Tribunal de grande instance de Paris, 8e chambre 3e section, 25 novembre 2009, n° 08/03307

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S

8e chambre 3e section

N° RG :

08/03307

N° MINUTE :

Assignation du :

11 Février 2008

(footnote: 1)

JUGEMENT

rendu le 25 Novembre 2009

DEMANDERESSE

Madame Z X

14, rue C D

[…]

représentée par Maître Joëlle DUCHET NESPOUX, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D1089

DÉFENDEUR

Syndicat des copropriétaires du 14 RUE C D […], représenté par son syndic la S.A.S. AGENCE ARAGO, […]

représenté par Maître C RYCHTER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0357

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Marie-Christine DENOIX DE SAINT MARC, Vice-Président

Daniel GUYOT, Vice-Président

A B, Juge

assistés de Stéphane BUSCQUA, Greffier

DEBATS

A l’audience du 14 Octobre 2009 tenue en audience publique

JUGEMENT

Prononcé en audience publique

Contradictoire

en premier ressort

Par acte d’huissier du 11 février 2008, Mme X, usufruitière du lot n°17 de l’immeuble du 14 rue C D, Paris 16e a fait assigner le syndicat des copropriétaires, aux fins d’obtenir avec le bénéfice de l’exécution provisoire et au visa des articles 9 et 1382 du Code Civil, l’annulation du constat d’huissier du 27 juillet 2007 ainsi que l’annulation de la sommation de faire du 19 novembre 2007 diligentés par ce dernier et elle sollicite la condamnation du défendeur à lui payer la somme de 10 000 euros de dommages-intérêts et la somme de 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure civile.

Par conclusions signifiées le 1er septembre 2009, Mme X maintient ses prétentions et demande que le Tribunal interdise la production du constat d’huissier du 27 juillet 2007 sous astreinte de 500 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision.

Par conclusions signifiées le 7 septembre 2009, le syndicat des copropriétaires conclut au débouté de Mme X et sollicite sa condamnation dans le délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision à :

— déposer la construction légère en bois accrochée sur la rambarde de la terrasse,

— débarrasser du sol tous les encombrants,

— déposer la dalle en ciment,

— exécuter le nettoyage du carrelage de sa terrasse et ses jointements afin d’en retirer tous les résidus.

A défaut d’exécution dans ces délais, il demande à être autorisé à y procéder aux frais exclusifs de Mme X, au besoin avec l’assistance de la force publique.

Il sollicite la condamnation de la demanderesse à lui payer la somme de 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure civile ainsi que le bénéfice de l’exécution provisoire.

Conformément aux termes des dispositions de l’article 455 du Code de Procédure civile, il sera expressément référé aux dernière conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions ;

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 9 septembre 2009.

MOTIFS :

Attendu que Mme X sollicite l’annulation du constat d’huissier au visa de l’article 9 du Code Civil au motif qu’il a été réalisé sur la terrasse dont elle a la jouissance privative sans qu’elle ait donné son accord et selon des moyens irréguliers ;

Attendu qu’il résulte de l’article 9 précité que chacun a droit au respect de sa vie privée, que les Juges peuvent, sans préjudice de la réparation du dommage subi , prescrire toutes mesures, telles que séquestre, saisie et autres propre à empêcher, ou faire cesser une atteinte à la vie privée; que ces mesures peuvent s’il y a urgence être ordonnées en référé ;

Attendu qu’en l’espèce le syndicat des copropriétaires qui soutient que Mme X ne saurait demander l’annulation de ce constat dans la mesure où elle a elle-même publié des photos de cette terrasse litigieuse dans des précédentes procédures ;

Attendu qu’il apparaît néanmoins que le syndicat des copropriétaires confond là les deux droits protégés par l’article 9 à savoir d’une part le droit à la vie privée qu’entend faire défendre Mme X , et le droit à l’image d’autre part ;

Attendu ensuite que contrairement à ce que fait valoir le défendeur, les circonstances dans lesquelles ont été réalisées le constat d’huissier ne peuvent être qualifiées d’habituelles et normales ; qu’en effet il ressort des photos versées aux débats que la terrasse dont Mme X a la jouissance exclusive n’offre pas de vue directe à partir du même immeuble et que la photo, dont il n’est pas contesté qu’elle a été prise à partir de la terrasse de la voisine de Mme X, a nécessité que l’huissier contourne le muret qui sépare les deux terrasses en passant son appareil photo soit par dessus soit sur le côté ;

Attendu que dans ces conditions, et alors qu’il appartenait au syndicat des copropriétaires d’obtenir sur requête auprès du président du Tribunal de céans la possibilité de pénétrer dans l’appartement et surtout sur la terrasse de Mme X pour y prendre des photos, il apparaît que cet acte constitue une atteinte à la vie privée de Mme X ;

Attendu par ailleurs que Mme X sollicite également la nullité de la sommation signifiée par le syndicat des copropriétaires et qui l’a enjointe à déposer l’habillage de bois posée sur la rambarde, ainsi que la dalle en ciment située sur le muret séparatif de la terrasse et les différents objets entreposés et à en nettoyer le dallage au motif qu’elle est inutile et parfaitement vexatoire ;

Attendu que la sommation expose que le règlement de copropriété prévoit que “ les occupants des appartements avec balcon auront droit à la jouissance des balcons correspondant à leur appartement ; qu’ils ne pourront y élever aucune construction même légère et ne devront y déposer aucun objet susceptible d’apporter de l’humidité ou de nuire à l’étanchéité desdits balcons” ;

Attendu qu’il résulte des photos versées aux débats que des croisillons en bois ont été accrochés sur toute la hauteur du balcon ; que si le règlement de copropriété interdit toute construction même légère sur ces balcons il apparaît que l’habillage de bois ainsi fixé ne peut être qualifié de construction, même légère ; que Mme X a pu par ailleurs à bon droit l’installer pour plus de sécurité afin d’éviter la chute d’enfant ou d’un animal de petite taille sans que cela ne contrevienne au règlement de copropriété ; qu’enfin cet habillage ne nuit pas à la destination de l’immeuble dès lors que toutes les photos prises à partir de la rue montrent que la terrasse de Mme X est en retrait et par conséquent invisible pour le passant;

que dans ces conditions le syndicat des copropriétaires est mal venu de sommer Mme X de déposer l’habillage en bois de sa terrasse ;

Attendu ensuite que le syndicat soutient que Mme X a fait poser une dalle de béton et qu’elle doit la faire ôter ;

Attendu qu’il résulte néanmoins des courriers des 6 et 20 mai 1994 adressés par l’administrateur de biens AQUAROC à Mme X que la “ petite toiture de la terrasse” dont il n’est nullement démontré que c’est Mme X qui l’a faite poser, a été endommagée à l’occasion de travaux réalisés par le syndicat et que ce dernier l’a réparée ;

que par conséquent le syndicat des copropriétaires n’est pas aujourd’hui fondé à sommer Mme Y de déposer cet élément ;

Attendu de plus que le syndicat des copropriétaires qui demande à Mme X d’enlever les différents objets n’est pas fondé à le faire dès lors qu’il ne démontre pas que ces objets, qui se limitent au demeurant à une chaise longue en plastic pliée, à un tuyau d’arrosage et à quelques pots de fleurs, sont susceptibles d’apporter de l’humidité ou de nuire à l’étanchéité ;

Attendu enfin que si le règlement de copropriété prévoit que les copropriétaires bénéficiant de la jouissance exclusive d’une terrasse doivent la maintenir propre, le syndicat des copropriétaires ne démontre pas qu’il existe des nuisances causées aux parties communes et provoquées par la saleté du dallage ou que la terrasse est dans un état de saleté qui nécessite de faire injonction à Mme X de la nettoyer ;

qu’il n’a donc aucune légitimité à contraindre Mme X à procéder au nettoyage de sa terrasse ;

Attendu qu’il apparaît dans ces conditions que le syndicat des copropriétaires était mal venu de délivrer cette sommation à Mme X et que celle-ci est purement vexatoire ;

Attendu néanmoins que l’atteinte à la vie privée ne se résoud pas par l’annulation du constat mais par l’octroi de dommages-intérêts que de même le caractère vexatoire de la sommation n’implique pas son annulation mais seulement le droit à réparation par des dommages-intérêts;

que le Tribunal dispose de suffisamment d’éléments pour évaluer les préjudices de Mme X à la somme de 2 000 euros ;

Attendu de plus qu’au vu de ce qui précède, Mme X est bien fondée à obtenir l’interdiction de produire le constat d’huissier ;

qu’il convient donc d’interdire au syndicat des copropriétaires de produire le constat d’huissier du 27 juillet 2007 sous astreinte de 50 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision ;

Attendu par ailleurs que le syndicat ne démontre pas davantage à l’occasion de la présente procédure le bien-fondé des demandes faites dans le cadre de la sommation critiquée ;

qu’il convient donc de rejeter sa demande reconventionnelle tendant à obtenir l’exécution des termes de la sommation sous astreinte ;

Attendu que le syndicat des copropriétaires qui succombe sera condamné à payer à Mme X la somme de 2000 euros au titre des frais non soumis à taxe qu’elle a du avancer à l’occasion de la présente instance ;

Attendu qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire eu égard à la nature de l’affaire;

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal statuant en audience publique, par décision contradictoire et en premier ressort :

Rejette la demande en annulation du constat d’huissier du 27 juillet 2007, et de la sommation du 19 novembre 2007 ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du14 rue C D, Paris 16e, à payer la somme de 2000 euros de dommages-intérêts à Mme X ;

Interdit au syndicat des copropriétaires du 14 rue C D, Paris 16e, de produire le constat d’huissier du 27 juillet 2007 sous astreinte de 50 euros par infraction constatée à compter de la signification de la présente décision ;

Rejette la demande reconventionnelle du syndicat des copropriétaires du 14 rue C D, Paris 16e, tendant à faire exécuter la sommation sous astreinte ;

Condamne le syndicat des copropriétaires du 14 rue C D, Paris 16e, à payer la somme de 2 000 euros à Mme X sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure civile ;

Dit n’y avoir lieu à ordonner l’exécution provisoire.

Condamne le syndicat de copropriétaires du 14 rue C D, Paris 16e, aux entiers dépens dit qu’il sera fait application des dispositions de l’article 699 du Code de Procédure civile au profit de Maître Joëlle DUCHET NESPOUX, avocat.

Fait et jugé à Paris le 25 Novembre 2009

Le Greffier Le Président

FOOTNOTES

1:

Expéditions

exécutoires

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Textes cités dans la décision

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