Cour d'appel de Paris, Pôle 2 chambre 1, 13 avril 2016, n° 15/03259

  • Honoraires·
  • Résultat·
  • Client·
  • Diligences·
  • Partage·
  • Titre·
  • Administration fiscale·
  • Ducroire·
  • Bâtonnier·
  • Adresses

Chronologie de l’affaire

Commentaires3

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Une Information Lexbase · Actualités du Droit · 3 mai 2016
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 2 ch. 1, 13 avr. 2016, n° 15/03259
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 15/03259
Importance : Inédit
Décision précédente : Bâtonnier de l'Ordre des avocats de Paris, BAT, 29 janvier 2015
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours
Date de dernière mise à jour : 1 novembre 2022
Lire la décision sur le site de la juridiction

Sur les parties

Texte intégral

Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE

aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 2 – Chambre 1

ARRET DU 13 AVRIL 2016

(n° 191 , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 15/03259

Décision déférée à la Cour : Décision du 30 Janvier 2015 -Bâtonnier de l’ordre des avocats de PARIS -

APPELANT

Monsieur [B] [D]

[Adresse 2]

[Localité 1]

Né le [Date naissance 1] 1976 à [Localité 3]

Comparant assisté de Me Yves LACHAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : W06

INTIMEE

SELURL SCPS

[Adresse 1]

[Localité 1]

Représentée par Me Jean HESS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0457

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 20 Janvier 2016, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Jacques BICHARD, Président de chambre

Madame Marie-Sophie RICHARD, Conseillère

Mme Marie-Claude HERVE, Conseillère

qui en ont délibéré

Greffier, lors des débats : Mme Sylvie BENARDEAU

ARRET :

— contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Jacques BICHARD, président et par Mme Lydie SUEUR, greffier lors du prononcé.

M [B] [D] a formé un recours contre la décision du délégué du bâtonnier prise sur le fondement de l’article 21 alinéa 3 de la loi du 31 décembre 1971 en date du 30 janvier 2015 qui l’a condamné à payer à la SELARLU S.C.P.S la somme de 20 000 € H.T au titre du solde de rémunération pour ses diligences en co-traitance avec elle et ce avec intérêts au taux légal à compter de la notification de la décision outre celle de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses conclusions du 19 janvier 2016 développées à l’audience M [D] sollicite l’infirmation de cette décision et la condamnation de la Société S.C.P.S à lui verser la somme de 6 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il soutient que M [E] qui exerce au sein de la SELARLU a perçu l’intégralité de la rémunération due au titre des diligences effectuées dans le dossier [Y] et qu’aucun honoraire supplémentaire de résultat ne doit lui être versé.

Dans ses conclusions développées à l’audience la SELARLU S.C.P.S demande à la cour de condamner avec exécution provisoire M [D] au paiement du solde de la facture du 2 juillet 2014 majorée des intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 30 juillet 2014 outre la somme de 10 000 € à titre de dommages-intérêts, 7 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de tirer toutes conséquences déontologiques du dossier et de sanctionner le comportement de l’appelant si la cour le juge utile.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il résulte des pièces versées aux débats que maître [G], notaire au sein de l’étude [Q] à [Localité 2], a saisi début octobre 2013 maître [D] des difficultés que rencontrait un de ses clients M [Y] suite à la rectification de sa déclaration d’impôts générant des droits additionnels à hauteur de la somme de 680 605 € ainsi que des pénalités de retard d’un montant de 201 469 € . Le 25 octobre suivant maître [D] a transféré pour étude à maître [E], associé unique de la SELARLU S.C.P.S qui partage les mêmes locaux professionnels et spécialisé en droit fiscal, les éléments reçus de l’étude notariale.

Le 30 octobre 2013 maître [D] a régularisé une convention d’honoraires avec M [Y] au taux horaire de 280 € H.T, prévoyant un honoraire de résultat de 5% sur l’économie d’impôt réalisée.

Après étude du dossier maître [E] a proposé de soulever un moyen de forclusion et a rédigé le 23 novembre 2013 une lettre en ce sens adressée par ses soins après accord de maître [D] à l’administration fiscale. Le 27 novembre 2013 M [E], dans l’ignorance de l’existence d’un honoraire de résultat, a adressé à M [D] une note d’honoraires de 3 000 € H.T (soit 10 heures sur la base d’un taux horaire de 300 € H.T), réglée par ce dernier.

A la suite de l’abandon des rectifications dans leur totalité par l’administration fiscale dont il a été informé tardivement, maître [D] a adressé à son client le 5 juin 2014 une note d’honoraires valant facture de 52 923,98 € T.T.C, la dite somme ayant été réglée par M [Y].

Maître [E] a sollicité en vain de maître [D] le paiement d’une somme de

20 000 € H.T lui adressant une note d’honoraires complémentaire le 2 juillet 2014 avant de saisir également sans succès la commission ducroire du barreau de Paris le 10 juillet 2014.

M [D] soutient que contrairement à ce que la décision déférée à la cour a retenu maître [E] est intervenu en qualité de sous traitant et qu’en cette qualité il est étranger aux accords conclus entre maître [D] et son client et ne peut revendiquer à ce titre le versement d’une partie des honoraires réglés par M [Y] ; qu’enfin les diligences

effectuées ne permettent pas davantage de lui allouer à ce titre une somme complémentaire puisque M [E] a reconnu notamment dans son courriel du 6 juin 2014 ne pas avoir effectué de diligences postérieurement à sa première note d’honoraires du 27 novembre 2013.

La SELARLU S.C.P.S fait valoir que le dossier a bien été co-traité par les deux avocats et que la décision doit être confirmée, subsidiairement que la facturation qu’il a émise le 2 juillet 2014 en méconnaissance de la convention d’honoraire cachée par maître [D] ne contrevient pas aux dispositions de l’article 11.5 du règlement intérieur du barreau de Paris qui n’interdit pas le partage d’un honoraire de résultat avec un confrère; que cette note d’honoraires est justifiée par le travail accompli, la difficulté du dossier, l’expérience de l’avocat et le résultat obtenu et enfin que l’attitude fautive de son confrère qui lui a dissimulé sciemment l’existence d’un honoraire de résultat doit être sanctionnée.

Contrairement à ce qu’a retenu la sentence déférée à la cour, la relation unissant les deux avocats s’inscrit, à défaut de tout lien contractuel entre la SELARLU S.C.P.S et M [Y], client de maître [D], dans le seul cadre des dispositions de l’article 11.5 du règlement intérieur national selon lesquelles: 'L’avocat qui, ne se bornant pas à mettre en relation un client avec un autre avocat, confie un dossier à un confrère ou le consulte, est personnellement tenu au paiement des honoraires, frais et débours, à l’exclusion des émoluments, dus à ce confrère correspondant, au titre des prestations accomplies à sa demande, par celui-ci…', et la SELARLU S.C.P.S ne peut se prévaloir de la convention d’honoraires conclue entre maître [D] et M [Y].

En effet la lettre adressée à l’administration fiscale le 20 novembre 2013 sur papier à en-tête de la SERLARLU S.C.P.S avec l’accord de M [D] et selon laquelle : 'la présente vous est adressée en qualité de conseil aux côtés de mon confère [B] [D], de M [K] [Y]….' comme les remerciements adressés par le notaire à maître [E] sont insuffisants à démontrer la relation contractuelle liant le cabinet de Maître [E] à M [Y], alors que maître [E] n’a pas signé la convention d’honoraires conclue entre maître [D] et M [Y] et n’a adressé aucune correspondance à ce dernier.

En outre les différents mails échangés entre les avocats qui exerçaient au sein des mêmes locaux mais dans deux structures différentes, révèlent que M [E] qui a adressé sa première note de provision sur honoraires en date du 27 novembre 2013 ainsi que sa note définitive le 2 juillet 2014 à maître [D] et non à M [Y], a toujours considéré ce dernier comme le client de maître [D] et a reconnu être intervenu uniquement à la demande de ce dernier auquel il a d’ailleurs soumis la lettre adressée à l’administration fiscale avant de l’envoyer.

Cette position a été confirmée par M [E] lui-même lorsqu’il a saisi la commission ducroire dans un mail en date du 10 juillet 2014 dans lequel il indique que maître [D] lui a sous traité ce dossier ainsi que dans les courriels adressés à son confrère notamment le 6 juin et le 2 juillet 2014, ce dernier accompagnant sa note d’honoraire définitive.

Les dispositions de l’article 11.5 susvisé permettent d’inclure dans les honoraires dus par maître [D] à la SELARLU S.C.P.S tous les honoraires dus à cette dernière au titre des prestations accomplies à la demande de maître [D] à l’exclusion, sauf accord préalable entre les avocats concernés, du partage d’un honoraire de résultat.

Or, maître [E] a reconnu lui-même dans sa correspondance du 6 juin 2014 avec son confrère n’avoir pas réalisé d’autres diligences que celles figurant dans la note d’honoraires du 27 novembre 2013 émise par la SELARLU S.C.P.S, certes intitulée 'provision sur honoraires'.

Ceci est confirmé par la note d’honoraires définitive détaillée du 2 juillet 2014 qui n’ajoute aux diligences initiales que: 'l’obtention d’un dégrèvement total supérieur à 800 000 euros', ce qui correspond à un honoraire de résultat, pour justifier le montant réclamé à hauteur de 23 000 € H.T et cette note ne fait pas état d’autres diligences accomplies postérieurement à celles figurant sur la note du 27 novembre 2013.

La SELARLU S.C.P.S qui ne justifie pas de diligences autres que celles figurant sur sa note d’honoraires initiale, comme elle l’a d’ailleurs confirmé à maître [D] avant de connaître l’existence de l’honoraire de résultat convenu avec le client de ce dernier, est mal fondée en sa demande de paiement d’un honoraire complémentaire qui s’analyse en une demande de partage d’un honoraire de résultat qui n’a pas été convenu entre les avocats, en application des dispositions de l’article 11.5 susvisé.

En revanche c’est à juste titre que la SELARLU S.C.P.S sollicite l’allocation de dommages-intérêts en raison de l’attitude fautive de son confrère qui lui a délibérément caché en novembre 2013 puis en juin 2014 l’honoraire de résultat qu’il avait négocié avec M [Y] comme le révèle la convention d’honoraires adressée à M [Y] le 30 octobre 2013 et signée par lui, qui mentionne bien un honoraire de résultat de 5%, ainsi que les correspondances échangées entre les deux avocats postérieurement au paiement des honoraires par son client à maître [D] entre le 6 juin et le 24 juin 2014. Ces mails révèlent que ce dernier a prétendu à son confrère ne pas avoir négocié d’honoraire de résultat, étant remarqué que la note d’honoraires définitive et valant facture du 5 juin 2014 adressée après paiement au client porte curieusement et exclusivement sur une somme au titre des diligences équivalente à l’honoraire de résultat initialement prévu qui n’y figure plus.

Le mensonge de maître [D] avec lequel maître [E] partageait les locaux professionnels et qu’il côtoyait régulièrement a causé à la SELARLU S.C.P.S un préjudice moral qui sera valablement indemnisé par l’allocation de la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts.

L’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile et il convient d’ordonner le partage des dépens par moitié entre les deux parties.

PAR CES MOTIFS :

— Infirme la décision du délégué du bâtonnier en date du 30 janvier 2015 ;

Statuant à nouveau,

— Déboute la SELARLU S.C.P.S de sa demande en paiement d’honoraires ;

— Dit que maître [B] [D] a commis une faute en cachant à maître [E] la convention d’honoraires prévoyant un honoraire de résultat ;

— Condamne maître [B] [D] à payer à la SELARLU S.C.P.S la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts ;

— Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Fait masse des dépens qui seront partagés par moitié entre les deux parties.

LE GREFFIER,LE PRESIDENT,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 2 chambre 1, 13 avril 2016, n° 15/03259