CJCE, n° C-84/94, Arrêt de la Cour, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Conseil de l'Union européenne, 12 novembre 1996

  • Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs·
  • Fixation au dimanche du jour de repos hebdomadaire·
  • Cee/ce - politique sociale * politique sociale·
  • Recours en annulation - moyens * moyens·
  • Cee/ce - contentieux * contentieux·
  • Légalité 6. actes des institutions·
  • Absence 5. recours en annulation·
  • Sources du droit communautaire·
  • Ordre juridique communautaire·
  • Portée 4. droit communautaire

Chronologie de l’affaire

Commentaires4

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Village Justice · 5 mars 2012

La jurisprudence communuataire et le droit national garantissent l'acquisition de droits à congés payés et leur exercice de manière très large. Mais quelles peuvent être les limites ? Alors que la valeur travail a été au centre de la dernière élection présidentielle et demeure, à juste titre, un objet de références et de débats soutenus, il est intéressant de se remémorer de manière totalement anachronique ce qu'écrivait Paul Lafargue voici plus de 130 ans dans son manifeste où il affirmait le droit à la paresse fustigeant « l'étrange folie que la classe ouvrière porte au travail » et …

 

Village Justice · 28 septembre 2011

Le Harcèlement Moral atteint toutes les entreprises, privées ou publiques et nous avions décrit les obligations de l'employeur, obligation de prévention pour l'ensemble des salariés et obligation de sanction à l'égard du harceleur.( Village de la Justice, Harcèlement moral et Entreprise) I/ Responsabilité conjointe du harceleur et de l'employeur Responsabilité du harceleur La qualification de harcèlement moral peut intervenir entre salariés ( harcèlement horizontal- harcèlement vertical) Situation très fréquente dans laquelle les salariés harcelés hésitent à mettre en cause …

 

Curia · CJUE · 12 novembre 1996

COMMUNIQUE DE PRESSE N° 53/1996 : Arrêt de la Cour dans l'affaire C-84/94 - Royaume-Uni c/ Conseil Division de la Presse et de l'Information COMMUNIQUE DE PRESSE N° 53/1996 12 novembre 1996 Arrêt de la Cour dans l'affaire C-84/94 Royaume-Uni c/ Conseil LA COUR DE JUSTICE REJETTE POUR L'ESSENTIEL LE RECOURS DU ROYAUME-UNI DEMANDANT L'ANNULATION DE LA DIRECTIVE CONCERNANT L'AMENAGEMENT DU TEMPS DE TRAVAIL REMARQUE IMPORTANTE: Ce communiqué, qui n'engage pas la Cour, est distribué par le service d'information à l'intention de la Presse. Il est disponible dans toutes les langues …

 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 12 nov. 1996, Royaume-Uni / Conseil, C-84/94
Numéro(s) : C-84/94
Arrêt de la Cour du 12 novembre 1996. # Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Conseil de l'Union européenne. # Directive 93/104/CE du Conseil concernant certains aspects de l'aménagement du temps de travail - Recours en annulation. # Affaire C-84/94.
Date de dépôt : 8 mars 1994
Précédents jurisprudentiels : 25 janvier 1994, Angelopharm, C-212/91
29 février 1996, France/Commission et Irlande/Commission, C-296/93 et C-307/93
arrêt du 9 novembre 1995, Allemagne/Conseil, C-426/93
Commission/Conseil, C-122/94, Rec. p. I-881, point 29
Commission/Conseil, C-300/89
Kirsammer-Hack ( C-189/91
Solution : Recours en annulation : rejet sur le fond, Recours en annulation : obtention
Identifiant CELEX : 61994CJ0084
Identifiant européen : ECLI:EU:C:1996:431
Télécharger le PDF original fourni par la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Avis juridique important

|

61994J0084

Arrêt de la Cour du 12 novembre 1996. – Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande du Nord contre Conseil de l’Union européenne. – Directive 93/104/CE du Conseil concernant certains aspects de l’aménagement du temps de travail – Recours en annulation. – Affaire C-84/94.


Recueil de jurisprudence 1996 page I-05755


Sommaire

Parties

Motifs de l’arrêt

Décisions sur les dépenses

Dispositif

Mots clés


1. Politique sociale ° Protection de la sécurité et de la santé des travailleurs ° Directive 93/104 concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail ° Base juridique ° Article 118 A du traité ° Limites ° Fixation au dimanche du jour de repos hebdomadaire ° Annulation de l’ article 5, deuxième alinéa, de la directive

(Traité CE, art. 100, 100 A et 118 A; directive du Conseil 93/104, art. 5, al. 2)

2. Actes des institutions ° Choix de la base juridique ° Critères ° Pratique d’ une institution ° Défaut de pertinence au regard des règles du traité

3. Traité CE ° Article 235 ° Portée

4. Droit communautaire ° Principes ° Proportionnalité ° Portée ° Violation par la directive 93/104 concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail ° Absence

(Directive du Conseil 93/104)

5. Recours en annulation ° Moyens ° Détournement de pouvoir ° Notion ° Directive du Conseil 93/104 ° Légalité

(Directive du Conseil 93/104)

6. Actes des institutions ° Motivation ° Obligation ° Portée

(Traité CE, art. 190)

Sommaire


1. L’ article 118 A du traité constitue la base juridique adéquate pour l’ adoption par la Communauté de mesures ayant pour objet principal la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, et ce nonobstant les incidences accessoires que de telles mesures peuvent avoir sur l’ établissement et le fonctionnement du marché intérieur. Il constitue en effet, dès lors qu’ il s’ agit d’ assurer cette protection, une disposition plus spécifique que les articles 100 et 100 A du traité, dont l’ existence n’ a pas pour conséquence de restreindre son domaine d’ application, et doit faire l’ objet d’ une interprétation large quant au champ qu’ il ouvre à l’ action du législateur communautaire en matière de santé et de sécurité des travailleurs. Cette action peut comporter des mesures de portée générale, et non pas seulement des mesures propres à certaines catégories de travailleurs, dont le caractère doit être celui de prescription minimale uniquement en ce sens que les États membres conservent la liberté d’ édicter des règles encore plus protectrices.

C’ est pourquoi, au vu tant de son contenu que de son objet, la directive 93/104 concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail pouvait, sauf pour les dispositions de son article 5, deuxième alinéa, privilégiant le dimanche comme jour de repos hebdomadaire, qui doit en conséquence être annulé, être adoptée sur le fondement de l’ article 118 A.

2. Dans le cadre du système de compétences de la Communauté, le choix de la base juridique d’ un acte doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel. Parmi de tels éléments figurent, notamment, le but et le contenu de l’ acte.

Une simple pratique du Conseil n’ est pas susceptible de déroger aux règles du traité et ne peut, par conséquent, créer un précédent liant les institutions lorsque, préalablement à l’ adoption d’ une mesure, il leur appartient de déterminer la base juridique correcte à cet effet.

3. L’ article 235 du traité ne peut servir de base juridique à un acte que si aucune autre disposition du traité ne confère aux institutions communautaires la compétence nécessaire pour arrêter cet acte.

4. L’ adoption par le Conseil de la directive 93/104 concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail n’ a pas constitué une violation du principe de proportionnalité.

En effet, le contrôle limité qu’ exerce le juge sur l’ exercice par le Conseil du large pouvoir d’ appréciation qu’ il détient dans le domaine de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, où interviennent des choix de politique sociale et des appréciations complexes, n’ a fait apparaître ni que les mesures que comporte la directive, à l’ exception de celle contenue à l’ article 5, deuxième alinéa, ne seraient pas aptes à réaliser l’ objectif de sécurité et de santé des travailleurs visé, ni que ces mesures, caractérisées par une souplesse certaine, iraient au-delà de ce qui est nécessaire pour atteindre ledit objectif.

5. Un acte d’ une institution communautaire est entaché de détournement de pouvoir s’ il a été adopté dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’ atteindre des fins autres que celles excipées ou d’ éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’ espèce.

Tel n’ est pas le cas de la directive du Conseil 93/104 concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail, dès lors qu’ il n’ est pas établi qu’ elle a été adoptée dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’ atteindre un objectif différent de celui de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs prévu par l’ article 118 A du traité qui en constitue la base juridique.

6. S’ il est vrai que la motivation exigée par l’ article 190 du traité doit faire apparaître d’ une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’ autorité communautaire, auteur de l’ acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la Cour d’ exercer son contrôle, il n’ est toutefois pas exigé qu’ elle spécifie tous les éléments de fait ou de droit pertinents.

Il est, à cet égard, inutile d’ exiger une motivation spécifique pour chacun des choix techniques que l’ acte contesté a opérés lorsque ce dernier fait ressortir l’ essentiel de l’ objectif poursuivi par l’ institution.

Parties


Dans l’ affaire C-84/94,

Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’ Irlande du Nord, représenté par M. John E. Collins, Assistant Treasury Solicitor, en qualité d’ agent, assisté de M. Michael J. Beloff, QC, et Mme Eleanor Sharpston, barrister, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ ambassade du Royaume-Uni, 14, boulevard Roosevelt,

partie requérante,

contre

Conseil de l’ Union européenne, représenté par M. Antonio Sacchettini, directeur au service juridique, Mmes Jill Aussant, conseiller juridique, et Sophia Kyriakopoulou, membre du service juridique, en qualité d’ agents, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Bruno Eynard, directeur de la direction des affaires juridiques de la Banque européenne d’ investissement, 100, boulevard Konrad Adenauer,

partie défenderesse,

soutenu par

Royaume d’ Espagne, représenté par MM. Alberto Navarro González, directeur général de la coordination juridique et institutionnelle communautaire, et Miguel Bravo-Ferrer Delgado, abogado del Estado, du service juridique de l’ État, en qualité d’ agents, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ ambassade d’ Espagne, 4-6, boulevard Emmanuel Servais,

par

Commission des Communautés européennes, représentée par M. Nicholas Khan, membre du service juridique, en qualité d’ agent, ayant élu domicile à Luxembourg auprès de M. Carlos Gómez de la Cruz, membre du même service, Centre Wagner, Kirchberg,

et par

Royaume de Belgique, représenté par M. Jan Devadder, directeur d’ administration au service juridique du ministère des Affaires étrangères, du Commerce extérieur et de la Coopération au développement, en qualité d’ agent, ayant élu domicile à Luxembourg au siège de l’ ambassade de Belgique, 4, rue des Girondins,

parties intervenantes,

ayant pour objet l’ annulation de la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail (JO L 307, p. 18) et, à titre subsidiaire, des dispositions de l’ article 4, de l’ article 5, premier et deuxième alinéas, de l’ article 6, paragraphe 2, et de l’ article 7 de cette directive,

LA COUR,

composée de MM. G. C. Rodríguez Iglesias, président, G. F. Mancini, J. C. Moitinho de Almeida (rapporteur), J. L. Murray et L. Sevón, présidents de chambre, C. N. Kakouris, P. J. G. Kapteyn, C. Gulmann, D. A. O. Edward, J.-P. Puissochet, G. Hirsch, P. Jann et H. Ragnemalm, juges,

avocat général: M. P. Léger,

greffier: Mme L. Hewlett, administrateur,

vu le rapport d’ audience,

ayant entendu les parties en leur plaidoirie à l’ audience du 16 janvier 1996,

ayant entendu l’ avocat général en ses conclusions à l’ audience du 12 mars 1996,

rend le présent

Arrêt

Motifs de l’arrêt


1 Par requête déposée au greffe de la Cour le 8 mars 1994, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’ Irlande du Nord a, en vertu de l’ article 173 du traité CE, demandé l’ annulation de la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail (JO L 307, p. 18, ci-après la « directive ») et, à titre subsidiaire, des dispositions de l’ article 4, de l’ article 5, premier et deuxième alinéas, de l’ article 6, paragraphe 2, et de l’ article 7 de la directive.

2 La directive a été adoptée sur le fondement de l’ article 118 A du traité CE, aux termes duquel:

« 1. Les États membres s’ attachent à promouvoir l’ amélioration, notamment du milieu de travail, pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs et se fixent pour objectif l’ harmonisation, dans le progrès, des conditions existant dans ce domaine.

2. Pour contribuer à la réalisation de l’ objectif prévu au paragraphe 1, le Conseil, statuant conformément à la procédure visée à l’ article 189 C et après consultation du Comité économique et social, arrête par voie de directive les prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres.

Ces directives évitent d’ imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu’ elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises.

3. Les dispositions arrêtées en vertu du présent article ne font pas obstacle au maintien et à l’ établissement, par chaque État membre, de mesures de protection renforcée des conditions de travail compatibles avec le présent traité."

3 Conformément à son article 1er, la directive fixe des prescriptions minimales de sécurité et de santé en matière d’ aménagement du temps de travail et s’ applique à tous les secteurs d’ activités, privés ou publics, au sens de l’ article 2 de la directive 89/391/CEE du Conseil, du 12 juin 1989, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’ amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail (JO L 183, p. 1), à l’ exception des transports aériens, ferroviaires, routiers, maritimes, fluviaux et lacustres, de la pêche maritime, d’ autres activités en mer, ainsi que des activités des médecins en formation.

4 La section II de la directive réglemente les périodes minimales de repos journalier, de repos hebdomadaire et de congé annuel ainsi que le temps de pause et la durée maximale hebdomadaire de travail. Ainsi, les États sont obligés de prendre les mesures nécessaires pour que tout travailleur bénéficie d’ une période minimale de repos de onze heures consécutives au cours de chaque période de vingt-quatre heures (article 3), d’ un temps de pause, lorsque le temps de travail journalier est supérieur à six heures, dont les modalités sont fixées par les partenaires sociaux ou par la législation nationale (article 4), d’ une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures au cours de chaque période de sept jours, à laquelle s’ ajoutent les onze heures de repos journalier prévues à l’ article 3 (article 5, premier alinéa) et qui comprend en principe le dimanche (article 5, deuxième alinéa) et, enfin, d’ un congé annuel payé de quatre semaines (article 7).

5 L’ article 6 oblige par ailleurs les États à prendre les mesures nécessaires pour que, en fonction des impératifs de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, la durée hebdomadaire du travail soit fixée par les partenaires sociaux ou par la législation nationale, sans que la durée moyenne de travail puisse excéder, pour chaque période de sept jours, quarante-huit heures, y compris les heures supplémentaires.

6 La section III de la directive contient différentes prescriptions relatives au travail de nuit, au travail posté et au rythme de travail. Les États membres doivent ainsi prendre les mesures nécessaires afin que le temps de travail normal des travailleurs de nuit ne dépasse pas huit heures en moyenne par période de vingt-quatre heures et que, lorsque le travail comporte des risques particuliers ou des tensions physiques ou mentales importantes, ils ne travaillent pas plus de huit heures au cours d’ une période de vingt-quatre heures durant laquelle ils effectuent un travail de nuit (article 8). Les travailleurs de nuit doivent en outre bénéficier d’ une évaluation gratuite de leur santé, préalablement à leur affectation et à intervalles réguliers, et doivent pouvoir être transférés, chaque fois que possible, à un travail de jour auquel ils sont aptes lorsqu’ ils souffrent de problèmes de santé liés au travail de nuit (article 9). L’ article 10 autorise les États à subordonner le travail de certaines catégories de travailleurs de nuit à certaines garanties, pour des travailleurs qui courent un risque de sécurité ou de santé lié au travail durant une période nocturne, et l’ article 12 oblige les États à prendre, notamment, les mesures nécessaires pour que les travailleurs de nuit et les travailleurs postés bénéficient d’ un niveau de protection, en matière de sécurité et de santé, adapté à la nature de leur travail.

7 Les États membres doivent en outre prendre des mesures afin que l’ employeur qui a régulièrement recours à des travailleurs de nuit informe de ce fait les autorités compétentes, sur leur demande (article 11). Enfin, lorsque le travail est organisé selon un certain rythme, l’ employeur doit tenir compte du principe général de l’ adaptation du travail à l’ homme, notamment en vue d’ atténuer le travail monotone et le travail cadencé en fonction du type d’ activité et des exigences en matière de sécurité et de santé (article 13).

8 La section IV de la directive comporte des dispositions diverses. L’ article 14 établit que la directive ne s’ applique pas s’ il existe des dispositions communautaires plus spécifiques en la matière concernant certaines occupations ou activités professionnelles. L’ article 15 énonce que les États peuvent prévoir ou permettre l’ application de dispositions plus favorables que celles contenues dans la directive. L’ article 16 institue la faculté pour les États de prévoir des périodes de référence dans le cadre de l’ application des dispositions relatives au repos hebdomadaire, à la durée maximale hebdomadaire de travail et à la durée du travail de nuit. Enfin, l’ article 17 énumère les dérogations dont certaines dispositions peuvent faire l’ objet, tandis que l’ article 18 fixe différents délais de transposition de la directive en droit national.

9 A l’ appui de son recours, le gouvernement du Royaume-Uni invoque quatre moyens tirés, respectivement, de la base juridique erronée de la directive, de la violation du principe de proportionnalité, d’ un détournement de pouvoir et de la violation des formes substantielles.

Sur le moyen tiré de la base juridique erronée de la directive

10 Le gouvernement requérant fait valoir que la directive aurait dû être arrêtée sur la base de l’ article 100 du traité CE, voire de l’ article 235 de ce traité, qui exigent l’ unanimité au sein du Conseil.

Quant à la portée de l’ article 118 A

11 Le gouvernement du Royaume-Uni observe, en premier lieu, que l’ article 118 A du traité doit être regardé comme constituant une exception à l’ article 100, dont relèvent, conformément à l’ article 100 A, paragraphe 2, les dispositions « relatives aux droits et intérêts des travailleurs salariés », de sorte que l’ article 118 A devrait faire l’ objet d’ une interprétation stricte.

12 A cet égard, il convient de relever que, dans l’ avis 2/91, du 19 mars 1993 (Rec. p. I-1061, point 17), la Cour a rappelé que l’ article 118 A confère à la Communauté une compétence normative interne dans le domaine social. L’ existence d’ autres dispositions du traité n’ a pas pour conséquence de restreindre le champ d’ application de l’ article 118 A. Figurant dans le chapitre du traité consacré aux « dispositions sociales », cette disposition a trait aux seules mesures relatives à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. Elle constitue, dès lors, une réglementation plus spécifique que les articles 100 et 100 A. Cette interprétation est confirmée par le texte même de l’ article 100 A, paragraphe 1, selon lequel cette disposition est d’ application « sauf si le présent traité en dispose autrement ». Par conséquent, l’ argument du gouvernement requérant ne saurait être retenu.

13 En deuxième lieu, le gouvernement du Royaume-Uni, se référant au libellé même de l’ article 118 A, fait d’ abord valoir que cette disposition ne permet d’ arrêter que des directives dont l’ objet présente un lien objectif et authentique avec « la sécurité et la santé des travailleurs ». Tel ne serait pas le cas de mesures concernant, notamment, la durée de travail hebdomadaire, les congés payés annuels et les temps de repos, dont le lien avec la sécurité et la santé des travailleurs serait trop ténu. Cette interprétation serait confirmée par la notion de « milieu de travail » utilisée à l’ article 118 A, qui exigerait que les directives fondées sur cette disposition aient uniquement trait aux conditions et risques physiques sur le lieu de travail.

14 A cet égard, il convient de rappeller que l’ article 118 A, paragraphe 2, lu en combinaison avec le paragraphe 1 de cette disposition, confère au Conseil le pouvoir d’ arrêter par voie de directives des prescriptions minimales applicables progresssivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres, en vue de contribuer à « promouvoir l’ amélioration, notamment du milieu de travail, pour protéger la sécurité et la santé des travailleurs » par l’ harmonisation dans le progrès des conditions existant dans ce domaine.

15 Rien dans les termes de l’ article 118 A n’ indique que les notions de « milieu de travail », de « sécurité » et de « santé » au sens de cette disposition devraient, en l’ absence d’ autres précisions, être entendues dans un sens restrictif et non comme visant tous les facteurs, physiques ou autres, capables d’ affecter la santé et la sécurité du travailleur dans son environnement de travail, et notamment certains aspects de l’ aménagement du temps de travail. Au contraire, le membre de phrase « notamment du milieu de travail » plaide en faveur d’ une interprétation large de la compétence conférée au Conseil par l’ article 118 A en matière de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs. En outre, une telle interprétation des termes « sécurité » et « santé » peut notamment s’ appuyer sur le préambule de la Constitution de l’ Organisation mondiale de la santé, dont font partie tous les États membres, qui définit la santé comme un état complet de bien-être physique, mental et social, et non pas seulement comme un état consistant en une absence de maladie ou d’ infirmité.

16 Le gouvernement requérant fait ensuite valoir que, en vertu de l’ article 118 A, paragraphe 2, le Conseil ne peut arrêter que des « prescriptions minimales » applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans les États membres. Par conséquent, cette disposition n’ habiliterait le Conseil à arrêter des mesures d’ harmonisation qu’ à un niveau acceptable par tous les États membres et constituant un point de repère minimal.

17 Il convient de relever à cet égard que, en conférant au Conseil le pouvoir d’ arrêter des prescriptions minimales, l’ article 118 A ne préjuge pas l’ intensité de l’ action que cette institution peut considérer comme nécessaire pour l’ accomplissement de la mission que la disposition litigieuse lui assigne expressément, laquelle consiste à oeuvrer en faveur de l’ amélioration ° dans le progrès ° des conditions relatives à la sécurité et à la santé des travailleurs. L’ expression « prescriptions minimales » figurant à l’ article 118 A signifie seulement, comme le confirme d’ ailleurs le paragraphe 3 de la même disposition, qu’ elle autorise les États membres à adopter des normes plus rigoureuses que celles qui font l’ objet de l’ intervention communautaire (voir, notamment, avis 2/91, précité, point 18).

18 En troisième lieu, le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir que, au vu des directives fondées sur l’ article 118 A dans le passé, cette disposition n’ autorise pas le Conseil à adopter des directives qui, comme celle faisant l’ objet du présent recours, abordent de manière générale, abstraite et non scientifique la question de la santé et de la sécurité. Tel serait d’ abord le cas de la directive 89/391, qui prévoirait une procédure d’ évaluation des risques destinée à mettre en lumière certains domaines dans lesquels l’ action est nécessaire à la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. Tel serait ensuite le cas des autres directives fondées sur l’ article 118 A, qui se rangeraient en deux catégories, à savoir les directives « particulières » au sens de l’ article 16 de la directive 89/391 (concernant, notamment, la signalisation de sécurité et de santé au travail ou la réglementation des risques liés à l’ exposition à des agents cancérigènes), et les directives qui, sans être fondées sur la directive 89/391, seraient à l’ évidence axées sur un problème concret de santé ou de sécurité dans une situation concrète.

19 Il y a lieu de rappeler à cet égard que, selon une jurisprudence constante, une simple pratique du Conseil n’ est pas susceptible de déroger à des règles du traité et ne peut dès lors créer un précédent liant les institutions de la Communauté quant à la base juridique correcte (voir, notamment, arrêts du 23 février 1988, Royaume-Uni/Conseil, 68/86, Rec. p. 855, point 24, et du 26 mars 1996, Parlement/Conseil, C-271/94, Rec. p. I-1689, point 24). En outre, des mesures de portée générale ont été adoptées sur le fondement de l’ article 118 A du traité, comme en témoigne notamment la directive 89/654/CEE du Conseil, du 30 novembre 1989, concernant les prescriptions minimales de sécurité et de santé pour les lieux de travail (première directive particulière au sens de l’ article 16, paragraphe 1, de la directive 89/391/CEE) (JO L 393, p. 1).

20 Par ailleurs, la thèse selon laquelle l’ intervention communautaire devrait se limiter aux seules mesures particulières applicables à des groupes de travailleurs déterminés se trouvant dans des situations spécifiques, alors que des mesures répondant à des objectifs plus vastes devraient être adoptées sur la base de l’ article 100 du traité, ne trouve aucun appui dans le texte de l’ article 118 A. Cette disposition vise en effet les « travailleurs » de manière générale et précise que l’ objectif qu’ il poursuit doit être atteint par l’ harmonisation des « conditions » en général existant dans le domaine de la sécurité et de la santé de ces travailleurs.

21 A cela s’ ajoute que la délimitation des champs d’ application respectifs des articles 100 et 100 A, d’ une part, et de l’ article 118 A, d’ autre part, ne repose pas sur une distinction entre la possibilité d’ adopter des mesures générales pour les premiers et des mesures particulières pour le second, mais sur l’ objet principal de la mesure envisagée.

22 Ainsi, dès lors que la mesure en cause a pour objet principal la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, le recours à l’ article 118 A s’ impose, nonobstant les incidences accessoires qu’ une telle mesure peut avoir sur l’ établissement et le fonctionnement du marché intérieur (voir, notamment, arrêt Parlement/Conseil, précité, point 32).

23 Enfin, il convient de rappeler qu’ il n’ appartient pas à la Cour de contrôler l’ opportunité des mesures adoptées par le législateur. Le contrôle exercé au titre de l’ article 173 doit se limiter à la légalité de l’ acte attaqué.

24 C’ est à la lumière de ces considérations qu’ il convient d’ examiner si la directive a été valablement adoptée sur le fondement de l’ article 118 A du traité.

Sur le choix de la base juridique de la directive

25 Dans le cadre du système de compétences de la Communauté, le choix de la base juridique d’ un acte doit se fonder sur des éléments objectifs susceptibles de contrôle juridictionnel (voir, notamment, arrêt du 26 mars 1987, Commission/Conseil, 45/86, Rec. p. 1493, point 11). Parmi de tels éléments figurent, notamment, le but et le contenu de l’ acte (voir, notamment, arrêt du 11 juin 1991, Commission/Conseil, C-300/89, Rec. p. I-2867, point 10).

26 En ce qui concerne le but poursuivi par la directive, le gouvernement requérant fait valoir que la réglementation litigieuse constitue l’ approfondissement d’ une réflexion antérieure de la Communauté et d’ une série d’ initiatives prises auparavant au niveau de l’ instance communautaire s’ occupant de l’ aménagement du temps de travail dans le but de créer des emplois et de réduire le chômage. Elle serait en réalité une mesure concernant l’ amélioration générale des conditions de vie et de travail des salariés et leur protection générale, dont la portée et le champ d’ application seraient tellement larges qu’ elle pourrait être qualifiée de mesure de politique sociale pour l’ adoption de laquelle il existerait d’ autres bases juridiques.

27 A cet égard, il y a lieu de relever que, selon son sixième considérant, la directive constitue un élément concret dans le cadre de la réalisation de la dimension sociale du marché intérieur. Cependant, il ne résulte pas de la circonstance que la directive s’ inscrit ainsi dans le contexte de la politique sociale communautaire qu’ elle ne saurait être valablement fondée sur l’ article 118 A, dès lors qu’ elle contribue à promouvoir l’ amélioration de la santé et de la sécurité des travailleurs. Il en est d’ autant plus ainsi que l’ article 118 A fait précisément partie du chapitre I, intitulé « Dispositions sociales », du titre VIII du traité, relatif notamment à la « politique sociale », ce qui a d’ ailleurs conduit la Cour à considérer que cette disposition avait conféré à la Communauté une compétence normative interne dans le domaine social (avis 2/91, précité, point 17).

28 Par ailleurs, ainsi que M. l’ avocat général l’ a démontré aux points 85 à 90 de ses conclusions, l’ aménagement du temps de travail n’ est pas nécessairement conçu comme un instrument de la politique de l’ emploi. En l’ occurrence, il ressort du cinquième considérant de la directive que l’ amélioration de la sécurité, de l’ hygiène et de la santé des travailleurs représente un objectif qui ne saurait être subordonné à des « considérations de caractère purement économique ». En revanche, la conception de l’ aménagement du temps de travail comme un instrument de lutte contre le chômage supposerait la prise en compte de nombreux facteurs économiques, tels que, par exemple, son incidence sur les capacités de production des entreprises et sur les salaires des travailleurs.

29 L’ approche de la directive, qui consiste à envisager l’ aménagement du temps de travail essentiellement dans la perspective où il peut avoir une incidence favorable sur la sécurité et la santé des travailleurs, ressort de différents considérants de la directive. Ainsi, notamment, selon le huitième considérant, en vue d’ assurer la sécurité et la santé des travailleurs de la Communauté, ces derniers doivent bénéficier de périodes minimales de repos et de périodes de pause adéquates et il convient de prévoir dans ce contexte également un plafond pour la durée de la semaine de travail. Par ailleurs, le onzième considérant relève que des « études ont démontré que … de longues périodes de travail de nuit sont préjudiciables à la santé des travailleurs et peuvent compromettre leur sécurité au travail » et le quinzième considérant souligne que les modalités de travail peuvent avoir des effets préjudiciables à la sécurité et à la santé des travailleurs et que l’ organisation du travail selon un certain rythme doit tenir compte du principe général de l’ adaptation du travail à l’ homme.

30 Si, au regard de ces considérations, il ne peut être exclu que la directive puisse avoir des incidences sur l’ emploi, celui-ci ne constitue manifestement pas son objectif essentiel.

31 Quant au contenu de la directive, le gouvernement requérant fait valoir que le lien entre les mesures prévues par la directive, d’ une part, et la sécurité et la santé, d’ autre part, est trop ténu pour qu’ elle puisse être fondée sur l’ article 118 A du traité.

32 A cet égard, il observe qu’ il n’ existe pas de données scientifiques satisfaisantes de nature à justifier les obligations générales de prévoir des temps de pause lorsque le temps de travail journalier est supérieur à six heures (article 4), d’ instaurer une période minimale de repos hebdomadaire sans interruption de vingt-quatre heures auxquelles s’ ajoutent les onze heures de repos journalier habituelles (articles 5, premier alinéa), d’ inclure en principe le dimanche dans cette période minimale de repos (article 5, deuxième alinéa), de limiter à quarante-huit heures la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours, y compris les heures supplémentaires (article 6, paragraphe 2) et d’ octroyer à tout travailleur un congé annuel payé d’ au moins quatre semaines (article 7).

33 Le gouvernement requérant relève dans ce contexte que la directive 89/391 prévoit que les employeurs procèdent à des évaluations afin d’ identifier les risques concrets pour la santé et la sécurité des travailleurs, compte tenu de la nature des activités de l’ entreprise. Or, la procédure d’ évaluation des risques prévue par la directive 89/391 ne serait pas effectivement applicable aux restrictions portant sur le temps de travail contenues dans la section II de la directive (et de manière très limitée dans la section III), les dispositions en cause étant tout simplement obligatoires et ne laissant aucune place à une telle évaluation en vue de déterminer si elles doivent s’ appliquer.

34 Par ailleurs, contrairement aux autres dispositions fondées sur l’ article 118 A du traité, les mesures litigieuses n’ auraient pas été soumises pour avis au comité consultatif pour la sécurité, l’ hygiène et la protection de la santé au travail (voir, sur le rôle des comités de ce type, arrêt du 25 janvier 1994, Angelopharm, C-212/91, Rec. p. I-171, points 31 et 32). Si la consultation de ce comité n’ est pas expressément prévue dans des cas comme celui de l’ espèce, le fait que le Conseil n’ ait pas invité la Commission à y procéder susciterait encore davantage de doutes sur le lien de la directive avec la santé et la sécurité des travailleurs.

35 Enfin, contrairement aux exigences de l’ article 118 A, paragraphe 2, les dispositions de la directive ne constitueraient pas des « prescriptions minimales », « applicables progressivement compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres » et ne tiendraient pas compte de leurs incidences sur « la création et le développement de petites et moyennes entreprises ».

36 Pour répondre à cette argumentation, il convient d’ établir une distinction entre l’ article 5, deuxième alinéa, de la directive et ses autres dispositions.

37 S’ agissant de l’ article 5, deuxième alinéa, de la directive, il convient de relever que, si la question de l’ inclusion éventuelle du dimanche dans la période de repos hebdomadaire est certes laissée, en définitive, à l’ appréciation des États membres, compte tenu, notamment, de la diversité des facteurs culturels, ethniques et religieux dans les différents États membres (article 5, deuxième alinéa, lu en combinaison avec le dixième considérant), il n’ en demeure pas moins que le Conseil est resté en défaut d’ expliquer en quoi le dimanche, comme jour de repos hebdomadaire, présenterait un lien plus important avec la santé et la sécurité des travailleurs qu’ un autre jour de la semaine. Dans ces conditions, il convient de faire droit à la demande subsidiaire du gouvernement requérant et d’ annuler l’ article 5, deuxième alinéa, de la directive, qui est détachable des autres dispositions de la directive.

38 Quant aux autres mesures prévues par la directive, qui ont trait aux périodes minimales de repos, à la durée de travail, au travail de nuit, au travail posté et au rythme de travail, elles visent le « milieu de travail » et répondent à un souci de protection « de la santé et de la sécurité des travailleurs », notions dont la portée a été précisée au point 15 du présent arrêt. Ainsi que le gouvernement belge l’ a d’ ailleurs relevé, l’ évolution de la législation sociale tant au niveau national qu’ international confirme le lien qui existe entre les mesures relatives au temps de travail, d’ une part, et la santé et la sécurité des travailleurs, d’ autre part.

39 Du reste, l’ action législative de la Communauté, notamment en matière de politique sociale, ne saurait être limitée aux seules hypothèses comportant des justifications scientifiquement démontrées (voir, à cet égard, points 165 à 167 des conclusions de M. l’ avocat général).

40 De même, la thèse du gouvernement du Royaume-Uni, selon laquelle la directive exclut toute évaluation des risques pour certains travailleurs ou ceux d’ un secteur particulier, ne peut être considérée comme fondée. En effet, tant l’ article 1er de la directive, qui exclut de son champ d’ application certains secteurs ou activités, que l’ article 14, qui en exclut les occupations et activités professionnelles pour lesquelles il existe des dispositions communautaires plus spécifiques en la matière, ou encore l’ article 17, paragraphes 1 et 2, qui permet de déroger aux articles 3, 4, 5, 6 et 8 pour certains groupes de travailleurs ou certains secteurs d’ activités, témoignent de la prise en compte par le législateur communautaire de certaines situations particulières (voir, à cet égard, points 114 à 117 des conclusions de M. l’ avocat général).

41 Certes, le Conseil n’ a pas soumis les mesures envisagées par la directive pour avis au comité consultatif pour la sécurité, l’ hygiène et la protection de la santé au travail, institué par la décision 74/325/CEE du Conseil, du 27 juin 1974 (JO L 185, p. 15). Toutefois, en vertu de l’ article 2, paragraphe 1, de cette décision, une telle consultation a pour seul objet « d’ assister la Commission dans la préparation et la mise en oeuvre des activités dans les domaines de la sécurité, de l’ hygiène et de la protection de la santé sur le lieu du travail » et, partant, ne constitue pas un préalable à l’ action du Conseil. Dans ces conditions, il ne saurait être tiré argument du défaut de consultation de ce comité pour mettre en doute le lien existant entre les mesures prévues par la directive et la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

42 Il y a lieu d’ ajouter que les dispositions de la directive constituent des « prescriptions minimales » au sens de l’ article 118 A du traité. En effet, tout en garantissant un certain niveau de protection en faveur des travailleurs, la directive autorise, en son article 15, les États membres à appliquer ou à favoriser l’ application de mesures plus favorables à la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs et à garantir ainsi aux travailleurs, conformément à l’ article 118 A, paragraphe 3, un niveau de protection renforcé. Dans le même sens, l’ article 18, paragraphe 3, de la directive précise que, si les États peuvent, dans le respect des prescriptions minimales qu’ elle fixe, prévoir des mesures différentes dans le domaine du temps de travail, la mise en oeuvre de la directive n’ est pas une justification valable pour la régression du niveau général de protection des travailleurs.

43 Les mesures prévues par la directive sont également, conformément à l’ article 118 A, « applicables progressivement compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chacun des États membres ». Il est d’ abord constant que la réglementation de tous les États membres comporte des mesures relatives à l’ aménagement du temps de travail. Ensuite, l’ article 18 de la directive autorise notamment, sous certaines conditions, les États à ne pas appliquer après l’ expiration du délai de transposition de la directive, le 23 novembre 1996, les dispositions de l’ article 6 sur la durée hebdomadaire de travail ni, pendant une période transitoire de trois ans, celles de l’ article 7 relatives au congé annuel payé qui, au cours de cette période, peut être limité à trois semaines.

44 Enfin, la directive a pris en considération les incidences que l’ aménagement du temps du travail qu’ elle établit peut avoir sur les petites et moyennes entreprises. Ainsi, le deuxième considérant de la directive rappelle l’ impératif de ne pas entraver le développement des petites et moyennes entreprises. Par ailleurs, comme la Cour l’ a jugé dans l’ arrêt du 30 novembre 1993, Kirsammer-Hack (C-189/91, Rec. p. I-6185, point 34), en prévoyant que les directives adoptées en matière de santé et de sécurité des travailleurs évitent d’ imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu’ elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises, l’ article 118 A, paragraphe 2, deuxième alinéa, indique que ces entreprises peuvent faire l’ objet de mesures économiques particulières. En revanche, cette disposition ne s’ oppose pas, contrairement à la thèse défendue par le gouvernement requérant, à ce qu’ elles fassent l’ objet de mesures contraignantes.

45 Dès lors que les éléments qui précèdent font apparaître que, selon son but et son contenu, la directive a pour objet principal de protéger la sécurité et la santé des travailleurs au moyen de prescriptions minimales applicables progressivement, ni l’ article 100 ni l’ article 100 A ne pouvaient constituer la base juridique adéquate de la directive.

46 Pour le surplus, le gouvernement du Royaume-Uni soutient que le législateur communautaire n’ a procédé ni à un examen complet ni à une démonstration satisfaisante quant au point de savoir si cette matière présentait des aspects transnationaux qui ne pouvaient être réglementés de manière adéquate par des mesures nationales, si de telles mesures auraient été incompatibles avec les exigences du traité CE ou si elles auraient lésé sensiblement les intérêts des États membres et, enfin, si une action entreprise au niveau communautaire comportait des avantages évidents par rapport à une action entreprise au niveau des États membres. Or, l’ article 118 A devrait être interprété à la lumière du principe de subsidiarité, lequel ne permettrait pas l’ adoption d’ une directive formulée de manière aussi générale et impérative que la directive litigieuse, étant donné que l’ étendue et la nature de la réglementation du temps de travail varieraient très sensiblement d’ un État membre à l’ autre. Le gouvernement du Royaume-Uni précise toutefois dans ce contexte qu’ il n’ invoque pas la violation du principe de subsidiarité à titre de moyen autonome.

47 A cet égard, il y a lieu de constater que l’ article 118 A charge le Conseil d’ adopter des prescriptions minimales en vue de contribuer, par la voie de l’ harmonisation, à la réalisation de l’ objectif d’ élévation du niveau de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs qui, en vertu du paragraphe 1 de cette même disposition, incombe en premier lieu aux États membres. Dès lors que le Conseil a constaté la nécessité d’ améliorer le niveau existant de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs et d’ harmoniser, dans le progrès, les conditions existant dans ce domaine, la réalisation d’ un tel objectif par voie de prescriptions minimales suppose nécessairement une action d’ envergure communautaire qui, du reste, laisse, comme en l’ occurrence, dans une large mesure aux États membres le soin de prendre les modalités d’ application nécessaires. Quant à l’ argument selon lequel le Conseil ne pouvait valablement adopter des mesures aussi générales et contraignantes que celles qui font l’ objet de la directive, il sera examiné ci-après dans le cadre du moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité.

48 S’ agissant enfin de l’ article 235 du traité, il suffit de rappeler la jurisprudence selon laquelle cette disposition ne peut servir de base juridique à un acte que si aucune autre disposition du traité ne confère aux institutions communautaires la compétence nécessaire pour arrêter cet acte (voir, notamment, arrêt Parlement/Conseil, précité, point 13).

49 Par conséquent, il y a lieu de considérer que la directive a été valablement adoptée sur le fondement de l’ article 118 A, sous réserve de son article 5, deuxième alinéa, qui doit, partant, être annulé.

Sur le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité

50 Le gouvernement du Royaume-Uni rappelle, à cet égard, que le Conseil ne peut arrêter sur le fondement de l’ article 118 A du traité que des « prescriptions minimales applicables progressivement, compte tenu des conditions et des réglementations techniques existant dans chaque État membre », et que ces prescriptions doivent éviter « d’ imposer des contraintes administratives, financières et juridiques telles qu’ elles contrarieraient la création et le développement de petites et moyennes entreprises ». Pour ce gouvernement, quatre grands principes doivent être pris en considération lors de l’ examen de la question de savoir si les exigences imposées par la directive concernant le temps de travail constituent ou non des prescriptions minimales au sens de l’ article 118 A.

51 En premier lieu, les mesures qui peuvent « améliorer » le niveau de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs ne constitueraient pas toutes des prescriptions minimales. Ainsi, notamment, celles qui consistent en réductions globales de la durée de travail ou en augmentations globales de périodes de repos, tout en ayant un certain effet bénéfique sur la santé ou la sécurité des travailleurs, ne constitueraient pas des « prescriptions minimales » au sens de l’ article 118 A.

52 En deuxième lieu, une disposition ne saurait être considérée comme une « prescription minimale » si le niveau de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs qu’ elle établit peut être atteint par des mesures moins restrictives et comportant moins d’ obstacles à la compétitivité de l’ industrie et à la capacité de gain des particuliers. Or, ni les propositions de la Commission ni la directive ne contiennent d’ explications quant à l’ impossibilité d’ atteindre le niveau de protection souhaité par des mesures moins restrictives comme, par exemple, le recours à des évaluations des risques si les horaires de travail dépassaient certaines normes.

53 En troisième lieu, la conclusion que les mesures envisagées sont de nature à améliorer le niveau de protection de la santé ou de la sécurité des travailleurs doit reposer sur des motifs raisonnables. Or, l’ état de la recherche scientifique dans le domaine en cause est loin de justifier les mesures litigieuses.

54 En quatrième lieu, le respect du principe de subsidiarité s’ impose pour qu’ une mesure puisse être considérée comme proportionnée. A cet égard, le gouvernement du Royaume-Uni fait valoir qu’ il appartient aux institutions communautaires de démontrer que les objectifs poursuivis par la directive seront plus facilement atteints au niveau communautaire que par une action au niveau des États membres. Or, cette démonstration ferait défaut en l’ espèce.

55 Il convient d’ écarter d’ emblée l’ argument tiré du non-respect du principe de subsidiarité, selon lequel le législateur communautaire n’ a pas établi que les objectifs de la directive seraient mieux servis au niveau communautaire qu’ à celui des États membres. Tel qu’ il est formulé, cet argument concerne en effet la nécessité de l’ action communautaire, question qui a déjà été examinée au point 47 du présent arrêt.

56 Il convient de relever ensuite que, comme il résulte du point 17 du présent arrêt, le gouvernement requérant se fonde sur une notion de « prescriptions minimales » qui n’ est pas celle de l’ article 118 A. Cette disposition ne limite pas l’ intervention communautaire au plus petit dénominateur commun, voire même au niveau de protection le plus bas établi par les différents États membres, mais elle signifie que les États sont libres d’ accorder une protection renforcée par rapport à celle, le cas échéant, élevée qui résulte du droit communautaire.

57 S’ agissant du principe de proportionnalité, il convient de rappeler la jurisprudence de la Cour, selon laquelle, afin d’ établir si une disposition de droit communautaire est conforme au principe de proportionnalité, il importe de vérifier si les moyens qu’ elle met en oeuvre sont aptes à réaliser l’ objectif visé et s’ ils ne vont pas au-delà de ce qui est nécessaire pour l’ atteindre (voir, notamment, arrêt du 9 novembre 1995, Allemagne/Conseil, C-426/93, Rec. p. I-3723, point 42).

58 En ce qui concerne le contrôle juridictionnel des conditions précitées, il y a lieu toutefois de reconnaître au Conseil un large pouvoir d’ appréciation s’ agissant d’ un domaine qui, comme en l’ espèce, implique, de la part du législateur, des choix de politique sociale et où il est appelé à effectuer des appréciations complexes. Par conséquent, le contrôle juridictionnel de l’ exercice d’ une telle compétence doit se limiter à examiner s’ il n’ est pas entaché d’ une erreur manifeste ou de détournement de pouvoir ou si l’ institution concernée n’ a pas manifestement dépassé les limites de son pouvoir d’ appréciation.

59 S’ agissant de la première condition, il suffit de constater que, comme il résulte des points 36 à 39 du présent arrêt, les mesures relatives à l’ aménagement du temps de travail faisant l’ objet de la directive, à l’ exception de celle qui est contenue à son article 5, deuxième alinéa, contribuent directement à l’ amélioration de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs au sens de l’ article 118 A et que, dès lors, elles ne sauraient être considérées comme inaptes à réaliser l’ objectif visé.

60 Quant à la deuxième condition, elle est également remplie. En effet, contrairement à ce que prétend le gouvernement requérant, le Conseil n’ a pas commis une erreur manifeste en estimant que les mesures litigieuses étaient nécessaires pour atteindre l’ objectif de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs.

61 En premier lieu, l’ article 4, qui a trait au temps de pause obligatoire, ne s’ applique que si le temps de travail journalier dépasse six heures. En outre, ses modalités, et notamment sa durée et ses conditions d’ octroi, sont fixées par des conventions collectives ou accords conclus entre partenaires sociaux ou, à défaut, par la législation nationale. Enfin, cette disposition peut faire l’ objet de plusieurs dérogations tenant soit à la qualité de la personne du travailleur (article 17, paragraphe 1), soit à la nature ou aux caractéristiques de l’ activité exercée (article 17, paragraphe 2, points 2.1 et 2.2), par voie de conventions collectives ou d’ accords conclus entre partenaires sociaux au niveau national ou régional (article 17, paragraphe 3).

62 En deuxième lieu, la période minimale de repos hebdomadaire de vingt-quatre heures sans interruption, prévue par l’ article 5, premier alinéa, et auxquelles s’ ajoutent les onze heures de repos journalier prévues à l’ article 3, peut faire l’ objet des mêmes dérogations que celles qui sont autorisées en ce qui concerne l’ article 4 précité. A ces dérogations s’ ajoutent celles relatives aux activités de travail posté et aux activités caractérisées par des périodes de travail fractionnées dans la journée (article 17, paragraphe 2, point 2.3). En outre, la période de référence de sept jours peut être étendue à quatorze jours (article 16, point 1).

63 S’ agissant, en troisième lieu, de l’ article 6, paragraphe 2, selon lequel la durée moyenne de travail pour chaque période de sept jours ne doit pas excéder quarante-huit heures, les États peuvent prévoir une période de référence qui ne dépasse pas quatre mois (article 16, point 2) et qui peut dans certains cas atteindre six mois pour l’ application de l’ article 17, paragraphe 2, points 2.1 et 2.2, et paragraphe 3 (article 17, paragraphe 4, premier alinéa) ou encore douze mois (article 17, paragraphe 4, deuxième alinéa). Enfin, l’ article 18, paragraphe 1, sous b), i), autorise même, sous certaines conditions, les États à ne pas faire application de l’ article 6.

64 S’ agissant, en quatrième lieu, de l’ article 7 relatif au congé annuel payé de quatre semaines par an, l’ article 18, paragraphe 1, sous b), ii), autorise les États à prévoir une période transitoire de trois ans au cours de laquelle les travailleurs doivent pouvoir bénéficier d’ un congé annuel payé de trois semaines.

65 Enfin, quant à l’ argument du gouvernement requérant, selon lequel l’ adoption de la directive n’ était pas nécessaire dans la mesure où la directive 89/391 s’ applique déjà aux domaines visés par la directive, il suffit de souligner que celle-ci, comme il ressort de son article 1er, se limite à établir, en vue de promouvoir l’ amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, des principes généraux, ainsi que les lignes générales de leur mise en oeuvre, concernant la prévention des risques professionnels et la protection de la sécurité et de la santé, l’ élimination des facteurs de risque et d’ accident, l’ information, la consultation, la participation et la formation des travailleurs et de leurs représentants. Elle n’ est donc pas apte à atteindre l’ objectif d’ harmonisation des périodes minimales de repos, des périodes de pause et d’ un plafond de la durée hebdomadaire de travail, qui font l’ objet de la directive.

66 Il résulte des considérations qui précèdent que, en estimant que l’ objectif d’ harmonisation, dans le progrès, des législations nationales en matière de sécurité et de santé des travailleurs ne pouvait pas être atteint par des mesures moins contraignantes que celles qui font l’ objet de la directive, le Conseil n’ a pas non plus commis une erreur manifeste.

67 Compte tenu de l’ ensemble de ces considérations, le moyen tiré de la violation du principe de proportionnalité doit également être rejeté.

Sur le moyen tiré d’ un détournement de pouvoir

68 Selon le gouvernement requérant, la directive édicte plusieurs mesures qui ne présentent aucun lien objectif avec ses buts déclarés et elle doit, pour ce motif, être annulée dans son ensemble. Ainsi, ces mesures relègueraient au second plan les aspects très limités ° périodes minimales de repos journalier, restrictions concernant la durée maximale du travail de nuit ° pour lesquels il existerait des données scientifiques révélatrices de l’ existence éventuelle d’ un certain lien causal avec la santé et la sécurité. Quant à ces deux derniers éléments, pour lesquels des mesures limitées et concrètes auraient pu être justifiées, ils n’ ont été abordés que d’ une manière imprécise, générale et, de ce fait, illégale.

69 Il convient de rappeler qu’ il est de jurisprudence (voir, notamment, arrêt du 13 juillet 1995, Parlement/Commission, C-156/93, Rec. p. I-2019, point 31) que constitue un détournement de pouvoir l’ adoption, par une institution communautaire, d’ un acte dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’ atteindre des fins autres que celles excipées ou d’ éluder une procédure spécialement prévue par le traité pour parer aux circonstances de l’ espèce.

70 Or, ainsi qu’ il résulte de l’ examen du moyen tiré de la base juridique incorrecte, le Conseil pouvait valablement fonder la directive sur l’ article 118 A du traité et le gouvernement requérant est resté en défaut d’ établir que la directive aurait été adoptée dans le but exclusif ou, tout au moins, déterminant d’ atteindre un objectif différent que celui de la protection de la santé et de la sécurité des travailleurs.

71 Dans ces conditions, le moyen tiré d’ un détournement de pouvoir doit être rejeté.

Sur le moyen tiré de la violation des formes substantielles

72 A titre principal, le gouvernement du Royaume-Uni allègue que la directive est insuffisamment motivée. Elle ne ferait pas apparaître d’ une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’ autorité communautaire qui a adopté l’ acte incriminé, dès lors qu’ elle n’ établirait pas l’ existence du lien de causalité, invoqué par le législateur communautaire, entre la santé et la sécurité des travailleurs et la plupart des mesures qu’ elle contient quant au temps de travail (articles 3, 4, 5, 6, paragraphe 2, 7 et 8). Par ailleurs, les considérants de la directive ne justifieraient pas non plus la nécessité de l’ action communautaire.

73 A titre subsidiaire, le gouvernement requérant fait valoir que la directive est motivée de façon défectueuse. En effet, le législateur aurait dû expliquer que de nombreux éléments de la directive concernent l’ amélioration des conditions de vie et de travail des salariés ou la dimension sociale du marché intérieur et non pas, comme il l’ a fait, la santé et la sécurité des travailleurs.

74 A cet égard, il convient de relever que, s’ il est vrai que la motivation exigée par l’ article 190 du traité CE doit faire apparaître d’ une façon claire et non équivoque le raisonnement de l’ autorité communautaire, auteur de l’ acte incriminé, de manière à permettre aux intéressés de connaître les justifications de la mesure prise et à la Cour d’ exercer son contrôle, il n’ est toutefois pas exigé qu’ elle spécifie tous les éléments de fait ou de droit pertinents (voir arrêt du 29 février 1996, Commission/Conseil, C-122/94, Rec. p. I-881, point 29).

75 Or, s’ agissant de la directive, il y a lieu de constater que les considérants font clairement apparaître que les mesures qu’ elle institue visent à l’ harmonisation de la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs.

76 Tel est d’ abord le cas des premier, troisième, quatrième et neuvième considérants, qui font référence respectivement à l’ article 118 A du traité, à la directive 89/391 concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l’ amélioration de la sécurité et de la santé des travailleurs au travail, à la charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs et aux principes de l’ Organisation internationale du travail en matière d’ aménagement du temps de travail.

77 Tel est ensuite le cas des cinquième, septième, huitième, onzième au quinzième considérants, qui établissent un lien direct entre les différentes mesures relatives à l’ aménagement du travail édictées par la directive et la protection de la sécurité et de la santé des travailleurs.

78 L’ argument selon lequel le Conseil aurait dû faire mention dans les considérants de la directive de références scientifiques concrètes justifiant l’ adoption des différentes mesures qui font l’ objet de la directive doit être rejeté.

79 En effet, il ressort du point 39 du présent arrêt que l’ article 118 A n’ exige pas que des preuves scientifiques soient produites pour chaque mesure adoptée sur le fondement de cette disposition. Par ailleurs, selon la jurisprudence de la Cour, il est inutile d’ exiger une motivation spécifique pour chacun des choix techniques que l’ acte contesté a opérés lorsque ce dernier fait ressortir l’ essentiel de l’ objectif poursuivi par l’ institution (voir arrêt du 29 février 1996, Commission/Conseil, précité, point 29).

80 De même, l’ argument selon lequel les considérants de la directive ne justifieraient pas la nécessité de l’ intervention communautaire ne peut être considéré comme fondé.

81 Ainsi qu’ il a été relevé aux points 75 à 77 du présent arrêt, il ressort des considérants de la directive que le Conseil a jugé nécessaire, afin de garantir un meilleur niveau de protection de la sécurité et de la santé des travailleurs, de procéder à l’ harmonisation des législations nationales relatives à l’ aménagement du temps de travail. Or, comme il ressort du point 47, la poursuite d’ un tel objectif, inscrit à l’ article 118 A lui-même, par voie de l’ harmonisation au moyen de prescriptions minimales, suppose nécessairement une action d’ envergure communautaire.

82 Enfin, quant aux arguments tirés de prétendues erreurs d’ appréciation contenues dans les considérants de la directive, il suffit de rappeler la jurisprudence selon laquelle de telles questions ne relèvent pas du moyen relatif à la violation des formes substantielles, mais du fond (voir, notamment, arrêt du 29 février 1996, France/Commission et Irlande/Commission, C-296/93 et C-307/93, Rec. p. I-795, point 76) et qu’ elles ont été examinées dans le cadre du moyen pris de la base juridique erronée.

83 Par conséquent, le moyen tiré de la violation des formes substantielles doit également être écarté.

84 Dès lors, le recours doit être rejeté sauf en ce qu’ il concerne l’ article 5, deuxième alinéa, de la directive, qui doit être annulé.

Décisions sur les dépenses


Sur les dépens

85 Aux termes de l’ article 69, paragraphe 2, du règlement de procédure, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens s’ il est conclu en ce sens. Le Conseil de l’ Union européenne ayant conclu en ce sens et le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’ Irlande du Nord ayant succombé en l’ essentiel de ses moyens, il y a lieu de le condamner aux dépens. En application du paragraphe 4, premier alinéa, les royaumes de Belgique et d’ Espagne, ainsi que la Commission des Communautés européennes, qui sont intervenus au litige, supporteront leurs propres dépens.

Dispositif


Par ces motifs,

LA COUR

déclare et arrête:

1) L’ article 5, deuxième alinéa, de la directive 93/104/CE du Conseil, du 23 novembre 1993, concernant certains aspects de l’ aménagement du temps de travail, est annulé.

2) Le recours est rejeté pour le surplus.

3) Le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’ Irlande du Nord est condamné aux dépens.

4) Les royaumes de Belgique et d’ Espagne ainsi que la Commission des Communautés européennes supporteront leurs propres dépens.

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
CJCE, n° C-84/94, Arrêt de la Cour, Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d'Irlande du Nord contre Conseil de l'Union européenne, 12 novembre 1996