Cour de cassation, Première chambre civile, 17 septembre 2020, n° 20-10.564

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 17 sept. 2020, n° 20-10.564
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 20-10.564
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Versailles, 6 novembre 2019, N° 18/05762
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:C110451
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 1

MY1

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 17 septembre 2020

Rejet non spécialement motivé

Mme BATUT, président

Décision n° 10451 F

Pourvoi n° W 20-10.564

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

DÉCISION DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 17 SEPTEMBRE 2020

Mme E… Q…, épouse K… , domiciliée […] , a formé le pourvoi n° W 20-10.564 contre l’arrêt rendu le 7 novembre 2019 par la cour d’appel de Versailles (2e chambre, 1re section), dans le litige l’opposant à M. H… K… , domicilié chez M. N… K… , […] , défendeur à la cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bozzi, conseiller, les observations écrites et les plaidoiries de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme Q…, de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. K… , et l’avis oral de M. Sassoust, avocat général, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s’ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l’audience publique du 17 septembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, Mme Bozzi, conseiller rapporteur, M. Hascher, conseiller le plus ancien faisant fonction de doyen, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu la présente décision.

1. Les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

2. En application de l’article 1014, alinéa 1er, du code de procédure civile, il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce pourvoi.

EN CONSÉQUENCE, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme Q… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept septembre deux mille vingt. MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Alain Bénabent , avocat aux Conseils, pour Mme E… Q….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d’avoir prononcé le divorce aux torts exclusifs de Mme E… Q… et, en conséquence, d’avoir rejeté sa demande tendant à voir condamner M. K… à lui verser une somme de 8 000 euros à titre de dommages et intérêts par application des articles 266 et 1240 du code civil ;

AUX MOTIFS QUE « Sur le divorce

Qu’aux termes de l’article 242 du code civil, le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ;

Que l’article 245 du code civil dispose que les fautes de l’époux qui a pris l’initiative du divorce n’empêchent pas d’examiner sa demande, qu’elles peuvent, cependant, enlever aux faits qu’il reproche à son conjoint le caractère de gravité qui en aurait fait une cause de divorce, que ces fautes peuvent aussi être invoquées par l’autre époux à l’appui d’une demande reconventionnelle en divorce et que si les deux demandes sont accueillies, le divorce est prononcé aux torts partagés des époux ;

Que chacun des époux forme une demande en divorce pour faute à l’encontre de son conjoint ;

Que Mme E… Q… fait grief à son époux d’avoir pris la décision unilatérale de travailler loin de sa famille, après sa nomination en qualité de magistrat dans une chambre régionale de la cour des comptes et, à ce titre, d’avoir travaillé en province jusqu’à son départ à la retraite en 2013 alors que cette situation devait durer 3 ans ; qu’elle fait état du caractère désastreux de cette situation pour la famille dès lors que son mari, sous pression et épuisé par le travail et ses trajets, se montrait agressif à son égard, dur envers elle et les enfants, indisponible ; que décrivant un climat familial extrêmement stressant et délétère du fait de son conjoint, Mme E… Q… dénonce un manquement de ce dernier aux devoirs de considération et d’affection entre époux et une attitude de dénigrement constante envers les siens ;

Que le premier juge a relevé à juste titre que de nombreuses pièces produites par Mme E… Q… sont dépourvues de force probante comme reproduisant ses propres déclarations qu’il s’agisse de mains courantes (pièces 82, 83, 102), de courriers officiels de son conseil ou de sa part (pièces 325, 67) ou encore d’attestations rapportant en grande partie ses dires (pièces 32, 75 et 308) ; que la pièce 40 produite par Mme E… Q…, largement citée dans ses conclusions, est dépourvue de toute valeur probante en l’absence de document d’identité de son auteur, l’intimé indiquant au demeurant ne pas connaître cette personne ; que plusieurs attestations ne sauraient en outre être invoquées en ce qu’elles émanent d’C…, fille du couple, ou reproduisent ses dires (pièces 246, 60) ;

Que l’attestation de Mme V… R…, mère de Mme E… Q…, décrit un gendre irascible, indisponible à sa famille, entrant dans des « colères incompréhensibles » ; qu’elle précise avoir vu à plusieurs reprises M. H… K… disputer son fils J… et le frapper sans raison (pièce 74) ; que ce témoignage isolé, sans référence à des faits précis et circonstanciés, est insuffisant à établir l’existence d’une faute à l’encontre du mari ; que de même, le doute prétendument exprimé par M. H… K… sur sa paternité ou son absence de soutien aux contingences de la maison « à l’époque », soit en 1994 (pièce précitée 74), sont trop anciens pour être utilement invoqués ; que l’attestation de Mme Y… G… , rédigée en octobre 2012 (pièce 75), émanant d’une personne précisant ne connaître la famille que depuis trois ans, se présente comme le reflet d’impressions générales et subjectives, ce témoin se bornant à indiquer que M. H… Q… « semblait lointain, comme si cette situation (l’état de santé d’C…) ne le concernait pas » ou encore « j’ai toujours eu l’impression que toute décision et toute action ne dépendait que d’elle (Mme E… Q…) et n’était jamais une affaire de couple. Le mari semblait totalement absent. A aucun moment il donnait signe de s’inquiéter pour sa fille ou d’avoir un avis » ;

Qu’il n’est pas justifié du caractère unilatéral du choix de M. H… K… de partir d’Orléans en février 1986 dans le cadre de son activité professionnelle après avoir obtenu le concours des chambres régionales des comptes, ce qu’il précise avoir été un projet commun sans être démenti sur ce point par l’épouse ;

Qu’il est par ailleurs constant que M. H… K… , durant ces années d’éloignement, d’abord à Orléans pendant 9 ans, puis à Rouen pendant 13 ans, a effectué quotidiennement, à de rares exceptions près, les trajets allers-retours entre le domicile conjugal et son lieu d’exercice en province en dépit des contraintes imposées ; que M. X… P…, ami du couple (pièce 13), témoigne de la constante attention de M. H… K… concernant l’éducation de ses enfants et leur avenir ; que M. A… L…, collègue de travail, confirme la préoccupation manifestée par l’intimé dans le cadre de leurs conversations « pour le devenir scolaire, puis professionnel de ses enfants, leur équilibre » ;

Que l’attestation de Mme W… T…, se présentant comme une amie de longue date de l’épouse, indique que cette dernière, face aux sujétions professionnelles de son mari, a cherché une solution en proposant un déménagement de la famille en province pour le retrouver, ce que ce dernier aurait refusé tout en reconnaissant que « c’était très lourd pour E… » (pièce 324) ; qu’il apparaît toutefois que Mme W… T… est seule à faire état de la démarche de l’épouse en vue d’un rapprochement familial, sans autre précision notamment de date, la preuve du refus de M. H… K… en vue d’un tel projet, encore moins sa réitération, n’étant confirmé par aucun autre témoignage ; qu’il ne saurait donc être déduit de cette attestation que l’organisation familiale et les charges quotidiennes familiales qu’elle a incontestablement induites pour Mme E… Q… pendant des années serait constitutives d’une faute de la part de M. H… K… alors que celui-ci supportait de son côté d’autres contraintes ;

Que l’état de solitude observé chez Mme E… Q… face à cette gestion du quotidien observé par plusieurs témoins (pièces 46, 74 et 75) manifestement aggravée par les problèmes de santé rencontrés par C… à partir de 2008, apparaît dans ce contexte davantage imputable aux choix de vie des époux qu’à un comportement fautif de l’un ou de l’autre ;

Que le simple constat par plusieurs témoins d’un climat pesant au domicile conjugal et de fortes tensions dans le couple ne permet pas d’en faire porter la responsabilité à M. H… K… ; que le dénigrement dont l’appelante dit avoir été victime de la part de ce dernier n’est par ailleurs pas justifié ;

Qu’il convient donc de rejeter la demande en divorce présentée par Mme E… Q… sur le fondement de l’article 242 du code civil ;

*

Que M. H… K… reproche à son épouse, d’une part, d’avoir refusé de consommer le mariage, d’autre part d’avoir manqué à son devoir de respect entre époux ;

Que Mme E… Q… a reconnu elle-même dans la main courante qu’elle a effectuée le 9 mai 2014 au commissariat de Versailles avoir cessé toute relation intime avec son mari depuis 2004 ;

Que Mme E… Q… justifie cette situation par son état de santé, invoquant notamment un accident grave dans le métro reconnu accident de service le 29 décembre 2005 lui laissant de nombreuses séquelles et l’ayant immobilisée près d’une année, puis une opération en 2009 pour une hernie discale paralysante ; qu’elle établit également avoir présenté un syndrome polymorphe persistant à tiques (maladie de Lyme chronique – pièce 251) traité par une antibiothérapie au long cours depuis octobre 2016 ;

Que toutefois de tels éléments médicaux ne peuvent excuser le refus continu opposé par l’épouse à partir de 2004 à des relations intimes avec son mari, et ce pendant une durée aussi longue, alors même que dans le cadre de la main courante précitée, Mme E… Q… relate les sollicitations répétées de son époux à ce sujet et les disputes générées par cette situation ;

Que ces faits, établis par l’aveu de l’épouse, constituent une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune ;

Que seule la demande en divorce de M. H… K… étant justifiée par des preuves suffisantes, le divorce sera prononcé aux torts exclusifs de l’épouse et le jugement infirmé de ce chef ;

Sur les dommages et intérêts

Sur le fondement de l’article 266 du code civil

Qu’aux termes de l’article 266 du code civil, des dommages et intérêts peuvent être accordés à un époux en réparation des conséquences d’une particulière gravité qu’il subit du fait de la dissolution du mariage soit lorsqu’il était défendeur à un divorce prononcé pour altération définitive du lien conjugal et qu’il n’avait lui-même formé aucune demande en divorce, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de son conjoint ;

Que Mme E… Q… demande la condamnation de l’intimé à lui payer la somme de 8 000 euros sur le fondement de l’article 266 du code civil ;

Que le divorce des époux étant prononcé à ses torts, la demande de Mme E… Q… sur le fondement de l’article 266 du code civil sera rejetée, le jugement étant confirmé de ce chef ;

Sur le fondement de l’article 1240 du code civil

Que chacun des époux invoque la faute commise par l’autre pour justifier l’octroi de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du code civil ;

Que Mme E… Q… fait valoir à l’appui de sa demande l’attitude vexatoire et outrageante de son mari qui se serait montré violent et dénigrant à son égard et vis à vis de ses proches, se serait désintéressé du sort de leur quatre enfants et ne lui aurait apporté aucun soutien dans les épreuves rencontrées du temps de la vie commune et notamment avec C… ;

Que Mme E… Q… échoue à rapporter la preuve des griefs qu’elle allègue ; qu’elle sera déboutée de sa demande de dommages et intérêts » ;

1°/ ALORS QU’en cas d’inobservation des règles de forme prévues pour les attestations produites en justice, non prescrites à peine de nullité, il appartient aux juges du fond d’apprécier la valeur probante de l’attestation irrégulière ; que le défaut de production d’un document d’identité de son auteur ne prive pas l’attestation de toute valeur probante ; qu’en l’espèce, pour débouter Mme Q… de sa demande de divorce aux torts de son époux, la cour d’appel a retenu que « la pièce 40 produite par Mme E… Q…, largement citée dans ses conclusions, est dépourvue de toute valeur probante en l’absence de document d’identité de son auteur » (arrêt, p. 5, § 6) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article 202 du code de procédure civile ;

2°/ ALORS QU’en ajoutant que l’époux « indiqu[e] au demeurant ne pas connaître cette personne » auteur de l’attestation (arrêt, p. 5, § 6), cependant qu’il lui appartenait d’apprécier sa valeur probante en examinant son contenu, la cour d’appel a statué par un motif inopérant, en violation de l’article 202 du code de procédure civile ;

3°/ ALORS QUE le divorce peut être demandé par l’un des époux lorsque des faits constitutifs d’une violation grave ou renouvelée des devoirs et obligations du mariage sont imputables à son conjoint et rendent intolérable le maintien de la vie commune ; que procédant du principe de liberté individuelle et de droit à l’intégrité physique, l’absence de relations intimes ne caractérise pas en soi un fait constitutif d’une telle violation ; qu’en affirmant que « le refus continu opposé par l’épouse à partir de 2004 à des relations intimes avec son mari » constituait « une violation grave et renouvelée des devoirs et obligations du mariage rendant intolérable le maintien de la vie commune » (arrêt, p. 6, § 9), la cour d’appel a violé l’article 242 du code civil, ensemble les articles 4 et suivants de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

4°/ ALORS QUE, en toute hypothèse, en se bornant à affirmer que les difficultés médicales successivement rencontrées par Mme Q… ne pouvaient suffire à « excuser » la faute retenue à son encontre (arrêt, p. 6,§ 8), sans s’expliquer autrement sur cette affirmation, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir confirmé le jugement en ce qu’il avait rejeté la demande de Mme E… Q… tendant à voir condamner M. H… K… à lui verser une prestation compensatoire ;

AUX MOTIFS PROPRES QUE « Sur la prestation compensatoire

Que le divorce met fin au devoir de secours entre époux mais que l’un des conjoints peut être tenu de verser à l’autre une prestation, destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives ; que cette prestation a un caractère forfaitaire et prend la forme d’un capital dont le montant est fixé par le juge ;

Qu’à cet égard, l’article 271 du code civil dispose :

« la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible.

A cet effet, le juge prend en considération :

— la durée du mariage ;

— l’âge et l’état de santé des époux ;

— leur qualification et leur situation professionnelles ;

— les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faut encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne ;

— le patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenu, après la liquidation du régime matrimonial ;

— leurs droits existants ou prévisibles ;

— leur situation respective en matière de pension de retraite en ayant estimé autant qu’il est possible, la diminution des droits à retraite qui aura pu être causée, pour l’époux créancier de la prestation compensatoire, par les circonstances visées au sixième alinéa » ;

Qu’en application de l’article 274, la prestation compensatoire en capital est exécutée sous la forme du versement d’une somme d’argent ou de l’attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage, d’habitation ou d’usufruit ;

Que Mme E… Q… sollicite l’octroi d’une prestation compensatoire de 90 000 euros sous la forme d’un abandon des droits de M. H… K… dans le bien indivis du Chesnay, subsidiairement, sous forme d’un versement d’argent du même montant ;

Que le mariage de M. H… K… et de Mme E… Q…, sous le régime de la séparation de biens a duré 34 ans, la séparation étant toutefois intervenue quelques jours après l’ordonnance de non-conciliation en date du 29 janvier 2013 ;

Que M. H… K… est âgé de 72 ans et Mme E… Q… de 64 ans ; que le couple a eu quatre enfants ;

Que la situation de chacune des parties se présente comme suit :

— M. H… K… est retraité depuis le 1er novembre 2013. Il est atteint d’un cancer du foie et de diabète ;

Que son dernier avis d’imposition produit, concernant les revenus perçus en 2017, mentionne la somme de 56 564 euros au titre des pensions de retraite et celle de 23 euros au titre des revenus de capitaux mobiliers, soit au total 4 715,58 euros par mois, et une charge d’impôts sur le revenu de 7 800 euros, soit 650 euros par mois ;

Que son bulletin pour janvier 2019 fait état d’une pension de 3 426,12 euros, après prélèvement à la source, s’y ajoutant une retraite Préfon d’un montant net trimestriel en 2019 de 1 170,99 euros, soit 390,33 euros nets par mois en moyenne 334,56 euros après prélèvement, soit au total la somme de 3 760,68 euros nets par mois, impôt sur le revenu déduit ;

Que M. H… K… justifie de la mise en place d’un virement de 821 euros par mois pour le paiement d’un loyer (pièce 72) ; que si Mme E… Q… en conteste la sincérité au motif qu’aucun contrat de location ni quittance de loyer ne sont versés aux débats, M. H… K… justifie d’une assurance habitation (pièce 69) ;

Que sa déclaration sur l’honneur (pièce 73) fait état :

— au titre des revenus de 2019 de 3 760,68 euros par mois (retraites de 3 426,12 euros + Prefon 334,56 euros)

— au titre du patrimoine immobilier :

* d’un bien indivis avec l’épouse au Chesnay (ancien domicile conjugal) estimé entre 570 000 et 590 000 euros

* d’un bien en indivision familiale avec ses soeurs à Grasse (06), estimé pour sa part à 93 250 euros ;

— au titre du patrimoine mobilier :

* de valeurs mobilières communes pour 3 800 euros

* en propre :

— un compte épargne de 42 842,11 euros

— un plan d’épargne logement de 11 552,80 euros

— d’une assurance-vie Agipi de 2 877 euros ;

— au titre de ses charges, outre les charges courantes habituelles :

* d’un loyer de 821 euros par mois

* d’une taxe d’habitation de 62 euros par mois

* de taxes foncières de 157 euros par mois (pour le bien indivis du Chesnay et celui de Grasse)

* de la contribution à l’entretien et l’éducation d’C… de 820 euros par mois ;

Que si Mme E… Q… souligne la qualité du bien situé à Grasse, avec piscine, et sa sous-évaluation par son mari, il n’est pas justifié que cet immeuble indivis, qui serait occupé par les soeurs de M. H… K… , soit source de revenus pour ce dernier ;

— Mme E… Q… exerce toujours son activité professionnelle de chef de projet ; qu’elle a bénéficié de la part de son employeur, La Poste, d’un détachement en qualité de fonctionnaire à la Banque Postale, lequel a pris fin à compter du 1er octobre 2018, mais dont elle indique qu’il a été prolongé de trois mois supplémentaires ; qu’elle se trouve en dispense d’activité depuis le 13 octobre 2018 après avoir subi de nombreux arrêts maladie ; qu’elle souffre de plusieurs pathologies, dont deux affections longue durée, et bénéficie du statut de travailleur handicapé ; qu’elle fait état d’un différend administratif concernant sa situation de détachement et les problématiques liées à sa prise en charge, et d’un risque de mise à la retraite d’office ou d’un licenciement, source pour elle de précarité ;

Que selon son bulletin de paie de juillet 2019 (pièce 339) son cumul net imposable s’élève à 39 000,29 euros, soit 5 572,61 euros nets par mois en moyenne, dont il y a lieu de déduire l’impôt à la source ; que déduction faite de cette charge, il est justifié d’un montant net perçu entre janvier et juillet 2019 de 31 245,93 euros, soit 4 463,70 euros nets par mois en moyenne (pièces 323 et 339) ;

Que l’avis d’imposition 2018 de Mme E… Q… révèle en outre qu’elle perçoit des revenus de capitaux mobiliers et des revenus fonciers nets d’un montant respectif de 1 462 euros et 2 586 euros, soit 4 048 euros par an (337,33 euros nets par mois en moyenne) ;

Que sa déclaration sur l’honneur (pièce 338) mentionne :

— au titre de son patrimoine

* la propriété indivise avec son mari de l’immeuble du Chesnay évalué à la somme de 500 000 euros

* la propriété indivise avec son père d’un F2 à Mandelieu La Napoule (Alpes Maritimes) d’une valeur, pour sa part, de 50 000 euros

* d’une épargne personnelle ainsi constituée :

— compte sur livret : 45 585 euros

— plan d’épargne logement : 21 012 euros

— Bfor bank : 105 817 euros

— Agipi assurance-vie : 22 463 euros

— Livret A : 8 euros

— Compte sur livret : 40 euros

— LDD : 92 euros

— Compte courant : 42 129 euros

— Contrat Groupe LBP disponible 50 070 euros brut

* des comptes communs BNP et Caisse d’Epargne

— au titre de ses charges, outre les charges courantes habituelles

— des taxes d’habitation et foncière de 311 euros par mois

— d’un crédit voiture de 426 euros par mois (en réalité 431,94 euros par mois étant observé toutefois par la cour que cette charge prend fin en novembre 2019 (pièce 320) ;

Qu’il n’y a pas lieu de tenir compte des indemnités dues par Mme E… Q… pour l’occupation du bien indivis du Chesnay depuis le 29 janvier 2013, s’agissant de fruits accroissant à l’indivision ; qu’il en est de même des charges payées au nom de celle-ci et qui feront l’objet de comptes dans le cadre de la liquidation ;

Qu’il est constant que Mme E… Q… va voir ses revenus diminuer à sa retraite prochaine ; qu’il est justifié à ce titre de droits à hauteur de 2 483,52 euros bruts par mois pour une retraite au 1er janvier 2019 comprenant la majoration pour 4 enfants mais hors les points de Nouvelle Bonification Indiciaire (NBI) auxquels elle pourrait prétendre et qui apparaitront au titre de suppléments (pièce 277) ;

Que M. H… K… oppose par ailleurs à juste titre que ces moments ne tiennent pas compte des droits de son épouse acquis dans le cadre des emplois qu’elle a occupés dans le secteur privé, au sein du Crédit Mutuel, à IOD International ou à la Caisse centrale de Crédit immobilier ;

Qu’il est justifié également pour l’épouse de droits au titre d’une retraite Préfon dont le montant net par mois selon l’attestation du 4 mai 2015 s’élève à 661,52 euros par mois pour une rente liquidée à 67 ans ;

Que Mme E… Q… fait état du temps qu’elle a consacré à la famille pendant la vie commune et de celui qu’elle devra encore consacrer à C…, dont l’état de santé a souffert d’une chute de cheval suivie d’une dépression et de différentes pathologies, qui vit à son domicile, et bénéficie de l’allocation adulte handicapée ;

Qu’il est constant, aux termes des nombreuses attestations concordantes, que Mme E… Q… a pris en charge principalement la charge quotidienne des enfants et qu’elle assume le soutien important dont C… a besoin ;

Que pour autant il n’est nullement établi que cette situation a eu des répercussions sur sa vie professionnelle ni sur ses revenus, sa carrière s’étant déroulée normalement comme en témoigne son curriculum vitae (pièce 111) ; que ses droits à la retraite n’ont subi aucune décote particulière ;

Que c’est à bon droit qu’au vu de ces éléments, le premier juge a débouté Mme E… Q… de sa demande de prestation compensatoire, aucune preuve de disparité dans les conditions de vie respectives des parties du fait de la dissolution du mariage n’étant établie au détriment de l’épouse » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la prestation compensatoire

Que l’article 270 du code civil prévoit que l’un des époux peut, à la suite d’un divorce, être tenu de verser à l’autre une prestation destinée à compenser, autant qu’il est possible, la disparité que la rupture du mariage créé dans les conditions de vie respectives ;

Que toutefois, le juge peut refuser d’accorder une telle prestation si l’équité le commande, soit en considération des critères prévus à l’article 271, soit lorsque le divorce est prononcé aux torts exclusifs de l’époux qui demande le bénéfice de cette prestation, au regard des circonstances particulières de la rupture ;

Que l’article 271 du même code dispose que cette prestation est fixée selon les besoins de l’époux créancier et les ressources de l’autre, en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible, au vu notamment :

— de la durée du mariage,

— de l’âge et de l’état de santé des époux,

— de leur qualification et de leur situation professionnelle,

— des conséquences des choix professionnels fait par l’un des époux pendant la vie commune pour l’éducation des enfants et du temps qu’il faudra encore y consacrer ou pour favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne,

— du patrimoine estimé ou prévisible des époux, tant en capital qu’en revenus, après la liquidation du régime matrimonial,

— de leurs droits existants ou prévisibles,

— de leur situation respective en matière de droit à la retraite ;

Que cette prestation prend en principe la forme d’un capital, dont le montant est fixé par le juge et dont le paiement peut être échelonné dans les conditions prévues à l’article 275 ;

Que l’article 274 du code civil précise que le juge décide des modalités selon lesquelles s’exécutera la prestation compensatoire en capital parmi les formes suivantes :

— le versement d’une somme d’argent,

— l’attribution de biens en propriété ou d’un droit temporaire ou viager d’usage d’habitation ou d’usufruit, le jugement opérant cession forcée en faveur du créancier. Toutefois, l’accord de l’époux débiteur est exigé pour l’attribution en propriété de biens qu’il a reçus par succession ou donation ;

Que dans sa décision n°2011-151 QPC du 13 juillet 2011, le Conseil a constitutionnel a précisé, s’agissant de cet article, que le 2° de l’article 274 précité était conforme à la Constitution, sous la réserve suivante : « Considérant, toutefois, que le 1° de l’article 274 du code civil prévoit également que la prestation compensatoire en capital peut être exécutée sous forme de versement d’une somme d’argent, le prononcé du divorce pouvant être subordonné à la constitution de garanties ;

que l’atteinte au droit de propriété qui résulte de l’attribution forcée prévue par le 2° de cet article ne peut être regardée comme une mesure proportionnée au but d’intérêt général poursuivi que si elle constitue une modalité subsidiaire d’exécution de la prestation compensatoire en capital; que, par conséquent, elle ne saurait être ordonnée par le juge que dans le cas où, au regard des circonstances de l’espèce, les modalités prévues au J0 n’apparaissent pas suffisantes pour garantir le versement de cette prestation ; que, sous cette réserve, l’attribution forcée d’un bien à titre de prestation compensatoire ne méconnaît pas l’article 2 de la Déclaration de 1789 » ;

Qu’en application de l’article 276 du même code, à titre exceptionnel, le juge peut, par décision spécialement motivée, lorsque l’âge ou l’état de santé du créancier ne lui permet pas de subvenir à ses besoins, fixer la prestation compensatoire sous forme de rente viagère ; qu’il prend en considération les éléments d’appréciation prévus à l’article 271 ; que le montant de la rente peut être minoré, lorsque les circonstances l’imposent, par l’attribution d’une fraction en capital parmi les formes prévues à l’article 274 ;

Qu’enfin, l’article 1080 du code de procédure civile dispose que lorsque des biens ou droits sont attribués à titre de prestation compensatoire en application du 2° de l’article 274 du code civil, le jugement en précise la valeur et, lorsque ces biens ou droits sont soumis à la publicité foncière, il précise également les mentions nécessaires à la publication du titre de propriété dans les formes prévues par le décret n° 55-22 du 4 janvier 1955 portant réforme de la publicité foncière ;

Qu’il convient de préciser que les arguments relatifs à la situation d’C… ne peuvent être pris en compte pour fonder une prestation compensatoire mais seulement pour déterminer une éventuelle contribution à son entretien et à son éducation ;

Qu’en l’espèce, le mariage a duré 33 ans ;

Qu’il convient d’analyser la situation respective des parties ;

Concernant Mme E… Q…

Qu’elle est âgée de 63 ans.

Qu’il n’est pas contesté qu’elle est atteinte de plusieurs pathologies ; qu’elle bénéficie de la qualité de travailleur handicapé ; que néanmoins, elle semble avoir repris le travail depuis le mois d’octobre 2017 au moins en mi-temps thérapeutique ;

Qu’elle ne démontre pas que l’éducation des enfants et les choix communs du couple ont eu un effet sur sa carrière professionnelle et sur ses droits à la retraite ;

Qu’elle a perçu les revenus suivants selon les avis d’impôt sur les revenus :

— en 2010 : 75 231 euros,

— en 2013 : 69 222 euros de salaire, 3 402 euros de revenus de capitaux mobiliers et 2 869 euros de revenus fonciers,

— en 2014 : 65 279 euros de salaire, 2 439 euros de revenus de capitaux mobiliers et 2 439 euros de revenus fonciers,

— en 2015 : 49 544 euros de salaire, 2 646 euros de revenus de capitaux mobiliers et 2 646 euros de revenus fonciers,

— en 2016 : 45 708 euros de salaire, 1 599 euros de revenus de capitaux mobiliers et 1 599 euros de revenus fonciers,

Qu’au mois de novembre 2017, elle a perçu un cumul net imposable de 52 123,03 euros ;

Qu’aussi, il convient de constater que ses problèmes médicaux ont eu un effet sur ses revenus à la baisse ;

Que sur son patrimoine, elle est propriétaire en indivision du bien commun sis […] estimé entre 470 000 et 569 000 euros ; qu’elle est également propriétaire en indivision avec ses enfants d’un bien immobilier sis […] estimé entre 110 000 et 115 000 euros ;

Qu’il n’y a plus de crédit immobilier à payer ;

Qu’elle bénéficie du domicile conjugal à titre onéreux ;

Qu’elle a une épargne constituée de :

— PEL de 19 166,03 euros au 31 décembre 2015,

— compte sur livret de 58 605,85 euros au 10 juin 2016,

— livret d’épargne de 105 073,77 euros au 31 décembre 2015,

— épargne contrat de retraite de 14 247,73 euros au 31 décembre 2015 ;

Qu’outre les charges courantes, elle paie les taxes et les charges de copropriété sur le bien commun situé à […] ;

Concernant M. H… K…

Que l’époux est âgé de 70 ans ;

Qu’il est atteint d’un cancer du foie et subit des traitements ;

Qu’il a fait valoir ses droits à la retraite à compter du 1er novembre 2013 ; qu’il a perçu en 2014 une retraite annuelle de 55 229 euros ;

Qu’il n’a pas versé ses avis d’impôt sur les revenus ultérieurs ; que néanmoins, il justifie du montant de ses pensions de retraite pour l’année 2018, à savoir 1 158,49 euros par trimestre (Préfon) et 4 009,97 euros par mois (fonction publique) ;

Que sur son patrimoine, il est propriétaire en indivision du bien commun sis […] estimé entre 470 000 et 569 000 euros ; qu’il est également propriétaire en indivision pour 2/8ème d’un bien immobilier sis […] estimé à 373 000 euros ;

Que selon attestation sur l’honneur du 16 mars 2018, l’époux a déclaré avoir une épargne de :

—  35 895,28 euros sur Livret A et Livret d’épargne solidaire,

—  10 737,57 euros sur PEL,

—  2 827,87 euros d’assurance-vie,

—  12 340,76 euros sur un compte au Crédit Agricole.

Qu’outre les charges courantes, il paie un loyer de 800 euros par mois ;

Qu’au regard de tous ces éléments, il apparaît que la situation de chacun des époux est équivalente et la rupture du mariage ne crée pas de disparité dans les conditions de vie ;

Que la demande de Mme E… Q… sera donc rejetée » ;

ALORS QUE la prestation compensatoire est fixée selon les besoins de l’époux à qui elle est versée et les ressources de l’autre en tenant compte de la situation au moment du divorce et de l’évolution de celle-ci dans un avenir prévisible ; qu’à ce titre, étant de nature à influer sur son patrimoine prévisible en capital, la dette d’indemnité d’occupation mise à la charge d’un époux par l’ordonnance de non-conciliation doit être prise en considération ; qu’en retenant au contraire, pour rejeter sa demande de prestation compensatoire, qu'« il n’y a pas lieu de tenir compte des indemnités dues par Mme E… Q… pour l’occupation du bien indivis du Chesnay depuis le 29 janvier 2013, s’agissant de fruits accroissant à l’indivision » (arrêt, p. 9, al. 21), la cour d’appel a violé les articles 270 et 271 du code civil.

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Cour de cassation, Première chambre civile, 17 septembre 2020, n° 20-10.564