Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 14 janvier 2021, n° 17/04466

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Grenoble, ch. soc. -sect. b, 14 janv. 2021, n° 17/04466
Juridiction : Cour d'appel de Grenoble
Numéro(s) : 17/04466
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Bourgoin-Jallieu, 6 septembre 2017, N° F17/00009
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

FB

N° RG 17/04466

N° Portalis DBVM-V-B7B-JG5T

N° Minute :

Copie exécutoire délivrée le :

la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC

la SCP THOIZET & ASSOCIES

la SCP FOLCO TOURRETTE NERI

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

Ch. Sociale -Section B

ARRÊT DU JEUDI 14 JANVIER 2021

Appel d’une décision (N° RG F 17/00009)

rendue par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOURGOIN JALLIEU

en date du 07 septembre 2017

suivant déclaration d’appel du 21 septembre 2017

APPELANTES :

SELARL AJ PARTENAIRE, représentée par Me Bruno SAPIN ès-qualités d’administrateur judiciaire à la procédure de sauvegarde ouverte à l’encontre de la SARL CAR SYSTEM REPARATIONS (CSR)

[…]

[…]

SELARL MJ ALPES, représentée par Me Jean BLANCHARD et Me Caroline JAL ès-qualités de mandataire judiciaire à la procédure de sauvegarde ouverte à l’encontre de la SARL CAR SYSTEM REPARATIONS (CSR)

[…]

[…]

SARL CAR SYSTEM REPARATIONS, prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

représentées par Me Dejan MIHAJLOVIC de la SELARL DAUPHIN ET MIHAJLOVIC, avocat postulant au barreau de GRENOBLE,

et par Me Claire DUPONT GUERINOT de la SELARL CELEV CONSEIL AVOCATS ASSOCIES, avocat plaidant au barreau d’AIN substituée par Me Matthieu PROUSTEAU, avocat au barreau de LYON

UNEDIC délégation AGS C.G.E.A.D’ANNECY

[…]

[…]

[…]

représenté par Me Florence NERI de la SCP FOLCO TOURRETTE NERI, avocat au barreau de GRENOBLE

INTIME :

M. B X

né le […]

[…]

[…]

représenté par Me Jacques THOIZET de la SCP THOIZET & ASSOCIES, avocat au barreau de VIENNE substitué par Me Philippe DEVILLE, avocat au barreau de VIENNE

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Blandine FRESSARD, Présidente,

M. Frédéric BLANC, Conseiller,

M. Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller,

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 novembre 2020,

M. Antoine MOLINAR-MIN, Conseiller chargé du rapport, assisté de M. Fabien OEUVRAY, Greffier, a entendu les parties en leurs conclusions et plaidoiries, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.

Puis l’affaire a été mise en délibéré au 14 janvier 2021, délibéré au cours duquel il a été rendu compte des débats à la Cour.

L’arrêt a été rendu le 14 janvier 2021.

EXPOSE DU LITIGE :

Monsieur B X, bénéficiaire du dispositif de préparation opérationnelle à l’emploi mis en place par le Pôle Emploi, a effectué une formation auprès de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS.

Cette formation de 400 heures s’est déroulée du 25 avril 2016 au 15 juillet 2016.

En contrepartie de la formation dispensée par la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à Monsieur B X, Pôle Emploi s’est engagé à verser à la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS une aide d’un montant toutes taxes comprises de 2'000'€.

Au terme de la formation, le 20 juillet 2016, a été signé le bilan de préparation opérationnelle à l’emploi, et Monsieur B X a été engagé par contrat à durée déterminée de douze mois pour surcroît temporaire d’activité, par la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS en qualité de technicien de réparation rapide, débosselage sans peinture, esthétique automobile, catégorie ouvrier.

Sa rémunération était de 1466,62 € bruts pour 151,67 heures mensuelles.

Monsieur B X a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 07 octobre 2016.

Le 14 octobre 2016, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS a notifié la rupture anticipée de son contrat à durée déterminée pour faute grave.

Le 04 janvier 2017, Monsieur B X a saisi le conseil de prud’hommes de Bourgoin-Jallieu afin de contester la rupture de son contrat de travail à durée déterminée.

Par décision du 07 septembre 2017, le Conseil de prud’hommes de Bourgoin-Jallieu a :

— DIT que le licenciement de Monsieur B X était sans cause réelle et sérieuse ;

— CONDAMNÉ la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à verser à Monsieur B X les sommes suivantes :

—  1 759,94 € au titre de l’indemnité de précarité ;

—  13 441,01 € au titre des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

—  1000 € au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

—  1000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— DÉBOUTÉ les parties de leurs autres demandes, tant principales et subsidiaires, que reconventionnelles;

— DIT qu’il n’y avait pas lieu à exécution provisoire ;

— MIS les entiers dépens a la charge de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS.

La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS a interjeté appel de la décision le 21 septembre 2017.

Par acte en date du 18 novembre 2019, Monsieur B X a fait appeler en intervention forcée l’UNEDIC DÉLÉGATION DE l’AGS D’ANNECY aux fins de lui voir déclarer la décision à intervenir commune et opposable.

Par conclusions du 28 juillet 2020, la SELARL MJ ALPES est intervenue volontairement à l’instance en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS.

À l’issue des débats et de ses conclusions du 1er octobre 2019 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS demande à la cour de :

— DÉCLARER recevable son appel ;

— CONFIRMER le jugement du 7 septembre 2017 du conseil de prud’hommes de Bourgoin-Jallieu en ce qu’il a débouté Monsieur B X de sa demande de dommages et intérêts pour non respect de la procédure de licenciement ;

— INFIRMER le jugement du 7 septembre 2017 du conseil de prud’hommes de Bourgoin-Jallieu en ce que :

— il a dit le licenciement de Monsieur B X sans cause réelle et sérieuse,

— il l’a condamnée à lui verser les sommes de :

' 1 759,94 € au titre de l’indemnité de précarité ;

' 13 441,01 € au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (rupture du contrat à durée déterminée) ;

' 1 000 € au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

' 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— il a mis les dépens a sa charge.

Statuant à nouveau :

— DÉBOUTER Monsieur B X de son appel incident ;

Sur la demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail :

— CONSTATER qu’elle a bien formé Monsieur B X selon le plan de formation annexe à la convention préparation opérationnelle à l’emploi ;

— JUGER qu’elle n’a commis aucun manquement à ce titre ;

— DÉBOUTER Monsieur B X de sa demande au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

Sur les demandes indemnitaires liées à la rupture du contrat à durée déterminée de Monsieur B X :

— JUGER que la faute grave invoquée pour rompre de manière anticipée le contrat à durée déterminée de Monsieur B X est justifiée ;

En conséquence :

— DÉBOUTER Monsieur B X de l’ensemble des demandes qu’il formule à ce titre ;

Sur la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile :

— DÉBOUTER Monsieur B X de sa demande au titre de |'article 700 du code de procédure civile ;

À titre reconventionnel :

— CONDAMNER Monsieur B X à la somme de 3 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— CONDAMNER Monsieur B X aux dépens.

À l’issue des débats et de ses conclusions du 14 novembre 2019 auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, Monsieur B X demande à la cour de :

— CONFIRMER le jugement rendu en ce qu’il a reconnu l’absence de faute grave et l’exécution déloyale du contrat de travail ;

En conséquence :

— CONDAMNER la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à lui payer les sommes suivantes :

' 1 759,94 € à titre d’indemnité de précarité ;

' 1 466,62 € à tire de dommages-intérêts pour non-respect de la procédure de licenciement ;

' 13 444 € à titre de dommages-intérêts pour rupture injustifiée du contrat à durée déterminée avant son terme ;

' 5 000 € pour exécution déloyale du contrat de travail ;

' 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

— DIRE ET JUGER que la décision à intervenir sera déclarée commune et opposable à l’AGS CGEA D’ANNECY, à la SELARL MJ ALPES en sa qualité de mandataire judiciaire et la SELARL AJ PARTENAIRES en sa qualité d’administrateur judiciaire de la société CAR SYSTEM RÉPARATIONS;

— CONDAMNER la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS aux éventuels dépens de première instance et d’appel.

À l’issue des débats et de ses conclusions du 28 juillet 2020, auxquelles il est expressément référé pour un plus ample exposé des moyens et prétentions, la SELARL MJ ALPES demande à la cour de :

— LUI DONNER ACTE de ce qu’elle intervient à l’instance en cours en sa qualité de commissaire à l’exécution du plan de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ;

— LUI DONNER ACTE de ce qu’elle s’associe aux conclusions précédemment prises par la SARL

CAR SYSTEM RÉPARATIONS, signifiées le 11 juin 2018 ;

L’UNEDIC délégation AGS CGEA D’ANNECY s’en est remise à des conclusions transmises le 12 mars 2020 et entend voir':

— ÊTRE MISE hors de cause ;

À titre subsidiaire :

— CONSTATER que, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ayant fait l’objet d’un plan de sauvegarde le 25 février 2020, sa présence dans le cadre de la présente procédure est d’autant moins justifiée et, par conséquent, la mettre de plus fort purement et simplement hors de cause ;

— LUI DONNER ACTE de ce qu’elle fait expressément assomption de cause avec la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS, la SELARL MJ ALPES et la SELARL AJ PARTENAIRES, ès-qualités, en ce que ceux-ci concluent ' par des motifs pertinents ' à la réformation du jugement entrepris et au débouté intégral de Monsieur B X

Encore plus subsidiairement :

— DIRE ET JUGER qu’il ne pourra être prononcé de condamnations à son encontre mais que la décision à intervenir lui sera seulement déclarée opposable, étant attraite en la cause sur le fondement de l’article L. 625-3 du code de commerce ;

— DIRE ET JUGER qu’une créance éventuelle sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ne constitue pas une créance découlant du contrat de travail et, partant, se situe hors le champ de sa garantie, ce conformément aux dispositions de l’article L. 3253-6 du code du travail ;

— DIRE ET JUGER qu’elle ne devra procéder à l’avance des créances visées par les articles L. 3253-6 à L. 3253-13 du code du travail que dans les termes et les conditions résultant des dispositions des articles L. 3253-19 à L. 3253-21 du code du travail ;

— DIRE ET JUGER qu’en application de l’article L. 3253-17 du code du travail tel que modifié par la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016, sa garantie est plafonnée, toutes sommes et créances avancées pour le compte du salarié confondues, à l’un des trois plafonds définis à l’article D. 3253-5 du code du travail, et inclut les cotisations et contributions sociales et salariales d’origine légale ou d’origine conventionnelle imposée par la loi ainsi que la retenue à la source prévue à l’article 204 A du code général des impôts ;

— DIRE ET JUGER, par conséquent, que les plafonds définis à l’article D. 3253-5 du code du travail s’entendent en montants bruts ;

— DIRE ET JUGER que l’obligation de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à leur paiement, les intérêts légaux étant arrêtés au jour du jugement déclaratif ;

— LA DÉCHARGER de tous dépens.

MOYENS :

La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS expose, dans ses conclusions, ne pas être un garage de réparation automobile classique mais un centre esthétique automobile.

- Sur la demande de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale :

La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS soutient que Monsieur B X n’aurait jamais évoqué le moindre besoin de formation en peinture et que, s’il avait été choisi, c’est en raison notamment de sa formation CQP carrossier-peintre et de ses compétences en peinture.

Aussi, la société expose que dans le cadre de la préparation opérationnelle à l’emploi, la formation de Monsieur B X s’opérait sur les activités de débosselage sans peinture et rénovation.

Par ailleurs, la société soutient que le conseil de prud’hommes a motivé l’attribution de la somme de 1000 € sur le motif que les propos tenus dans la lettre de licenciement auraient été vexatoires alors même que Monsieur B X n’a jamais soutenu l’argument de la rupture vexatoire et brutale pour étayer cette demande. En outre, il faut, selon la société, justifier d’un préjudice distinct du licenciement.

Monsieur B X explique avoir été victime d’une exécution fautive de son contrat de travail, la société ne l’ayant pas formé pour lui reprocher, ensuite, ses propres négligences en matière de formation.

Monsieur B X expose, en outre, qu’aucun salarié n’était affecté à sa formation, et que les explications de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS visant à faire croire que c’était le gérant qui aurait dispensé la formation, alors qu’il n’est pas même titulaire d’un CAP, ne sont pas sérieuses.

De même, Monsieur X fait valoir que Monsieur Y, autre salarié prétendument responsable de la formation, a avoué lui-même n’avoir donné que de simples conseils.

- Sur la demande de dommages et intérêts au titre du non respect de la procédure de licenciement:

La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS soutient qu’en matière de rupture anticipée d’un contrat de travail à durée déterminée, l’employeur n’a pas à respecter les dispositions de l’article L. 1232-4 du code du travail.

Aussi, elle estime qu’elle n’avait pas à prévoir la possibilité pour Monsieur B X de se faire assister.

Monsieur B X soutient, sur ce moyen, que la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS s’est abstenue de l’informer de la possibilité qu’il avait d’être assisté d’un conseiller du salarié et qu’il en résulte un préjudice.

- Sur la faute grave :

La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS indique que la rupture est parfaitement fondée, et renvoie à la lettre de licenciement dans laquelle il est fait état de l’ensemble des griefs ayant conduit à la décision de licenciement.

Les fautes reprochées sont, selon la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS, des fautes liées à la peinture et non à des prestations liées à la formation qu’il a suivie. D’ailleurs, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS indique que Monsieur B X reconnaissait lui-même ses négligences, se justifiant par un contexte de rupture amoureuse. La SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS verse plusieurs attestations qui font état des manquements de Monsieur B X et de leurs conséquences.

Ensuite, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS indique qu’il n’a jamais été question de reprocher une insuffisance professionnelle à Monsieur B X mais bien une faute grave.

Il n’était pas inexpérimenté, comme il le prétendrait.

C’est son insubordination, malgré des consignes claires, qui a été proportionnellement sanctionnée par le licenciement pour faute grave. À ce titre, la société explique que Monsieur B X a reçu plusieurs avertissements puisqu’il ne suivait pas les consignes et directives.

Monsieur B X soutient, quant à lui, être parfaitement inexpérimenté, raison pour laquelle il avait convenu d’une formation dans le cadre d’une préparation opérationnelle à l’emploi.

Il expose que la faute grave n’est pas constituée, compte tenue de son inexpérience. Il affirme qu’alors qu’il rencontrait des difficultés dans l’accomplissement de ses tâches, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ne lui a apporté aucune aide ou formation.

Il estime qu’aucun des éléments invoqués dans la lettre de licenciement n’est constitutif d’une faute grave. D’après lui, ni la lenteur d’exécution (au demeurant non prouvée), ni les reprises sur un véhicule, qui avait fait l’objet à la suite de chacune de ses interventions d’un contrôle par un supérieur hiérarchique, ne sauraient constituer une faute grave.

Par ailleurs, Monsieur X conteste avoir dissimulé le retour d’un véhicule sur lequel il était intervenu, et explique que le véhicule était dans l’atelier à la vue de tous.

Sur l’utilisation du cutter, Monsieur B X explique avoir imité les pratiques de ses collègues.

Sur sa prétendue lenteur, il expose être récemment diplômé, et avoir accepté une rémunération en deçà de l’échelon 1 car conscient de son inexpérience et de l’influence de celle-ci sur son efficacité.

Sur la livraison de véhicule, il expose avoir toujours contesté ce grief, et que s’il est arrivé qu’une livraison se fasse sans le contrôle d’un collègue, c’est uniquement parce qu’il était seul dans l’atelier.

Sur son incapacité à réaliser un devis, il affirme ne pas avoir été formé, et que cette méconnaissance ne saurait être une faute grave.

La clôture intervenue le 20 février 2020 a été rabbattue à l’audience du 05 novembre 2020 puis prononcée avant l’ouverture des débats.

EXPOSE DES MOTIFS':

- Sur l’exécution déloyale du contrat de travail':

L’article L 1221-1 du code du travail prévoit que le contrat de travail s’exécute de bonne foi.

En l’espèce, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS produit aux débats la convention de formation (préparation opérationnelle à l’emploi) signée les 17 mai, 8 juin et 22 avril 2016 par la société CAR SYSTEM RÉPARATIONS en qualité à la fois d’employeur et d’organisme de formation et par Monsieur B X.

Il s’agit d’une formation de 400 heures selon le plan de formation joint.

Il est également versé aux débats un bilan de la préparation opérationnelle à l’emploi, signé le 20 juillet 2016 par l’employeur, Monsieur B X et un représentant de Pôle Emploi attestant

que l’ensemble des modules prévus au plan de formation a été réalisé avec succès par le stagiaire.

Monsieur Y, technicien au sein de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS atteste, par ailleurs, avoir réalisé cette formation.

Il s’ensuit que Monsieur X ne rapporte pas la preuve de l’exécution fautive qu’il reproche à la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS, qui justifie avoir rempli son obligation conventionnelle de formation, dès lors qu’il n’explique pas la raison pour laquelle il aurait signé le bilan de formation attestant que celle-ci s’est bien déroulée et qu’il a rempli les objectifs fixés si cela ne correspondait à aucune réalité.

Il convient, en conséquence, d’infirmer le jugement entrepris et de débouter Monsieur B X de sa demande indemnitaire au titre de l’exécution fautive alléguée du contrat de travail.

- Sur la mise hors de cause de l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS D’ANNECY':

D’une part, l’article L. 625-3 du code de commerce ne prévoit pas la mise en cause des institutions mentionnées à l’article L. 3253-14 du code du travail en cas d’ouverture d’une procédure de sauvegarde au cours de l’instance prud’homale et, d’autre part, il résulte de l’article L. 3253-8 du code du travail que, dans ce cas, seules sont garanties les créances résultant des ruptures intervenues pendant la période d’observation et dans le mois suivant le jugement qui a arrêté le plan de sauvegarde.

En l’espèce, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS a fait l’objet de l’ouverture d’une procédure de sauvegarde par jugement du tribunal de commerce de Vienne en date du 5 mars 2019.

L’ensemble des prétentions, au principal, de Monsieur B X se rapporte à des créances résultant de l’exécution et de la rupture du contrat de travail en date du 14 octobre 2016, soit antérieures au jugement d’ouverture de la procédure de sauvegarde.

Il s’ensuit que l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS D’ANNECY ne garantit pas lesdites créances de sorte qu’elle doit être mise hors de cause.

- Sur le non-respect de la procédure de rupture anticipée du contrat à durée déterminée':

La rupture anticipée du contrat à durée déterminée pour faute grave s’analyse en une sanction. Elle est donc soumise à la procédure disciplinaire des articles L. 1332-1 et suivants du code du travail.

L’employeur doit notifier, par écrit, les griefs retenus contre le salarié et celui-ci doit être convoqué à un entretien préalable.

En revanche, les dispositions des articles L. 1232-2 et L. 1233-11 du code du travail, relatives à la procédure de licenciement, ne sont pas applicables à celles de la rupture du contrat de travail à durée déterminée.

En l’espèce, Monsieur B X n’est pas fondé à se prévaloir du fait que la procédure de rupture anticipée de son contrat à durée déterminée n’a pas été régulièrement suivie au motif qu’il n’a pas été informé dans la lettre de convocation à l’entretien préalable qu’il pouvait se faire assister d’un conseiller du salarié, dans la mesure où les dispositions de l’article L 1232-4 du code du travail ne sont pas applicables à la procédure de rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée.

Le jugement entrepris est, dès lors, confirmé par substitution de motifs en ce qu’il a débouté Monsieur B X de sa demande indemnitaire à raison de l’irrégularité alléguée de la procédure de rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée.

- Sur la rupture anticipée du contrat à durée déterminée pour faute grave':

L’article L1243-1 du code du travail énonce que':

sauf accord des parties, le contrat de travail à durée déterminée ne peut être rompu avant l’échéance du terme qu’en cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail.

Lorsqu’il est conclu en application du 6° de l’article L. 1242-2, le contrat de travail à durée déterminée peut, en outre, être rompu par l’une ou l’autre partie, pour un motif réel et sérieux, dix-huit mois après sa conclusion puis à la date anniversaire de sa conclusion.

La faute grave se définit comme un manquement du salarié d’une gravité telle qu’elle empêche la poursuite du contrat de travail.

L’employeur doit rapporter la preuve de la faute grave qu’il allègue.

L’existence d’une faute disciplinaire est subordonnée à la preuve du caractère intentionnel du manquement professionnel reproché.

L’insuffisance professionnelle ne peut jamais constituer une faute disciplinaire.

En l’espèce, il convient d’analyser chacun des griefs figurant dans le courrier de rupture anticipée du contrat à durée déterminée afin de vérifier s’ils constituent une faute grave.

D’une première part, aucun élément produit par l’employeur ne vient démontrer que les travaux à réaliser sur le véhicule GOLF selon facture du 30 septembre 2016 dressée au nom du garage REYPIN ne nécessitaient que 2h30 de travail.

Ladite facture ne mentionne aucune heure de main d''uvre et le temps de travail ne peut être déduit de la seule modicité du prix alors que la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS indique par ailleurs qu’il s’agissait de son plus important client à l’époque, susceptible dès lors de bénéficier de tarifs avantageux.

Aucune pièce ne vient davantage confirmer l’affirmation de l’employeur selon laquelle Monsieur B X a comptabilisé 12h30 de main d''uvre.

L’attestation de Madame D A n’est pas probante, à ce titre, et ce pour plusieurs raisons, en ce que :

— elle est co-gérante de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS de sorte qu’il s’agit pour l’employeur d’une preuve qu’il se fait à lui-même ;

— elle indique que le travail nécessitait une demi-journée alors qu’il n’est pas justifié de ses compétences techniques en tant que témoin, et cette durée est, de toutes façons, deux fois plus importante que celle mentionnée dans la lettre de rupture.

L’attestation de Madame E F n’est pas davantage probante en ce que':

— elle précise que son poste consiste à remplir et gérer les plannings des prestations esthétiques automobiles de sorte qu’il n’est pas justifié de compétences techniques particulières du témoin en matière de carrosserie automobile ;

— elle indique que ce travail nécessitait une demi-journée, soit une durée deux fois plus importante

que celle mentionnée dans la lettre de rupture.

Le seul fait que Monsieur B X s’y soit repris à trois fois pour achever les travaux ne saurait permettre d’en déduire ipso facto qu’il a sciemment mal réalisé sa prestation de travail et ce d’autant plus, que la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ne fournit aucune explication technique sur le détail de celle-ci.

Plus précisément, l’employeur qui supporte la charge de la preuve n’apporte aucun élément permettant de contredire l’affirmation de Monsieur B X, selon laquelle il se serait agi d’une prestation compliquée, empêchant de déduire l’élément délibéré de la faute du seul fait que le salarié aurait mal exécuté des tâches simples ou élémentaires relevant de ses fonctions et réputées maîtrisées.

Les propres termes de la lettre de rupture anticipée tendent, d’ailleurs, à confirmer la technicité de l’intervention puisqu’il est également reproché à Monsieur B X d’avoir utilisé un cutter pour découper un élément à réparer sans autorisation d’un de ses responsables ; ce qui suppose, dès lors, une décision à prendre sur un geste particulièrement technique.

En conséquence, la mauvaise réalisation par Monsieur B X de cette intervention peut parfaitement ne pas résulter d’un comportement volontaire mais d’une insuffisance dans ses compétences professionnelles comme il le soutient.

Concernant la dissimulation du retour du véhicule, ce grief n’est pas établi dès lors que l’employeur ne répond pas au moyen pertinent du salarié selon lequel le véhicule se trouvait dans l’atelier visible de tous'; Monsieur Y, autre technicien, atteste d’ailleurs avoir été témoin des trois retours successifs et l’employeur ne produit aucune consigne écrite sur les procédures à suivre pour les entrées et sorties de véhicules.

S’agissant du fait que Monsieur B X n’aurait pas respecté la consigne consistant à solliciter l’autorisation préalable d’un de ses responsables pour découper au cutter un élément à réparer, il convient de relever la contradiction dans les éléments fournis par l’employeur.

En effet, dans la lettre de rupture anticipée, l’employeur ne considère pas que le recours au cutter est prohibé mais qu’il s’agit d’une procédure délicate nécessitant l’autorisation d’un responsable.

Monsieur B X conclut, quant à lui, qu’il a fait exactement comme ses collègues, à savoir que, pour éviter de peindre les capteurs sans utiliser de scotch, il aurait fallu démonter le pare-choc et qu’il ne lui a jamais été demandé de le faire, compte tenu du temps que l’opération aurait pris.

Or, Monsieur Y, également technicien au sein du centre, qui atteste avoir été témoin des difficultés rencontrées par Monsieur B X pour effectuer la prestation sur le véhicule GOLF ne fait aucune référence à l’utilisation ou non du cutter.

En revanche, Madame E G, qui ne travaille pas au sein de l’atelier, est en mesure d’attester qu’interdiction avait été faite à Monsieur B X de se servir du cutter'; ce qui diffère du fait de devoir solliciter l’accord du responsable pour le faire.

Enfin, il est pour le moins contradictoire pour l’employeur de conclure au fait que Monsieur B X disposait de toutes les compétences nécessaires pour effectuer en autonomie des travaux de peinture et dans le même temps de le soumettre à une consigne alléguée, mais en définitive non suffisamment établie, de devoir solliciter l’autorisation pour effectuer certains gestes techniques complexes de peinture.

D’une seconde part, s’agissant de l’insubordination alléguée, aucun élément produit ne vient corroborer que Monsieur B X aurait déclaré que sa «'manière de procéder n’avait aucune incidence sur l’état de marche des véhicules en question'».

D’une troisième part, l’employeur soutient que Monsieur B X a livré, à plusieurs reprises, des véhicules sans l’en informer.

Madame E G atteste en ce sens mais ne fournit aucune date précise et l’employeur n’apporte pas davantage d’éléments précis sur les véhicules et clients concernés.

Monsieur B X admet l’avoir fait uniquement au mois d’août 2016 au motif que personne n’était présent.

Il n’est pour autant pas nécessaire de trancher le point de savoir si Monsieur B X était ou non seul dans l’entreprise au mois d’août 2016 alors que l’employeur conteste ce fait en indiquant que Monsieur Z était présent avec lui au mois d’août.

En effet, la procédure de rupture anticipée a été engagée le 7 octobre 2016, soit plus d’un mois après'; ce qui est incompatible avec l’existence d’une faute grave, qui suppose que le contrat de travail ne peut être poursuivi.

D’une troisième part, outre que l’employeur ne produit aucun devis qui aurait été mal réalisé par Monsieur B X, que les faits ne sont pas datés et qu’il ne justifie pas de la formation qui lui a été dispensée à ce titre, il n’est pas justifié que Monsieur B X aurait volontairement commis des erreurs dans la réalisation de devis.

Par ailleurs, d’une manière générale, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ne saurait invoquer une faute grave alors même qu’elle indique avoir toléré des manquements de Monsieur B X depuis le mois d’août 2016 (témoignage de Madame A co-gérante) soit pendant plus d’un mois avant l’engagement de la procédure de rupture anticipée et alors qu’elle ne justifie pas de la moindre sanction disciplinaire antérieure, auxquelles les remontrances et rappels à l’ordre oraux évoqués par les témoins ne peuvent être assimilés.

La faute grave implique en effet que le contrat de travail ne peut être poursuivi de sorte que la procédure de rupture doit nécessairement être engagée dans un délai restreint'; ce qui n’a pas été le cas en l’espèce.

En conséquence, la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS ne rapporte pas la preuve de la faute grave qu’elle invoque.

Le jugement entrepris est néanmoins infirmé en ce qu’il a improprement qualifié la rupture de licenciement, de sorte qu’il convient de déclarer abusive la rupture anticipée du contrat à durée déterminée par l’employeur selon courrier du 14 octobre 2016.

- Sur les prétentions financières':

Premièrement, l’article L. 1243-4 du code du travail énonce que':

La rupture anticipée du contrat de travail à durée déterminée qui intervient à l’initiative de l’employeur, en dehors des cas de faute grave, de force majeure ou d’inaptitude constatée par le médecin du travail, ouvre droit, pour le salarié, à des dommages-intérêts d’un montant au moins égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat, sans préjudice de l’indemnité de fin de contrat prévue à l’article L. 1243-8.

Toutefois, lorsque le contrat de travail est rompu avant l’échéance du terme en raison d’un sinistre relevant d’un cas de force majeure, le salarié a également droit à une indemnité compensatrice dont le montant est égal aux rémunérations qu’il aurait perçues jusqu’au terme du contrat. Cette indemnité est à la charge de l’employeur.

En l’espèce, eu égard au montant des rémunérations brutes que Monsieur B X aurait perçues jusqu’à l’issue de son contrat, il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à lui payer la somme de 13 441,01 €, sauf à dire qu’il s’agit d’une somme nette et qu’elle est dûe au titre de la rupture anticipée abusive du contrat à durée déterminée.

Deuxièmement, le jugement entrepris est également confirmé au visa des articles L. 1243-4 et L. 1243-8 du code du travail, en ce qu’il a condamné la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à payer à Monsieur B X la somme de 1 759,94 € à titre d’indemnité de précarité, sauf à préciser qu’il s’agit d’une somme brute.

- Sur les demandes accessoires':

L’équité commande de confirmer l’indemnité de procédure allouée en première instance et de condamner la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à une indemnité complémentaire de procédure de 1000 €.

Le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile est rejeté.

Au visa de l’article 696 du code de procédure civile, confirmant le jugement entrepris et y ajoutant, il convient de condamner la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS, partie perdante, aux dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, statuant publiquement et contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,

DONNE ACTE à la SELARL MJ ALPES en ce qu’elle est intervenue volontairement à l’instance

MET HORS DE CAUSE l’UNEDIC DÉLÉGATION AGS D’ANNECY

CONFIRME le jugement entrepris en ce qu’il a':

— condamné la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à verser à Monsieur B X les sommes suivantes :

' 1 759,94 € au titre de l’indemnité de précarité, sauf à préciser qu’il s’agit d’une somme brute

' 13 441,01 €, sauf à préciser qu’elle est dûe au titre de la rupture anticipée abusive du contrat à durée déterminée et qu’il s’agit d’une somme nette

' 1 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile

— débouté Monsieur B X de sa demande indemnitaire à raison de l’irrégularité alléguée de la procédure suivie de rupture anticipée de contrat à durée déterminée

— mis les entiers dépens a la charge de la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS

L’INFIRME pour le surplus ;

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DÉCLARE abusive la rupture anticipée notifiée le 14 octobre 2016 par la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS du contrat à durée déterminée consenti le 20 juillet 2016 à Monsieur B X

DÉBOUTE Monsieur B X de sa demande indemnitaire pour exécution fautive du contrat de travail

CONDAMNE la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS à payer à Monsieur B X une indemnité complémentaire de procédure de 1000 €

REJETTE le surplus des prétentions des parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile

CONDAMNE la SARL CAR SYSTEM RÉPARATIONS aux dépens d’appel.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Mme Blandine FRESSARD, Présidente et par Mme Carole COLAS, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier La Présidente

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Cour d'appel de Grenoble, Ch. sociale -section b, 14 janvier 2021, n° 17/04466