Cour d'appel de Poitiers, Chambre sociale, 1er juillet 2015, n° 14/02471

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, ch. soc., 1er juill. 2015, n° 14/02471
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 14/02471
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Rochefort, 23 mars 2014
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

EV/KG

ARRET N° 511

R.G : 14/02471

Y

C/

SARL AJC IMMOBILIER

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

Chambre Sociale

ARRÊT DU 01 JUILLET 2015

Numéro d’inscription au répertoire général : 14/02471

Décision déférée à la Cour : Jugement au fond du 24 mars 2014 rendu par le Conseil de Prud’hommes de ROCHEFORT SUR MER.

APPELANT :

Monsieur A Y

né le XXX à XXX

de nationalité Française

XXX

XXX

Représenté par Me Alexandra DUPUY, avocat au barreau de LA ROCHELLE

INTIMEE :

SARL AJC IMMOBILIER

N° SIRET : 413 519 869 00023

XXX

XXX

XXX

Représentée par Me François GOMBAUD de la SCP GOMBAUD & COMBEAU, avocat au barreau de LA ROCHELLE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 19 Mai 2015, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Eric VEYSSIERE, Président

Monsieur Jean-Paul FUNCK-BRENTANO, Conseiller

Monsieur Jean-Michel AUGUSTIN, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Christine PERNEY

ARRÊT :

— CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Eric VEYSSIERE, Président, et par Madame Christine PERNEY, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Faits-procédure-prétentions des parties

Monsieur A Y a été engagé le 5 septembre 2011 en qualité d’agent commercial négociateur immobilier par la société AJC Immobilier.

Par courrier du 12 avril 2012, M. Y a mis fin à la relation contractuelle. Le 27 février 2013, il a saisi le conseil de prud’hommes de Rochefort/mer aux fins d’obtenir la requalification du contrat d’agent commercial en contrat de travail et le paiement des sommes suivantes :

—  20.373 euros à titre de rappel de salaires outre les congés payés afférents

—  3000 euros à titre de dommages et intérêts pour rétention abusive de la rémunération

—  17.977,50 euros pour travail dissimulé

—  1800 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 24 mars 2014, le conseil a jugé que le contrat liant les parties n’était pas un contrat de travail et a débouté M. Y de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

M. Y a relevé appel du jugement.

Par conclusions enregistrées au greffe le 18 mai 2015 et soutenues oralement à l’audience, l’appelant demande à la cour de dire que le contrat conclu avec la société AJC immobilier s’analyse en un contrat de travail, de requalifier le contrat en ce sens et de condamner la société au paiement des sommes réclamées en première instance, outre 2500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dans ses écritures enregistrées au greffe le 15 avril 2015 et reprises oralement à l’audience, l’intimée conclut à la confirmation du jugement et y ajoutant demande à la cour de condamner M. Y à lui payer la somme de 4000 euros pour procédure abusive, outre 4000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La cour renvoie, pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, aux conclusions qu’elles ont déposées et reprises oralement à l’audience.

Motifs de la décision

Sur la demande de requalification du contrat d’agent commercial

Pour justifier sa demande de requalification, M. Y fait valoir qu’il a exercé sa fonction de négociateur immobilier dans un lien de subordination avec le gérant, voire sa secrétaire, qui lui donnait des instructions sur la manière de procéder pour chacune de ses démarches commerciales et d’enregistrer les données relatives à ces transaction, qui lui faisait des remarques écrites sur son comportement professionnel et qui l’a sanctionné en procédant à une retenue sur avance de commission. Il ajoute qu’il devait tenir des permanences comme les autres négociateurs salariés et qu’il percevait une rémunération régulière.

La société expose que M. Y a saisi le conseil de prud’hommes pour retarder la procédure qu’elle a engagée devant le tribunal de commerce aux fins d’obtenir le remboursement des avances sur commissions suite à la rupture de la relation contractuelle à l’initiative de M. Y. Elle réfute les arguments de ce dernier concernant la requalification et soutient que les directives qui lui ont été données correspondent un cahier des charges inhérent à la bonne marche des négociations et transactions immobilières.

Aux termes de l’article L 8221-6 du code du travail, sont présumés ne pas être liés avec le donneur d’ordre par un contrat de travail, les personnes physiques immatriculées au registre des agents commerciaux.

Compte tenu de cette présomption, il incombe à M. Y qui a conclu un contrat d’agent commercial de prouver qu’il exerçait ses fonctions, comme il le soutient, dans le cadre d’un contrat de travail.

L’existence d’une relation de travail salarié ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donné à la convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle. M. Y doit d’établir, à cet égard, qu’il se trouvait placé dans un lien de subordination lequel est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité de l’employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives et de sanctionner les manquements de son subordonné.

S’agissant des ordres qui seraient donnés à M. Y par le gérant de l’agence, il ne peut-être déduit du guide de procédures établi par la société AJC immobilier, remis à l’ensemble des personnes travaillant pour le service transaction et dont l’objet est de détailler les opérations juridiques, informatiques et matérielles à respecter pour mener à bien une transaction immobilière, que ces directives démontrent l’existence d’un lien de subordination. En effet, ce document de portée générale qui précise la manière d’enregistrer un mandat dans le système informatique de l’agence, de compléter un mandat de vente et les modalités à suivre pour sa signature et pour sa transmission aux notaires est un rappel élémentaire des règles indispensables au bon fonctionnement de l’entreprise et à la sécurité des transactions immobilières qui concerne tous les négociateurs immobiliers indépendamment de leur statut juridique au sein de la société.

Les courriels adressés à M. Y par le gérant de la société lui demandant d’être plus rigoureux, de se reprendre, de lui rendre compte d’une affaire ou de lui apporter un dossier l’agence ou lui rappelant que le statut d’agent commercial n’imposait que des avances lui soient versées pour l’aider à survivre n’excèdent pas, en dépit de leur forme rugueuse, les attributions d’un mandataire à son mandat dés lors que le contrat d’agent commercial implique, selon les termes du contrat signé entre les parties, de mener à bonne fin les affaires entreprises, de constituer des dossiers complets et d’établir un rapport pour chaque affaire ce qui autorise le mandant à signifier au mandataire des dysfonctionnements qu’il a constatés sans que ceux-ci revêtent pour autant un caractère disciplinaire.

Le fait de tenir des permanences occasionnelles le samedi à l’agence n’a pas été imposé à M. Y, contrairement à ses affirmations. Mme Z dont la valeur probante du témoignage ne peut être remise en cause au seul motif qu’elle est salariée de la société AJC Immobilier, atteste, ainsi, en ces termes : 'l’agence était régulièrement fermée les samedis où M. Y avait souhaité être de permanence. Il lui a, donc, été proposé en réunion commerciale d’arrêter les permanences le samedi'.

De manière générale, M. Y ne rapporte pas la preuve qu’il était soumis à des horaires de travail ou qu’il appartenait à un service organisé. Aucun secteur géographique de prospection de la clientèle ne lui a été imposé.

Le versement d’avances sur commissions à hauteur de 1000 euros par mois sur les six premiers mois d’activité récupérables dés les premières commissions ne s’analyse pas en un salaire au regard de leur caractère provisoire. La menace exprimée par le gérant de la société de ne pas verser une commission si M. Y ne traitait pas les dossiers de son portefeuille ne s’est pas traduite dans les faits et ne peut, dés lors, être qualifiée de sanction.

M. Y ne peut se prévaloir de l’annonce qui proposait une embauche d’agent immobilier en contrat à durée indéterminée à laquelle il a répondu et qui a abouti à son recrutement, dans la mesure où, selon l’attestation de M. X, consultant en recrutement, mandaté par la société AJC Immobilier, la candidature de M. Y a été en définitive retenue malgré les conditions posées par ce dernier qui voulait conserver une certaine autonomie sans lien de dépendance avec un futur employeur et qui a insisté pour que sa candidature soit examinée sous le statut d’agent commercial.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la preuve de l’existence d’un lien de subordination n’est pas établie. Le jugement sera, en conséquence, confirmé en ce qu’il a débouté M. Y de sa demande de requalification en contrat de travail du contrat d’agent commercial.

Sur les autres demandes

Les demandes de rappels de salaires ou d’indemnité pour travail dissimulé liées à l’exécution d’un contrat de travail formées par M. Y seront rejetées.

Il ne résulte pas des circonstances de l’espèce que l’appel interjeté par M. Y ait dégénéré en abus de droit. La demande reconventionnelle de la société AJC Immobilier pour procédure abusive ne sera pas, en conséquence, retenue.

La charge des dépens sera supportée par M. Y qui succombe en ses demandes.

L’équité commande d’allouer à la société AJC Immobilier la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Déboute la société AJC Immobilier de sa demande pour procédure abusive ;

Condamne M. Y à payer à la société AJC Immobilier la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. Y aux dépens.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT,

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Textes cités dans la décision

  1. Code de procédure civile
  2. Code du travail
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