Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 28 mai 2020, n° 17/07209

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Douai, ch. 8 sect. 1, 28 mai 2020, n° 17/07209
Juridiction : Cour d'appel de Douai
Numéro(s) : 17/07209
Décision précédente : Tribunal d'instance de Saint-Omer, 9 novembre 2017, N° 16/00518
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

CHAMBRE 8 SECTION 1

ARRÊT DU 28/05/2020

N° de MINUTE : 20/434

N° RG 17/07209 – N° Portalis DBVT-V-B7B-RHIS

Jugement (N° 16/00518) rendu le 10 novembre 2017

par le tribunal d’instance de Saint Omer

APPELANTE

Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France prise en la personne de mme carine balle-derly, chef du service contentieux, spécialement habilitée à l’effet des présentes, par délégation de pouvoir en date du 02 janvier 2017

[…]

Représentée par Me Marie Hélène Laurent, avocat au barreau de Douai et Me Jean-Sébastien Delozière, avocat

INTIMÉS

Monsieur A X

né le […] à […]

[…]

Madame B X

née le […] à […]

[…]

Représentés par Me Olivier Desloover, avocat au barreau de Saint-Omer

DÉBATS à l’audience publique du 12 février 2020 tenue par Maria Bimba Amaral magistrat chargé d’instruire le dossier qui, après rapport oral de l’affaire, a entendu seul(e) les plaidoiries, les conseils des parties ne s’y étant pas opposés et qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré (article 786 du code de procédure civile).

Les parties ont été avisées à l’issue des débats que l’arrêt serait prononcé par sa mise à disposition au greffe

GREFFIER LORS DES DÉBATS : Betty Moradi

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

Sylvie Collière, président de chambre

Hélène Billieres, conseiller

Maria Bimba Amaral, conseiller

ARRÊT CONTRADICTOIRE prononcé publiquement par mise à disposition au greffe le 28 mai 2020 (date indiquée à l’issue des débats) et signé par Sylvie Collière, président et Betty Moradi, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE DU 16 janvier 2020

FAITS ET PROCÉDURE – PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Selon offre émise et acceptée le 9 mai 2009, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France (ci-après le Crédit Agricole) a consenti à M. A X et à Mme B X, tenus solidairement, un crédit renouvelable « Supplétis » n° 70060996763 d’un maximum de 15 200 euros au taux d’intérêt révisable de 9,5 %.

Selon offre émise et acceptée le 9 février 2010, le Crédit Agricole a consenti à M. A X un « prêt à consommer voiture » n°73032256618 d’un montant de 12 400 euros afin de financer l’acquisition d’un véhicule Tourisme Ford Fiesta 1400 TDCI 68 trend, remboursable en 72 mensualités de 205,19 euros sans assurance, au taux de 5,6 %.

Selon offre émise et acceptée le 18 novembre 2010, le Crédit Agricole a consenti à M. A X et à Mme B X, tenus solidairement, un prêt « à consommer confort» n°73044340013 de 18 000 euros remboursable en 120 mensualités de 199,41 euros sans assurance, au taux d’intérêt de 5,8 % .

Le 30 avril 2014, la commission de surendettement des particuliers du Pas de Calais a élaboré un plan conventionnel de redressement de la situation de surendettement des époux X, plan entrant en vigueur le 31 mai 2014 et prévoyant le règlement des créances du Crédit Agricole de la façon suivante :

— n°70060996763 : 15 755,59 euros retsant dû : 17 mois de moratoire à taux zéro puis 7 mensualités de 110 euros au taux de 0,04 %, de sorte qu’il restait dû

14 989,19 euros à l’issue du plan ;

— n°73032256618 : pour 6593 euros restant dû : 17 mois de moratoire au taux zéro puis 7 mensualités de 45 euros au taux de 0,04 %, de sorte qu’il restait dû la somme de 6 279,51 euros ;

— n°73044340013 travaux : pour 14 860,90 euros restant dû : 17 mois de moratoire à taux zéro et 7 mensualités de 105 euros au taux de 0,04 %, soit un solde de 14 129,29 euros.

La commission avait prévu qu’en cas de non respect du plan, celui-ci deviendrait de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure restée infructueuse d’avoir à exécuter les obligations, adressée aux débiteurs par lettre recommandée avec demande d’avis de réception.

Par deux courriers recommandés du 9 février 2016 avec avis de réception signés le 11 du même mois, le Crédit Agricole a mis en demeure les époux X de régulariser les échéances impayées notamment pour les montants suivants :

— plan BDF n°100000 50170 (réaménagement du prêt n°70060996763) : 356,43 euros ;

— plan BDF N°10000 50184 (réaménagement du prêt n°73032256618) : 145,80 euros ;

— plan BDF n°100000 50176(réaménagement n°73044340013) : 340,23 euros

pour le 22 février 2016, à défaut de quoi les époux perdraient le bénéfice des aménagements consentis et il procéderait au recouvrement de l’intégralité de la créance devenue exigible par voie judiciaire.

Par deux courriers recommandés du 6 juin 2016 avec avis de réception signés le 7 du même mois, le Crédit Agricole a prononcé la déchéance du terme des contrats de crédit et mis en demeure les époux X de payer les soldes du plan banque de France : 15 820,88 euros ( n° 50170), 14 889 euros (n° 50176) et 6 619,75 euros ( n° 50184).

Par acte d’huissier du 25 novembre 2016, le Crédit Agricole a assigné en paiement les époux X devant le tribunal d’instance de Saint Omer.

Par jugement contradictoire du 10 novembre 2017, cette juridiction a :

— débouté la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de l’intégralité de ses demandes formulées à l’encontre des époux Y au titre des offres de prêt n°70060996763, n° 73032256618 et n° 73044340013 ;

— débouté les époux X de leur demande indemnitaire formulée à l’encontre de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de Frane ;

— rejeté toutes autres demandes ou surplus de demandes ;

— dit n’y avoir lieu à condamnation au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et que chaque partie assumera la charge de ses propres frais irrépétibles ;

— condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France, d’une part, et les époux X et Madame B X, d’autre part, à assumer chacun la moitié des dépens de l’instance.

Le 15 décembre 2017, le Crédit Agricole a interjeté appel de cette décision en ce qu’elle :

— l’a débouté de l’intégralité de ses demandes formulées à l’encontre des époux X ;

— a rejeté toutes autres demandes ou surplus de celles-ci ;

— a dit n’y avoir lieu à condamnation au titre de l’article 700 ;

— l’a condamné à assumer la moitié des dépens de l’instance.

Selon ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 septembre 2018, il demande à la cour d’infirmer le jugement déféré dans les termes de sa déclaration d’appel et, sur le fondement des articles 1103 et suivants, 1343-2 du code civil, 695 et suivants du code de procédure civile, de constater l’absence de forclusion et de condamner :

— solidairement les époux X à lui verser les sommes de :

. 17 020,09 euros avec intérêts au taux de 3,60 % à compter du 29 juillet 2016 au titre du crédit

renouvelable ;

. 16 017,60 euros avec intérêts au taux de 8 % à compter du 29 juillet 2016 au titre du « prêt à consommer confort »;

— les époux X à lui payer :

. 7 122,11 euros avec intérêts au taux de 8 % à compter du 29 juillet 2016 au titre du « prêt à consommer automobile » ;

. 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

outre les dépens de première instance et d’appel.

Il est demandé en outre la capitalisation annuelle des intérêts, par année entière et successive, commençant à courir à compter de la «présente demande».

Il souligne que si le premier juge a demandé la production, en cours de délibéré, des historiques de compte des contrats de prêt depuis l’origine des crédits, il avait d’ores et déjà versé aux débats les relevés du compte courant ouvert en ses livres au nom des débiteurs pour la période du 27 avril 2009 au 23 septembre 2017, compte sur lequel les échéances des contrats de prêt étaient prélevées ; les tableaux d’amortissement étaient également communiqués, ce qui permettait de vérifier que les échéances avaient été prélevées ; les débiteurs n’ont pas contesté leur créance lors de la procédure de surendettement.

Il rappelle que la mise en place d’un plan de surendettement suspend le délai de forclusion ; en l’espèce, le plan entrant en application le 31 mai 2014, arrivait à échéance le 31 octobre 2016 ; le délai de forclusion court donc depuis le 1er novembre 2016.

Il explique que :

— concernant le crédit renouvelable du 9 mai 2009 : la différence entre la somme empruntée en 2009 et la somme due en 2017 résulte des intérêts qui se sont accumulés faute de paiement ; la somme de 15 755,59 euros due est reprise dans le plan conventionnel de redressement définitif ; il justifie de l’information de reconduction annuelle, ce qui exclut toute déchéance du droit aux intérêts ;

— sur le prêt voiture du 9 février 2010 et le prêt à consommer confort du 18 novembre 2010 : les sommes réclamées le sont en application de l’article 13 des contrat de prêts ;

— les contrats établis les 9 mai 2009 et 18 novembre 2010 comportent une clause contractuelle au terme de laquelle les époux X reconnaissent rester en possession d’un exemplaire des conditions particulières et générales de l’offre dotées d’un bordereau détachable de rétractation.

Il souligne que les revenus déclarés lors de l’octroi des différents prêts ne correspondent nullement aux avis d’imposition produits aux débats ; au vu de leurs déclarations lors du premier crédit, le taux d’endettement des époux X était nul, de sorte qu’il n’a commis aucune faute en leur accordant un crédit ; lors de l’octroi du prêt du 9 février 2010, le taux d’endettement des époux X est de 13 %, ce qui est inférieur au taux traditionnellement admis de 35 % ; lors de l’octroi du prêt du 18 novembre 2010, le taux d’endettement des époux X déclaré est alors de 19 % ce qui est toujours inférieur au taux traditionnel ; il est tenu d’un devoir de non-immixtion et est en droit de se fier aux informations communiquées.

Selon leurs dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 12 juin 2018, les époux X demandent à la cour, sur le fondement des articles L.311-1 et suivants du code de la

consommation en leur rédaction antérieure à la loi n°2010-737 du 1er juillet 2010, et 1147 ancien du code civil, de :

— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté le Crédit agricole de l’intégralité de ses demandes ;

subsidiairement :

— prononcer la déchéance du droit aux intérêts pour l’ensemble des contrats ;

— avant-dire droit, ordonner la communication par le Crédit Agricole d’un décompte établi, contrat par contrat, et laissant apparaître le déblocage effectif des fonds, le versement de telle ou telle mensualité et la perception, par prélèvement, de toute somme à titre de frais, pénalités, intérêts ou accessoires ;

en toutes hypothèses :

— les recevoir en leur appel incident et infirmer le jugement déféré en ce qu’il les a déboutés de leur demande indemnitaire, constater la faute du Crédit Agricole dans l’octroi des crédits , le condamner au paiement d’une somme de 15 000 euros à titre de dommages et intérêts ; ordonner si besoin la compensation entre cette somme et toute somme mise à leur charge à concurrence de la plus faible.

— condamner le Crédit Agricole au paiement d’une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux frais et dépens.

Ils soutiennent que le premier juge a exactement retenu qu’il lui appartenait de vérifier si antérieurement à l’adoption du plan de surendettement la forclusion n’était pas déjà acquise et que, relevant que seuls les relevés de compte courant étant produits, sans pré-analyse, sans historique prêt par prêt et sans imputation de frais et pénalités, il ne pouvait apprécier d’une part les dates de déblocage de fonds et d’autre part le premier incident de paiement non régularisé avant plan ; le montant réclamé au titre du crédit renouvelable en 2017 est supérieur, en principal, au montant susceptible d’être

emprunté ; le Crédit Agricole ne communique que les tableaux d’amortissement d’origine, objectivement inexploitables en l’état, ou encore des tableaux récapitulatifs établis pour une période commençant à courir à compter du mois de juin 2014.

Ils font valoir que :

— concernant le contrat du 9 mai 2009, le Crédit Agricole doit justifier du respect de l’information de reconduction annuelle et du respect des dispositions de l’ancien article L.311-9-1 relatif à l’information mensuelle de l’emprunteur ainsi que de l’interrogation du FICP au jour de naissance de cette obligation nouvelle, s’agissant d’un contrat à reconduction annuelle ;

— pour les trois contrats, le Crédit Agricole doit justifier du respect de l’article L.311-10 ancien du code de la consommation qui prévoit que l’offre préalable doit notamment préciser les conditions d’une assurance ainsi que le coût total ventilé du crédit et rappeler « les dispositions des articles L.311-15 à L.311-17 et L.311-32 et, s’il y a lieu, des articles L.311-20 à L.311-31, L.313-13 » et reproduire celles de l’article L.311-37 du même code ;

— les contrats établis les 9 mai 2009 et 18 novembre 2010 ne comportent pas de bordereau de rétractation, au mépris des dispositions de l’article L.311-15 du code de la consommation.

Ils soutiennent que le Crédit Agricole a engagé sa responsabilité, en multipliant les offres de crédit,

malgré des capacités de remboursement insuffisantes ; sur une période d’une année et demi, 108 600 euros ont été prêtés entraînant des engagements mensuels de 1 239,57 euros ; leurs avis d’imposition laissent apparaître pour les années 2008 à 2010, des revenus d’une moyenne mensuelle de 2 035 à 2 274 euros, soit des facultés de remboursement de 35 % pour 712 à 796 euros mensuels ; même en retenant des revenus à hauteur de 2 960 euros selon le montant mentionné l’offre de prêt du 18 novembre 2010, le montant total des mensualités à acquitter s’élevait à 1 239,57 euros, entraînant un endettement de près de 42 %.

MOTIFS

Sur la forclusion

Selon l’article L. 311-37 du code de la consommation dans sa version applicable en l’espèce aux trois contrats de crédits souscrits avant l’entrée en vigueur le 1er mai 2011 de la loi dite Lagarde n°2010-737 du 1er juillet 2010, « Le tribunal d’instance connaît des litiges nés de l’application du présent chapitre. Les actions en paiement engagées devant lui à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur doivent être formée dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion.

Lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés ou après adoption du plan conventionnel de redressement prévu à l’article L. 331 -6 ou après décision du juge de l’exécution sur les mesures mentionnées à !'article L. 331 -7. »

La défaillance des emprunteurs est caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé.

L’article 1256 du code civil rappelle que : « Lorsque la quittance ne porte aucune imputation, le paiement doit être imputé sur la dette que le débiteur avait pour lors le plus d’intérêt d’acquitter entre celles qui sont pareillement échues ; sinon, sur la dette échue, quoique moins onéreuse que celles qui ne le sont point.

Si les dettes sont d’égale nature, l’imputation se fait sur la plus ancienne ; toutes choses égales, elle se fait proportionnellement

C’est à tort que le premier juge a exigé un historique individuel des versements pour chaque prêt ou/et une préanalyse par le prêteur des 275 pages de relevés de compte courant alors que les déblocages de fonds et les mensualités des trois prêts sont intervenus sur ledit compte et étaient identifiables par le numéro de chaque contrat.

Il ressort de ces relevés de compte courant que les premières mensualités impayées en ce qui concerne le crédit renouvelable Supplétis et le prêt à consommer Confort, datent du mois d’avril 2013, et la première mensualité impayée du prêt à consommer confort du mois de mai 2013, alors que le plan conventionnel est intervenu environ un an après, le 30 avril 2014.

Il ressort également de ces relevés que les mensualités dues en application du plan conventionnel, après le moratoire de 17 mois, n’ont pas été acquittées pour les trois prêts, de sorte que la première mensualité impayée date du mois de novembre 2015. Il ne s’était donc pas écoulé deux ans lors de la délivrance de l’assignation le 25 novembre 2016.

Le Crédit Agricole est ainsi recevable en son action, de sorte que le jugement déféré sera infirmé.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

En ce qui concerne le crédit renouvelable Supplétis du 9 mai 2009 et le prêt à consommer confort du 18 novembre 2010 :

Selon l’article L. 311-8 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable au litige, issue de la loi n° 93-949 du 27 juillet 1993, les opérations de crédit visées à l’article L. 311-2 sont conclues dans les termes d’une offre préalable, remise en double exemplaire à l’emprunteur et, éventuellement, en un exemplaire aux cautions.

Il résulte par ailleurs de la combinaison des articles L. 311-13, L. 311-15 et R. 311-6 du même code, les premiers dans leur rédaction applicable au litige, issue de la loi précitée du 27 juillet 1993 et, le dernier, dans sa rédaction applicable au litige, issue du décret n° 97-298 du 27 mars 1997, que l’offre préalable de prêt prévue à l’article L. 311-8 est établie selon celui des modèles types fixés par le comité de réglementation bancaire et annexés au code de la consommation qui correspond à l’opération de crédit proposée, lesquels imposent la jonction à l’offre d’un formulaire détachable de rétractation qui doit lui-même être, en application de l’article R. 311-7, établi conformément au modèle type joint en annexe audit article et ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.

Il résulte enfin de la combinaison des anciens articles L. 311-8, L. 311-13, L.311-15, R. 311-7 et L. 311-33 du code de la consommation, ce dernier également dans sa rédaction issue de la loi précitée du 27 juillet 1993, que le prêteur qui a accordé un crédit suivant une offre préalable ne comportant pas de formulaire détachable de rétractation conforme au modèle-type annexé à l’article R. 311-7 du code de la consommation, doit être déchu de son droit aux intérêts.

Ceci étant rappelé, il convient d’observer que le Crédit Agricole ne discute pas que les exemplaires des offres de crédit du 9 mai 2009 et du 18 novembre 2010 dont elle est détentrice sont dépourvus du formulaire détachable à l’aide duquel les emprunteurs sont mis à même d’exercer éventuellement leur droit de rétractation.

S’il objecte à bon droit qu’aucune disposition légale ou réglementaire n’impose que le bordereau de rétractation, dont l’usage est exclusivement réservé aux emprunteurs, figure aussi sur les exemplaires des offres destinées à être conservées par le prêteur, la formalité du double s’appliquant uniquement aux offres préalables elles-mêmes et non au formulaire détachable de rétractation qui y est joint, il n’en demeure pas moins qu’il lui appartient, en sa qualité de prêteur, de prouver la régularité des offres préalables de crédits au regard des dispositions d’ordre public précitées du code de la consommation et de prouver, partant, l’existence et le contenu du formulaire de rétractation joint à l’exemplaire des offres de crédit remises à M. A X et à Mme B X, emprunteurs.

Or, la cour observe que si le Crédit Agricole se prévaut à cet égard d’une clause type, figurant aux contrats de prêts, selon laquelle les emprunteurs reconnaissent « rester en possession d’un exemplaire des conditions générales et particulières de l’offre dotées d’un bordereau détachable de rétractation », elle ne verse toutefois pas ce document aux débats.

Il suit que la signature de la mention d’une telle clause ne saurait, en ces conditions, être considérée que comme un simple indice non susceptible, en l’absence d’élément complémentaire, de prouver l’exécution par le Crédit Agricole de son obligation de joindre aux exemplaires des offres de crédits remises aux emprunteurs un formulaire de rétractation régulier.

Le Crédit Agricole échouant ainsi à rapporter la preuve qui lui incombe qu’il a satisfait à l’obligation de joindre aux offres préalables remises aux emprunteurs le formulaire détachable prévu à l’article L. 311-15 précité du code de la consommation conforme au modèle-type annexé à l’article R. 311-7 du même code, à l’aide duquel les emprunteurs sont mis à même d’exercer éventuellement leur droit de rétractation, il sera déchu de son droit aux intérêts contractuels des prêts litigieux, sans qu’il y ait lieu

d’examiner les autres motifs de déchéance du droit aux intérêts invoqués par les intimés.

Selon l’article L. 311-33 du code de la consommation dans sa version applicable en l’espèce, en cas de déchéance du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu. Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, devant être restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Comme il a été vu ci-dessus pour la question de la forclusion, il est inutile d’ordonner avant dire droit la communication par le Crédit Agricole d’un décompte établi, contrat par contrat, et laissant apparaître « le déblocage effectif des fonds, le versement de telle ou telle mensualité et la perception, par prélèvement, de toute somme à titre de frais, pénalités, intérêts ou accessoires » , toutes ces informations figurant sur les relevés de compte courant.

En ce qui concerne le crédit renouvelable Supplétis, la créance principale détenue par le Crédit Agricole sur les époux X s’établit en conséquence à la somme de 11 303 euros représentant le montant du capital emprunté, dont il convient de déduire l’ensemble des versements opérés pour un montant total de 8 317,63 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement, le solde obtenu étant lui-même productif d’intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016, date de réception de la mise en demeure.

En ce qui concerne le « prêt à consommer confort », la créance principale détenue par le Crédit Agricole sur les époux X s’établit à la somme de 18 000 euros représentant le montant du capital emprunté, dont il convient de déduire l’ensemble des versements opérés pour un montant total de 5 982,30 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement, le solde obtenu étant lui-même productif d’intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016, date de réception de la mise en demeure.

Compte tenu de la déchéance du droit aux intérêts, les indemnités de 8 % ne sont pas dues.

Conformément aux dispositions de l’article 1154 devenu 1343-5 du code civil, il convient d’autoriser la capitalisation des intérêts légaux échus depuis plus d’un an à compter du 11 septembre 2018, date de la demande en justice.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, les époux X qui ne prouvent pas leur libération seront solidairement condamnés à payer ces sommes.

En ce qui concerne le « prêt à consommer voiture » du 9 février 2010 :

L’article L. 311-33 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à la loi du 1er juillet 2010, dispose que :

« Le prêteur qui accorde un crédit sans saisir l’emprunteur d’une offre préalable satisfaisant aux conditions fixées par les articles L.311-8 à L.311-13 est déchu du droit aux intérêts et l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu.

Les sommes perçues au titre des intérêts, qui sont productifs d’intérêts au taux légal à compter du jour de leur versement, seront restitués par le prêteur ou empruntés sur le capital restant dû".

Selon l’article L. 311-10 du même code issu de la loi 93-949 du 27 juillet 1993, l’offre préalable :

« 2° Précise le montant du crédit et éventuellement de ses fractions périodiquement disponibles, la nature, l’objet et les modalités du contrat, y compris, le cas échéant, les conditions d’une assurance ainsi que le coût total ventilé du crédit et, s’il y a lieu, son taux effectif global ainsi que le total des perceptions forfaitaires demandées en sus des intérêts en ventilant celles correspondant aux frais de dossiers et celles correspondant aux frais par échéance ;

3° Rappelle les dispositions des articles L. 311-15 à L. 311-17 et L. 311-32 et, s’il y a lieu, des articles L. 311-20 à L. 311-31, L. 313-13, et reproduit celles de l’article L. 311-37 (') ».

L’article L. 311-20 du code de la consommation dont il doit être fait rappel prévoit que " Lorsque l’offre préalable mentionne le bien ou la prestation de services financé, les obligations de l’emprunteur ne prennent effet qu’à compter de la livraison du bien ou de la fourniture de la prestation ; en cas de contrat de vente ou de prestation de services à exécution successive, elles prennent effet à compter du début de la livraison ou de la fourniture et cessent en cas d’interruption de celle-ci. Le vendeur ou le prestataire de services doit conserver une copie de l’offre préalable remise à l’emprunteur et la présenter sur leur demande aux agents chargés du contrôle. »

En l’espèce, le contrat « prêt à consommer automobile », s’il mentionne son objet à savoir le véhicule de tourisme Ford Fiesta 1400 TDCI 68 Trend date première immatriculation 01/02/2010, ne rappelle pas les dispositions de l’article L. 311-20 précité, de sorte que la déchéance du droit aux intérêts est encourue.

La créance principale détenue par le Crédit Agricole s’établit à la somme de 12 400 euros représentant le montant du capital emprunté, dont il convient de déduire l’ensemble des versements opérés pour un montant total de 7 830,85 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement, le solde obtenu étant lui-même productif d’intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016, date de réception de la mise en demeure.

Compte tenu de la déchéance du droit aux intérêts, l’indemnité de 8 % n’est pas due.

Conformément aux dispositions de l’article 1154 devenu 1343-5 du code civil, il convient d’autoriser la capitalisation des intérêts légaux échus depuis plus d’un an à compter du 11 septembre 2018.

Le contrat ayant été conclu par M. A C, même si le plan conventionnel de redressement concernait le couple, seul l’époux, qui ne prouve pas sa libération, sera condamné à payer cette somme.

Sur la demande de dommages et intérêts

L’article 1147 dans sa version applicable au jour de l’offre prévoit que « le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part

Les époux X n’établissent pas l’existence d’un dommage particulier qui ne serait pas déjà réparé par la sanction, déjà prononcée pour l’ensemble des prêts, de déchéance totale du prêteur de son droit aux intérêts contractuels, de sorte qu’ils seront déboutés de leur demande de dommages et intérêts.

Sur les demandes accessoires

Succombant, les époux Z seront condamnés aux dépens de première instance et à ceux d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Infirme le jugement déféré ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

Déclare recevable l’action en paiement de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France ;

Condamne solidairement M. A X et Mme B X à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France les sommes

de :

— au titre du crédit renouvelable Supplétis, la somme de 11 303 euros sous déduction des versements opérés pour un total de 8 317,63 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement ;

— au titre du « prêt à consommer confort », la somme de 18 000 euros sous déduction des versements opérés pour un total de 5 982,30 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement ;

Condamne M. A X à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France, au titre du « prêt à consommer automobile », la somme de 12 400 euros sous déduction des versements opérés pour un total de 7 830,85 euros majoré de l’intérêt ayant couru au taux légal sur les sommes versées au titre des intérêts à compter du jour de leur versement ;

Dit que les soldes ainsi obtenus seront productifs d’intérêts au taux légal à compter du 7 juin 2016 ;

Autorise la capitalisation des intérêts légaux échus depuis plus d’un an à compter du 11 septembre 2018 ;

Déboute M. A X et Mme B X de leur demande de dommages et intérêts ;

Déboute la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel Nord de France de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum M. A X et Mme B X aux dépens de première instance et d’appel.

Le greffier, Le président,

B. Moradi S. Collière

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Cour d'appel de Douai, Chambre 8 section 1, 28 mai 2020, n° 17/07209