Cour d'appel de Paris, Pôle 5 - chambre 4, 3 mars 2021, n° 19/07235

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 5 - ch. 4, 3 mars 2021, n° 19/07235
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/07235
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lille, 27 février 2019, N° 2018002255
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 4

ARRET DU 03 MARS 2021

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/07235 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7VBA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Février 2019 – Tribunal de Commerce de LILLE – RG n° 2018002255

APPELANTE

SARL Z X

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

08300 SAULT-LÈS-RETHEL

immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de Sedan sous le numéro 331 309 377

Représentée par Me Hélène MARTIN, avocat au barreau de PARIS, toque A.693, avocat postulant

INTIMEE

SASU B C FRANCE

prise en la personne de ses représentants légaux

[…]

[…]

immatriculée au Registre du commerce et des sociétés de Nîmes sous le numéro 380 824 888

R e p r é s e n t é e p a r M e M a t t h i e u B O C C O N G I B O D d e l a S E L A R L L E X A V O U E PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477, avocat postulant

Représentée par Me Christophe PECNARD, avocat au barreau de PARIS, toque : L0237, avocat plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 janvier 2021, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de:

Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente

M. Dominique GILLES, Conseiller

Mme Sophie DEPELLEY, Conseillère

Greffière, lors des débats : Madame Kala FOULON.

ARRÊT :

— contradictoire,

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

— signé par Mme Marie-Laure DALLERY, Présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCEDURE

La société Z X a pour activité le négoce de détail pour l’animalerie et une activité de prestataire de services de stockage et d’entreposage.

La société B C France (ci-après 'B C') a pour activité la distribution d’aliments pour chiens et chats de sa marque.

Le 11 février 1987, les sociétés Z X et B C ont formalisé leur relation par la signature d’un accord de distribution des produits B C.

Fin 1988, la société Z X étant en difficultés financières, MM. X et Mme Y, ont à la garantie de la somme d’un million de francs, affecté en nantissement leurs parts sociales dans la société Z X au profit de la société B C. Ce nantissement a été levé le 5 octobre 2007.

A compter de 1989, la société B C a sollicité la société Z X pour la réalisation d’une prestation annexe de stockage, préparation et livraison de commandes. En particulier un contrat d’assistance logistique a été signé entre les parties le 20 novembre 2000, puis un contrat logistique le 17 novembre 2013, puis un accord de collaboration le 27 octobre 2005 allant jusqu’au 31 décembre 2008 pour les mêmes prestations d’entreposage et d’opération logistiques de réception et distribution des produits. La fourniture de ses prestations ont perduré après la fin de l’accord de collaboration et ont également concerné les échantillons des produits B C à destination des vétérinaires.

Par lettre du 26 octobre 2011, la société B C annonçait à la société Z X la fin des prestations logistiques et d’entreposage de ses produits. La date de prise d’effet de cette résiliation, à savoir le 20 juillet 2012, a été confirmée par la société B C par lettre du 18 avril 2012.

La fin des prestations d’entreposage et de logistique a donné lieu à la signature en 2012 d’un protocole transactionnel entre les parties aux termes duquel :

— la Z X n’est plus en charge des opérations de logistiques et de stockages des produits à

destination des points de vente au détail et des éleveurs à compter du 20 juillet 2012 et à compter du 1er août 2021 B C n’accorde plus la remise sur facture de 10% dont la Z X bénéficiait jusqu’à présent et application des conditions commerciales prévues dans ses conditions catégorielles de vente.

— B C s’engage à verser à la Z X une indemnité transactionnelle forfaitaire de 15 000 euros et s’engage à confier à la Z X les opérations logistiques et d’entreposages des échantillons de ses produits à destination des vétérinaires jusqu’au 31 décembre 2013.

A l’issue de ce protocole, les prestations de logistique et de stockage des échantillons des produits B C ont perduré, jusqu’à ce que par lettre du 27 juin 2016, la société B C annonce la fin de ces prestations avec effet au 31 décembre 2016. Suite à des discussions entre les parties, la fin des prestations a été reportée au 30 juin 2017, puis au 31 décembre 2017.

C’est dans ce contexte, que par acte du 1er février 2018, la société Z X a assigné la société B C devant le tribunal de commerce de Paris.

Par jugement du 28 février 2019, le tribunal de commerce de Lille, a :

— dit que les demandes de la société Z X fondées sur l’article L.420-2 du code de commerce et 1140 et suivants du Code civil sont prescrites, et donc irrecevables,

— débouté la société Z X de toutes ses demandes fins et conclusions,

— condamné la société Z X à payer à la société B C France la somme arbitrée à 5000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la société Z X aux entiers dépens de l’instance, taxés et liquidés à la somme de 77.08€ en ce qui concerne les frais de Greffe.

Le 4 avril 2019, la société Z X a interjeté appel de ce jugement devant la cour d’appel de Paris.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 24 mai 2019, la société Z X demande à la Cour, au visa des articles L.420-2 et L.442-6, 1° du code de commerce, de :

Infirmer le jugement rendu le 28 février 2019 par le tribunal de commerce de Lille en toutes ses dispositions,

Dire que la société B C a rompu abusivement le 27 juin 2016 les relations commerciales datant de 1974 de façons brusques et sans préavis approprié au regard de la nature de la relation,

Constater l’abus de dépendance économique de la société B C à l’égard de la société Z X,

Dire que le protocole d’accord transactionnel signé entre les parties en 2012 a été vicié par la violence économique exercée par la société B C,

Déclarer nulle la clause dudit protocole prévoyant une compensation financière manifestement disproportionnées,

En conséquence,

Condamner la société B C au paiement des sommes suivantes :

— Dommages et intérêts pour rupture brutale : 200 000 €

— Prestations à taux réduit indûment appliqué : 161 177 €

— Dommages et intérêts pour abus de dépendance économique : 20 000 €

— Dommages et intérêts pour vice de violence économique : 100 000 €

— Article 700 du code de procédure civile : 10 000 €

Condamner la société B C aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions, notifiées et déposées le 23 août 2019, la société B C France demande à la Cour, de :

Vu les articles 9, 42, 56 et 700 du Code de procédure civile,

Vu les articles L 110-4, L 442-6-I-5°, L 420-2, L 481-1, L 482-1 et R 420-3 du Code de commerce,

Vu les articles 1140 et suivants, 1143, 1144 et 2224 du Code civil, et les articles 1112, 1340 et 2262 du Code civil (ancien)

Confirmer le jugement du Tribunal de Commerce de Lille du 28 février 2019,

En conséquence, à titre principal :

— Dire et juger que les demandes de la société Z X fondées sur l’article L.420-2 du Code de commerce et 1140 et suivants du Code civil sont prescrites,

— Déclarer les demandes de la société Z X fondées sur les articles L.420-2 du Code de commerce et 1140 et suivants du Code civil irrecevables,

— Dire et juger qu’aucune rupture brutale des relations commerciales n’est établie et n’est imputable à B C France SAS,

— Dire et juger en conséquence que la demande d’indemnisation de la société Z X sur le fondement de l’article L.442-6 I 5° du Code de commerce est infondée,

— Dire et juger que le préjudice allégué par la société Z X du fait de la rupture des relations commerciales n’est pas démontré,

— Rejeter la demande d’indemnisation de la société Z X fondée sur l’article L.442- 6-I 5° du Code de commerce.

A titre subsidiaire :

— Dire et juger qu’aucune pratique anticoncurrentielle consistant en l’exploitation abusive d’un état de dépendance économique n’est établie et n’est imputable à la société B C France SAS,

— Dire et juger en conséquence que la demande d’indemnisation de la société Z X est infondée,

— Dire et juger que les préjudices allégués par la société Z X du fait d’une prétendue exploitation abusive d’un état de dépendance économique ne sont pas démontrés,

— Rejeter en conséquence les demandes d’indemnisation de la société Z X liées à la prétendue existence d’une exploitation abusive d’un état de dépendance économique,

— Dire et juger qu’aucune violence de nature à vicier le consentement de la société Z X n’est établie et imputable à la société B C France SAS,

— Dire et juger que la demande de nullité de l’article 2.1 du protocole transactionnel n’est pas fondée,

— Dire et juger que le préjudice allégué par la société Z X du fait de la prétendue existence d’un vice de son consentement n’est pas démontré,

— Rejeter en conséquence les demandes de Z X de nullité de l’article 2.1 du protocole transactionnel et d’indemnisation relatives à l’existence d’un vice du consentement.

En tout état de cause :

— Condamner la société Z X à régler à la société B C France SAS la somme de 11 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

— Condamner la société Z X à supporter les entiers dépens dont distraction au profit de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES.

***

La cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions susvisées pour un exposé détaillé du litige et des prétentions des parties, conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

SUR CE, LA COUR,

Sur la demande de dommages-intérêts fondée sur la rupture brutale des relations commerciales

La société Z X soutient que le contrat de prestations de logistique et d’entreposage des produits B C à destination des vétérinaires a été brutalement rompu par la société B C, dans sa lettre du 26 juin 2016 notifiant la rupture moyennant un préavis de 6 mois, selon elle insuffisant au vu de la durée de leurs relations commerciales de 33 ans et de l’état de dépendance économique dans lequel elle se trouvait. Elle précise que ce n’est que parce que la société B C connaissait le caractère brutal de la rupture opérée qu’elle aurait accepté de poursuivre les prestations, de manière sporadique, jusqu’au 31 décembre 2017. Elle ajoute qu’elle a réalisé des investissements importants à la demande de B C et ce dans un contexte de nantissement de ses parts sociales, le tout caractérisant sa dépendance économique. Elle réclame la somme de 200 000 euros au regard de sa marge brute annuelle .

La société B C fait valoir que le préavis accordé de 18 mois était suffisant. Elle conteste l’état de dépendance économique allégué. Elle soutient que les investissements allégués non pas été réalisés à sa demande et qu’il n’est pas justifié qu’ils n’ont pas été amortis. Elle précise n’avoir pu opérer à des commandes courant juillet et août 2017 en raison d’une ciber-attaque de son système informatique.

Sur ce,

L’article L. 442-6, I, 5° du code de commerce dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2019-359 du 24 avril 2019 applicable au litige, dispose qu’engage la responsabilité de son auteur et l’oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels.

Les parties ne contestent pas que la société B C a mis fin le 31 décembre 2017 a une relation commerciale établie avec la société Z X depuis au moins 29 ans, et portant dans les dernières années sur des prestations d’entreposage et de logistique d’échantillons de produits B C à destination des vétérinaires. Les parties s’opposent sur le caractère suffisant du préavis.

Or le délai de préavis doit tenir compte de la durée des relations commerciales, même brèves et doit s’entendre du temps nécessaire à l’entreprise délaissée pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une solution de remplacement. Les principaux critères à prendre en compte sont la dépendance économique, l’ancienneté des relations, le volume d’affaires et la progression du chiffre d’affaires, les investissements spécifiques effectués et non amortis, les relations d’exclusivité et la spécificité des produits et services en cause.

En l’espèce, la société B C a par lettre du 27 juin 2016 notifié à la société Z X la fin de la relation commerciale au 31 décembre 2016. Après discussion entre les parties, le préavis a été prolongé jusqu’au 30 juin 2017, puis jusqu’au 31 décembre 2017.

Il ressort des pièces versées aux débats par la société B C ( pièces n°7 et 9) que le volume des commandes a été constant pendant toute la durée du préavis. Celle-ci justifie avoir eu des problèmes informatiques courant juillet et août 2017 ne lui permettant plus de passer commandes, mais avoir tenté de rattraper les commandes sur la facturation de novembre 2017 (pièces n°5,6,8 et 9). Il résulte de ces éléments, non utilement contredit par la société Z X (notamment pièces n° 17 et 24), que celle-ci a bénéficié d’un préavis effectif de 18 mois.

La société Z X prétend que ce préavis est insuffisant, sans préciser quelle durée devait être ce préavis. Elle justifie d’investissements réalisés courant 2005, mais sans apporter d’élément permettant de démontrer que ces investissements ont été fait à la demande de la société B C pour les besoins spécifiques de ses prestations et qu’ils n’ont pas été amortis fin 2017. Si la société Z X allègue de la durée de la relation commerciale et de la part de 20% de l’activité de prestations pour la société B C dans son chiffre d’affaires global, elle n’apporte aucun élément permettant d’apprécier le temps nécessaire pour le redéploiement de son activité dont elle n’expose pas sa spécificité. Il est par ailleurs relevé que le nantissement des parts sociales a été levé en 2007, soit dans une période bien antérieure à la rupture de la relation commerciale dont il est demandé réparation.

En l’état des éléments d’appréciation soumis à la Cour, le délai de préavis effectif de 18 mois était suffisant. La société Z X sera déboutée de sa demande de dommages-intérêts pour rupture brutale. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les demandes fondées sur l’article L.420-2 du code de commerce

Le tribunal a jugé les demandes fondées sur l’exploitation abusive d’un état de dépendance économique présentées le 1er février 2018 prescrites, et partant irrecevables.

La société Z X réclame sur le fondement de l’article L.420-2 du code de commerce, le remboursement de la somme de 161 177 euros indûment perçue au titre de prestations à taux réduit et la somme de 20 000 euros à titre de dommages-intérêts. Il est soutenu qu’un accord de prestations

à taux réduit a été passé entre les parties en 1991 pour solder les 700 000 francs restant pour lever le nantissement, et alors que cette somme a été ainsi remboursée en 1997, les prestations à taux réduit ont été imposées jusqu’en 2005 représentant le trop perçu réclamé. Selon la société appelante, cette situation témoigne d’un abus de position dominante de la part de la société B C. Elle estime que son action n’est pas prescrite, dès lors qu’en application de l’article L.482-1 du code de commerce, la prescription ne court pas tant que la pratique anticoncurrentielle n’a pas cessé. Elle fait valoir à cet effet que si le nantissement a été levé en 2007, il n’en demeure pas moins que la société Z X est restée en situation de dépendance économique vis à vis de la société B C jusqu’en décembre 2017.

La société B C soutient que la demande d’indemnisation de la société Z X, fondée sur la prétendue exploitation abusive de l’état de dépendance économique, est prescrite. Le nantissement ainsi que la tarification basse en cause ont été consentis par Z X en 1988. En articulant les dispositions sur la durée de prescription de droit commun avant la réforme (30 ans) et après la réforme de la prescription en matière civile opérée par la loi de 2008 (5 ans), la prescription de la demande d’indemnisation du préjudice se prescrivait en 2013 au plus tard.

La société intimée ajoute que, sur le fondement de l’article L482-1, la pratique anticoncurrentielle alléguée par la société Z X a cessé en 2007, avec la levée du nantissement et que l’action en réparation a commencé à se prescrire à ce moment, la prescription étant acquise en 2012. La société B C soutient que même si la société Z X était prétendument en état de dépendance économique jusque fin 2017, l’article L420-1 du commerce ne sanctionne que l’abus de cet état de dépendance, abus qui aurait nécessairement cessé en 2007 avec la levée du nantissement et la fin des tarifications basses et qui en toute hypothèse n’est pas établi.

Sur ce,

Selon l’article L.420-2, dans sa version antérieure à l’ordonnance n°2019-698 du 3 juillet 2019 est prohibée, dans les conditions prévues à l’article L. 420-1, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises d’une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées ou en conditions de vente discriminatoires ainsi que dans la rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées.

Est en outre prohibée, dès lors qu’elle est susceptible d’affecter le fonctionnement ou la structure de la concurrence, l’exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d’entreprises de l’état de dépendance économique dans lequel se trouve à son égard une entreprise cliente ou fournisseur. Ces abus peuvent notamment consister en refus de vente, en ventes liées, en pratiques discriminatoires visées au I de l’article L. 442-6 ou en accords de gamme.

Selon l’article L.482-1, l’action en dommages et intérêts fondée sur l’article L. 481-1 se prescrit à l’expiration d’un délai de cinq ans. Ce délai commence à courir du jour où le demandeur a connu ou aurait dû connaître de façon cumulative :

1° Les actes ou faits imputés à l’une des personnes physiques ou morales mentionnées à l’article L. 481-1 et le fait qu’ils constituent une pratique anticoncurrentielle ;

2° Le fait que cette pratique lui cause un dommage ;

3° L’identité de l’un des auteurs de cette pratique.

Toutefois, la prescription ne court pas tant que la pratique anticoncurrentielle n’a pas cessé.

Elle ne court pas à l’égard des victimes du bénéficiaire d’une exonération totale de sanction pécuniaire en application d’une procédure de clémence tant qu’elles n’ont pas été en mesure d’agir à l’encontre des auteurs de la pratique anticoncurrentielle autres que ce bénéficiaire

Par des motifs pertinents, qui ne sont pas utilement contestés à hauteur d’appel par la société Z X, et que la Cour adopte, le tribunal a relevé que la société Z X estime que la société B C a abusé d’un état de dépendance économique en profitant de la tarification basse pendant plusieurs années après que les sommes en garantie du nantissement aient été remboursées. La société Z X ne produit aucun élément justifiant du mode de calcul de la durée de cette tarification basse permettant de connaître le terme de la dernière échéance de remboursement et les différents contrats logistiques produits par la Z X ne font pas état d’une quelconque tarification basse. Il est également relevé que cette pratique aurait cessé à la levée du nantissement soit le 5 octobre 2007.

Il sera ajouté que le seul fait que l’activité de prestations pour la société B C ait représenté depuis le début de la relation commerciale, en moyenne 26% du chiffre d’affaires global de la société Z X, près de 40% certaines années, ne caractérise pas en soi un abus de position dominante ou de dépendance économique et ainsi d’une pratique anticoncurrentielle qui perdure dans le temps.

En conséquence, le jugement sera confirmé en ce qu’il dit les demandes de la société Z X fondées sur l’article L.420-2 prescrites et partant irrecevables.

Sur la demande de dommages-intérêts pour vice de violence économique

Le tribunal a jugé la demande fondée sur l’existence d’un vice de consentement prescrite et partant irrecevable.

La société Z X soutient que le protocole d’accord signé en 2012 à la suite de la rupture partielle du contrat de prestations de logistique et de stockage est vicié, en ce qu’il prévoit une indemnité manifestement disproportionnée, et s’analyse en une forme de violence économique exercée par B C et sanctionnée par l’article 1112, repris par les articles 1140 nouveau et suivants du code civil. Elle affirme avoir été contrainte d’accepter cette compensation totalement disproportionnée de peur que l’activité logistique vétérinaire lui soit retirée, et que la société B C a donc exercé une violence économique. Estimant que dans la mesure où la violence économique est caractérisée par l’abus de l’état de dépendance économique, la violence n’a cessé qu’avec la fin de dépendance économique et donc à la fin des relations commerciales en décembre 2017, en sorte que la demande nullité de la clause dudit protocole prévoyant une compensation financière manifestement disproportionnée et la demande de dommages-intérêts pour vice de violence économique n’est pas prescrite en application des articles 1304 alinéa 2 ancien du code civil, repris par l’article 1144 nouveau.

La société B C soutient que la violence économique invoquée par la société Z X à titre de vice de son consentement consiste en l’obtention, par B C, de l’accord de Z X pour le versement d’une indemnité qu’elle estime disproportionnée, en sorte qu’elle aurait eu connaissance du prétendu vice au jour de la signature du protocole, soit en 2012. Elle fait valoir que l’article 1304 alinéa 2 du Code civil était applicable (actuellement article 1144 du Code civil) et précisait que le point de départ de la prescription : « (') ne court dans le cas de violence que du jour où elle a cessé. » Elle affirme que la société B C n’apporte aucun élément démontrant que la société B C aurait exercé, après 2012, une quelconque violence économique et qu’ainsi la prescription courait entre 2012 et 2017.

Sur ce,

Comme l’a justement relevé le tribunal, la violence économique invoquée par la société Z

X au titre d’un vice de consentement consiste en l’obtention, par la société B C, de l’accord de la société Z X pour le versement d’une indemnité qu’elle estime disproportionnée, soit un vice dont la société Z X avait connaissance au jour de la signature du protocole en 2012. Depuis cette date, la société Z X fait état d’une 'menace constante de rompre le courant d’affaires', mais comme l’a relevé le tribunal et sans nouveau élément à hauteur d’appel, sans qu’il ne soit apporté d’élément de preuve de cette menace.

Il sera ajouté que le seul fait que depuis 2012, son activité représente en moyenne 20% de son chiffre d’affaires global ne peut à lui seul caractériser une dépendance économique dont la société B C aurait abusé. Il a été par ailleurs retenu que la rupture de la relation commerciale en 2017 n’a pas été brutale.

En conséquence, la prescription de la demande de nullité de l’article 2.1 du protocole transactionnel en raison d’un vice de consentement était acquise en 2017, ainsi que la demande de dommages-intérêts subséquente. Le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Z X aux dépens de première instance et à payer à la société B C la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Z X, partie perdante, sera condamnée aux dépens d’appel.

En application de l’article 700 du code de procédure civile en appel, la société Z X sera déboutée de sa demande et condamnée à verser à la société B C la somme de 8 000 euros.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

Condamne la société Z X aux dépens,

Condamne la société Z X à payer à la société B C France la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Rejette toute autre demande.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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