Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 30 décembre 2019, n° 18/01456

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Angers, ch. a - com., 30 déc. 2019, n° 18/01456
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 18/01456
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Le Mans, 29 mai 2018, N° 18/00002
Dispositif : Autre décision ne dessaisissant pas la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – COMMERCIALE

VVG/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 18/01456 – N° Portalis DBVP-V-B7C-EK73

Ordonnance du 30 Mai 2018

Tribunal de Grande Instance du MANS

n° d’inscription au RG de première instance 18/00002

ARRET DU 30 DECEMBRE 2019

APPELANT :

M. Y X

né le […] à […]

[…]

[…]

Représenté par Me Jennifer NEVEU de la SCP PELTIER & NEVEU, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 17.375

INTIMEE :

Société CAISSE D’ÉPARGNE ET DE PREVOYANCE BRETAGNE-PAYS DE LOIRE venant aux droits de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance des Pays de la Loire, prise en la personne de son représentant légal

[…]

[…]

Représentée par Me François GAUTIER, avocat au barreau du MANS – N° du dossier 2017186

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 05 Novembre 2019 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme F G, Conseillère faisant fonction de Présidente, qui a été préalablement entendue en son rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme F G, Conseillère faisant fonction de Présidente

Mme MICHELOD, Présidente de chambre

Mme BEUCHEE, Conseiller

Greffière lors des débats : Mme D

En présence d’Audrey THOMAS, stagiaire avocate, François RIVALLAIN, juriste assistant et Elza BELLUNE, greffière stagiaire

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 30 décembre 2019 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Véronique F G, Conseillère faisant fonction de Présidente, et par Florence D, Greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

FAITS ET PROCEDURE

Suivant offre préalable acceptée le12 septembre 2006, M. Y X a souscrit auprès de la Caisse d’épargne et de Prévoyance des Pays de Loire quatre prêts destinés au financement de l’acquisition de sa résidence principale et l’exécution de travaux afférents, dont :

— un prêt n°7040492 'P.H. Primo’ d’un montant de 37 000 €, au taux de 3,99 %, au taux effectif global (TEG) de 4,68 %, amortissable au terme d’une période de préfinancement de 24 mois, en 192 mensualités de 271,82 € assurance comprise ;

— un prêt n°7040493 'PH Primolis 5 Paliers’ d’un montant de 61 900 € au taux de 4,10%, au TEG de 4,57 %, amortissable au terme d’une période de préfinancement de 24 mois, en 144 mensualités de 230,50 €, 36 mensualités de 404,49 €, 12 mensualités de 245,56 €, 12 mensualités de 519,54 € et 85 mensualités de 705,94 €, assurance comprise.

Par avenant en date du 17 juillet 2014 le taux conventionnel du prêt n° 7040492 'P.H. Primo’ a été réduit à 2,6 %, pour un TEG recalculé de 4,373 %.

Par avenant en date du 23 juillet 2014 le taux conventionnel du prêt n° 7040493 'PH Primolis 5 Paliers’ a été réduit à 2,9 %, pour un TEG recalculé de 3,824 %.

Par lettre du 19 juillet 2017 adressée à la Caisse d’épargne et de Prévoyance des Pays de Loire, M. X a contesté le mode de calcul du TEG des prêts n° 7040492 et n° 7040493 comme étant effectué sur la base de 360 jours au lieu de 365 jours et a sollicité en conséquence l’abandon par la banque des intérêts à échoir ainsi que le remboursement de ceux acquittés.

En réponse, par courriel du 4 août 2017, la Caisse d’Epargne a informé M. X de son refus de donner une suite favorable à sa demande, en affirmant

que le calcul des intérêts conventionnels des prêts concernés est conforme à la réglementation du code de la consommation et ne lui préjudicie pas.

Par acte du 28 décembre 2017, M. X a fait assigner la Caisse d’épargne et de prévoyance

Bretagne Pays de la Loire (CEBPL), venant aux droits de la Caisse d’Epargne et de Prévoyance des Pays de le Loire, devant le juge des référés du tribunal de grande instance du Mans, aux fins de voir ordonner une expertise comptable du calcul du taux effectif global (TEG) des prêts n° 7040492 et n° 7040493 souscrits auprès de la CEPL visant à vérifier le nombre de jours sur lequel est calculé le TEG.

Par ordonnance de référé du 30 mai 2018, le président du tribunal de grande instance du Mans a :

— renvoyé les parties à se pourvoir ainsi qu’elles en aviseront, mais dès à présent ;

— débouté M. X de sa demande d’expertise ;

— condamné M. X aux dépens ;

— rejeté la demande de la CEBPL fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour statuer ainsi, le premier juge a retenu que la seule présence, dans les contrats de prêts et dans les avenants de clauses se référant pour le calcul des intérêts à une année bancaire de 360 jours, ne suffisait pas à justifier d’un intérêt légitime de M. X à voir établir la preuve par une mesure d’expertise, du calcul par la banque des TEG de chacun des prêts concernés sur la base de 360 jours, en vue d’une éventuelle action visant à obtenir la perte par la banque de son droit à percevoir des intérêts depuis l’origine.

Par dé’claration reçue au greffe le 6 juillet 2018, M. X a interjeté appel de l’ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal de grande instance du Mans le 30 mai 2018, intimant la CEPBL, en ce qu’elle l’a débouté de sa demande d’expertise et condamné aux dépens.

Les parties ont conclu.

Par avis de clôture et de fixation du 25 janvier 2019, l’affaire a été fixée à bref délai conformément aux articles 905 et suivants du code de procédure civile.

Une ordonnance du 29 avril 2019 a clôturé l’instruction de l’affaire.

MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe :

— le 2 aout 2018 pour l’appelant, M. X,

— le 1er octobre 2018 pour l’intimée, la CEBPL,

aux termes desquelles, les parties forment les demandes qui suivent :

M. X demande à la cour, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, de :

— infirmer l’ordonnance du juge des référés du Mans du 30 mai 2018 en toutes ses dispositions ;

— débouter la CEBPL de ses demandes ;

— ordonner une expertise comptable du calcul du TEG dans les prêts souscrits par M. X avec

la CEBPL sous les n° 7040492 et 7040493 en démontrant le nombre de jours sur lequel est calculé le TEG,

— condamner la CEBPL à verser à M. X la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner la CEBPL aux entiers dépens recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile dont distraction au profit de Me Neveu, membre de la SCP Peltier Neveu.

Pour solliciter une mesure d’expertise, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile et subséquemment l’infirmation de la décision entreprise, M. X rappelle que le TEG d’un prêt est erroné lorsqu’il est calculé sur la base de 360 jours et non de 365 jours, que la jurisprudence sanctionne le calcul du TEG sur une base de 360 jours par la perte de la totalité des intérêts et prétend qu’en l’espèce, il ressort des stipulations contractuelles des deux prêts concernés, que le TEG est calculé sur 360 jours.

Il relève que malgré la présence de ces clauses, la CEBPL affirme que les TEG mentionnés dans les contrats concernés ne sont pas erronés en ce qu’ils ont bien été calculés conformément aux dispositions légales et réglementaires applicables.

Il conclut que la mesure d’expertise permettra de vérifier sur quelles bases le TEG des deux prêts ont été calculés.

Il fait également observer que sa demande étant fondée non sur l’article 808 du code de procédure civile, mais sur l’article 145 du même code, l’existence d’une contestation sérieuse n’est pas de nature à empêcher le juge des référés d’ordonner la mesure d’expertise.

La CEBPL demande à la cour, au visa des articles 6, 9 et 146 du code de procédure civile, de l’article 1315 du code civil, des articles L. 312-1, L. 313-1, L. 313-2, R. 313-1 et l’annexe de l’article R. 313-1 du code de la consommation, de :

— dire et juger recevable mais mal fondé M. X en son appel à l’encontre de l’ordonnance de référé rendu le 30 mai 2018 par M. le président du tribunal de grande instance de le Mans ;

— le débouter en conséquence de toutes ses demandes, fins et conclusions,

— confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé rendue en date du 30 mai 2018 par M. le président du tribunal de grande instance de Le Mans,

— condamner M. X à payer à la CEBPL une somme de 1 500 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner en outre M. X aux entiers dépens d’appel.

La CEBPL rappelle, au visa de l’article 146 du code de procédure civile, que M. X ne peut solliciter d’expertise dans l’unique but de suppléer sa carence dans l’administration de la preuve.

Elle fait valoir que la seule référence à 'la clause 360" dans les contrats, ne saurait suffire à établir l’irrégularité du TEG.

Elle affirme avoir procédé au calcul des intérêts conformément à l’annexe de l’article R. 313-1 du code de la consommation et ce quand bien même il existe une clause dans l’offre de prêt faisant état de l’utilisation de l’année bancaire, ainsi que cela ressort des données chiffrées des tableaux d’amortissement.

Elle prétend en outre que la méthode dite '360" est équivalente à la méthode du mois normalisé prévue par le code de la consommation et relève que M. X ne produit aucun élément de nature à démontrer que le calcul des intérêts sur la base de 360 jours aurait un impact quelconque sur le TEG mentionné dans les contrats de prêts concerné, au point qu’il serait entaché d’une erreur qui affecterait la première décimale du TEG.

MOTIFS

A titre liminaire, il convient de relever que la CEBPL, en sollicitant la confirmation de l’ordonnance de référé, n’a pas repris devant la Cour son moyen subsidiaire tiré de l’incompétence du juge des référés pour ordonner la mesure d’expertise comme se heurtant à l’existence d’une contestation sérieuse.

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile qui fonde la demande d’expertise de M. X, « s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou référé. »

En l’espèce, au soutien de sa demande d’expertise portant sur le calcul du TEG des prêts n° 7040492 et n° 7040493 souscrits auprès de la CEBPL, M. X verse les avenants des 17 et 23 juillet 2014.

L’examen de ces pièces révèle que les deux avenants aux contrats de prêts contiennent une clause aux termes de laquelle 'durant la phase d’amortissement, les intérêts sont calculés sur le montant du capital restant dû, au taux d’intérêt indiqué ci dessus, sur la base d’une année bancaire de 360 jours, d’un semestre de 180 jours, d’un trimestre de 90 jours et d’un mois de 30 jours.'

Il sera relevé que l’offre initiale acceptée le 12 septembre 2006, produite par la CEBPL, ne contient pas ce type de clause.

Il n’est pas contesté que les deux prêts litigieux qui ont financé l’acquisition de la résidence principale de M. X et des travaux obéissent au régime du code de la consommation pour les prêts immobiliers consentis à un consommateur ou un non professionnel.

L’article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-351 du 25 mars 2016 applicable aux contrats litigieux, impose pour le calcul du TEG des prêts relevant des dispositions de l’article L 313-2 du code de la consommation, la référence à l’année civile, soit une base de calcul de 365 ou 366 jours.

Le TEG a pour composante les intérêts conventionnels dont le calcul doit également s’effectuer sur la base de l’année civile de 365 ou 366 jours.

Si la seule référence à l’année bancaire de 360 jours dans les deux avenants ne vaut pas à elle seule preuve d’une irrégularité du TEG sanctionnable, elle constitue néanmoins un élément de nature à laisser supposer que la banque a pu calculer les intérêts conventionnels dus par l’emprunteur sur la base d’une année bancaire et que cela a eu un impact sur le TEG mentionné dans ces avenants ou sur la majoration des intérêts dus par l’emprunteur.

Il convient de relever que la banque affirme que, nonobstant l’existence de ces clauses, elle a calculé les intérêts conventionnels conformément aux dispositions applicables en la matière.

Ainsi, compte tenu de l’existence des ' clauses 360 jours’ dans les deux avenants et des explications de la banque non concordantes avec les dispositions contractuelles concernant son calcul des intérêts conventionnels, il convient de considérer que M. X justifie d’un motif légitime à voir vérifier,

au moyen d’une expertise judiciaire, l’application de l’année bancaire de 360 jours pour le calcul des intérêts conventionnels dus par l’emprunteur et, le cas échéant, son impact sur la majoration des intérêts conventionnels par rapport au calcul sur une année civile, ainsi que son impact sur l’exactitude du TEG mentionné dans les avenants.

Ces 'clauses 360 jours’ ne figurant pas dans l’offre intiale acceptée le 12 septembre 2006 et M. X ne justifiant d’aucun autre élément de nature à laisser supposer que, depuis l’origine jusqu’à la signature des avenants, les intérêts conventionnels ou le TEG auraient pu être calculés sur 360 jours, la mission de l’expert sera cantonnée à l’examen du calcul du TEG dans les avenants aux contrats de prêts n° 7040492 et n° 7040493 signés les 17 et 23 juillet 2014.

L’ordonnance entreprise sera donc infirmée et l’expertise sera ordonnée, aux frais avancés de M. X qui a seul intérêt à sa réalisation, dans les conditions mentionnées dans le dispositif.

M. X conservera à sa charge les dépens de l’instance en référé engagée dans son seul intérêt et les dépens d’appel.

Il n’apparait pas inéquitable de laisser à chacune des parties la charge des frais irrépétibles engagées par elle.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

Infirme l’ordonnance de référé du 30 mai 2018 du président du tribunal de grande instance du Mans, en ce qu’elle a débouté M. Y X de sa demande d’expertise ;

Statuant à nouveau,

Ordonne une mesure d’expertise et commet à cet effet Mme A B […] en Vairais, laquelle aura pour mission :

Après avoir pris connaissance des documents de la cause en se faisant remettre toutes les pièces utiles à l’accomplissement de sa mission et notamment le contrat de prêt du 12 septembre 2006, les avenants des 17 juillet 2014 et 23 juillet 2014, les tableaux d’amortissement et, après avoir recueilli les explications des parties et s’être entourée de tous renseignements utiles :

— indiquer si les intérêts conventionnels des prêts n° 7040492 et n° 7040493 résultant des avenants signés les 17 et 23 juillet 2014 ont été calculés sur la base de l’année bancaire de 360 jours ; le cas échéant indiquer l’impact de ce calcul sur les intérêts conventionnels dus par l’emprunteur par rapport au calcul sur une année civile, ainsi que son impact sur le TEG mentionné dans lesdits avenants ;

— indiquer si le TEG mentioné dans les prêts n° 7040492 et n° 7040493 résultant des avenants signés les 17 et 23 juillet 2014 a été calculé sur la base de l’année bancaire de 360 jours et, le cas échéant calculer le TEG des prêts n° 7040492 et n° 7040493 résultant des avenants signés les 17 et 23 juillet 2014, selon les dispositions légales applicables ;

Dit que l’expert devra tenir la cour informée de l’exécution de sa mission et de toute difficulté qu’il pourrait rencontrer pour l’accomplir ;

Fixe à la somme de 2 000 €, la consignation à valoir sur la rémunération de l’expert ;

Dit que cette somme sera consignée par M. Y X, au plus tard le 31 janvier 2020, à titre d’avance à valoir sur la rémunération de l’expert ;

Rappelle que le défaut de consignation entraine la caducité de la décision ordonnant l’expertise ;

Dit que l’expert devra commencer ses opérations dès qu’il aura reçu avis de la consignation de la provision et qu’il devra déposer son rapport en un seul exemplaire au plus tard le 30 mai 2020 ;

Dit qu’en cas d’empêchement d’un expert, il sera pourvu à son remplacement par ordonnance de ce magistrat rendue sur simple requête ou même d’office ;

Déboute les parties de leurs demandes au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. Y X aux dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIERE LA PRESIDENTE

F. D V. F G

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