Cour d'appel de Nîmes, 19 février 2013, n° 11/00428

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Nîmes, 19 févr. 2013, n° 11/00428
Juridiction : Cour d'appel de Nîmes
Numéro(s) : 11/00428
Décision précédente : Conseil de prud'hommes d'Avignon, 8 novembre 2010

Texte intégral

ARRÊT N°

R.G : 11/00428

XXX

CONSEIL DE PRUD’HOMMES D’AVIGNON

du 09 novembre 2010

Section: Encadrement

SA SCOP SECMMI

C/

Y

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 19 FEVRIER 2013

APPELANTE :

SA SCOP SECMMI

(SOCIÉTÉ D’ETUDES CHAUDRONNERIE MÉCANIQUE ET MAINTENANCE INDUSTRIELLE)

prise en la personne de son représentant légal en exercice

immatriculée au RCS d’Avignon sous le XXX

XXX

XXX

XXX

représentée par la SCP BAGLIO-ROIG-ALLIAUME-BLANCO, avocats au barreau d’AVIGNON

INTIMÉ :

Monsieur Z Y

né le XXX à XXX

XXX

XXX

représenté par la SCP CANO/CANO, avocats au barreau d’AVIGNON

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Régis TOURNIER, Président, a entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

Il en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Régis TOURNIER, Président

Madame Sylvie COLLIERE, Conseiller

Monsieur Philippe SOUBEYRAN, Conseiller

GREFFIER :

Madame Martine HAON, Greffier, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

à l’audience publique du 25 Septembre 2012, où l’affaire a été mise en délibéré au 27 Novembre 2012, prorogé au 19 Février 2013,

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé et signé par Madame Sylvie COLLIERE, Conseiller, pour le Président empêché, publiquement, le 19 Février 2013, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.

FAITS PROCEDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Monsieur Z Y a été embauché, comme chef d’atelier -niveau V-échelon 2 – coefficient 335, le 23 février 1998 par la société CMH Mécanique, ensuite dénommée GRME SUD, appartenant au Groupe GRME, à compter du 23 février 1998.

Le 31 octobre 1998 il était en arrêt maladie prolongé jusqu’en mars 2001 et percevait des indemnités journalières et le 1er avril 2001 il lui était attribué une pension d’invalidité 2e catégorie, cessant alors toute activité professionnelle sans que le contrat de travail soit rompu.

Cette rente était alors complétée par des versements servis par la Compagnie d’assurance ALP au titre d’un contrat de prévoyance qui avait été souscrit unilatéralement par l’employeur, cette invalidité ayant été considérée comme découlant d’un arrêt de travail pour maladie ayant débuté avant la résiliation du contrat de prévoyance ALP prononcée le 31 décembre 1999.

Un nouveau contrat de prévoyance était souscrit par la société GRME SUD auprès de l’organisme URRPIMMEC le 1er janvier 2000, puis auprès de l’ICIRS à partir 1er janvier 2002.

En 2004, le Groupe GRME était déclaré en liquidation judiciaire et parmi les actifs du groupe la filiale GRME SUD était reprise par des salariés de l’entreprise, transformée en société coopérative de production le septembre 2004 et dénommée maintenant SECMMI.

Le 1erjanvier 2009, la société SCOP SECMMI a souscrit un nouveau de prévoyance auprès de la Compagnie UNIPREVOYANCE.

Monsieur Y saisissait le Conseil de prud’hommes d’Avignon le 21 octobre 2009 sollicitant une revalorisation de la rente complémentaire qu’il perçoit directement de la compagnie 'assurance ALP.

Par jugement du 9 novembre 2010 cette juridiction condamnait la société SECMMI à :

— lui payer les sommes de :

*3.702,66 euros de dommages et intérêts au titre de la revalorisation de la rente complémentaire pour la période du 1er janvier 2000 au 19 octobre 2004,

*141,08 euros mensuels à compter du 1er janvier 2009, et tant que cette invalidité est reconnue par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie, correspondant à la part de revalorisation de sa rente complémentaire à sa rente d’invalidité pour la période du 1er janvier 2000 au 31 décembre 2008,

*1.000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile.

— lui remettre un bulletin de salaire conforme à la présente décision, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard et par document à compter du 3e jour suivant la notification de la présente décision et jusqu’à la délivrance du document, le bureau de jugement se réservant le pouvoir de liquider ladite astreinte, sur simple demande de Monsieur Y,

— déclarer les paiements de rentes complémentaires fixés par le jugement à, ou aux assureurs de prévoyance idoines afin que Monsieur Y soit rétabli dans ses droits tant pour le passé que pour l’avenir, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 61e jour suivant la notification de la décision et jusqu’à réalisation complète de ladite déclaration, le bureau de jugement se réservant le pouvoir de liquider ladite astreinte, sur simple demande de Monsieur Y,

— réaliser toutes les déclarations rectificatives auprès des caisses de sécurité sociale, maladie, retraite et vieillesse pour la période du 1er janvier 2000 à ce jour, afin que Monsieur Y soit rétabli dans ses droits passés et à venir notamment en terme de retraite, et ce sous astreinte de 150 euros par jour de retard à compter du 61e jour suivant la notification de la présente décision et jusqu’à réalisation complète des déclarations, le bureau de jugement se réservant le pouvoir de liquider ladite astreinte, sur simple demande de Monsieur Y.

La société SECMMI a régulièrement relevé appel du jugement et soutient essentiellement que :

— d’une part la demande n’est pas fondée car le contrat de prévoyance ALP a été souscrit en dehors de toute obligation concernant le risque invalidité, car aucune disposition légale n’imposait une couverture supplémentaire en cas d’invalidité au profit des agents de maîtrise de niveau V , seules les assimilés cadres relevant de la Convention collective de retraite et de prévoyance des cadres et assimilés du 14 mars 1947 instituant une garantie en cas de décès pour les salariés assimilés cadres par l’article 4 bis,

— également la convention collective de la Métallurgie ne prévoit pas non plus d’obligation en matière d’invalidité,

— d’autre part l’application des conditions générales du contrat de prévoyance souscrit par la société CMH Mécanique auprès de la compagnie ALP n’impose pas à l’employeur une revalorisation de la rente complémentaire, en effet l''article 4 du titre 5 du règlement de prévoyance (invalidité permanente) fixe des conditions et la rente doit être servie pendant plus d’un an , la revalorisation dépend d’une décision du Conseil d’administration de l’ALP, et enfin en cas de résiliation de l’adhésion les rentes seront servies pour leur valeur à la date de résiliation. Elles ne peuvent en aucun cas être revalorisées ultérieurement. »

— or le contrat ALP a été résilié à compter du 31 décembre 1999, soit avant même la reconnaissance d’invalidité de Monsieur Y qui n’est intervenue qu’en avril 2001, dès lors celui-ci a logiquement perçu d’ALP et perçoit encore une rente non revalorisée ;

— subsidiairement, la demande est irrecevable pour les périodes antérieures au octobre 2004 et les règles applicables en matière de prescription, tant celles des accessoires du salaire soumis à la prescription quinquennale, instituée par l’article L.3245-1, que celle désormais fixée à 5 ans par application des dispositions de l’article 2224 du Code civil par la loi 2008-561 du 17 juin 2008,

— les premiers juges n’étaient d’ailleurs pas fondés à éluder ces règles de prescription en allouant au salarié sous la forme de dommages-intérêts les sommes sollicités pour cette période,

— en ce qui concerne le point de départ de l’évaluation de la demande Monsieur Z Y perçoit de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie et du régime de prévoyance complémentaire une rente d’invalidité depuis le 1er avril 2001, et la revalorisation de la rente d’invalidité servie par l’organisme de prévoyance ne peut se poser qu’à partir de la date anniversaire de la mise en invalidité, soit au cas d’espèce à partir du 1er avril 2002.

— en ce qui concerne le calcul présenté par Monsieur Y le contrat d’assurance ALP ne prévoit pas non plus de modalités de revalorisation automatiques et prédéfinies, et Monsieur Y n’apporte ni précisions et justifications,

— enfin elle a payé la somme 3.259,91 euros à la suite de la réclamation de Monsieur Y exprimée le 20 novembre 2008 pour la période du 20 octobre 2004 au 31 décembre 2008, compte tenu de la prescription, étant observé que depuis le 1er janvier 2009 date de souscription d’un nouveau contrat d’assurance Monsieur Y perçoit à nouveau la rente complémentaire et la revalorisation, et a reçu une copie de ce contrat,

— c’est sans fondement que le jugement a décidé d’ordonner la délivrance de bulletins de paie , puisque le contrat de travail n’étant pas rompu, elle délivre des bulletins de paie portant sur les contributions salariales sur la mutuelle santé X, mais elle n’a pas à faire figurer des sommes à titre de rentes qu’elle ne verse pas.

Elle demande donc l’infirmation du jugement et le paiement de la somme de 1.000 euros pour ses frais non compris dans les dépens en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

Monsieur Y, intimé, demande la confirmation du jugement et l’indemnisation de ses frais à hauteur de 3.500 euros. Par appel incident et invoquant la loi n°89-1009 du 31 décembre 1989, modifiée par celle 94-678 du 08 août 1994, dite loi EVIN, codifiée notamment à l’article L 912-3 CSS, et les dispositions combinées de la CC de la Métallurgie nationale et du Vaucluse et leurs avenants, les articles 1134 et 1147 du Code Civil.

Dans les termes tels que retranscrits ci-après il sollicite :

— la condamnation de la SECMMI à paiement de la somme de 7.500 euros à titre de dommages et intérêts au visa de l’article 1147 du Code civil pour absence d’information de cet employeur sur la couverture du risque décès ; et au-delà sur l’absence de toute couverture de ce risque sur la période du 1er janvier 2000 au 31 mars/2009,

— sur les réclamations consécutives aux absences de déclarations par la SECMMI de janvier 2000 à mars 2009 inclus, à ses Assureurs groupe successifs, de la situation d’invalidité de Monsieur Y et de ses conséquences, de dire et juger que Monsieur Y devait bénéficier du régime d’assurance complémentaire obligatoire pour compléter ses indemnités journalières puis sa rente invalidité versées par la Caisse Primaire d’Assurance Maladie,

— sur l’absence de revalorisation du point de rente invalidité depuis l’année 2000 à septembre 2004 de dire que le régime de la prescription quinquennale applicable doit se comprendre à la lecture de la nouvelle rédaction de l’article 2224 du Code Civil et de dire qu’en l’espèce, aucune prescription ne peut donc courir sur cette période, du fait de l’absence totale d’information du salarié,

— la confirmation en son principe du jugement dont appel,

— à tout le moins, et si nécessaire, de dire en faisant application de l’adage fraus omnia corrumpit, en l’espèce, que la prescription ne peut commencer à courir dans de telles conditions, ou bien sanctionner le comportement d’un employeur qui agit en l’espèce par une discrimination, sinon directe, à tout le moins indirecte, en s’abstenant de déclarer volontairement auprès de ses assureurs groupe successifs, son salarié en arrêt de travail.

— de dire en conséquence au visa de l’article L1134-4 du Code du travail qu’il reste recevable à tout le moins à solliciter la condamnation de la SECMMI sur une base indemnitaire, et non plus salariale, ou pour des raisons comparables à l’état de discrimination constatée, dire que cette situation met en place une situation d’inégalité salariale entre travailleurs actifs, et en situation d’invalidité.

— à titre infiniment subsidiaire, et prenant acte du fait qu’il a subi une absence totale d’information du 1er janvier 2000 au 31 mars 2009 pour ce qui concernait ses couvertures au titre de la rente d’invalidité et de sa revalorisation sur cette période (dont celle de 2000 à 2004), dire et juger que celui-ci a perdu la chance d’obtenir une rente revalorisée sur ces années,:

our ces raisons et au pire, de condamner la SECMMI à paiement de la même somme de 3.702 euros toutes causes confondues, à des dommages et intérêts, pour cette perte de chance subie.

— sur l’absence de revalorisation de rente à compter du 1er janvier 2009.

Il demande :

— l’infirmation du jugement dont appel et de constater en effet qu’il n’a pas la revalorisation de rente à laquelle il aurait dû prétendre, si la SECMMI l’avait régulièrement déclaré années après années, et de la condamner d’ores et déjà pour 2009 et 2010, à paiement de la somme totale de 834.36 euros.

— de dire qu’à compter du 1er janvier 2011 et pour les années suivantes, il appartiendra à cet employeur de continuer, selon les revalorisations AGIRC et ce même mode de calcul, à régler les nouveaux montants pour Monsieur Y ; faute pour tel Assureur de l’effectuer en ses lieu et place,

— de dire qu’il importera encore à la SECMMI, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de l’arrêt à intervenir, d’avoir à réaliser toutes déclarations rectificatives idoines auprès des Caisses de Sécurité Sociale, maladie, retraite et vieillesse, pour la période du 1er/01/2000 à ce jour, afin que Monsieur Y ne puisse être péjoré dans ses droits existants et à venir, notamment en termes de retraite future.

— de dire qu’un intérêt au taux légal sur les condamnations susvisées sera pratiqué en application de l’article 1153 du Code Civil, à compter de la mise en demeure faite par la SCP CANO à la SECMMI, soit dès le 30/06/09.

— de condamner la SECMMI à paiement de la somme de 7.500 euros pour appel abusif et dilatoire.

— de condamner la société SECMMI à payer la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile.

MOTIFS

Sur le bien-fondé de la demande

Attendu que la société prétend que le contrat avec l’assureur ALP a été résilié à compter du 31 décembre 1999, avant même la reconnaissance d’invalidité qui n’est intervenue qu’en avril 2001, et que Monsieur Y n’a perçu qu’une rente non revalorisée jusqu’à sa réclamation en 2008 conformément au règlement de l’organisme de prévoyance dont l''article 4 du titre 5 fixe des conditions et la rente doit être servie pendant plus d’un an, la revalorisation dépendant d’une décision du Conseil d’administration de l’ALP, et enfin en cas de résiliation de l’adhésion 'les rentes seront servies pour leur valeur à la date de résiliation. Elles ne peuvent en aucun cas être revalorisées ultérieurement.»

Attendu, cependant, que l 'article 7 de la loi du 31 décembre1989, dite loi Evin, dispose que lorsque des assurés ou adérents sont garantis collectivement contre les risques portant atteinte à l’intégrité physique de la personne ou liés à la maternité, le risque décès ou les risques d’incapacité ou d’invalidité, la résiliation ou le non renouvellement du contrat ou de la convention est sans effet sur le versement des prestations immédiates ou différées, acquises ou nées durant son exécution ; que cette disposition d’ordre public maintient donc le service des prestations liées à un sinistre survenu pendant la durée de validité du contrat malgré la résiliation du contrat ;

Attendu qu’en outre il est de jurisprudence constante qu’en application de l’article 1134 du Code civil les prestations liées à la réalisation d’un sinistre survenu pendant la période de validité d’une police d’assurance de groupe ne peuvent être remises en cause par la résiliation ultérieure de cette police ;

Attendu que la société appelante soutient également que la demande n’est pas fondée car le contrat de prévoyance ALP a été souscrit en dehors de toute obligation légale imposant une couverture supplémentaire en cas d’invalidité au profit des agents de maîtrise de niveau V ;

Attendu que, toutefois , les assimilés cadres relèvent de la Convention collective de retraite et de prévoyance des cadres du 14 mars 1947 par l’effet de l’article 4 bis selon lequel les employés, techniciens et agents de maîtrise sont assimilés aux ingénieurs et cadres visés à l’article précédent, dans les cas où ils occupent des fonctions classées par référence aux arrêtés de mise en ordre des salaires, à une cote hiérarchique brute égale ou supérieure à 300 ;

Attendu que, de plus la société a volontairement admis que pour la période de 2004 à 2008 qu’elle devait payer une revalorisation à la suite de la réclamation de Monsieur Y en 2008 ; qu’elle a indiqué dans les mentions des bulletins de salaire une affiliation de Monsieur Y à la Caisse des cadres pour sa retraite ; qu’ainsi l’employeur avait reconnu cette assimilation et ne peut actuellement prétendre remettre en cause cet engagement ;

Attendu qu’enfin selon l’article L.912-3 du Code de la sécurité sociale, dans sa rédaction alors applicable de la loi 95-116 du 4 février 1995 , lorsque la convention, l’accord ou la décision unilatérale constatée par un écrit relevant de l’article L. 911-1 prévoient la couverture, sous forme de rentes, du décès, de l’incapacité de travail ou de l’invalidité, ils organisent également, en cas de changement d’organisme assureur, la poursuite de la revalorisation des rentes en cours de service ;

Attendu qu’en conséquence l’obligation pèse sur l’employeur lequel doit faire en sorte que le changement d’organisme assureur soit sans influence sur le niveau de prestation ; que si le nouveau contrat de prévoyance ne procure pas cette revalorisation, l’employeur est redevable de la différence ;

Attendu qu’il constant que le risque assuré s’est réalisé pendant la durée de validité du contrat souscrit initialement par la société et ce contrat prévoyait la revalorisation des rentes versées ; que Monsieur Y ne peut dès lors être privé, par l’effet de la résiliation du contrat, du bénéfice des revalorisations de la rente prévue contractuellement, s’agissant de prestations différées nées pendant la durée de validité dudit contrat ;

Attendu que la demande est donc fondée en son principe ;

Sur la prescription

Attendu que la société soutient que la demande est irrecevable pour les périodes antérieures au octobre 2004 qui seraient prescrites ;

Attendu que le jugement a retenu que le délai de prescription n’avait pas couru car Monsieur Y n’avait pas été informé de ses droits dès le 1er janvier 2002 date du premier changement d’assureur ;

Attendu qu’il résulte de la combinaison des principes du droit des assurances tirés de l’article L. 114-2 du Code des assurances et de l’article 2248 du Code civil, dans sa rédaction alors applicable, que la reconnaissance même partielle du droit du réclamant Monsieur Y entraîne pour l’ensemble de la créance un effet interruptif de prescription qui ne peut se fractionner ; qu’en effet le versement partiel de la rente par l’assureur impliquait une reconnaissance, par ce dernier, d’une garantie qui, même limitée à une somme inférieure à celle qui était réclamée, interrompait la prescription pour la totalité de la créance ;

Attendu que l’action de Monsieur Y, toujours salarié de la société et dont le contrat est suspendu, a pour objet la réparation d’une inexécution de l’employeur-souscripteur qui a omis de payer les échéances annuelles de la revalorisation, accessoire, de la rente complémentaire; que dans cette situation les rapports des parties ne dérivent pas directement du contrat de travail et l’employeur, défaillant, est, à l’égard de son salarié , dans la même relation de droit que l’assureur à l’égard de l’assuré quant à la prescription ;

Attendu que dès lors la prescription n’est pas acquise ;

Sur les sommes restant dues

Attendu que la société a payé la somme 3.259,91 euros à la suite de la réclamation de Monsieur Y exprimée le 20 novembre 2008 pour la période du 20 octobre 2004 au 31 décembre 2008 ; qu’il n’a pas ensuite discuté les modalités de calcul de cette somme ; que de même dans sa saisine du Conseil de prud’hommes le 21 octobre 2009 il ne faisait pas état d’une difficulté à ce titre demandant une somme globale de 8.010,44 euros de 2000 à 2008 sans la décomposer ;

Attendu, cependant, que la revalorisation de la rente d’invalidité servie par l’organisme de prévoyance est la date anniversaire de la mise en invalidité, soit au cas d’espèce à partir du 1er avril 2002 ;

Attendu qu’en l’état d’un décompte actuellement présenté en cause d’appel par Monsieur Y et particulièrement précis, il convient déduire les années 2000, 2001, et pour partie l’année 2002, outre celles de 2004 à 2008 déjà réglées; quant à celles de 2009 et 2010 elles doivent être déduites de ce rappel et seront examinées ci-après ; que dès lors le solde dù est celui alloué par le jugement, qui est réclamé, à la charge de l’employeur pour la période de mai 2002 à 2003 mais pas à titre de dommages intérêts ;

Attendu que depuis le 1er janvier 2009 date de souscription d’un nouveau contrat d’assurance Monsieur Y perçoit à nouveau la rente complémentaire et la revalorisation ; qu’il a reçu une copie de ce contrat ;

Attendu que le jugement a énoncé :

Que la SA SCOP SECMMI a adressé un courrier à Monsieur Y le 24 février 2009 lui demandant les éléments nécessaires à l’organisation de la revalorisation de sa rente complémentaire auprès du nouvel assureur « UNI PREVOYANCE ».

Que M. Y n’a pas donné suite à ce courrier.

EN CONSEQUENCE, le Conseil déboute Monsieur Y de ses demandes de paiement des revalorisations de sa rente complémentaire pour les années 2009 et 2010.

Le Conseil rappelle qu’il appartient à Monsieur Y de communiquer les informations nécessaires à son employeur afin que celui-ci les transmette à « UNI PREVOYANCE » pour assurer la revalorisation de sa rente complémentaire à compter du 1er janvier 2009.

Attendu qu’aucun élément ne vient établir un changement depuis cette décision ; que, dans ces conditions, la demande, dans les termes tels que formulés et présentés par Monsieur Y, n’est pas fondée pour les années 2009 et suivantes ;

Sur les autres demandes

Attendu que l’inobservation par l’employeur des règles relatives à l’information des salariés tirées de l’article 12 de la loi du 31 décembre 1989 est démontrée; que le préjudice de Monsieur Y est toutefois limité dans la mesure où il appartient toujours à la société, et pouvait facilement s’adresser à elle, sans pouvoir s’assurer personnellement à un autre organisme, chaque contrat d’assurance groupe s’imposant à lui ; qu’il convient de lui allouer la somme de 1.000 euros à ce titre en réparation ;

Attendu que selon l’article R. 143-2 devenu R 3243-1 du Code du travail un bulletin de paie est délivré à l’employé à titre de pièce justificative du paiement du salaire conformément aux articles L. 143-3 devenu L 3243-2; que si le bulletin de paie comporte la nature et le montant des accessoires de salaires, toutefois la rente, qui n’est pas une rémunération versée par l’employeur en contrepartie d’un travail, n’est pas soumise aux cotisations sociales et patronales ;

Attendu que la délivrance de bulletins de paie ne s’impose donc que dans ces limites ; que dans ces conditions il convient de ne pas prononcer d’astreinte ;

Attendu qu’il convient simplement de préciser que la société SECMMI devra procéder à toutes déclarations rectificatives auprès des Caisses de sécurité sociale, maladie, retraite et vieillesse, pour la période du 1er avril 2002 à 2008 afin que Monsieur Y ne puisse être péjoré dans ses droits existants et à venir, notamment en terme de retraite future ; qu’il n’y a pas lieu à prononcer une astreinte en l’état de l’indétermination des organismes compétents ;

Attendu que la procédure n’est pas abusive ;

Attendu qu’il paraît équitable que chacune des parties supporte ses frais non compris dans les dépens en application de l’article 700 de Code de procédure civile ;

Vu l’article 696 du Code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Infirme le jugement déféré,

Statuant à nouveau,

Condamne la société SECMMI à payer à Monsieur Y les sommes de 3.702,66 euros bruts de rappel de la revalorisation de la rente à la charge de l’employeur pour la période de mai 2002 à décembre 2003, et de 1.000 euros de dommages intérêts pour inobservation par l’employeur de son obligation d’information,

La condamne à lui délivrer des bulletins de paie,

La condamne à procéder à toutes déclarations rectificatives auprès des Caisses de sécurité sociale, maladie, retraite et vieillesse, pour la période du 1er avril 2002 à 2008 afin que la situation de Monsieur Y ne soit pas compromise dans ses droits existants et à venir, notamment en terme de retraite,

Dit n’y avoir lieu à astreinte pour l’exécution de cette obligation,

Rejette les autres demandes,

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile,

Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens exposés tant pour la première instance que pour l’appel.

Arrêt signé par Madame Sylvie COLLIERE, Conseiller, pour le Président empêché, et par Madame Martine HAON, Greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

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