décision de la CJUE, d’apprécier les conséquences de celle-ci au regard de l’ensemble des moyens soulevés par les parties y compris ceux tirés de l’absence d’incidence de l’éventuelle illégalité de l’arrêté sur le caractère réparable du préjudice ;

Considérant que l’arrêté du 10 juillet 2006 sur lequel se fonde la demande a été abrogé'; que l’appréciation de sa légalité demeure, toutefois, nécessaire pour l’examen du présent litige';

Considérant qu’est également nécessaire d’apprécier la légalité, au regard de ces développements, de l’arrêté du 12 janvier 2010; que la question préjudicielle portera donc également sur cet arrêté';

Considérant qu’il convient, afin de respecter les exigences prescrites par l’article 94 du TFUE et les recommandations destinées aux juridictions nationales, de préciser les points suivants :

µµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµµ

1.La présentation du contexte de l’affaire

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 87, paragraphe 1, du traité instituant la Communauté européenne («'TCE'»), devenu article 107, paragraphe 1, traité sur le fonctionnement de l’Union européenne («'TFUE'») et de l’article 88, paragraphe 3, TCE, devenu article 108, paragraphe 3, TFUE.

Cette demande est présentée dans le cadre d’un contentieux dans lequel des producteurs photovoltaïques sollicitent l’indemnisation d’un préjudice qui consiste à ne pas avoir pu bénéficier des tarifs, auquel EDF aurait été obligée de leur acheter l’électricité, fixés par les arrêtés ministériels du 10 juillet 2006 (JORF n°'171 du 26 juillet 2006, p. XXX et du 12 janvier 2010 (JORF n°'0011 du 14 janvier 2010, p. 727), fixant les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l’article 2 du décret n°'2000-1196 du 6 décembre 2000.

2.La présentation du cadre juridique national

L’article'5 de la loi n°'2000-108, du 10'février 2000, relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité (JORF du 11'février 2000, p.'2143, la «'Loi n°'2000-108'»), telle que modifiée par la loi n°'2006-1537, du 7'décembre 2006, relative au secteur de l’énergie (JORF du 8'décembre 2006, p.'18531), prévoit':

«'I.- Les charges imputables aux missions de service public assignées aux opérateurs électriques sont intégralement compensées. Elles comprennent':

En matière de production d’électricité':

1° Les surcoûts qui résultent, le cas échéant, de la mise en 'uvre des dispositions des articles'8 et 10 par rapport aux coûts évités à Électricité de France ou, le cas échéant, à ceux évités aux distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article'23 de la loi no'46-628 du 8'avril 1946 [sur la nationalisation de l’électricité et du gaz (JORF du 9'avril 1946, p.'2651)] qui seraient concernés. Les coûts évités sont calculés par référence aux prix de marché de l’électricité ou, pour les distributeurs non nationalisés, par référence aux tarifs de cession mentionnés à l’article'4 à proportion de la part de l’électricité acquise à ces tarifs dans leur approvisionnement total, déduction faite des quantités acquises au titre des articles'8 et 10 précités. Les mêmes valeurs de coûts évités servent de référence pour déterminer les surcoûts compensés lorsque les installations concernées sont exploitées par Électricité de France ou par un distributeur non nationalisé. Lorsque l’objet des contrats est l’achat de l’électricité produite par une installation de production implantée dans une zone non interconnectée au réseau métropolitain continental, les surcoûts sont calculés par rapport à la part relative à la production dans les tarifs réglementés de vente d’électricité';

[']

Ces charges sont calculées sur la base d’une comptabilité appropriée tenue par les opérateurs qui les supportent. Cette comptabilité, établie selon des règles définies par la Commission de régulation de l’énergie, est contrôlée aux frais des opérateurs qui supportent ces charges par leur commissaire aux comptes ou, pour les régies, par leur comptable public. ['] Le ministre chargé de l’énergie arrête le montant des charges sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie effectuée annuellement.

La compensation de ces charges, au profit des opérateurs qui les supportent, est assurée par des contributions dues par les consommateurs finals d’électricité installés sur le territoire national.

Le montant des contributions mentionnées ci-dessus est calculé au prorata de la quantité d’électricité consommée.

[']

Le montant de la contribution due par site de consommation, par les consommateurs finals mentionnés au premier alinéa du I de l’article'22, ne peut excéder 500'000'euros. Le même plafond est applicable à la contribution due par les entreprises mentionnées au deuxième alinéa du I de l’article'22 pour l’électricité de traction consommée sur le territoire national et à la contribution due par les entreprises mentionnées au quatrième alinéa du II de l’article'22 pour l’électricité consommée en aval des points de livraison d’électricité sur un réseau électriquement interconnecté.

Le montant de la contribution applicable à chaque kilowattheure est calculé de sorte que les contributions couvrent l’ensemble des charges visées aux a et b, ainsi que les frais de gestion exposés par la Caisse des dépôts et consignations, mentionnés ci-après, et le budget du médiateur national de l’énergie. Le ministre chargé de l’énergie arrête ce montant sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie, effectuée annuellement. Le montant de la contribution annuelle, fixé pour une année donnée, est applicable aux exercices suivants à défaut d’entrée en vigueur d’un nouvel arrêté pour l’année considérée.

[']

Les contributions des consommateurs finals éligibles ayant exercé les droits accordés au III de l’article'22 alimentés par l’intermédiaire du réseau public de transport ou par un réseau public de distribution sont recouvrées par l’opérateur en charge de la gestion du réseau auquel ces consommateurs sont raccordés sous la forme d’un prélèvement additionnel aux tarifs d’utilisation des réseaux. ['] Les contributions effectivement recouvrées sont reversées aux opérateurs qui supportent les charges de service public par l’intermédiaire de la Caisse des dépôts et consignations.

[']

La Caisse des dépôts et consignations reverse quatre fois par an aux opérateurs qui supportent les charges visées aux 1° et 2° des a et b les sommes collectées. Elle verse au médiateur national de l’énergie une somme égale au montant de son budget le 1er janvier de chaque année.

La Caisse des dépôts et consignations retrace ces différentes opérations dans un compte spécifique. Les frais de gestion exposés par la caisse sont arrêtés annuellement par les ministres chargés de l’économie et de l’énergie.

Sans préjudice de l’application des sanctions prévues à l’article'41, en cas de défaut ou d’insuffisance de paiement de la contribution dans un délai de deux mois à compter de la date à laquelle elle est due, la Commission de régulation de l’énergie adresse une lettre de rappel assortie d’une pénalité de retard dont le taux est fixé à 10'% du montant de la contribution due.

[']

Lorsque le montant des contributions collectées ne correspond pas au montant constaté des charges de l’année, la régularisation intervient l’année suivante au titre des charges dues pour cette année. Si les sommes dues ne sont pas recouvrées au cours de l’année, elles sont ajoutées au montant des charges de l’année suivante.

La Commission de régulation de l’énergie évalue chaque année dans son rapport annuel le fonctionnement du dispositif relatif aux charges du service public de l’électricité visées au présent I.

[']

III.- En cas de défaillance de paiement par un redevable des contributions prévues au I ['] ci-dessus, le ministre chargé de l’énergie prononce une sanction administrative dans les conditions prévues par l’article'41 de la présente loi.

IV.- Des décrets en Conseil d’État précisent les modalités d’application du présent article'».

L’article'10 de la Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 dispose que':

«'Sous réserve de la nécessité de préserver le bon fonctionnement des réseaux, Électricité de France et, dans le cadre de leur objet légal et dès lors que les installations de production sont raccordées aux réseaux publics de distribution qu’ils exploitent, les distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article'23 de la loi no'46-628 du 8'avril 1946 précitée sont tenus de conclure, si les producteurs intéressés en font la demande, un contrat pour l’achat de l’électricité produite sur le territoire national par':

[']

2° Les installations qui utilisent des énergies renouvelables ['].

[']

Les surcoûts éventuels des installations de production d’électricité exploitées par Électricité de France ou par les distributeurs non nationalisés précités entrant dans le champ d’application du présent article font l’objet d’une compensation dans les conditions prévues au I de l’article'5.

[']

Les surcoûts éventuels qui en découlent sont compensés dans les conditions prévues au I de l’article'5.

[']'».

L’article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 fixant par catégorie d’installations les limites de puissance des installations pouvant bénéficier de l’obligation d’achat d’électricité prévue par la Loi n°'2000-108 (JORF n° 285 du 9 décembre 2000, p. 19550), prévoit que':

«'Lorsque les conditions fixées par l’article 10 de la loi du 10 février 2000 susvisée [la Loi n° 2000-108] sont réunies, les producteurs qui en font la demande bénéficient de l’obligation d’achat d’électricité prévue par ledit article, pour les installations de production d’électricité utilisant des énergies renouvelables correspondant aux catégories suivantes :

[']

3° Installations, d’une puissance installée inférieure ou égale à 12 mégawatts, utilisant l’énergie radiative du soleil'».

L’article'8, point'2, du décret n°'2001-410, du 10'mai 2001, relatif aux conditions d’achat de l’électricité produite par des producteurs bénéficiant de l’obligation d’achat modifié (JORF du 12'mai 2001, p.'7543), est ainsi rédigé':

«'Des arrêtés des ministres chargés de l’économie et de l’énergie, pris après avis du Conseil supérieur de l’électricité et du gaz et après avis de la Commission de régulation de l’électricité, fixent les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations bénéficiant de l’obligation d’achat prévue par l’article'10 de la loi du 10'février 2000'['] Ces conditions d’achat précisent notamment':

[']

2° les tarifs d’achat de l’électricité'».

3.Le rappel de la présentation du litige au principal

Par les arrêtés ministériels du 10 juillet 2006 (JORF n°'171 du 26 juillet 2006, p. XXX et du 12 janvier 2010 (JORF n°'0011 du 14 janvier 2010, p. 727), le ministre de l’Écologie, de l’Énergie, du Développement durable et de l’Aménagement du territoire et la ministre de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi ont, conformément à l’article 8, point 2, du décret n°'2001-410, du 10 mai 2001 susvisé, fixé les conditions d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil telles que visées au 3° de l’article 2 du décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 (les «'Arrêtés »).

La société Ombrière le Bosc est un producteur photovoltaïque qui sollicite l’indemnisation du préjudice qu’elle prétend avoir subi du fait du retard pris par ERDF dans l’instruction de sa demande de raccordement au réseau de distribution électrique aux fins d’exploitation d’une centrale photovoltaïque.

Le préjudice invoqué consiste dans le fait pour la société demanderesse de ne pas avoir pu bénéficier, sur une période de 20 ans, du tarif fixé par les Arrêtés auquel EDF aurait été obligée de lui acheter l’électricité produite par leur installation si sa demande de raccordement avait été instruite dans les temps par ERDF.

Les sociétés Axa CS et Enedis font valoir que les Arrêtés invoqués par la société demanderesse participent d’un aide état illégale en ce qu’elle a été mise à exécution préalablement à sa notification à la Commission européenne, en violation des dispositions de l’article 108, paragraphe 3, du TFUE.

Or, le préjudice dont l’indemnisation est sollicitée sur le fondement de l’article 1382 du code civil doit, pour être réparable, revêtir un caractère licite. Tel pourrait ne pas être le cas en l’espèce si les Arrêtés participaient effectivement d’une aide d’Etat illégale.

C’est pourquoi la question de l’existence d’une aide d’Etat et, le cas échéant, de sa légalité constitue, même si elle n’épuise pas, au vu des moyens soulevés, le litige, un élément préalable à sa décision.

Le moyen invoqué par les appelants est, ainsi, pertinent.

La réponse à cette question est d’autant plus importante qu’elle conditionne la résolution d’un nombre important de demandes similaires formulées par d’autres producteurs photovoltaïques dans le cadre d’actions en justice portées notamment devant cette Cour.

En raison de la technicité de la question relative à la qualification d’aide d’Etat et, le cas échéant, à sa légalité et de son caractère inédit, la Cour ne n’estime toutefois pas en mesure d’y répondre elle-même.

Compte tenu du caractère pertinent du moyen soulevé, elle se doit toutefois d’y répondre.

Ce moyen est fondé sur une violation du droit de l’Union et, en application du TFUE et de l’article 88-1 de la Constitution française, son application constitue une obligation.

Il résulte du principe d’effectivité du droit de l’Union que le juge national, chargé d’appliquer les dispositions du droit de l’Union, doit en assurer le plein effet'; il doit dès lors soit appliquer directement le droit de l’Union en laissant inappliquée toute disposition contraire soit, lorsqu’il ne s’estime pas en mesure de le faire, saisir la Cour de justice de l’Union européenne à titre préjudiciel d’un recours en interprétation. C’est cette dernière option que la Cour entend mettre en 'uvre.

4.La présentation du mécanisme de compensation instauré par la Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 et mis en 'uvre par les Arrêtés

Les Arrêtés ont pour objet d’obliger Electricité de France (EDF) et les distributeurs non nationalisés mentionnés à l’article'23 de la loi du 8'avril'1946, à acheter, dans les conditions prévues par la loi, l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative du soleil à un prix supérieur au prix de marché de cette électricité.

En vertu des articles'5 et 10 de la Loi n° 2000-108 du 10 février 2000, les surcoûts ainsi imposés à Electricité de France (EDF) et aux distributeurs non nationalisés font l’objet d’une compensation intégrale par des contributions dues par les consommateurs finals d’électricité installés sur le territoire national.

En pratique cette compensation intégrale intervient par l’acquittement par les consommateurs finals d’électricité sur le territoire national d’une taxe ad hoc, la Contribution au service public de l’électricité (CSPE), dont le montant est calculé au prorata de la quantité d’électricité consommée et arrêté par le ministre chargé de l’énergie sur proposition de la Commission de régulation de l’énergie.

Aux termes de l’article'87, paragraphe 1, du TCE, devenu article 107, paragraphe 1, du TFUE':

«'Sauf dérogations prévues par le présent traité, sont incompatibles avec le marché commun, dans la mesure où elles affectent les échanges entre Etats membres, les aides accordées par les Etats ou au moyen de ressources d’Etat sous quelque forme que ce soit qui faussent ou qui menacent de fausser la concurrence en favorisant certaines entreprises ou certaines productions'».

Aux termes de l’article'88 du TCE, devenu article 108 du TFUE':

«'1.'La Commission procède avec les Etats membres à l’examen permanent des régimes d’aides existant dans ces Etats

[']

3.'La Commission est informée, en temps utile pour présenter ses observations, des projets tendant à instituer ou à modifier des aides. ['] L’Etat membre ne peut mettre à exécution les mesures projetées, avant que cette procédure ait abouti à une décision finale'».

Il résulte de ces stipulations que, s’il ressortit à la compétence exclusive de la Commission européenne de décider, sous le contrôle de la Cour de justice de l’Union européenne, si une aide de la nature de celles mentionnées à l’article'107du TFUE, précité est ou non, compte tenu des dérogations prévues par le traité, compatible avec le marché intérieur, il incombe, en revanche, aux juridictions nationales de sanctionner, le cas échéant, l’invalidité de dispositions de droit national qui auraient institué ou modifié une telle aide en méconnaissance de l’obligation, qu’impose aux Etats membres le paragraphe'3 de l’article 108 du TFUE, d’en notifier le projet à la Commission, préalablement à toute mise à exécution.

En vertu de la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne, la qualification d’aide au sens de l’article'107 requiert qu’il s’agisse d’une intervention de l’Etat ou au moyen de ressources d’Etat et que cette intervention soit susceptible d’affecter les échanges entre Etats membres, accorde un avantage à son bénéficiaire et fausse ou menace de fausser la concurrence.

5.L’examen du précédent jurisprudentiel

Par une décision du 19 décembre 2013, la Cour de justice de l’Union européenne, saisie par le Conseil d’Etat (CE, 15 mai 2012, Association Vent de colère'! Fédération nationale, n°'324852) a jugé’que':

« ['] l’article 107, paragraphe 1, TFUE doit être interprété en ce sens qu’un mécanisme de compensation intégrale des surcoûts imposés à des entreprises en raison d’une obligation d’achat de l’électricité d’origine éolienne à un prix supérieur à celui du marché dont le financement est supporté par tous les consommateurs finals de l’électricité sur le territoire national, tel que celui résultant de la loi n° 2000-108, du 10 février 2000, relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, telle que modifiée par la loi n° 2006-1537, du 7 décembre 2006, relative au secteur de l’énergie, constitue une intervention au moyen de ressources d’Etat » (CJUE, 19'décembre 2013, Association Vent De Colère! Fédération nationale et autres, aff. C-262/12)';

Par arrêt du 28 mai 2014, le Conseil d’Etat, tirant les conclusions de cette décision de la Cour de justice de l’Union européenne qu’il avait sollicitée, a jugé :

«'qu’il résulte de l’interprétation ainsi donnée par la Cour de justice de l’Union européenne et des motifs précités de la décision du 15'mai 2012 du Conseil d’État que l’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie mécanique du vent à un prix supérieur à sa valeur de marché, dans les conditions définies par les arrêtés attaqués, a le caractère d’une aide d’État'»'(CE, 28 mai 2014, Vent de Colère'!, n°324852) ;

Le Conseil d’Etat a ensuite constaté que les arrêtés ayant fixé les tarifs litigieux étaient illégaux pour ne pas avoir été préalablement notifiés à la Commission européenne':

«'ces arrêtés, pris en méconnaissance de l’obligation de notification préalable à la Commission européenne résultant de l’article 88, paragraphe 3 du traité instituant la Communauté européenne sont entachés d’une illégalité de nature à en entrainer l’annulation'»''(idem) ;

L’obligation d’achat de l’électricité d’origine photovoltaïque à un prix supérieur à celui du marché résulte du même mécanisme que l’obligation d’achat de l’électricité d’origine éolienne, issu de l’article 10 de la Loi n° 2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité et de l’article 8 du décret n° 2001-410 du 10 mai 2001 précité.

µµµµµµµµµµµµµµµµµµ

Considérant qu’il sera, dans l’attente de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne, sursis à statuer sur toutes les demandes ; qu’il sera également sursis à statuer sur tous les moyens invoqués ;

PAR CES MOTIFS

Contradictoirement,

Vu l’article 267 du traité de fonctionnement de l’Union européenne

Saisit la Cour de justice de l’Union européenne de la question préjudicielle suivante':

1.L’article 107, paragraphe 1, du TFUE’ doit-il être interprété en ce sens que le mécanisme d’obligation d’achat de l’électricité produite par les installations utilisant l’énergie radiative solaire à un prix supérieur à celui du marché et dont le financement est supporté par les consommateurs finals d’électricité, tel que ce mécanisme résulte des arrêtés ministériels des 10 juillet 2006 (JORF n°171 du 26 juillet 2006, p. XXX et 12 janvier 2010 (XXX du 14 janvier 2010, p. 727) fixant les conditions d’achat de cette électricité, lus en combinaison avec la loi n°'2000-108 du 10 février 2000 relative à la modernisation et au développement du service public de l’électricité, le décret n° 2000-1196 du 6 décembre 2000 et le décret n°'2001-410, du 10'mai 2001, constitue une aide d’Etat''

2.Et, dans l’affirmative, l’article 108, paragraphe 3, du TFUE doit-il être interprété en ce sens que le défaut de notification préalable à la Commission européenne de ce mécanisme affecte la validité des arrêts susvisés comportant mise à exécution de la mesure d’aide litigieuse ''»

Sursoit à statuer dans l’attente de la décision de la Cour de justice de l’Union européenne,

Ordonne le retrait de la procédure du rôle de la cour,

Dit que le présent arrêt sera adressé à la Cour de justice de l’Union européenne par pli recommandé, accompagné des textes visés,

Réserve les dépens,

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Alain PALAU, Président et par Monsieur BOUTEMY, greffier faisant fonction, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier f.f., Le président,

Extraits similaires
highlight
Extraits similaires
Extraits les plus copiés
Extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Versailles, 20 septembre 2016, n° 16/05166