Cour de cassation, Chambre civile 3, 1 octobre 2020, 19-14.479, Inédit

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Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Référence :
Cass. 3e civ., 1er oct. 2020, n° 19-14.479
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-14.479
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Grenoble, 29 octobre 2018
Dispositif : Rejet
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043105345
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:C300701
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Sur les parties

Texte intégral

CIV. 3

MY2

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 1er octobre 2020

Rejet

M. CHAUVIN, président

Arrêt n° 701 F-D

Pourvoi n° F 19-14.479

Aide juridictionnelle totale en défense

au profit de l’AIIPRFE.

Admission du bureau d’aide juridictionnelle

près la Cour de cassation

en date du 9 septembre 2019.

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 1ER OCTOBRE 2020

1°/ l’Association du Vajra triomphant (AVT), dont le siège est […] ,

2°/ l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah, agissant par son liquidateur amiable, dont le siège est […],

ont formé le pourvoi n° F 19-14.479 contre l’arrêt rendu le 30 octobre 2018 par la cour d’appel de Grenoble (1re chambre civile), dans le litige les opposant :

1°/ à l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de Fontaine l’Evêque (AIIPRFE), lac de Sainte-Coix et de son environnement des lacs et sites du Verdon, dont le siège est […] et de son environnement des lacs et sites du Verdon,

2°/ à Mme D… T…, épouse A…,

3°/ à M. X… A…,

4°/ à Mme C… K…, épouse G…,

5°/ à M. M… G…,

tous quatre domiciliés […] ,

défendeurs à la cassation.

Les demanderesses invoquent, à l’appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Jacques, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de l’Associations du Vajra triomphant et l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah, de Me Haas, avocat de l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de fontaine l’évêque, après débats en l’audience publique du 7 juillet 2020 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Jacques, conseiller rapporteur, M. Maunand, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre,

la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Grenoble, 30 octobre 2018), rendu sur renvoi après cassation (3e Civ., 26 janvier 2005, pourvoi n° 03-15.008), par arrêté du 16 avril 1992, le maire de Castellane a accordé à l’Association cultuelle du temple pyramide (ACTP), aux droits de laquelle se trouve l’Association du Vajra triomphant (AVT), gérant le monastère du Mandarom, un permis de construire une pyramide destinée à abriter un temple.

2. Le permis de construire ayant été annulé et la construction ayant reçu un commencement d’exécution, l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de Fontaine l’Evêque (l’AIIPRFE) et M. et Mme A… ont assigné en remise en état des parcelles l’ACTP et l’AVT. A été appelée à l’instance l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah (la fondation) à qui l’AVT avait fait apport de ses biens immobiliers avant que la fondation ne les lui cède à nouveau.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. L’AVT et la fondation font grief à l’arrêt de les condamner à remettre dans leur état antérieur les parcelles […], […], […], […], […], […], […] et […], alors « qu’il appartient au juge de vérifier si l’ingérence causée par le droit national à un droit fondamental est proportionnée au but légitime poursuivi ; qu’en l’espèce, saisie d’une action en remise en état de plusieurs parcelles d’un terrain montagneux, situées au sein du Mandarom, terre sainte de la religion aumiste, la cour d’appel a ordonné des travaux consistant à importer des terres par camions pour combler les espaces creusés et redonner au site sa morphologie initiale ; que cependant, l’association proposait, plutôt que ce transport massif de terres par des milliers de camions, de remettre à leur emplacement initial les terres déplacées dans le cadre des travaux demeurées sur le site, ce qui était d’un coût trois fois inférieur ; que cette méthode permettait, par un juste équilibre, de ménager, d’une part, les intérêts des demandeurs, d’autre part, la liberté religieuse et d’association ainsi que le droit au respect des biens de l’association, puisque le coût de la mesure ne privait pas l’association cultuelle des moyens financiers nécessaires à son existence et, de ce fait, à celle du culte de l’aumisme ; qu’en retenant cependant la méthode la plus onéreuse et la plus attentatoire aux droits fondamentaux de l’association, sans rechercher si l’atteinte qui en résultait était proportionnée au but légitime poursuivi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 9 et 11 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 1er du Protocole additionnel n° 1 à ladite Convention, et de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme. »

Réponse de la Cour

4. La Cour européenne des droits de l’homme, qui reconnaît une grande marge d’appréciation au Etats contractants en matière de planification et d’aménagement du territoire, a admis que l’application d’une règle d’urbanisme neutre à l’égard de l’exercice de la liberté de culte poursuit un but légitime, à savoir la protection de l’ordre public et des droits et libertés d’autrui (CEDH, arrêt du 24 juin 2004, Vergos c. Grèce, n° 65501/01, § 32 ; CEDH, décision du 17 septembre 2019, Pantelidou c. Grèce, n° 36267/19, § 24).

5. En outre, si elle a implicitement admis que le libre exercice du droit à la liberté de religion de l’ACTP était protégé par l’article 9 de la Convention (CEDH, arrêt du 31 janvier 2013, Association cultuelle du Temple Pyramide c. France, n° 50471/07), elle ne reconnaît l’existence d’une ingérence dans le droit d’une association religieuse à manifester et à exercer sa liberté de religion que lorsque la mesure à laquelle elle est soumise, telle qu’une taxation des dons manuels, est de nature à affecter directement le libre exercice du culte et à entraver l’organisation interne, le fonctionnement et les activités religieuses de l’association (CEDH, arrêt du 30 juin 2011, Association Les Témoins de Jéhovah c. France, n° 8916/05, § 53).

6. La cour d’appel a relevé qu’elle était saisie d’une demande de réparation en nature à la suite de travaux effectués par l’AVT en violation des règles d’urbanisme et que la divergence de chiffrage du coût des travaux de remise en état entre le rapport d’expertise judiciaire et le rapport non judiciaire diligenté à l’initiative de l’AVT et de la fondation devait être minorée.

7. Elle n’a pas fait siennes les conclusions de l’expert judiciaire quant à cette évaluation et n’était pas tenue de répondre à de simples allégations, dépourvues d’offre de preuve, relatives à l’impossibilité pour l’AVT de financer ces travaux et à l’atteinte portée à son droit de propriété.

8. En l’absence de démonstration d’une ingérence dans le droit de l’AVT et de la fondation à manifester et à exercer leur liberté de religion et dans leur droit au respect de leurs biens, elle a légalement justifié sa décision, sans être tenue de procéder à un contrôle de proportionnalité que ses constatations rendaient inopérant, en appréciant souverainement les travaux nécessaires à la remise en état.

9. Le grief n’est donc pas fondé.

Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche

Enoncé du moyen

10. L’AVT et la fondation font le même grief à l’arrêt, alors « que les époux A… et l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de Fontaine l’Evêque (AIIPRFE) limitaient leur action à la réparation des préjudices consécutifs à l’annulation du permis de construire délivré le 16 avril 1992 et à la remise des lieux dans l’état antérieur aux travaux effectués sur le fondement du permis annulé ; qu’ainsi que le faisait valoir l’association du Vajra Triomphant, l’action en démolition ne pouvait donc affecter ni la plate-forme, c’est-à-dire l’aplanissement du terrain réalisé antérieurement, destinée à servir de support à la construction à venir du temple, ni la voie d’accès sud qui existait antérieurement ; que pour inclure cependant l’aplanissement du terrain dans le champ de la remise en état, la cour d’appel s’est bornée à affirmer qu’un raisonnement inverse reviendrait à « vider de toute sa substance la question de la remise en état du terrain », privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme, ainsi que des articles 9 et 11 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du Protocole additionnel n° 1 à ladite Convention. »

Réponse de la Cour

11. L’article L. 480-13 du code de l’urbanisme ne s’appliquant pas aux constructions édifiées sans permis de construire et l’AVT et la fondation n’ayant pas soutenu dans leurs conclusions d’appel que la plate-forme avait été édifiée en vertu d’un permis de construire, la cour d’appel, qui a relevé que la remise du site en son état antérieur impliquait l’inclusion de la plate-forme, a légalement justifié sa décision.

Sur le premier moyen, pris en ses troisième et quatrième branches, et sur le second moyen, ci-après annexés

12. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne l’Association du Vajra Triomphant et l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par l’Association du Vajra Triomphant et l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah et les condamne à payer à Me N… la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du premier octobre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour l’Association du Vajra triomphant et l’association la Fondation sa sainteté le seigneur Hamsah Manarah.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir condamné in solidum l’association du Vajra Triomphant et la fondation sa Sainteté le seigneur Hamsah Manarah à remettre dans leur état antérieur aux divers travaux réalisés les parcelles […], […], […], […], […], […], […] et […] , sur la commune de Castellane, soit concernant la voie d’accès sud, la zone plateforme-pyramide et le parking ;

AUX MOTIFS QUE la discussion porte principalement sur la voie d’accès et l’état de la zone de la plateforme pyramide, selon que l’on se place avant tout démarrage des travaux ou après la délivrance du permis de construire annulé ; qu’il existe deux voies d’accès, la première voie étant située au sud, sur les parcelles […], […], […] et […] et la seconde au nord, traversant les parcelles […] et […] ; que compte-tenu de la réalisation de la voie nord en 2013, soit postérieurement à l’introduction du litige, cet accès doit être exclu des travaux de réfection ; qu’en revanche, au regard des considérations précédentes sur les points définitivement tranchés, la remise en état des lieux concerne la voie sud ; que dès lors, la remise en état portera sur les parcelles […], […], […], […], […], […] et […] ; que par ailleurs, la remise en état des lieux devra prendre en compte l’élément de réalité selon lequel il est impossible de travailler à la stabilité de la piste d’accès sans intervenir sur les talus amont et aval, ce qui légitime un léger débord des parcelles concernées ; qu’il ressort des observations de l’expert : – que la remise en état des lieux devra tenir compte de ce que la commune de Castellane est classée en zone sismique 4, – que la piste d’accès sud présente sept virages, avec des soutènements en enrochements, pour partie déstabilisés, – que la revégétalisation est assez faible, notamment, au niveau des protections en alvéoles, – que les fossés bordant la piste sont très enherbés et que les caniveaux présentent un défaut d’entretien avec apparition de nouveaux ravinements par rapport à l’expertise de Monsieur Y…, – concernant la plateforme-pyramide, à l’est et au nord, que le ravinement est très intense avec accentuation au fil du temps, – qu’au centre, il existe un immense cirque plan avec, en pied de falaise, une mouillère temporaire résultant de l’accumulation des eaux sauvages mal évacuées, – qu’au sud-est, les deux terrasses créées avec les déblais du cirque sont recouvertes en partie par la végétation, – qu’en partie nord, le talus reste toujours à nu, – que le parking s’est enherbé à l’ouest, une cuvette s’étant formée par une très forte accumulation récente de sédiments venus des pentes, – que cette cuvette s’est progressivement agrandie et est devenue stérile, – qu’un profond fossé d’écoulement des eaux sauvages s’est créé avec un ruissellement orienté plein est ; que l’expert estime que, s’il est impossible de reconstituer des marnes âgées de 150 millions d’années, tectonisées, consolidées et structurées, il est néanmoins possible de retrouver la morphologie initiale du site ; que pour ce faire, l’expert préconise de procéder à des déblais et à des remblais avec toile de jute sur les parties les plus pentues pour permettre la revégétalisation du site avec ensemencement des zones et plantations d’espèces arbustives locales ; qu’il estime que la faune réoccupera l’espace rapidement dès que la végétation aura repoussé ; que l’expert décrit les travaux nécessaires comme suit : – travaux préparatoires comprenant l’amenée de camions, de pelles-mécaniques, de mini-pelles, de rouleaux de matériaux (géogrilles, toile de jute, remblais, plants, balises de chantier, feux de circulation, panneaux de signalisation, cabanes de chantier, sanitaires…), – décapage des zones où des remblais réutilisables ont été entreposés lors des travaux antérieurs, – stockages des matériaux sur place, – apports de remblais calcaire type déchets de carrière, – mise en place de drains routiers entourés de géotextiles, en pied de talus, – mise en place de remblais compactés par couche de 20 à 30 centimètres avec pose de géogrilles dans les profils 11, 14, 15, 17, 24-26, 27-30, les géogrilles devant s’étendre d’un profil à l’autre lorsqu’ils sont voisins et jusqu’à la moitié de la distance avec le profil suivant lorsque ce dernier est stable sans géogrille, – mise en place des anciens déblais du site en remblais superficiels, – mise en place d’une toile de jute sur les zones pentues, – ensemencement avec du calamagrostis, du ray grass italien et anglais, de la fétuque, de l’achillée millefeuille et de la marguerite, – plantation de genêts, de bugranes, de pins noirs, de pins sylvestres, d’aulnes, de cèdres, de buis et d’argousier ; que la question des coûts n’est pas utile à la solution du litige dans la mesure où les intimés demandent la remise en état en nature ; que dès lors, la divergence de chiffrage entre le rapport d’expertise judiciaire et le rapport de Géotechnique doit être minimisée ; que les critiques concernant l’absence de fiabilité des calculs de l’expert au motif que le sapiteur, l’entreprise A., n’aurait pas pris de point de référence sont infondées dans la mesure où l’état initial du site a été retenu comme étant celui antérieur à la réalisation de la voie d’accès sud ; que par ailleurs, l’AVT via son expert amiable, la société Géotechnique, se fonde sur le plan topographique du 2 avril 1991 dont les cotes sont illisibles ; que la question de la plateforme doit être appréciée au regard de l’état du site avant les travaux de terrassement de cette zone et non après le démarrage des travaux de construction sauvage de la plateforme en 1991, sauf à vider de toute sa substance la question de la remise en état du terrain ; que la question du volume des remblais sera retenu conformément à la proposition de la société A. selon la coupe cotée proposée et non selon la proposition de la société Géotechnique, laquelle ne reposant sur aucun descriptif, n’est pas pertinente ; que l’expert évalue la durée des travaux à environ trois ans ; que toutefois, les travaux de remise en état ne concernant pas la voie d’accès nord, le délai de réalisation des travaux sera fixé à trente mois ; qu’en l’état de tous ces éléments, il convient de condamner in solidum l’AVT et la Fondation, cette dernière ayant reçu de l’AVT ses biens immobiliers, à remettre dans leur état antérieur aux travaux les parcelles […], […], […], […], […], […], […] et […], soit concernant la voie d’accès sud, la zone plateforme-pyramide et le parking, selon les préconisations de l’expert visées en pages 34, 35, 36, 37, 38 et 39 du rapport d’expertise, telles que détaillées dans le dispositif du présent arrêt ; qu’il convient d’assortir ces travaux d’une astreinte de 500,00€ par jour de retard, le chantier devant être ouvert dans un délai de six mois suivant la signification du présent arrêt et les travaux devant être terminés dans un délai de trente mois suivant le démarrage du chantier ;

1°) ALORS QU’ il appartient au juge de vérifier si l’ingérence causée par le droit national à un droit fondamental est proportionnée au but légitime poursuivi ; qu’en l’espèce, saisie d’une action en remise en état de plusieurs parcelles d’un terrain montagneux, situées au sein du Mandarom, terre sainte de la religion aumiste, la cour d’appel a ordonné des travaux consistant à importer des terres par camions pour combler les espaces creusés et redonner au site sa morphologie initiale ; que cependant, l’association du Vajra Triomphant proposait, plutôt que ce transport massif de terres par des milliers de camions, de remettre à leur emplacement initial les terres déplacées dans le cadre des travaux demeurées sur le site, ce qui était d’un coût trois fois inférieur ; que cette méthode permettait, par un juste équilibre, de ménager, d’une part, les intérêts des demandeurs, d’autre part, la liberté religieuse et d’association ainsi que le droit au respect des biens de l’AVT, puisque le coût de la mesure ne privait pas l’association cultuelle des moyens financiers nécessaires à son existence et, de ce fait, à celle du culte de l’aumisme ; qu’en retenant cependant la méthode la plus onéreuse et la plus attentatoire aux droits fondamentaux de l’AVT, sans rechercher si l’atteinte qui en résultait était proportionnée au but légitime poursuivi, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 9 et 11 de la Convention européenne des droits de l’homme, de l’article 1er du Protocole additionnel n°1 à ladite Convention, et de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme ;

2°) ALORS QUE les époux A… et l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de Fontaine l’Evêque (AIIPRFE) limitaient leur action à la réparation des préjudices consécutifs à l’annulation du permis de construire délivré le 16 avril 1992 et à la remise des lieux dans l’état antérieur aux travaux effectués sur le fondement du permis annulé (concl., p. 18) ; qu’ainsi que le faisait valoir l’association du Vajra Triomphant, l’action en démolition ne pouvait donc affecter ni la plate-forme, c’est-à-dire l’aplanissement du terrain réalisé antérieurement, destinée à servir de support à la construction à venir du temple (concl., p. 34 § 7), ni la voie d’accès sud qui existait antérieurement (concl., p. 36 § 3) ; que pour inclure cependant l’aplanissement du terrain dans le champ de la remise en état, la cour d’appel s’est bornée à affirmer qu’un raisonnement inverse reviendrait à « vider de toute sa substance la question de la remise en état du terrain » (arrêt, p. 9 § 6), privant ainsi sa décision de base légale au regard de l’article L. 480-13 du code de l’urbanisme, ainsi que des articles 9 et 11 de la Convention européenne des droits de l’homme et 1er du Protocole additionnel n° 1 à ladite Convention ;

3°) ALORS QUE l’objet du litige est déterminé par les prétentions des parties ; qu’en l’espèce, les époux A… et l’AIIPRFE limitaient leur action en démolition aux constructions situées « sur les parcelles […], […], […] et […] (voie d’accès comprise) » (concl., p. 18 § 14) ; que la cour d’appel a cependant condamné in solidum l’AVT et la Fondation à remettre dans leur état antérieur aux travaux « les parcelles […], […], […], […], […], […], […] et 141 » (arrêt, p. 11 § 3) ; qu’en statuant ainsi, quand elle était saisie d’une demande qui se limitait à la remise en état de quatre parcelles, voie d’accès comprise, la cour d’appel, excédant les limites de sa saisine, a violé l’article 4 du code de procédure civile ;

4°) ALORS QU’ en décidant tout à la fois que la voie d’accès nord – située sur les parcelles […], […] et […] – devait être exclue des travaux de remise en l’état antérieur et que les parcelles […], […] et […] devaient être remise en l’état antérieur (arrêt, p. 8 § 2 et 4 ; p. 11 § 3), la cour d’appel s’est contredite, violant ainsi l’article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir condamné in solidum l’association Vajra Triomphant et la fondation sa Sainteté le Seigneur Hamsah Manarah à payer à l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de Fontaine l’Evêque (AIIPRFE) et aux époux A…, unis d’intérêts, la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts, et celle de 20.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

AUX MOTIFS QUE l’AIIPRFE et les époux A… forment une demande globale et la cour, tenue par les prétentions des parties, indemnisera leur préjudice par l’allocation d’une seule somme ; qu’ainsi qu’il a précédemment été retenu, la question du bien-fondé de la demande indemnitaire des intimés est définitivement tranchée ; que c’est à tort que l’AVT tente de déplacer le débat sur le terrain de la liberté religieuse et d’association et sur le respect du droit de propriété alors qu’il est définitivement acquis que l’action de l’AIIPRFE est conforme à l’objet pour laquelle elle a été créée, à savoir la sauvegarde des milieux naturels, des paysages et de la flore ; que le principe du préjudice est définitivement jugé, tant en ce qui concerne l’AIIPRFE, puisque les travaux litigieux réalisés en contravention avec le POS portent une atteinte directe aux intérêts qu’elle défend, qu’en ce qui concerne les époux A… en leur qualité de propriétaires riverains du site ; qu’il n’est au surplus pas inutile de rappeler que le droit de propriété trouve sa limite dans le respect des lois et règlements, ainsi que de celui du droit d’autrui ; qu’il ressort à l’évidence des photographies produites que le site a été dénaturé et la montagne véritablement « scalpée » par les travaux entrepris par l’ACTP aux droits desquels vient l’AVT ; que ces travaux réalisés au mépris des règles d’urbanisme, présentent un caractère dangereux et entraînent une atteinte grave tant à la sécurité qu’à l’environnement ; que la méconnaissance des règles susvisées dans une région à risques sismiques entraîne également des ruissellements intempestifs portant atteinte non seulement au milieu naturel mais également aux habitations riveraines du site ; qu’enfin, l’atteinte visuelle des époux A… s’apprécie au regard de la vue globale sur le site, même si la voie d’accès est, en partie, dissimulée par les constructions du « Mandarom » ; que le préjudice des intimés ayant été partiellement réparé par la condamnation de l’AVT et de la Fondation à la remise en état du site, il convient de condamner ces dernières in solidum à payer à l’AIIPRFE et aux époux A…, unis d’intérêts, des dommages-intérêts de 50.000 € ;

ALORS QUE si les associations de protection de l’environnement peuvent réclamer la réparation d’un préjudice collectif résultant d’une atteinte à l’environnement, celui-ci se distingue des préjudices individuels que cette atteinte peut causer ; qu’il ne peut donc être alloué une somme commune et globale pour indemniser les conséquences dommageables d’un fait ayant causé deux préjudices distincts, respectivement un préjudice collectif à une association de défense de l’environnement et un préjudice personnel allégué par deux personnes physiques ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a pourtant indemnisé le préjudice subi par l’association interdépartementale et intercommunale pour la protection de la retenue de fontaine l’évêque (AIIPRFE) et celui subi par les époux A… par l’allocation de « la somme de 50.000 euros à titre de dommages et intérêts » (arrêt, p. 11 § 16) ; qu’en statuant ainsi, quand l’AIIPRFE sollicitait l’indemnisation d’un préjudice dont la nature était collective, distincte du préjudice personnel que prétendaient subir les époux A…, la cour d’appel a violé l’article 1382 du code civil dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, devenu l’article 1240 du même code.

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