Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 6 décembre 2013, n° 2011/18793

  • Faits antérieurs à l'inscription de la cession au registre·
  • Lien entre la marque renommée et le signe litigieux·
  • Action en nullité du contrat de cession·
  • Action en revendication de propriété·
  • Opposabilité de la cession du titre·
  • Cession ou licence à titre gratuit·
  • Atteinte à la marque de renommée·
  • Inscription au registre national·
  • Atteinte au pouvoir attractif·
  • Atteinte aux droits privatifs

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Les sociétés demanderesses, titulaires de plusieurs marques comportant le terme elite, et le déposant des marques revendiquées ont entretenu des relations d’affaires. En procédant à l’enregistrement des marques litigieuses, en son nom personnel, sans en référer aux demanderesses comme il aurait dû loyalement le faire, le déposant qui échoue à démontrer qu’il ait bénéficié d’une stipulation particulière ou d’un accord tacite, n’a pu que vouloir atteindre un but s’écartant des fonctions légitimes des marques enregistrées, soit qu’il ait voulu l’opposer aux sociétés exploitant le signe elite et entraver leur activité, soit qu’il ait cherché à en tirer un quelconque profit. Ces dépôts ayant été effectués de mauvaise foi, l’action en revendication de propriété est fondée. Il a été porté atteinte à la marque notoire non enregistrée elite. En application de la jurisprudence communautaire, l’existence d’un lien entre les signes en cause doit être rapportée. La marque contestée reprend à l’identique le graphisme de la marque notoire en le faisant précéder d’un carré. Les demanderesses ne peuvent toutefois arguer du préjudice porté au caractère distinctif de la marque dès lors qu’elles ne démontrent pas une modification du comportement économique du consommateur moyen des produits ou services couverts par la marque notoire consécutivement à l’enregistrement de la marque litigieuse et des noms de domaine. En revanche, elles sont fondées à se prévaloir du profit indûment tiré, par le déposant et la société cessionnaire des droits, de la renommée de la marque elite. A cet égard, il n’est pas nécessaire que le signe litigieux ait été mis en contact avec la clientèle ou exploité hors de la sphère privée de la vie de l’entreprise pour être considéré comme un acte accompli dans la vie des affaires. Les demanderesses invoquent par ailleurs l’atteinte à leurs marques notoires enregistrées qui sont toutes constituées du terme dominant elite dans son graphisme particulier. Un signe doit permettre de percevoir le produit ou le service comme provenant d’une entreprise déterminée et pas d’une autre. En l’espèce, les signes revendiqués ont été enregistrés par des personnes morales distinctes et l’inclusion du terme notoire elite ne peut être considéré que comme l’un des facteurs pertinents d’appréciation. Il convient de procéder à l’examen de la notoriété de chacune des marques. Les documents produits aux débats ne permettent pas de déduire que les marques invoquées puissent être considérées comme notoires dans la mesure où la présence en leur sein du signe notoire non enregistré elite ne suffit pas à les rendre notoires et que si certaines bénéficient effectivement d’une couverture médiatique, les critères dégagés par la jurisprudence communautaire (parts de marché détenue par chacune des marques prises isolément, intensité, étendue géographique, durée de l’usage, importance des investissements notamment) n’ont pas été pris en compte. Le nom commercial et l’enseigne sont des signes distinctifs qui se distinguent d’une marque enregistrée en ce qu’ils n’ont pas pour objet d’identifier directement des produits ou des services. En l’espèce, il n’est pas démontré que les usages allégués du signe "e" par les demanderesses désignent le fonds de commerce et le lieu d’exploitation d’une personne morale. Par conséquent, l’action fondée sur l’article L. 711-4 qui ne réserve une priorité d’usage sur une marque dont l’enregistrement est demandé, ou qui a été enregistrée, qu’à une enseigne ou à un nom commercial ceci de façon limitative, n’est pas fondée. L’action n’est pas davantage fondée sur le fondement de l’article 1382 du Code civil.

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5, 6 déc. 2013, n° 11/18793
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 2011/18793
Publication : PIBD 2014, 1002, IIIM-238
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Paris, 9 septembre 2010, N° 08/03508
Décision(s) liée(s) :
  • Tribunal de grande instance de Paris, 10 septembre 2010
Domaine propriété intellectuelle : MARQUE
Marques : ELITE ELITE MODEL MANAGEMENT; ELITE SUPER MODEL ; ELITE MODEL LOOK ; ELITE + ; ELITE MODELS FASHION ; ELITE MODELS STUDIO ; D'elite ; eLIMITED
Numéro(s) d’enregistrement des titres de propriété industrielle : 1662492 ; 97700699 ; 383109 ; 96621973 ; 663734 ; 749770 ; 663732 ; 96637865 ; 345926 ; 2143915 ; 3122417 ; 780157 ; 3167036 ; 3167037
Classification internationale des marques : CL03 ; CL09 ; CL12 ; CL14 ; CL16 ; CL18 ; CL25 ; CL28 ; CL35 ; CL36 ; CL38 ; CL40 ; CL41 ; CL42
Référence INPI : M20130787
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Texte intégral

COUR D’APPEL DE PARIS ARRET DU 06 DECEMBRE 2013

Pôle 5 – Chambre 2 (n° 284, 31 pages) Numéro d’inscription au répertoire général : 11/18793.

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 Septembre 2010 – Tribunal de Grande Instance de PARIS 3e Chambre 2e Section – RG n° 08/03508.

APPELANTES : - SARL ELITE MODEL MANAGEMENT prise en la personne de son gérant, Monsieur Andrew G, ayant son siège social […] V – 75008 PARIS,

- SA de droit suisse ELITE LICENSING COMPANY prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […],

- SA de droit suisse ELITE MODEL MANAGEMENT prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] 1700 FRIBOURG (SUISSE),

- SA de droit luxembourgeois ELITE WORLD prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] L1160 LUXEMBOURG (LUXEMBOURG), représentées par la SCP GALLAND – V en la personne de Maître Marie-Catherine V, avocat au barreau de PARIS, toque : L0010, assistées de Maître Cyril F de la SELARL YDEX, avocat au barreau de PARIS, toque : K0037.

INTIMÉ : Monsieur Mourad MECHERI représenté par la SCP NABOUDET – H en la personne de Maître Caroline H, avocat au barreau de PARIS, toque : L0046, assisté de Maître Renaud L, avocat au barreau de NANTERRE.

INTIMÉE : SA GRANT FINANCE & CO prise en la personne de ses représentants légaux, ayant son siège social […] L1650 LUXEMBOURG (LUXEMBOURG), Non représentée. (Assignation signifiée le 7 février 2012 au domicile, 'personne ayant qualité de recevoir copie de l’acte n’a pu être trouvée sur les lieux').

COMPOSITION DE LA COUR : L’affaire a été débattue le 17 octobre 2013, en audience publique, devant la Cour composée de : Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, Madame Sylvie NEROT, conseillère, Madame Denise JAFFUEL, conseillère, qui en ont délibéré. Greffier lors des débats : Monsieur T Lam NGUYEN.

ARRET : Par défaut,
- prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

- signé par Madame Marie-Christine AIMAR, présidente, et par Monsieur T Lam NGUYEN, greffier présent lors du prononcé.

La société à responsabilité limitée Elite Modele Management, fondée en 1972, expose avoir développé, sous le nom commercial et l’enseigne 'elite’ le premier réseau mondial d’agences de mannequins (avec 36 agences et plus de 800 mannequins sur les cinq continents) et faire usage de la marque semi-figurative notoire non enregistrée 'elite’ pour désigner les 'services d’agence de mannequins’ ainsi que les 'services de mannequins à des fins de promotion de ventes’ qui constituent encore à ce jour le cœur de son activité.

Elle ajoute que l’activité de l’Agence Elite se divise actuellement en trois secteurs : l’agence de mannequins, les produits dérivés (licensing) et le concours Elite Model Look.

Elle précise qu’à la faveur de son développement, l''Agence Elite’ est notamment titulaire des marques enregistrées suivantes, toutes régulièrement renouvelées :

— la marque française semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 1.057.269, déposée par la société E lite Model Management SARL et enregistrée le 25 septembre 1978, renouvelée sous le n° 1 662 492 pour les produits et services relevant des classes 35, 41 et 42,

— la marque française verbale 'Elite+', n° 96 621 9 73, déposée par la société de droit suisse Elite Model Management SA et enregistrée le 19 avril 1996 en classes 35, 41 et 42,

— la marque française semi-figurative ' elite Models fashion, n° 96 637 865, déposée par la société de droit suis se Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 août 1996, en classes 3, 14, 16, 18 et 25,


- la marque française verbale 'Elite Super Model', n° 96 700 699, déposée par la société Elite Model Management SARL et enregistrée le 22 octobre 1997 en classes 9, 14, 18 et 25,

— la marque française semi-figurative 'elite Models’Studio', n° 01 3 122 417, déposée par la société Elite Licen sing Company SA et enregistrée le 24 septembre 2001 en classe 3,

— la marque communautaire verbale 'Elite Model Look', n° 749 770, déposée le 11 février 1998 par la société Elite Licensing Company SA enregistrée le 19 février 2004 en classes 3 et 16,

— la marque communautaire verbale 'Elite Models Studio', n° 2 143 915, déposée le 14 mars 2001 par la sociét é Elite Licensing Company SA et enregistrée le 12 avril 2002 en classe 42,

— la marque communautaire semi-figurative 'elite Model Look', n° 383 109, déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 20 décembre 1999 en classe 41,

— la marque communautaire semi-figurative ' elite Models fashion, n° 345 926, déposée le 07 août 1996 et enregistrée par la société Elite Licensing Company SA le 27 juin 2002, en classes 3, 14, 16, 18 et 25,

— la marque internationale semi-figurative 'elite Model Look', n° 663 732, désignant la France déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 38 et 41,

— la marque internationale semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 663 734, désignant la France déposé e par la société Elite Model Management SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 35, 41 et 42,

— la marque internationale semi-figurative 'elite Models’ Studio', n° 780 157, désignant la France déposée par la soci été Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 mai 2002 en classes 9, 16 et 41.

Elle expose, par ailleurs :

— qu’aux termes d’un contrat de partenariat signé le 10 octobre 2001, les sociétés de droit luxembourgeois Elite Model Management (devenue Elite World) et MC Conseils représentée par Monsieur Mourad Mecheri (société dont les engagements souscrits le 10 octobre 2001 ont été repris, le 15 novembre 2001, par la société Grant Finance & Co) sont convenues de collaborer 'à l’effet de concevoir, construire, mettre en ligne et animer un site internet,

s’appuyant sur la marque et la notoriété d’Elite’ et, pour ce faire, ont créé une société de droit luxembourgeois Elitemodel.com, dont les statuts ont été dressés le 24 mai 2002, dont le capital était détenu, à la date du 27 mai 2002, à 51 % par la société Elite et à 49 % par la société Grant Finance Management et dont l’administrateur délégué était Monsieur Mecheri,

— qu’il résultait de ces accords que la société commune était propriétaire exclusive des droits de propriété intellectuelle attachés aux prestations, objets du contrat, et que la société Elite s’engageait, quant à elle, à apporter l’ensemble des contenus destinés à alimenter le site à venir et à garantir, par ailleurs, l’octroi de concessions de licences sur les marques et logos de l’Agence Elite nécessaires à la réalisation du site web,

— que le site internet www.elitemodel.com a été mis en ligne le 3 juin 2002,

— que sont rapidement apparues des dissensions avec Monsieur Mecheri concernant, notamment, la tenue de la comptabilité et l’avancement du projet de site, que le différend a perduré jusqu’au 1er octobre 2003, date à laquelle Monsieur Mecheri, démis de ses fonctions, n’a plus eu de lien économique direct avec la société Elite Model Management,

— qu’aucun mandat ou autorisation n’avaient été donnés par l’Agence Elite ou la société Elite à la société MC Conseils ou à Monsieur Mecheri personnellement pour déposer et réserver les signes suivants :

* une demande de marque communautaire semi-figurative 'elite’men’ déposée le 28 novembre 2002 sous le numéro 2.945.624 pour désigner des services relevant des classes 35, 38 et 41,

* une demande de marque communautaire semi-figurative 'elite’ déposée le 28 novembre 2002 sous le numéro 2.945.616 pour désigner des services relevant des classes 35, 38 et 41,

* une demande de marque communautaire verbale 'Elite Men’ déposée le 28 novembre 2002 sous le numéro 2.945.608 pour désigner des services relevant des classes 35, 38, 41 et 44,

* une marque française semi-figurative ''' elite’ (carré elite) déposée le 29 mai 2002, sous le numéro 02 3.167.036, pour désigner des produits et des services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44,

* une marque française semi-figurative ''-limited’ déposée le 29 mai 2002, sous le numéro 02 3.167.037, pour désigner des produits et des services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44,

* une marque bénéluxienne semi-figurative 'e’ ' déposée le 13 janvier 2004, sous le numéro 1.047.488, et enregistrée le 10 février 2004 sous le numéro 748.890, pour désigner des produits et des services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44,

* un nom de domaine « carre-elite.com » réservé le 8 octobre 2002,

* un nom de domaine « e-limited-magazine.com » réservé le 8 octobre 2002,

* un nom de domaine « elite-men.com » réservé le 30 octobre 2002,

— et qu’en dépit de la rupture de leur coopération, Monsieur Mourad Mecheri a déposé trois nouvelles demandes de marques le 13 janvier 2004, à savoir :

* une demande de marque communautaire semi-figurative ''-limited', n° 3 607 157 pour désigner les produits et services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44,

* une demande de marque communautaire semi-figurative ''' elite', n° 3 607 141 en classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44,

* une marque bénéluxienne 'e'', enregistrée le 10 février 2004 sous le n° 748 890 dans ces mêmes classes,

C’est dans ce contexte que la société à responsabilité limitée Elite Model Management, la société de droit suisse Elite Licensing Company, la société de droit suisse Elite Model Management SA et la société de droit luxembourgeois Elite World ont assigné Monsieur Mourad Mecheri, par acte du 29 février 2008, aux fins d’obtenir des mesures d’interdiction, de transfert des marques et noms de domaine incriminés ainsi que de publication, outre le paiement de dommages-intérêts; elles ont, par ailleurs, assigné en intervention forcée, le 24 mars 2009, la société Grant Finance & Co devenue titulaire des marques françaises n° 02 3 167 036 et 02 3 167 037 suivant acte de cession du 21 juin 2004 inscrit au Registre national des marques (RNM) le 10 novembre 2008.

Dans leurs dernières conclusions de première instance, elles ont, de plus, fait valoir qu’elles avaient constaté le dépôt, le 23 mai 2008, soit postérieurement à l’introduction de l’instance et ceci par un prête-nom des défendeurs, de quatre marques bénéluxiennes portant de nouveau atteinte à leurs droits.

Par jugement contradictoire rendu le 10 septembre 2010, le tribunal de grande instance de Paris a, en substance et avec exécution provisoire limitée aux mesures d’interdiction et de transfert :

— déclaré les sociétés Elite Model Management, Elite Licensing Company, Elite Model Management et Elite World recevables en leur action en revendication de la propriété des marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et n° 02 3 167 037 à l’e ncontre de Monsieur Mourad Mecheri mais les en a déboutées,

— dit qu’en procédant au dépôt le 29 mai 2002 de la marque semi- figurative française ''' Elite’ n° 2 3 167 036 et e n réservant les noms de domaine <carre-elite.com>, <elite-men.com>, <elite.prime- book.com>, <eliteprimebook.com>, Monsieur Mourad Mecheri a exploité de manière injustifiée la marque notoire non enregistrée 'elite’ dont la société Elite Model Management est titulaire,

— dit, que, ce faisant, Monsieur Mourad Mecheri a en outre porté atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial et à l’enseigne de la société Elite Model Management SARL,

— dit qu’en faisant l’acquisition de la marque semi-figurative française ''' Elite’ n° 2 3 167 036 par acte du 21 juin 2004 inscrit le 10 novembre 2008 au Registre national des marques, la société Grant Finance & Co a exploité de manière injustifiée la marque notoire non enregistrée 'elite’ dont la société Elite Model Management est titulaire et a également porté atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial et à l’enseigne de la société Elite Model Management,

— fait, en conséquence, interdiction, en tant que de besoin à Monsieur Mourad Mecheri et à la société Grant Finance & Co de poursuivre de tels agissements, ce sous astreinte dont il s’est réservé la liquidation,

— donné acte à la société Grand Finance & Co de ce qu’elle accepte de transférer la propriété de la marque semi-figurative ''' Elite’ n° 2 3 167 036 et à Monsieur Mourad Mecheri de ce q u’il accepte de transférer les noms de domaine <carre-elite.com>, <e-limited- magazine.com<, <elite-men.com>, <elite.prime-book.com> et <eliteprimebook.com>,

— ordonné, en tant que de besoin, le transfert au profit de la société Elite Licensing Company de la propriété de ladite marque et desdits noms de domaine, en autorisant, en tant que de besoin, la société Elite Licensing Company à notifier le jugement au Directeur de l’INPI aux fins d’inscription au Registre national des marques, ainsi qu’aux autorités compétentes pour procéder au transfert de ces noms de domaine à son bénéfice,

— condamné in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à payer à la société Elite Model Management SARL la somme indemnitaire de 20.000 euros en réparation de l’atteinte portée à la marque notoire non enregistrée 'elite', outre celle de

10.000 euros en réparation de l’atteinte portée à sa dénomination sociale, à son nom commercial et à son enseigne,

— débouté les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA du surplus de leurs demandes,

— prononcé la déchéance des droits :

* de la société Elite Model Management SARL sur la marque semi- figurative française 'elite – elite Model Management’ n° 1 662 492 et sur la marque verbale française 'Elite Super Model’ n° 97 700 699,

* de la société Elite Model Management SA sur la marque verbale française 'elite+' n° 96 621 973 et sur la marque s emi-figurative internationale 'elite -elite model management’ n° 6 63 734,

* de la société Elite Licensing Company sur la marque verbale communautaire 'Elite Model Look’ n° 000 749 770, su r la marque semi-figurative communautaire 'Elite Model Look’ n° 000 383 109, sur la marque semi-figurative internationale 'Elite Model Look’ n° 663 732, sur la marque française semi-figurative 'Elite Models Fashion’ n° 96 637 865, sur la marque semi-figurati ve communautaire 'Elite Models Fashion’ n° 000 345 926 , sur la marque communautaire verbale 'Elite Models Studio’ n° 002 143 915, sur la marque française semi-figurative 'Elite Models’Studio’ n° 01 3 122 471 et de la marque semi-figurative int ernationale 'Elite Models’Studio’ n° 780 157,

ceci pour l’ensemble des produits et services visés dans leur enregistrement et à compter du 1er janvier 2010,

— dit que la décision, une fois devenue définitive, sera transmise par les soins du greffier saisi à la requête de la partie la plus diligente à Monsieur l de l’INPI pour inscription au Registre national des marques,

— condamné in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à payer aux sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA, ensemble, la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens qui comprendront les frais de constat de l’agence pour la Protection des Programmes et les frais de constat d’huissier.

Par dernières conclusions signifiées le 06 juin 2012, la société à responsabilité limitée Elite Model Management, la société anonyme de droit suisse Elite Licensing Company, la société anonyme de droit suisse Elite Model Management et la société anonyme de droit luxembourgeois Elite World (anciennement

Elite Model Management), appelantes et ci-après : les sociétés Elite, demandent en substance à la cour, au visa du constat établi le 16 juillet 2007 par l’agence pour la Protection des Programmes, du constat d’huissier établi le 16 janvier 2008, du contrat conclu le 21 juin 2004 par Monsieur Mourad Mecheri au bénéfice de la société Grant Finance & Co, de l’article 9 § 1 du règlement CE 207/2009 du 26 février 2009, des articles L 711-4, L 712-6, L 713-3, L 713-5 et L 714-5 du code de la propriété intellectuelle ainsi que des articles 1108, 1128, 1131, 1133 et 1382 du code civil, de confirmer le jugement en ses dispositions qui leur sont favorables et, y ajoutant :

— de constater, d’une première part, qu’en vertu de l’article 6 bis de la Convention de Paris pour la Protection de la Propriété Industrielle, la société française Elite Model Management est titulaire de la marque notoire non enregistrée 'elite’ pour désigner les "services d’agence de mannequins ; services de mannequins à des fins de promotion des ventes" et les « services d’organisation de concours », à tout le moins depuis 1994, d’une deuxième part, la notoriété des marques suivantes des sociétés de l’Agence Elite :

o la marque française semi-figurative ' elite Elite Model Mangement’ enregistrée le 25 septembre 1978 sous le numéro 1.057.269 et régulièrement renouvelée sous le numéro 1.662.492 par la société Elite Model Management,

o la marque française verbale 'Elite +' enregistrée depuis le 19 avril 1996 sous le numéro 96 621 973 et régulièrement renouvelée par la société Elite Model Management SA,

o la marque française semi-figurative 'Elite Models Fashion’ enregistrée depuis le 7 août 1996 sous le numéro 96 637 865 et régulièrement renouvelée par la société Elite Licensing Company SA,

o la marque française verbale 'Elite Super Model’ enregistrée le 22 octobre 1997, sous le numéro 96 700 699 et régulièrement renouvelée par la société Elite Model Management,

o la marque française semi-figurative 'elite – Models Studio’ enregistrée depuis le 24 septembre 2001 sous le numéro 01 3.122.417 et régulièrement renouvelée par la société Elite Licensing Company SA,

o la marque communautaire verbale 'Elite Model Look’ déposée le 11 février 1998 puis enregistrée le 19 février 2004 sous le numéro 749.770 par la société Elite Licensing Company SA,

o la marque communautaire verbale 'Elite Models Studio’ déposée le 14 mars 2001 puis enregistrée le 12 avril 2002 sous le numéro 2.143.915 par la société Elite Licensing Company SA,

o la marque communautaire semi-figurative 'elite Model Look’déposée le 23 octobre 1996 puis enregistrée le 20 décembre 1999 sous le numéro 383.109 et régulièrement renouvelée par la société Elite Licensing Company SA,

o la marque communautaire semi-figurative 'elite Models fashion’ déposée le 7 août 1996 par la société Elite Licensing Company SA, puis enregistrée le 27 juin 2002 sous le numéro 345.926,

o la marque internationale semi-figurative 'elite Model Look’ déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée sous le numéro 663 732 le 7 novembre 1996, produisant ses effets en France,

o la marque internationale semi-figurative 'elite – Elite Model Management’ déposée par la société Elite Model Management SA et enregistrée sous le numéro 663 734 le 7 novembre 1996, produisant ses effets en France,

o la marque internationale semi-figurative 'elite Elite Model Management’ déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée sous le numéro 780.157 le 7 mai 2002, produisant ses effets en France

— de constater, en outre, que leurs dénominations sociales et noms commerciaux ont un caractère notoire et que Monsieur Mourad Mecheri ainsi que la société Grant Finance & Co. ont reconnu, par voie de conclusions devant le tribunal de grande instance, la notoriété du signe distinctif 'elite',

— de constater, de plus :

' que les signes suivants constituent l’imitation des marques notoires, dénominations sociales, noms commerciaux et enseignes des sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA :

o la marque semi-figurative française 'e-limited’ déposée par Monsieur Mourad Mecheri auprès de l’INPI le 29 mai 2002 et enregistrée sous le numéro 02 3.167.036 pour désigner les produits et les services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44 et cédée à la société Grant Finance & Co. le 21 juin 2004, cession inscrite au Registre national des marques le 10 novembre 2008,

o les noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-prime-book.com», «eliteprimebook.com » dont est titulaire Monsieur Mourad Mecheri,

' que les signes suivants constituent l’imitation du nom commercial et de l’enseigne notoires «e» des sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA ;

o la marque semi-figurative française 'e Limited’ déposée par Monsieur Mourad Mecheri auprès de l’INPI le 29 mai 2002 et enregistrée sous le numéro 02 3 167 037 pour désigner les produits et les services relevant des classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44 et cédée à la société Grant Finance & Co. le 21 juin 2004, cession inscrite au Registre national des marques le10 novembre 2008 ;

o le nom de domaine « e-limited-magazine.com » dont est titulaire Monsieur Mourad Mecheri,

- à titre principal :

(1) sur le caractère frauduleux des dépôts de marques et enregistrement de noms de domaine :

de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré l’Agence Elite recevable en son action en revendication de propriété des marques françaises n° 02 3 167 036 et n° 02 3 167 037 et de l’infirmer en ce qu’il a rejeté l’action de l’Agence Elite sur le caractère frauduleux des dépôts de marques françaises n° 02 3167 036 et n° 0 2 3 167 037 ; de considérer, en conséquence, que Monsieur Mourad Mecheri a procédé à l’enregistrement des marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et n° 02 3 167 037 ainsi que des no ms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-prime-book.com », « eliteprimebook.com » et « e-limited-magazine.com » en fraude des droits antérieurs détenus par les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite ModelManagement SA et Elite World SA à titre de marques, de dénominations sociales, de noms commerciaux et d’enseignes ; de considérer que Monsieur Mourad Mecheri a frauduleusement procédé au dépôt des marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et n° 0 2 3 167 037, au sens de l’article L. 712-6 du code de la propriété intellectuelle et de prononcer la nullité absolue du contrat de cession des marques, y compris des marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et 02 3167 037, conclu le 21 juin 2004 entre Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co SA ; d’ordonner que les choses soient remises en l’état dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat du 21 juin 2004, c’est-à-dire que toutes les marques litigieuses, y compris les marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et n° 02 3 167 037, reto urnent entre les mains de Monsieur Mecheri, entre lesquelles l’Agence Elite les revendique ; de les autoriser, en tant que de besoin, à notifier l’arrêt à intervenir au Directeur de l’Institut National de la Propriété Industrielle.

(2) sur l’atteinte aux marques notoires de l’Agence Elite :

de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré qu’en procédant au dépôt le 29 mai 2002 de la marque semi figurative n° 02 3.167.036 et en réservant les noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-primebook. com » et « eliteprimebook.com », Monsieur Mourad Mecheri a exploité de manière injustifiée la marque notoire non enregistrée 'elite’ de la société Elite Model Management SARL, au sens des dispositions de l’article 713-5 du code de la propriété intellectuelle et qu’en se faisant céder la marque semi figurative ''' elite’ n° 02 3 167 036, la société Grant Finance & Co a exploité de manière injustifiée la marque notoire non enregistrée de la société Elite Model Management SARL, au sens des dispositions de l’article 713-5 du code de la propriété intellectuelle ; de considérer que, par ces mêmes agissements, Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co. ont exploité de manière injustifiée les douze marques notoires françaises, communautaires et internationales enregistrées par les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA, au sens des dispositions de l’article L.713-5 du Code de la propriété intellectuelle.

(3) sur l’usage sérieux des marques invoquées par l’Agence Elite :

de considérer que les preuves d’usage produites par les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA des douze marques invoquées au soutien de leurs prétentions sont de nature à justifier de l’usage sérieux et ininterrompu pendant cinq ans avant le 1er janvier 2010, et ce conformément aux dispositions de l’article L.714-5 du Code de la propriété intellectuelle ; de réformer le jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance des droits des sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA sur les douze marques invoquées au soutien de leurs prétentions à compter du 1er janvier 2010 ;

- à titre subsidiaire :

de considérer qu’en procédant au dépôt le 29 mai 2002 de la marque semi figurative n° 02 3 167 036 et en réservant les noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-primebook.com » et « eliteprimebook.com », Monsieur Mourad Mecheri a commis des actes de contrefaçon par imitation des douze marques des sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA, au sens des dispositions de l’article L. 713-3 b) du code de la propriété intellectuelle ; qu’en se faisant céder la marque semi figurative n° 02 3 167 036, la société Grant Finance & Co a commis des actes de contrefaçon par imitation des douze marques des sociétés Elite Model Management SARL,

Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA, au sens des dispositions de l’article L. 713-3 b) du code de la propriété intellectuelle ;

- en tout état de cause :

de confirmer le jugement en ce qu’il a déclaré qu’en procédant au dépôt le 29 mai 2002 de la marque semi figurative n° 02 3 167 036 et en réservant les noms de domaine « carre-elite.com», « elite-men.com », « eliteprimebook.com » et « eliteprimebook.com », Monsieur Mourad Mecheri a porté atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial et à l’enseigne de la société Elite Model Management, qu’en se faisant, par ailleurs, céder la marque semi figurative n° 02 3 167 036, la société Grant Financ e & Co a porté atteinte à la dénomination sociale, au nom commercial et à l’enseigne de la société Elite Model Management ; de considérer qu’en enregistrant la marque française n° 02 3 167 037 et le nom de domaine « e-limited-magazine.com» Monsieur Mecheri a porté atteinte à l’enseigne et au nom commercial de la société Elite Model Management ; qu’en outre, en se faisant céder ladite marque, la société Grant Finance & Co a porté atteinte à l’enseigne et au nom commercial de la société Elite Model Management ;

— sur les mesures réparatrices :

de confirmer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à verser à la société Elite Model Management SARL la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à la marque à la marque notoire non enregistrée 'elite’ et en ce qu’il a condamné in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à verser à la société Elite Model Management SARL la somme de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation de l’atteinte portée à sa dénomination sociale, à son nom commercial et à son enseigne ; de condamner in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à verser aux sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA la somme de 170.000 euros à titre de dommages et intérêts ; d’ordonner à Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co de cesser toute reproduction ou usage, sur quelque support que ce soit, des marques notoires des sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA, y compris de la marque notoire non enregistrée ainsi que du nom commercial et de l’enseigne, et ce sous astreinte de 1.500 euros par infraction constatée dans les huit jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir ; de confirmer le jugement entrepris et d’ordonner à Monsieur Mourad Mecheri et à la société Grant Finance & Co de transférer la marque française semi-figurative n° 02 3 167 036 au bénéfice de la société Elite Lic ensing Company

SA et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, dans un délai de huit jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ; de l’infirmer en ordonnant à Monsieur Mourad Mecheri et à la société Grant Finance & Co de transférer la marque française semi-figurative n° 02 3.167.037 au bénéfice de la société Elite Lic ensing Company SA et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard dans un délai de huit jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ; de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a ordonné à Monsieur Mourad Mecheri de procéder au transfert des noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite- primebook.com », «eliteprimebook.com » au bénéfice de la société Elite Licensing Company SA ; de l’infirmer en ce qu’il n’a pas ordonné à Monsieur Mourad Mecheri le transfert du nom de domaine« e-limited-magazine.com » au bénéfice de la société Elite Licensing Company SA ; de constater que Monsieur Mourad Mecheri a sciemment omis de procéder au renouvellement des noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-prime-book.com », «eliteprimebook.com» et « e-limited- magazine.com » et de considérer que le non-renouvellement par Monsieur Mourad Mecheri des noms de domaine attaqués ne l’exonère pas de sa responsabilité dans cette affaire ; de constater que la société Elite Licensing Company SA a été contrainte de récupérer à la hâte lesdits noms de domaine « carre-elite.com », « elite-men.com », « elite-prime-book.com»,'eliteprimebook.com » et « e-limited-magazine.com » et de dire que les frais de récupération desdits noms de domaine seront remboursés à la société Elite Licensing Company SA par Monsieur Mourad Mecheri et ce, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard, dans un délai de huit jours à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ; d’autoriser, en tant que de besoin, la société Elite Licensing Company SA à notifier l’arrêt à intervenir, entre les mains de Monsieur l de l’Institut national de la propriété industrielle, aux fins d’inscrire le transfert à son bénéfice des marques semi-figuratives françaises n° 02 3 167 036 et n° 02 3 167 037 sur le Registre national des marques ; d’ordonner la publication de cet arrêt aux frais avancés in solidum de Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co dans cinq journaux, au choix des demanderesses, sans que le coût de ces publications puisse être supérieur à la somme de 30.000 euros HT ; d’ordonner à Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co de consigner la somme de 30.000 euros HT entre les mains de Monsieur l de l’Ordre des Avocats de Paris en qualité de séquestre, sous astreinte de 5.000 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir et de dire ce dernier attribuera cette somme à la société Elite Licensing Company SA sur présentation des bulletins de commande d’insertion des publications de l’arrêt à intervenir ; de se réserver le pouvoir de liquider les astreintes prononcées ; de condamner in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à verser aux sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA la somme de 50.000 euros au

titre de l’article 700 du Code de procédure civile; de condamner in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co au paiement des frais du constat réalisé par l’Agence pour la Protection des Programmes et celui réalisé par la SCP Benjamin Chaplais et Anthony Chaplais ; de condamner in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co en tous les dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 06 avril 2012, Monsieur Mourad Mecheri demande à la cour de réformer le jugement déféré et, statuant à nouveau au vu des dispositions des articles L 712-6 et L 713-3 du code de la propriété intellectuelle :

— de constater qu’il n’est plus propriétaire des marques n° 02 167 036 et n° 02 167 037 et de dire, en conséquence, que l’ action est irrecevable à son encontre,

— de constater, en outre, que ni le dépôt des marques ni la réservation des cinq noms de domaine litigieux n’ont été réalisés en fraude des droits 'des sociétés Elite',

— de constater à titre subsidiaire que l’action en revendication est prescrite,

— de considérer qu’il n’a commis aucune atteinte aux signes distinctifs et au nom commercial 'des sociétés Elite',

— de lui donner acte de ce qu’il n’a pas procédé au renouvellement des noms de domaine litigieux,

— de considérer que les sociétés appelantes ne justifient d’aucun préjudice,

— de les débouter, en conséquence, de l’intégralité de leurs demandes,

— de condamner in solidum les sociétés appelantes au paiement de la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les entiers dépens.

Le 07 février 2012, la société anonyme de droit luxembourgeois Grant Finance & Co a été assignée par les appelantes avec signification de leurs 'conclusions d’appel n° 1" s ignifiées à l’intimé constitué le 19 janvier 2012, ceci en application du règlement (CE) n° 1393/2007 du Parlement européen et du Conseil du 13 novembre 2007 relatif à la signification et à la notification dans les États membres des actes judiciaires et extrajudiciaires en matière civile et commerciale.

Par arrêt rendu le 30 novembre 2012, la présente cour d’appel de Paris, constatant que les appelantes avaient omis de signifier à la société Grant Finance & Co, intimée non constituée, leurs dernières conclusions d’appel du 06 juin 2012 ainsi que leur bordereau de communication de pièces du 07 novembre 2012, a sursis à statuer sur l’ensemble des prétentions des parties dans l’attente de la justification de ces diligences en renvoyant l’affaire à la mise en état.

Il a été justifié de l’accomplissement de ces formalités au 'domicile du destinataire', soit au siège social de la société Grant Finance & Co SA – […] – L 1650 Luxembourg, à la date du 07 février 2013.

SUR CE,

Sur l’action en revendication de marques en tant que dirigée à l’encontre de Monsieur Mecheri

Considérant que, débouté de cette fin de non-recevoir déjà opposée en première instance, Monsieur Mecheri fait valoir qu’il a cédé les marques dont il avait demandé l’enregistrement à la société Grant Finance & Co, que si le tribunal a motivé sa décision en considérant que l’enregistrement de cette cession était intervenu postérieurement à l’assignation, la validité dudit enregistrement n’est pas remise en cause et que tant le transfert de ces marques que leur simple dépôt ne sont, au demeurant, pas frauduleux ;

Mais considérant qu’il est constant que Monsieur Mourad Mecheri a été assigné le 29 février 2008 par les sociétés Elite, que le contrat de cession portant sur l’ensemble des marques litigieuses dont il fait état (et dont les sociétés Elite contestent, à titre principal, la validité, avec toutes conséquences de droit) est daté du 24 juin 2004, que le récépissé d’enregistrement dudit contrat auprès de l’Institut National de la Propriété Industrielle (INPI) porte la date du 10 novembre 2008, postérieure à l’assignation, et que, conformément à l’article L 714-7 du code de la propriété intellectuelle, la cession dont s’agit n’a pu devenir opposable aux tiers qu’à compter de cette dernière date ;

Qu’il en résulte que le jugement doit être confirmé en ce qu’il a rejeté cette fin de non-recevoir;

Sur l’enregistrement argué de fraude, le 29 mai 2002, des marques françaises semi-figuratives '''elite'(carré elite), n° 02 3.167.036 et ''- limited', n° 02 3.167.037 en classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44 par Monsieur Mecheri

Sur l’action en revendication de ces deux marques :

Considérant que les appelantes, déclarées recevables à agir à ce titre à l’encontre de Monsieur Mecheri, poursuivent l’infirmation du jugement en ce qu’il les a déboutées de leur action en revendication

au motif, selon elles erroné, que l’enregistrement de ces marques est intervenu sans intention frauduleuse de ce dernier ;

Qu’au visa de l’article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle et des enseignements de la juridiction communautaire sur la notion de mauvaise foi en la matière, elles font valoir que l’intention frauduleuse de Monsieur Mecheri s’évince du fait qu’il a toujours eu une parfaite connaissance des droits de marque de l’Agence Elite, en particulier dans le cadre de leurs relations économiques entre 2001 et 2003, qu’il a reconnu la notoriété de leurs signes et que l’Agence Elite n’a jamais expressément (ou préalablement) été informée du dépôt de ces deux marques françaises, les pièces sur lesquelles se sont fondés les premiers juges étant inopérantes pour démontrer l’absence d’intention frauduleuse du déposant et l’OHMI ayant justement, selon elles, annulé pour fraude la marque communautaire semi-figurative ''' elite’ n° 3 607 1 41 par décision définitive rendue le 28 juillet 2011 ;

Qu’en réplique, Monsieur Mecheri soutient que ces marques ont été déposées alors que les sociétés Elite en avaient connaissance, comme sont de nature à en attester les documents déjà soumis à l’appréciation du tribunal, et ce sans protestation de leur part ;

Que ces marques avaient vocation à désigner différents modules du site internet <elitemodel.com> dont il avait en charge le développement, que ces dépôts, intervenus alors que leur collaboration débutait en pleine confiance, n’étaient pas destinés à nuire aux intérêts des sociétés Elite mais à leur profiter, qu’il lui importait de les réserver afin d’éviter tout détournement ultérieur de tiers et que s’il avait voulu agir frauduleusement, il se serait gardé de s’adresser à Maître B qui était le conseil des sociétés Elite ; qu’aucune volonté de nuire ne peut donc lui être imputée ;

Considérant, ceci rappelé, que se prononçant sur l’article 5.2 § 1 sous b) du règlement sur la marque communautaire selon des enseignements s’imposant pour la mise en oeuvre de l’article 3 § 2 sous d) de la directive CE n° 89/104 à la lumière d e laquelle doit être interprété le droit national, la Cour de justice a dit pour droit (CJCE, 11 juin 2009, Chokoladefabriken Lindt) que pour apprécier la mauvaise foi du demandeur, il convient de prendre en compte tous les facteurs pertinents du cas d’espèce existant au moment du dépôt de la demande d’enregistrement d’un signe et, notamment :

— le fait que le demandeur sait ou doit savoir qu’un tiers utilise, dans au moins un État membre, un signe identique ou similaire pour un produit identique ou similaire prêtant à confusion avec le signe dont l’enregistrement est demandé,

— le degré de protection juridique dont jouissent le signe du tiers et le signe dont l’enregistrement est demandé,


- l’intention du demandeur d’empêcher ce tiers de continuer à utiliser un tel signe ;

Que la circonstance que Monsieur Mecheri ait entretenu, à compter de l’année 2001, des relations d’affaires avec les sociétés Elite et que, ce faisant, il ait eu connaissance de leur réputation et de la valeur économique attachée à leurs marques et signes distinctifs (dénominations sociales, noms commerciaux et enseignes comprenant tous le terme distinctif 'Elite') mais aussi le fait qu’elles associaient accessoirement le signe 'e’ à l’occasion de l’exploitation de certains produits ou services identiques ou similaires à ceux visés à l’enregistrement ne peut être contesté ;

Que, de la même façon, enregistrant ces deux marques en classes 3, 25, 35, 38, 41 et 42, Monsieur Mecheri ne pouvait ignorer qu’elles désignaient des produits et services identiques ou similaires à ceux couverts par les diverses marques des sociétés Elite ou correspondant aux domaines d’activité auxquels renvoient leurs signes distinctifs ;

Qu’il a lieu de constater, au demeurant, que Monsieur Mecheri ne porte pas sa défense sur ce point ;

Que, s’agissant de l’appréciation de la bonne foi de Monsieur Mecheri au moment du dépôt de ces marques, il convient de relever que si ce dernier déduit d’un certain nombre de documents (rapports d’activité de janvier 2003, lettres de mars 2003, assistance demandée à l’un des conseils des société Elite pour procéder au dépôt de ces deux marques) que les sociétés Elite étaient informées des demandes d’enregistrement litigieuses, force est de considérer qu’il n’est pas en mesure de produire une convention, un courrier d’information ou encore un rapport dénués d’équivoque démontrant qu’il avait personnellement pouvoir de le faire, qu’il disposait de l’accord des sociétés Elite ou qu’il leur en a rendu compte alors qu’il leur était lié par un rapport contractuel et tenu, par conséquent, à un devoir de loyauté ;

Que la lecture du protocole signé entre la société Elite Model Management et la société MC Conseils (représentée par Monsieur Mecheri) le 10 octobre 2001 (pièce 4 des appelantes) révèle que le dépôt d’une marque par Monsieur Mecheri ou par la société MC Conseils excédait les limites convenues de leur accord puisqu’il visait à la mise en œuvre, selon son préambule, d’une 'étroite collaboration et association en vue de la conception, construction, animation d’un site internet 'portail de services et de contenu’ s’appuyant sur l’image de marque d’Elite et sur l’expérience technique et la disponibilité de MC Conseils’ ;

Que son objet, défini à l’article I, portait plus précisément sur la mise en ligne de trois rubriques dédiées / aux agences du groupe et aux mannequins / à 'Elite Model Look', le concours / et aux membres du Club-Elite, avec, de plus, la perspective d’espaces consacrés au e-commerce, à un magazine-on-line et à la messagerie ; qu’en outre, les stipulations relatives à la propriété intellectuelle de son article III, b) comportaient l’engagement de la société MC Conseils de céder à la société commune l’ensemble de ses droits, lesquels ne concernaient que ses créations et productions graphiques, le développement de pages statiques et des développements spécifiques pour des partenaires et/ou clients de la société Elite ; qu’en dépit de cette précaution sur le sort des droits de propriété incorporels, il n’était nullement question de propriété industrielle ni de Monsieur Mecheri sur ce chapitre ;

Que Monsieur Mecheri ne pouvait l’ignorer pas plus qu’il ne pouvait ignorer qu’il était tenu – à s’en tenir au strict cadre de ses engagements à titre personnel (prévus à l’article III, a) relatif aux apports)
- d’obtenir l’aval préalable de la société Elite ; qu’il était, en effet, convenu qu’il s’engageait personnellement 'à déterminer et mettre en place toutes les mesures nécessaires à la rentabilité du projet (effet de leviers financiers) lesquels devront avoir été préalablement avalisés par la société Elite’ ainsi qu’à 'gérer l’aspect développement commercial en régularisant tous accords nécessaires auprès de partenaires ou sponsors également après l’aval d’Elite’ ;

Que, dans ce contexte, Monsieur Mecheri, déposant les deux marques françaises litigieuses en son nom personnel, six mois après la signature de ce protocole et cinq jours avant la mise en ligne du site, n’explique en rien en quoi leur dépôt pouvait être rattaché à l’objet de ladite convention et aux diligences qui lui incombaient personnellement, ni pour quelle raison il n’a pas pris la précaution de solliciter l’accord préalable de la société Elite, d’autant plus nécessaire que cette initiative excédait le périmètre de la convention que la société Elite entendait expressément encadrer ;

Que cet aval préalable ou même une connaissance a posteriori qui n’aurait été suivie d’aucune protestation des sociétés Elite ne peuvent être tirés par l’intimé de la simple coexistence du mandat donné à Maître B par ces dernières, le 26 novembre 2001, de 'régulariser, signer tout acte nécessaire à la constitution de la société Elitmodel.com’ (pièce 3 de l’intimé) et du fait que Monsieur Mecheri, agissant à titre personnel, a donné mandat à ce même Maître B, le 14 mai 2002 (pièce 4 de l’intimé) 'de, pour moi et en mon nom, signer et remettre toutes pièces, faire tous dépôts et toutes démarches nécessaires, retirer tous documents en vue du dépôt de marques Carré Elite et E-limited et ce, auprès de l’INPI et/ou l’OMPI’ ;

Que les courriers de cet avocat à la société MC Conseils des 2 juillet et 24 septembre 2001 (pièces 7 et 8) sont, comme le font valoir les appelantes, inopérant pour le second au soutien de la présente démonstration et tend plutôt à démontrer, pour le premier, que l’exploitation des signes dont était titulaire 'la société Elite’ pourrait faire l’objet d’un contrat puisqu’il lui est indiqué : 'Après l’élaboration du pacte d’actionnaires général, il y aura lieu d’élaborer deux autres contrats, à savoir: (…) un contrat entre la société Elite et la joint- venture qui permettra à cette dernière d’exploiter la marque et certaines bases de données en en définissant les conditions dit 'contrat de concession de licence ou de droits d’exploitation’ ;

Que cette perspective, de même que 'le projet internet Elite Luxembourg’ élaboré dès le mois de mai 2001 (pièce 6 de l’intimé) et qui prévoyait notamment qu''Elite donne le nom Elite en licence gratuite à la société luxembourgeoise. En échange, Messieurs R et M ne seront pas salariés de la société ; au moment où la société dépassera le point de break-even, des salaires pourront être attribués (…)' ne pouvaient qu’attirer l’attention de Monsieur Mecheri sur la nécessité de recueillir le consentement des sociétés Elite en déposant, comme il l’a fait, deux signes comportant comme élément distinctif le terme 'Elite’pour le premier et déjà associé à l’exploitation de certains produits et services des sociétés du groupe Elite pour le second ;

Que les rapports d’activité de la société créée Elitmodel.com des 28 et 31 janvier 2003, soit postérieurs de plus de six mois aux dépôts litigieux (pièces 10 et 11 de l’intimé) n’apportent rien au débat, d’autant qu’il n’y est question et de manière imprécise que du dépôt de la marque 'Elite Men’ alors que Monsieur Mecheri avait déjà déposé quatre marques à son nom personnel à cette date ;

Que, par ailleurs, Monsieur Mecheri ne peut être suivi lorsqu’il affirme avoir voulu préserver les intérêts des sociétés Elite sans expliquer pour quelle raison il s’est massivement livré lui-même (ou éventuellement par l’intermédiaire d’un tiers postérieurement à l’assignation) à un dépôt de marques comportant pour signe distinctif le terme 'Elite’ ou le signe 'e’ et pour quelle raison, s’agissant en particulier des marques litigieuses, leurs dépôts ont été effectués en son nom personnel et non point au nom des sociétés Elite, jusque là seules titulaires de toutes les marques comportant ce signe, ou, à tout le moins, qu’il n’ y ait pas fait procéder au nom de la société commune Elitmodel.com ;

Que ces circonstances factuelles ne peuvent être occultées dans la mesure où la juridiction communautaire a ajouté aux éléments à prendre en considération pour apprécier l’existence de la mauvaise foi du déposant (CJCE, 03 juin 2010, Internetportal Und Marketing) la chronologie des événements et la répétitivité du comportement du demandeur ; qu’elles ne peuvent d’autant moins l’être qu’à la date du

dépôt, les relations entre les parties connaissaient un début de dégradation liée à l’avancement du projet et à des irrégularités comptables qui donneront lieu à des mesures de contrôle en février 2003 puis à la rapide révocation de Monsieur Mecheri ;

Qu’il résulte de l’ensemble de ces éléments mis en exergue par les appelantes qu’en procédant à l’enregistrement de ces deux marques en son nom personnel sans en référer aux sociétés Elite comme il aurait dû loyalement le faire et alors qu’il se trouvait en difficultés, Monsieur Mecheri qui échoue à démontrer qu’il ait bénéficié d’une stipulation particulière ou d’un accord tacite, n’a pu que vouloir atteindre un but s’écartant des fonctions légitimes des marques enregistrées, soit qu’il ait voulu l’opposer aux sociétés exploitant le signe 'Elite’ et entraver leur activité, soit qu’il ait cherché à en tirer un quelconque profit, et partant abusif ;

Que les appelantes administrent ainsi la preuve du comportement contraire aux pratiques loyales et honnêtes du commerce adopté par Monsieur Mecheri ;

Que ces dépôts effectués de mauvaise foi, en fraude des droits des sociétés appelantes, conduisent à considérer comme bien fondée leur action en revendication de ces deux marques et à infirmer le jugement qui en a autrement décidé ;

Sur la prescription de l’action invoquée à titre subsidiaire par Monsieur Mecheri :

Considérant que l’intimé se fonde sur la prescription triennale de l’action en revendication prévue à l’article L 712-6 du code de la propriété intellectuelle qui a pour point de départ la date de publication de la demande d’enregistrement et sur la circonstance que leur publication est intervenue le 12 juillet 2002 tandis que l’action a été introduite le 29 février 2008, soit plus de cinq après ;

Mais considérant que l’alinéa 2 de l’article précité, reproduit in extenso, dispose : ' A moins que le déposant ne soit de mauvaise foi, l’action en revendication se prescrit par trois ans à compter de la demande de publication de la demande d’enregistrement’ ; qu’il s’en déduit que seul le déposant de bonne foi est recevable à invoquer l’exception de prescription et que tel n’est pas le cas en l’espèce ;

Que Monsieur M sera donc déclaré irrecevable en sa fin de non- recevoir et qu’il sera ajouté au jugement qui a considéré la demande comme sans objet du fait du rejet de l’action en revendication de marque ;

Sur l’action en nullité du contrat du 21 juin 2004 conclu entre Monsieur Mecheri et la société Grant Finance & Co portant cession

des marques ''' elite'(carré elite), n° 02 3 167 03 6 et semi-figurative ''- limited', n° 02 3 167 037 :

Considérant qu’il ressort des pièces versées aux débats par Monsieur Mecheri (pièces 1, 15 et 2) qu’il a cédé à la société Grant Finance & Co, par acte sous seing privé du 21 juin 2004 qui n’en spécifie pas la contrepartie si ce n’est 'aux conditions arrêtées et réglées entre les parties', les deux marques précitées, outre cinq autres marques communautaires ('Elite', 'E Limited', 'Elite Men') et une marque 'e’ enregistrée au Benelux ;

Que cette cession fait suite à un courrier daté du 17 juin 2004 adressé par un Conseil en propriété industrielle à la SA Elite Men accusant réception 'de votre fax du 3 courant nous informant que toutes les marques au nom de M. Mecheri ont été rachetées par la société Grant Finance & Co’ ; que la cession de ces deux marques a fait l’objet d’une demande d’inscription au Registre national des marques, présentée par Monsieur Mecheri à l’INPI, le 10 novembre 2008 ;

Considérant qu’outre le fait que les appelantes poursuivent, par ailleurs, la condamnation in solidum des défendeurs à des dommages-intérêts pour atteinte à leur marque notoire et à leurs signes distinctifs ainsi que le prononcé à leur encontre de diverses mesures réparatrices, elles entendent voir ordonner, s’agissant plus précisément de ces deux marques, la remise en état des choses dans lequel elles se trouvaient avant la conclusion du contrat du 21 juin 2001, avec retour de ces marques entre les mains de Monsieur Mecheri entre lesquelles 'l’Agence Elite’ ou la société Elite Licensing Company SA (selon les termes alternatifs du dispositif de leurs dernières conclusions, pages 71 puis 73/161) les revendique ;

Que, pour ce faire, elles invoquent, sur le fondement des articles 1108, 1128, 1131 et 1133 du code civil la nullité absolue dudit contrat dont l’objet était, selon elles, illicite puisqu’il portait sur des marques déposées frauduleusement et dont la cause l’était également du fait que le transfert dans le patrimoine de la société Grant Finance & Co a été effectué en violation des droits des sociétés Elite ;

Qu’en réplique Monsieur Mecheri soutient que la convention qu’il a signée le 21 juin 2004 ne saurait être annulée en raison de la parfaite régularité de cette cession de marques, ceci à titre gracieux ; qu’il expose que la rupture de ses relations avec les sociétés Elite l’a conduit, de bonne foi, à s’en séparer et à choisir la société Grant Finance en sa qualité d’actionnaire de la société Elite-Men qui avait vocation à les exploiter ; qu’aucune suspicion ne pouvant planer sur la régularité de cette cession ou son inscription au RNM, il en conclut que la société Grant Finance & Co est bien propriétaire de ces

marques et que cette inscription rend la cession intervenue opposable aux appelantes ;

Considérant, ceci rappelé, qu’il résulte de ce qui précède que les sociétés Elite ont été déclarées fondées en leur action en revendication ; que le triomphe de leur action a pour effet de subroger rétroactivement la société Elite Licensing SA, requérante à ce titre, dans les droits du déposant ayant agi de mauvaise foi et de permettre l’inscription de la requérante au RNM en qualité de nouveau titulaire ;

Que, tiers au contrat de cession de ces marques, elles ne peuvent en poursuivre la nullité, en vertu du principe de la relativité des conventions selon lequel elles n’ont d’effet qu’entre les parties contractantes, ceci par application de l’article 1165 du code civil, mais tout au plus demander qu’il leur soit déclaré inopposable ;

Qu’il convient de considérer qu’en cédant à une société tierce les deux marques en cause, Monsieur Mecheri, dont il a été démontré qu’il avait procédé à leur enregistrement en fraude des droits des sociétés Elite, ne pouvait qu’avoir connaissance du préjudice qu’il leur causait en les soustrayant de l’actif de son patrimoine et en les privant, ce faisant, de la faculté de lui réclamer le transfert desdites marques ;

Que, s’agissant de la fraude susceptible d’être imputée à la société Grant Finance & Co, les assertions de Monsieur Mecheri selon lesquelles ces deux marques, comme les six autres marques cédées, l’ont été à titre gratuit n’emportent pas la conviction de la cour ;

Qu’en effet, dans la logique des affirmations de Monsieur Mecheri prétendant avoir procédé à l’enregistrement de ces marques afin qu’elles bénéficient aux sociétés Elite et/ou à la société Elitmodel.com SA créée, une cession à titre gratuit au profit de ces dernières aurait pu se concevoir ; qu’il n’en a rien été puisque la cession est intervenue au profit de la société Grant Finance & Co, étant précisé qu’à la date du 13 juin 2003 (pièce 14 des appelantes), lors d’une assemblée générale extraordinaire de la société Protector Lux SA qui n’avait aucun lien avec les sociétés Elite, celle-ci a changé de dénomination sociale pour devenir la société Elite-Men SA et qu’elle a désigné parmi ses administrateurs la société Grant Finance & Co SA et Monsieur Mourad Mecheri (ce dernier précisant dans ses dernières conclusions, en page 16/18, que la société Grant Finance et lui même contrôlaient cette société) ;

Qu’en outre, cette affirmation se trouve contredite par les termes de la convention du 21 juin 2004 versée aux débats qui évoque un règlement, hors convention, entre les parties et par la lettre du

Conseil en propriété industrielle, produite par Monsieur Mecheri lui-même, qui fait état d’un rachat ;

Que cela conduit à considérer que cette cession n’est pas intervenue sans contrepartie mais qu’elle résulte d’un concert frauduleux entre Monsieur Mecheri et la société Grant Finance & Co SA (dont il peut, incidemment, être relevé qu’elle n’a pas constitué avocat en cause d’appel pour venir soutenir qu’elle a agi de bonne foi mais qui avait le même conseil que Monsieur Mecheri en première instance, montrant ainsi implicitement qu’elle ne considérait pas être en conflit d’intérêts avec Monsieur Mecheri) et que, faute de pouvoir retenir la bonne foi de cette société, la cour ne peut que conclure que cette cession frauduleuse est inopposable aux sociétés Elite ;

Que la révocation de la cession intervenue le 21 juin 2004 a donc pour effet de la rendre inopposable à la société Elite Licensing SA poursuivante à ce titre et à permettre à cette dernière, d’une part, d’être subrogée dans les droits frauduleusement entrés dans le patrimoine de la société Grant Finance & Co SA, et, d’autre part, d’agir en revendication des deux marques litigieuses à son encontre, ceci sans préjudice d’une action indemnitaire à son encontre susceptible d’être accueillie s’il est démontré que la société Grant Finance & Co a commis, indépendant du concert frauduleux ainsi retenu, des faits distincts générateurs d’un préjudice distinctement subi par les sociétés Elite ;

Qu’il sera, par conséquent, ajouté au jugement dans ce sens ;

Sur l’atteinte aux marques notoires de l’Agence Elite revendiquées par les appelantes

Considérant que les quatre sociétés appelantes poursuivent la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré :

— d’une part, qu’en déposant la marque ''' elite'(carré elite), n° 02 3.167.036 et en réservant les noms de domaine 'carre.elite.com', 'elite-men.com', 'elite-primebook.com’ et 'eliteprimebook.com', Monsieur Mecheri a exploité de manière injustifiée la marque notoire non enregistrée 'elite’ de la société Elite Model Mangement SARL au sens des dispositions de l’article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle,

— d’autre part, qu’en se faisant céder ladite marque, la société Grant Finance & Co a exploité de manière injustifiée ladite marque notoire de la société Elite Model Management SARL, au sens ce ces mêmes dispositions,

mais en poursuivent l’infirmation pour le surplus en demandant à la cour de considérer que par ces mêmes agissements, les intimés ont exploité de manière injustifiée leurs douze marques françaises,

communautaires et internationales enregistrées, au sens de ces mêmes dispositions ;

Considérant qu’en réplique, Monsieur Mecheri ne conteste pas la notoriété de la marque semi-figurative non enregistrée ;

Qu’il objecte, toutefois :

— que seules les six marques 'elite Model Management', 'elite +' 'PI7CEADVERSE B2.2°' (sic), 'elite Models Fashion', 'elite Super Model', elite Models Studio’ et 'elite Model Look’ sont bien exploitées mais que si elles bénéficient d’une importante couverture médiatique, elles ne sont pas pour autant connues d’une partie significative du public concerné par les produits et services qu’elles couvrent et ne bénéficient pas d’une reconnaissance suffisante,

— qu’il en va de même du logo 'e’ non enregistré en dépit de sa large exploitation et de la publicité dont il bénéficie,

— que les demanderesses ne peuvent se prévaloir valablement de marques qui n’ont pas fait l’objet de renouvellement et que tel est le cas des marques 'elite Model Management', 'elite +', 'elite super model’ et 'elite Model Loof (sic)',

— que la preuve n’est pas rapportée d’une exploitation sérieuse des douze marques revendiquées, de sorte que leurs titulaires respectifs doivent être déchus de leurs droits sur chacune de ces marques, ainsi qu’en a jugé le tribunal ;

Qu’il conclut qu’en toute hypothèse, il ne saurait être condamné puisque l’atteinte ne peut être caractérisée, à son sens, que 'si son exploitation est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière', selon les termes de l’article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle, et qu’il n’y a jamais eu une quelconque exploitation des marques qu’il a enregistrées ;

Sur le caractère notoire de la marque semi-figurative non enregistrée 'elite’ et l’atteinte incriminée

Considérant que par motifs pertinents que la cour adopte, le tribunal a retenu le caractère notoire de cette marque non enregistrée, relevant incidemment comme il peut l’être en cause d’appel, que cette notoriété n’était pas contestée par la partie défenderesse ;

Considérant, s’agissant de l’atteinte à cette marque notoire par l’enregistrement de deux marques et de quatre noms de domaine par Monsieur Mecheri qui les a cédés à la société Grant Finance & Co, que l’article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle venant protéger les signes ayant un pouvoir d’attraction propre,

indépendamment des produits et services désignés, et qui doit être interprété à la lumière de l’article 5 § 2 de la directive d’harmonisation (CE) n° 104/89 (devenu l’article 5 § 2 de la direct ive 2008/95/CE) tel qu’interprété par la Cour de justice dispose :

'La reproduction ou l’imitation d’une marque jouissant d’une renommée pour des produits ou services non similaires à ceux désignés dans l’enregistrement engage la responsabilité civile de son auteur si elle est de nature à porter préjudice au propriétaire de la marque ou si cette reproduction ou imitation constitue une exploitation injustifiée de cette dernière’ ;

Qu’il résulte, en outre, de la jurisprudence communautaire que la protection spécifique en cause doit être accordée au titulaire de la marque renommée aussi bien pour des produits ou des services non identiques ou non similaires que pour des produits ou des services similaires couverts par celle-ci (CJCE, 23 octobre 2003, Adidas) ;

Que Monsieur Mecheri soutenant que les conditions auxquelles est subordonné le bénéfice de cette protection ne sont pas satisfaites, il appartient au titulaire de la marque renommée de rapporter la preuve que l’usage du signe postérieur constitue une atteinte à cette marque ;

Qu’à cet égard, la Cour de Justice de l’Union Européenne a dit pour droit (arrêt CJCE Intel du 27 novembre 2008 invoqué par les appelantes) que cette atteinte, qui ne peut se produire que si le public établit un lien entre les marques alors même qu’il ne les confond pas, est constituée lorsque l’usage du signe second porte préjudice au caractère distinctif de la marque ou à sa renommée ou bien lorsqu’il est indûment tiré profit de son caractère distinctif ou de sa renommée ;

Que, selon cet arrêt, l’existence de ce lien doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce et selon divers critères tenant au degré de similitude entre les marques en conflit, à la nature des produits et services désignés dans l’enregistrement, à l’intensité de la renommée, au caractère distinctif de la marque, précisant qu’un lien entre les marques en conflit est nécessairement établi en cas de risque de confusion ;

Considérant qu’en ce qui concerne le degré de similitude entre les signes – lequel doit être apprécié globalement et fondé sur l’impression d’ensemble produite par les marques en tenant compte, notamment, de leurs éléments distinctifs et dominants – il convient de relever que les deux marques opposées sont des marques verbales ;

Qu’en l’espèce la marque renommée figurative ne comprend que le terme 'elite', écrit en minuscules, avec une accentuation des lettres 'e', initiale et finale, adoptant la forme d’un cercle presque fermé et

barré d’un trait horizontal, les lettres 'lit’ resserrées au centre du signe ;

Que la marque contestée ''' elite’ reprend à l’identique le graphisme de la marque notoire en le faisant précéder d’un carré ;

Que la parenté visuelle de ces deux signes, la circonstance que le carré compris dans le signe second ne sera perçu que comme un élément décoratif, le fait que le public aura tendance à ne prononcer que le terme 'élite’ en présence du signe second et que la proximité de ces deux signes le conduira à les associer en pensant que les produits ou services qu’ils désignent proviennent de la même entreprise ou d’entreprises liées économiquement conduisent à considérer que le public établira un lien entre les signes en cause ;

Que ce point ne fait, d’ailleurs, pas l’objet de contestation par l’intimé constitué, pas plus que la satisfaction des autres critères dégagés par la Cour de Justice, en particulier le fait que la renommée de la marque 'elite’ s’étend au delà du public concerné ou qu’elle possède un fort pouvoir distinctif ;

Qu’il ne conteste pas davantage le lien que fera le public entre la marque notoire 'elite’ et les quatre noms de domaine réservés par Monsieur M, à savoir : 'carre.elite.com', 'elite-men.com', 'elite- primebook.com’ et 'eliteprimebook.com’ ;

Considérant, s’agissant de l’effectivité des atteintes à la marque notoire 'elite’ en revanche contestée par l’intimé, que les appelantes ne peuvent arguer du préjudice porté au caractère distinctif de la marque dès lors qu’elles ne démontrent pas une modification du comportement économique du consommateur moyen des produits ou services couverts par la marque notoire 'elite’ consécutivement à l’enregistrement de la marque ''' elite’ ou des noms de domaine litigieux pas plus que le risque sérieux qu’une telle modification se produise dans le futur du fait de l’affaiblissement du caractère distinctif de leur marque ;

Qu’elles n’établissent pas davantage que les produits ou services désignés par la marque ''' elite’ ou auxquels renvoient les noms de domaine litigieux sont susceptibles de ternir l’image véhiculée par leur marque et à invoquer, par conséquent, le préjudice affectant sa renommée;

Qu’en revanche, elles sont fondées à se prévaloir du profit indûment tiré par Monsieur M et la société Grant Finance & Co de la renommée de la marque 'elite', appréciée du chef du consommateur moyen des produits ou services pour lesquels la marque postérieure a été enregistrée, dès lors que les caractéristiques habituellement associées à la marque 'elite’ pour les produits ou services en cause sont aptes à apporter un profit aux produits et services désignés par

la marque ''' elite’ ou auxquels renvoient les noms de domaine litigieux ;

Qu’à cet égard, il n’est pas nécessaire que le signe litigieux ait été mis en contact avec la clientèle ou exploité hors de la sphère privée de la vie de l’entreprise pour être considéré comme un acte accompli dans la vie des affaires ; que Monsieur Mecheri reconnaît lui-même qu’il a fait usage, (dans le sens large que lui donne l’article 5 § 3 de la directive précitée employant le terme 'notamment') de cette marque lorsqu’il écrit (page 10/18 de ses conclusions) que la cession n’a été motivée que par le souhait de Monsieur Mecheri de transférer dans le patrimoine de la société Grant Finance en sa qualité d’actionnaire de la société Elite Men la propriété des marques que cette dernière avait vocation à exploiter’ ;

Qu’il suit qu’à juste titre, les appelantes se prévalent de l’atteinte portée à la renommée de le marque 'elite’ du fait de la volonté des intimés de tirer indûment profit de leur marque notoire ;

Sur le moyen tiré du défaut de renouvellement des marques 'elite Model Mangement', 'elite +', 'elite super model’ et 'elite Model Look'

Considérant qu’en dépit des affirmations de Monsieur Mecheri qui se borne à citer ces quatre marques sans procéder à l’examen des pièces que lui opposent les appelantes sur ce point, celles-ci ont fait l’objet de renouvellements réguliers, puisque ressort de ces pièces :

— que la marque 'elite Model Mangement’ n° 1 057 26 9 renouvelée sous le n° 1 057 269 a été enregistrée le 25 septem bre 1978 et renouvelée le 27 mai 2008,

— que la marque 'elite +' n° 96 621 973 a été enreg istrée le 19 avril 1996 et renouvelée le 31 octobre 2006,

— que la marque 'elite supermodel’ n° 97 700 699 a été enregistrée le 22 octobre 1997 et renouvelée le 09 octobre 2007,

— que la marque 'elite Modele Look’ n° 000749770 a été enregistrée le 11 février 1998 et renouvelée le 19 février 2004 ;

Que ce moyen ne saurait prospérer ;

Sur le moyen tiré du défaut d’exploitation sérieuse de ces douze marques

Considérant que pour affirmer qu’aucune des douze marques enregistrées revendiquée ne peut lui être opposée, Monsieur Mecheri soutient que preuve doit être rapportée d’un usage sérieux et ininterrompu 'sur les cinq dernières années’ pour

l’ensemble des produits et services visés à l’enregistrement, conformément à l’article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle, et que tel n’est pas le cas en l’espèce ;

Qu’ il ajoute que les pièces adverses versées aux débats ne permettent pas d’établir que, depuis 2005, lesdites marques sont effectivement exploitées pour chacun des produits ou services concernés ;

Que les appelantes qui se sont vues déchues de leurs droits sur ces marques précisent en réponse que la demande reconventionnelle des défendeurs à l’action n’a été formée en première instance que près de deux ans après l’introduction de l’instance, qu’elles n’ont disposé que d’un très bref délai pour rassembler des preuves d’usage sur lesquelles ces derniers se sont abstenus de procéder à un examen circonstancié ; que, de la même façon, elles font grief aux premiers juges d’avoir méconnu tant les dispositions de l’article 74 du Règlement CE 40/94 (reprises à l’article 76 du Règlement CE 207/2009) que les règles d’application de l’article L 714-5 du code de la propriété intellectuelle en ne se prononçant pas sur les preuves d’usage qu’elles produisaient ;

Qu’elles estiment que la décision des premiers juges est d’autant plus surprenante que dans leurs dernières conclusions de première instance (conclusions du 03 juin 2010, pages 15 et 16 – pièce 226 des appelantes), Monsieur Mecheri et la société Grant Finance & Co écrivaient :

'Les documents précités permettent en effet uniquement de démontrer que les marques semi-figuratives 'elite Model Management', 'elite +', 'elite models fashion', 'elite super model', 'elite models studio’ 'elite model look’ sont bien exploitées et bénéficient d’une importante couverture médiatique',

relevant que Monsieur Mecheri soutient de la même façon, dans ses dernières conclusions d’appel et dans le chapitre II qu’il consacre à la notoriété et à la renommée des marques en litige (page 13/18), que 'les documents précités permettent en effet de démontrer (que ces six mêmes marques) sont bien exploitées et bénéficient d’une importante couverture médiatique mais non qu’elles sont, telles que déposées, véritablement connues (…)' ;

Considérant, ceci exposé, que force est de constater que l’argumentation de Monsieur M tient en la formule lapidaire sus- reprise et que, ce faisant, il se dispense de tout examen de l’ensemble des pièces que les appelantes ont produites en cause d’appel pour en attester (pièce 62 constituée de deux CD Rom contenant deux tomes) ;

Qu’en outre, nul ne pouvant se contredire au détriment d’autrui, il y a lieu de considérer que le moyen de Monsieur Mecheri tendant (au décours du chapitre III de ses conclusions) à voir prononcer la déchéance de l’ensemble des douze marques qui lui sont opposées ne peut sérieusement porter sur les six marques précitées dont il affirme qu’elles sont 'bien exploitées’ par leur titulaire ;

Qu’en toute hypothèse, l’examen du CD Rom auquel la cour s’est livrée révèle l’existence d’une importante compilation de preuves d’usage (en copie) qui permettent de considérer que les sociétés appelantes peuvent se prévaloir, comme elles le font :

— de nombreuses photographies de soin capillaire sur lesquelles est apposée la marque 'elite Modele Studio’ publiées dans la brochure 'Elite Attitude 2006" et dans les plaquettes de présentation de l’agence Elite en 2006 et 2007, de lieux de prestation de services,

— de la brochure de présentation du parfum Elite Miami Edition appartenant à la gamme Elite Model Look et de la brochure de présentation de la société Arthes, licenciée en charge de la fabrication de ses parfums, de la fin de l’année 2005,

— de grilles tarifaires, bons de commande, factures, facturations de royalties, documents douaniers relatifs à des commandes de produits du domaine du soin de la personne, revêtus des marques dont il est affirmé qu’elles ne sont pas exploitées, de déclarations de chiffre d’affaires,

— des catalogues 2007 et 2008 présentant des produits de maquillage, des accessoires de manucure et de maquillage revêtus des marques dont l’usage est contesté, et concernant les produits de parfums 'Elite Model Look',

— de la revue de presse pour la période s’étendant du mois d’octobre 2005 au mois d’octobre 2006 dédiée au Centre de Beauté de 'l’Agence Elite',

— d’articles de presse, des années 2004, 2005 et 2006, mentionnant les produits de beauté qu’elles commercialisent,

— de preuves d’usage complémentaires tels les relevés des chiffres d’affaire de ventes au détail estimés pour les années 2005 à 2008 (pièce 227) ;

Qu’il en résulte que ne saurait prospérer le moyen de Monsieur Mecheri tiré de l’absence d’usage sérieux de ces marques pour les produits et services visés à leur enregistrement, nullement argumenté factuellement et empreint de contradictions internes, et que le jugement qui a prononcé la déchéance des sociétés

appelantes sur leurs marques respectives doit être infirmé de ce chef ;

Sur la notoriété des douze marques enregistrées revendiquée par les appelantes

Considérant que les sociétés appelantes poursuivent, comme il a été dit, l’infirmation du jugement qui a dénié à ces marques françaises, communautaires et internationales leur caractère de marques notoires, entendant voir juger, de plus, que la marque semi-figurative ''' elite’ déposée par Monsieur Mecheri ainsi que les quatre noms de domaine qu’il a réservés portent atteinte à ces marques notoires dont ces signes constituent l’imitation du fait de leur exploitation injustifiée au sens des dispositions de l’article L 713-5 du code de la propriété intellectuelle ;

Que Monsieur Mecheri réplique que la notoriété doit être appréciée au regard des parts de marché qu’elles occupent, de leur ancienneté, de la durée de leur usage et du budget consacré à leur publicité et que si certaines d’entre elles sont bien exploitées et bénéficient d’une importantes couverture médiatique, elles ne sont pas véritablement connues d’une partie significative du public concerné pour les produits et services qu’elles couvrent ;

Considérant, ceci rappelé, que la protection spéciale organisée par les articles 9 § 1 sous c) du Règlement CE 207/2009 du Conseil sur la marque communautaire et L 713-5 du code de la propriété intellectuelle suppose la réunion d’un certain nombre de critères pertinents ;

Qu’ainsi, la Cour de justice de la communauté européenne a dit pour droit (CJCE, 14 sept. 1999, Chevy, points 23 à 27) que la condition de notoriété implique un certain degré de connaissance de la marque antérieure par le public, que le public parmi lequel la marque antérieure doit avoir acquis une renommée est celui concerné par cette marque, c’est à dire en fonction du produit ou du service commercialisé, soit le grand public, soit un public spécialisé, par exemple un milieu professionnel donné ;

Qu’en outre, le degré de connaissance doit être considéré comme atteint lorsque la marque antérieure est connue d’une partie signifiante du public concerné par les produits ou services couverts par cette marque et que, dans l’examen de cette condition, le juge national doit prendre en considération tous les éléments pertinents de la cause, à savoir, notamment, la part de marché détenue par la marque, l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, ainsi que l’importance des investissements réalisés pour la promouvoir ;

Que si les appelantes, dans une approche globalisante, font valoir que toutes ces marques sont constituées du terme dominant 'elite', notoire depuis 1994, au surplus sous sa forme semi-figurative, qui constitue l’élément phare, d’attaque et distinctif de chacune et que leurs autres éléments sont descriptifs des activités et services proposés par le signe envisagé dans son ensemble, il convient de considérer qu’un signe doit permettre de percevoir le produit ou le service comme provenant d’une entreprise déterminée et pas d’une autre, qu’en l’espèce les signes revendiqués ont été enregistrés par des personnes morales distinctes et que l’inclusion du terme notoire 'elite’ ne peut être considéré que comme l’un des facteurs pertinents d’appréciation ;

Que cela ne peut donc dispenser la cour de procéder à l’examen de la notoriété de chacune en regard, en particulier, de la pièce 3 produite par les appelantes et intitulé 'dossier de notoriété – tomes 1 – 9" reproduit dans un CD Rom, étant, d’emblée, relevé que les éléments produits ne font pas l’objet d’une classification rigoureuse, marque par marque, ce qui contraint la cour à les identifier elle- même au sein de la masse produite ;

1) s’agissant de la marque française semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 1.057.269, déposée par la soc iété Elite Model Management SARL et enregistrée le 25 septembre 1978 pour les produits et services relevant des classes 35, 41 et 42.

Cette marque n’apparaît que très ponctuellement dans l’ensemble de la documentation produite, notamment lorsqu’est incidemment évoqué un contrat passé avec cette société. Rien ne vient justifier du rayonnement ou des parts de marché acquises par cette marque.

2) s’agissant de la marque française verbale 'Elite+', n° 96 621 973, déposée par la société de droit suisse Elite Model Management SA et enregistrée le 19 avril 1996 en classes 35, 41 et 42.

Une même remarque s’impose sur les preuves de la notoriété de cette marque française.

3) s’agissant de la marque française semi-figurative ' elite Models fashion, n° 96 637 865, déposée par la société de d roit suisse Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 août 1996, en classes 3, 14, 16, 18 et 25,

Les tomes 7 et 8 des appelantes relatifs aux preuves de la notoriété contiennent des éléments journalistiques issus de la presse, essentiellement locale ou spécialisée.

Outre les observations ci-dessus qui peuvent être reprises, il n’est pas fourni d’éléments sur l’ampleur de leur diffusion auprès du public, pas plus que sur l’ancienneté de cette marque ou sur son intensité.

4) la marque française verbale 'Elite Super Model', n° 96 700 699, déposée par la société Elite Model Management SARL et enregistrée le 22 octobre 1997 en classes 9, 14, 18 et 25,

Cette marque n’apparaît que de manière extrêmement marginale dans les documents, essentiellement dans des articles de presse.

5) s’agissant de la marque française semi-figurative 'elite Models’Studio', n° 01 3 122 417, déposée par la soc iété Elite Licensing Company SA et enregistrée le 24 septembre 2001 en classe 3.

La documentation produite, exempte d’éléments chiffrés susceptibles d’être considérés comme des éléments pertinents au sens de la jurisprudence communautaire sus-évoquée, se révèle insuffisante pour rapporter la preuve de la notoriété de cette marque destinée à désigner les soins d’hygiène et de beauté, les salons de coiffure et les services de manucure.

6) s’agissant de la marque communautaire verbale 'Elite Model Look', n° 749 770, déposée par la société Elite Lic ensing Company SA enregistrée le 19 février 2004 en classes 3 et 16,

De nombreux documents sont produits au soutien de la demande. Ils s’agit d’articles de presse évoquant le concours de mannequins organisé ou qui sont consacrés aux modalités d’accès à ce concours permettant de faire défiler dans 80 pays plus de 15.000 jeunes filles, relayant la volonté affichée de ses organisateurs de s’ouvrir vers les banlieues ou des lieux plus exotiques comme l’île de la Réunion, faisant pour cela état d’ 'orientations vers des profils métissés’ (objets de polémiques), s’attachant à montrer des top-modèles découvertes par l’agence Elite ou devenues célèbres depuis Linda E.

Il est également justifié de réclames publicitaires interpellant le public avec la phrase 'toi aussi, deviens Top Model'.

Il n’en demeure pas moins que l’affiche publicitaire évoquée, et dont la cour ignore la diffusion, porte certes la mention en bas de page’Elite Model Look', mais surdimensionne en son centre la simple marque notoire non enregistrée 'elite'.

Plus généralement, il est davantage question dans les documents produits de 'l’agence Elite’ ou 'des agences Elite’ que de la marque 'Elite Model Look’ renvoyant aux produits et services couverts par la marque enregistrée et à son titulaire, la société Elite Licensing Company SA.

Les sondages produits ne permettent pas davantage d’admettre que cette marque 'Elite Model Look’ est connue d’une part significative du

public, le sondage Sofres d’avril 1996 révélant seulement qu’en France, une jeune fille sur deux qui connaît 'l’Agence Elite’ est capable de la citer spontanément et que le sondage Ipsos de 2002 ne pose que la question : 'connaissez-vous 'la marque Elite '' avec 55 % de réponses positives.

7) s’agissant de la marque communautaire verbale 'Elite Models Studio', n° 2 143 915, déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 12 avril 2002 en classe 42,

Les pièces versées aux débats appellent les mêmes remarques que précédemment au point 5.

8) s’agissant de la marque communautaire semi-figurative 'elite Model Look', n° 000 383 109, déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 20 décembre 1999 en classe 41.

Cette marque est souvent figurée en fond de décor, sur la scène où se déroule le concours, et la plupart du temps accompagnée d’un nom de lieu ou d’une date.

Peuvent être reprises les mêmes remarques que celles développées sur la marque communautaire verbale 'Elite Model Look’ ci-dessus au point 6.

9) s’agissant de la marque communautaire semi-figurative ' elite Models fashion, n° 000 345 926, déposée le 07 août 1996, enregistrée par la société Elite Licensing Company SA le 27 juin 2002, en classes 3, 14, 16, 18 et 25.

La documentation versée atteste de l’usage de la marque apposée sur des produits tels que des montres, des lunettes, des téléphones portables ou encore des accessoires liés à l’univers de divers véhicules.

Elle ne permet cependant pas de satisfaire aux conditions posées par la juridiction communautaire.

10) s’agissant de la marque française semi-figurative 'elite Models fashion', n° 96 637 865, désignant la France déposé e par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 38 et 41.

Les pièces versées aux débats appellent les mêmes remarques que précédemment au point 9.

11) s’agissant de la marque internationale semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 663 734, désignant la France déposée par la société Elite Model Management SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 35, 41 et 42,

Les pièces versées aux débats appellent les mêmes remarques que précédemment au point 1.

12) s’agissant de la marque internationale semi-figurative 'Elite Models’ studio', n° 780 157, désignant la France dé posée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 mai 2002 en classes 9, 16 et 41.

Les pièces versées aux débats appellent les mêmes remarques que précédemment au point 5 ;

Qu’il convient de conclure qu’aucune de ces marques ne peut être considérée comme une marque notoire, telle que définie, dans la mesure où la présence en leur sein du signe notoire non enregistré 'elite’ ne suffit pas à les rendre notoires et que si, comme le soutient Monsieur Mecheri, elles bénéficient d’une couverture médiatique non contestable pour certaines, ne sont pas pris en compte les enseignements de la juridiction communautaire qui auraient dû conduire les appelantes à s’attacher à des éléments tels que la part de marché détenue par chacune de ces marques, prise isolément, à l’intensité, l’étendue géographique et la durée de son usage, ainsi qu’à l’importance des investissements réalisés pour la promouvoir ;

Que les appelantes échouent par conséquent à démontrer que ces douze marques peuvent être considérées comme des marques notoires ;

Qu’elles doivent donc être déboutées de ce chef de prétentions et, subséquemment, de celles relatives aux atteintes à leur notoriété dont elles se prévalent ;

Sur l’imitation du nom commercial et de l’enseigne 'e’ des appelantes

Considérant que les appelantes poursuivent l’infirmation du jugement en qu’il énonce, pour conclure au rejet de leur demande de ce chef, que le 'dossier de notoriété versé aux débats', s’il permet de justifier d’un usage du signe 'e’ pour distinguer des produits commercialisés par ou en partenariat avec les sociétés Elite, et donc d’un usage à titre de marque, ne démontre nullement que ce signe 'e’ constitue le nom commercial et l’enseigne de 'l’Agence Elite', laquelle serait constituée par l’ensemble des sociétés demanderesses ;

Qu’elles font valoir que ce signe qui se présente comme étant parfaitement circulaire, traversé en sa moitié par une barre horizontale, en dessous de laquelle et sur le côté droit le cercle extérieur est interrompu, épais et de couleur noire sur fond blanc, est un signe très particulier dont la distinctivité réside dans sa stylisation ; que l’enseigne et le nom commercial 'e’ constituent des identifiants commerciaux incontournables de 'l’Agence Elite’ comme référence à

la marque notoire 'elite’ et que ce signe non enregistré constitue sans conteste, selon elles, une enseigne et un nom commercial protégeable à ce titre par les dispositions des articles L 711-4 sous c) du code de la propriété intellectuelle et 1382 du code civil ;

Qu’elles font grief à Monsieur Mecheri d’avoir, en connaissance de cause et dans l’intention de leur nuire, enregistré la marque française 'e-limited’ qui plus est pour des produits et services 'couverts’ (sic) par l’enseigne et le nom commercial 'e', réservé le nom de domaine 'e-limited-magazine.com', reproduit ce signe 'e’ sur le site internet, en marge de l’adresse URL 'www.e-limited-magazine.com’ alors qu’elles le reproduisaient de la même façon en marge de leur adresse URL ;

Qu’en réplique, Monsieur Mecheri soutient que ce signe 'e’ est, certes, exploité depuis plusieurs années et bénéficie d’une certaine publicité mais qu’il ne fait pas l’objet d’une reconnaissance par le grand public ;

Considérant, ceci rappelé, qu’il convient de relever que le double fondement juridique de l’action, tel que présenté, conduit à distinguer ce qui relève de la validité de la marque enregistrée en regard des dispositions de l’article L 711-4 sous c) précité de ce qui relève de l’usage du signe contesté qui ne peut être sanctionné sur le fondement de la responsabilité civile de droit commun que s’il est fait la démonstration d’un risque de confusion ;

Que, pour rapporter la preuve de l’usage à titre d’enseigne et de nom commercial du signe 'e’ par 'l’Agence Elite’ depuis 1997, les appelantes évoquent trois éléments tenant, pour le premier, à un contrat de partenariat conclu avec le constructeur automobile Renault pour le lancement et la promotion de sa 'Twingo e', pour le deuxième, à son usage dans le cadre des concours de mannequins organisés en 1997, 1998 et 2006 et, pour le dernier, à son apposition sur différents produits dérivés (prêt-à-porter féminin, accessoires de mode, produits cosmétiques, produits de maroquinerie, bijoux, téléphones mobiles, etc.) ; qu’elles ajoutent que le public associe indubitablement l’enseigne et le nom commercial 'e’ à 'l’Agence Elite’ lui conférant une renommée indiscutable, aussi incontestable que la notoriété des marques 'elite';

Que, s’agissant de la contestation de la validité de la marque enregistrée 'e-limited', il convient de rappeler que le nom commercial et l’enseigne sont des signes distinctifs qui se distinguent d’une marque enregistrée en ce qu’ils n’ont pas pour objet d’identifier directement des produits ou des services mais, pour le nom commercial, un fonds de commerce et, pour l’enseigne, un lieu d’exploitation commerciale ;

Que les trois types d’usage allégués ne caractérisent qu’une exploitation directe de ce signe sur des produits ou des services qui

constituent l’objet de l’activité de 'l’Agence Elite', mais il n’est pas démontré qu’ils désignent le fonds de commerce et le lieu d’exploitation d’une personne morale ;

Qu’il peut être incidemment relevé que les appelantes ne s’expliquent pas sur la concomitance de cette revendication du signe 'e’ comme nom commercial et enseigne et de leur revendication précisée aux § 4 et 5 de leurs écritures (page 5/161) selon laquelle 'les premiers droits de propriété intellectuelle de l’Agence Elite ont pour origine la société fondatrice de l’Agence : la société Elite Model Management dont le nom commercial et l’enseigne sont 'elite'. Ce nom commercial et cette enseigne sont exploités depuis quarante ans. Tous ces signes distinctifs sont composés du radical principal et dominant 'Elite’ ;

Que leur action ne saurait donc prospérer sur le fondement de l’article L 711-4 précité qui ne réserve une priorité d’usage sur une marque dont l’enregistrement est demandé, ou qui été enregistrée, qu’à 'une enseigne ou à un nom commercial', ceci de façon limitative ;

Que, s’agissant de l’atteinte portée par la marque 'e-limited’ aux nom commercial et enseigne revendiqués qui pourrait être sanctionnée sur le fondement de l’article 1382 du code civil, outre ce qui vient d’être dit sur lesdits nom commercial et enseigne, il peut être ajouté que cette action suppose que soit démontrée l’exploitation de ce signe par un concurrent, condition nécessaire pour apprécier le risque de confusion, et que ce signe, en raison de sa distinctivité, soit apte à exercer une véritable fonction d’identification d’une origine, Monsieur Mecheri faisant justement valoir, à cet égard, que la lettre 'e’ a vocation à être considérée par les internautes uniquement comme le symbole de l’internet ; qu’en toute hypothèse, les démonstrations requises ne sont pas faites ;

Que l’action des appelantes à ce titre n’est, par conséquent, pas davantage fondée ;

Sur la demande présentée à titre subsidiaire

Considérant que les appelantes rappellent qu’elles ont été déboutées de leur action en contrefaçon par imitation 'des marques de l’agence Elite’ fondée sur l’article 713-3 sous b) du code de la propriété intellectuelle au motif qu’elles s’abstenaient de procéder à une comparaison des produits et estiment qu’elles n’étaient pas tenues de le faire puisqu’elles arguaient, à titre principal, du dépôt frauduleux des deux marques litigieuses et de la notoriété évidente ainsi que de la protection étendue 'des marques de l’Agence Elite’ ; qu’en tout état de cause, elles renvoient la cour à une annexe I sur le support de laquelle elles procèdent à une analyse comparative des

produits et services couverts par la marque ''' elite'(carré elite), n° 02 3.167.036 et ceux que désignent les douze marques revendiquées ;

Considérant, ceci rappelé, que la cour est conduite à constater que les appelantes ne précisent pas de quelle action à titre principal qui aurait été rejetée cette demande est le subsidiaire, alors que la demande principale des appelantes se divise en plusieurs chefs de réclamation nécessitant d’être appréhendés distinctement ;

Qu’en outre, l’examen des préjudices subis – présentés dans les écritures des appelantes en pages 66 et suivantes/191 – ne révèle aucun préjudice particulier résultant d’une contrefaçon par imitation (seule étant invoquée 'l’atteinte à leurs marques notoires y compris la marque notoire non enregistrée 'elite’ ') ni aucune demande particulière au profit de chacune des personnes morales titulaires desdites marques alors que leur titulaire est, pour quatre d’entre elles, la société Elite Model Management et, pour les huit autres, la société Elite Licensing Company ;

Que les réserves relatives à la pertinence de cette prétention subsidiaire ainsi présentée se retrouvent dans l’examen du dispositif qui, selon l’article 954 du code de procédure civile, est seul à lier la cour puisque les demandes indemnitaires ne sont présentées que comme venant réparer le préjudice résultant de l’atteinte à la marque notoire non enregistrée 'elite', d’une part, à la dénomination sociale, au nom commercial et à l’enseigne 'elite', d’autre part, ceci au profit de la société Elite Model Mangement SARL, déjà réparé, à l’exclusion de demandes indemnitaires résultant de faits de contrefaçon par imitation préjudiciables aux titulaires respectifs de ces marques ; que la demande d’interdiction explicitée au dispositif ne porte que sur la cessation de la reproduction ou de l’usage des 'marques notoires’ revendiquées par les quatre sociétés appelantes ;

Qu’eu égard à l’ensemble de ces éléments, la cour est conduite à considérer qu’il n’y a pas lieu de se prononcer sur la demande subsidiaire telle que présentée ;

Sur les mesures réparatrices

Considérant que, formant appel incident, Monsieur Mecheri argue d’une absence de préjudice en exposant que les marques et noms de domaine litigieux avaient vocation à être utilisés dans le cadre du développement du segment-homme du groupe Elite à travers une société indépendante contrôlée par la société Grant Finance & Co et lui-même, que la société Elite-Men constituée s’est rapidement trouvée en faillite après que les parties ont cessé toute relation, qu’ils ne se sont jamais opposés à un transfert de ces signes qui aurait très bien pu être effectué si une demande amiable leur avait été faite ;

Que le seul dessein des appelantes est, selon lui, de faire cesser une atteinte qui n’existe pas, les signes litigieux n’ayant pas fait l’objet d’une exploitation véritable comme le révèlent les procès- verbaux de constat effectués, et d’obtenir de lourdes condamnations pécuniaires, alors qu’aucun préjudice n’est démontré et que la société Grant Finance et lui-même n’ont pas cherché à profiter de ces signes ; qu’il ajoute qu’une éventuelle condamnation ne pourrait qu’être symbolique et qu’il n’a pas procédé au renouvellement des noms de domaine litigieux, de sorte qu’ils sont disponibles;

Qu’en réplique, la société Elite Model Mangement qui s’est vue allouer distinctement les sommes de 20.000 euros réparant l’atteinte portée à la marque notoire 'elite’ et 10.000 euros réparant l’atteinte portée à ses dénomination commerciale, nom commercial et enseigne, poursuit la majoration de ces condamnations, sollicitant l’allocation, en sus, d’une somme globale de 170.000 euros ;

Considérant, ceci rappelé, que la société Elite Model Management qui ne ventile aucunement le surplus de dommages-intérêts auquel elle prétend, n’explicite en rien les modalités de son calcul pour parvenir à une telle somme ;

Que tout au plus établit-elle la liste des éléments constitutifs du préjudice subi qu’elle qualifie de 'grave’ tenant :

— aux atteintes à la marque notoire non enregistrée, du fait de l’enregistrement et de l’exploitation des deux marques litigieuses

— aux atteintes à leurs marques notoires y compris la marque notoire non enregistrée 'elite’ à 'leurs’ dénomination sociale, nom commercial et enseigne, du fait de la réservation des quatre noms de domaine litigieux et de leur exploitation corrélative, via ces noms de domaine, d’un site internet les imitant,

— au galvaudage 'des marques de l’Agence Elite',

— au détournement de ses investissements et notamment de ses efforts publicitaires,

— à l’empêchement qui a été le sien de disposer desdites marques et noms de domaine usurpés,

— des coûts et tracas occasionnés par les multiples procédures initiées pour mettre fin aux agissements dénoncés aussi bien dans le cadre de la présente instance mais aussi devant l’OHMI,

— au détournement de trafic réalisé vers le site web litigieux, de surcroît incompatible avec l’image de qualité de son propre site,

— à l’association et à la confusion dans l’esprit du public résultant des agissements dénoncés,

— au préjudice d’image résultant de cette situation globale ;

Qu’il y a lieu de considérer que Monsieur Mecheri, qui, par ses agissements, a porté atteinte à la marque notoire 'elite’ et aux signes distinctifs tels que précisés dans la présente décision, ne saurait valablement affirmer que les appelantes ne peuvent se prévaloir d’aucun préjudice ;

Que, pour autant, le surplus d’indemnisation sollicité ne se justifie pas dès lors que la cour n’a pas retenu le caractère notoire des douze marques revendiquées, ni l’atteinte au signe 'e’ et que si les agissements dont le caractère frauduleux a été retenu en ce qu’ils constituaient une appropriation indue des efforts financiers et humains consentis par les sociétés du groupe Elite, ilsprésentent un caractère limité ;

Que, de même, il ne peut être considéré qu’ils ont constitué une entrave à l’exploitation de signes comprenant en leur sein la marque notoire 'elite’ ; que les faits de détournement de trafic, de confusion dans l’esprit du public et de préjudice d’image ne sont étayés par aucune pièce de nature à les démontrer ; que les coûts et tracas occasionnés par des procédures étrangères à la présente instance ne sauraient, de plus, donner lieu à indemnisation dans le cadre de cette dernière;

Qu’enfin, il convient de relever que les appelantes laissent sans réponse le moyen qui leur est opposé et qui tient à leur abstention à rechercher une voie amiable pour résoudre, avant toute procédure, le présent litige ;

Qu’il en résulte que les dispositions du jugement portant condamnation pécuniaire ne sauraient être infirmées et que le tribunal a porté une juste appréciation sur les préjudices subis en fixant comme il l’a fait le quantum des dommages-intérêts ;

Considérant, s’agissant de la mesure d’interdiction prononcée sous astreinte, qu’il convient également de confirmer le jugement sur ce point, ainsi que requis par les appelantes ;

Qu’il n’y a pas lieu de s’en réserver la liquidation ;

Considérant, s’agissant des demandes de transfert des marques et noms de domaine litigieux, que les appelantes poursuivent l’infirmation du jugement uniquement en ce qu’il n’a pas ordonné le transfert de la marque semi-figurative e-limited n° 02 3 167 037 ni celui du nom de domaine 'e-limited.com', ceci au bénéfice de la société Elite Licensing Company SA ; que cette dernière ajoute que

Monsieur Mecheri s’est abstenu de procéder au renouvellement des cinq noms de domaine en cause, qu’elle a été contrainte de les 'récupérer à la hâte’ et sollicite la condamnation de Monsieur Mecheri au remboursement des 'frais de récupération', ce sous astreinte ;

Que la teneur de la présente décision conduit à considérer que les demandes portant sur la revendication de la marque 'e-limited’ et sur le nom de domaine éponyme ne peuvent se justifier en raison de l’atteinte au nom commercial et à l’enseigne ;

Que, cela étant, le transfert de la marque 'e-limited’ résulte de l’accueil, par la cour, du moyen des appelantes relatif au dépôt frauduleux de la marque ;

Que, par ailleurs et s’agissant de ce nom de domaine, il ne saurait être fait grief à Monsieur Mecheri, de n’en avoir pas prolongé la réservation et d’avoir, de la sorte, mis fin à une situation qu’il lui était reproché, par voie judiciaire, d’avoir créée en réservant des noms de domaine ; que les frais de réservation de ces noms de domaine que les sociétés appelantes déclarent avoir exposés, selon, qui plus est, un choix qui dépendait de leur libre arbitre, ne sauraient être supportés par Monsieur Mecheri ;

Considérant, s’agissant de la demande de publication, qu’eu égard au caractère ancien du litige et au fait que les mesures ci-avant prononcées réparent à suffisance le préjudice subi, il n’y a pas lieu d’y faire droit ;

Sur les demandes accessoires

Considérant que l’équité commande de condamner les intimés, tenus in solidum, à verser aux appelantes une somme complémentaire de 8.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Que Monsieur M qui succombe en sa demande d’infirmation totale du jugement sera débouté de sa demande à ce titre et condamné, in solidum avec la société Grant Finance & Co aux dépens d’appel ;

Que le jugement sera, toutefois, infirmé en sa disposition relative aux frais de constat de l’Agence pour la Protection des Programmes et de constat d’huissier, simples mesures probatoires, en ce qu’il les a inclus dans les dépens alors que ces frais ne figurent pas dans la liste des dépens explicitée à l’article 695 du code de procédure civile ; que les appelantes qui réitèrent cette demande en ces termes ne peuvent qu’en être déboutées ;

PAR CES MOTIFS,

Confirme le jugement entrepris à l’exception de ses dispositions portant sur le rejet de la demande de revendication de marques, sur la déchéance de leurs droits sur les douze marques notoires revendiquées et relatives aux frais de constat et, statuant à nouveau en y ajoutant ;

Dit qu’en procédant à l’enregistrement des marques françaises semi-figuratives ''' elite'(carré elite), n° 02 3.1 67.036 et ''-limited', n° 02 3.167.037, ceci en classes 3, 25, 35, 38, 41 et 44, Monsieur Mourad Mecheri a agi de mauvaise foi, en fraude des droits antérieurs détenus par les sociétés Elite Model Magement SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA ;

Rejette la fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par Monsieur Mecheri à l’action en revendication de marques dirigée à son encontre ;

Déclare en conséquence ces sociétés bien fondées leur action en revendication de ces deux marques ;

Dit que le contrat de cession de marque du 21 juin 2004 liant Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co et qui a fait l’objet d’une inscription au Registre national des marques le 10 novembre 2008 ne leur est pas opposable et que mention de ces dispositions pourra être portée à l’Institut National de la Propriété Industrielle ;

Dit que les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA justifient d’un usage sérieux et pendant une période ininterrompue de cinq ans de leurs marques, à savoir :

— la marque française semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 1.057.269, déposée par la société E lite Model Management SARL et enregistrée le 25 septembre 1978, renouvelée sous le n° 1 662 492 pour les produits et services relevant des classes 35, 41 et 42,

— la marque française verbale 'Elite+', n° 96 621 9 73, déposée par la société de droit suisse Elite Model Management SA et enregistrée le 19 avril 1996 en classes 35, 41 et 42,

— la marque française semi-figurative ' elite Models fashion, n° 96 637 865, déposée par la société de droit suisse Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 août 1996, en classes 3, 14, 16, 18 et 25,

— la marque française verbale 'Elite Super Model', n° 96 700 699, déposée par la société Elite Model Management SARL et enregistrée le 22 octobre 1997 en classes 9, 14, 18 et 25,


- la marque française semi-figurative 'elite Models’Studio', n° 01 3 122 417, déposée par la société Elite Licen sing Company SA et enregistrée le 24 septembre 2001 en classe 3,

— la marque communautaire verbale 'Elite Model Look', n° 749 770, déposée le 11 février 1998 par la société Elite Licensing Company SA enregistrée le 19 février 2004 en classes 3 et 16,

— la marque communautaire verbale 'Elite Models Studio', n° 2 143 915, déposée le 14 mars 2001 par la sociét é Elite Licensing Company SA et enregistrée le 12 avril 2002 en classe 42,

— la marque communautaire semi-figurative 'elite Model Look', n° 383 109, déposée par la société Elite Licensing Company SA et enregistrée le 20 décembre 1999 en classe 41,

— la marque communautaire semi-figurative ' elite Models fashion, n° 345 926, déposée le 07 août 1996 et enregistrée par la société Elite Licensing Company SA le 27 juin 2002, en classes 3, 14, 16, 18 et 25,

— la marque internationale semi-figurative 'elite Model Look', n° 663 732, désignant la France déposée par la soci été Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 38 et 41,

— la marque internationale semi-figurative 'elite – elite Model Management', n° 663 734, désignant la France déposé e par la société Elite Model Management SA et enregistrée le 07 novembre 1996 en classes 35, 41 et 42,

— la marque internationale semi-figurative 'elite Models’ Studio', n° 780 157, désignant la France déposée par la soci été Elite Licensing Company SA et enregistrée le 07 mai 2002 en classes 9, 16 et 41, sur les produits et services visés à l’enregistrement et que la déchéance des droits de leurs titulaires respectifs sur lesdites marques n’est pas encourue ;

Dit n’y avoir lieu de statuer sur la demande telle que présentée par les appelantes à titre subsidiaire ;

Déboute les parties du surplus de leurs prétentions respectives ;

Déboute les sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA de leur demande de remboursement des frais de constat présentée au titre des dépens ;

Condamne in solidum Monsieur Mourad Mecheri et la société Grant Finance & Co à verser aux sociétés Elite Model Management SARL, Elite Licensing Company SA, Elite Model Management SA et Elite World SA la somme complémentaire de 8.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

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Cour d'appel de Paris, Pôle 5, 6 décembre 2013, n° 2011/18793