Cour d'appel de Rouen, Ch. civile et commerciale, 14 novembre 2019, n° 18/04788

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rouen, ch. civ. et com., 14 nov. 2019, n° 18/04788
Juridiction : Cour d'appel de Rouen
Numéro(s) : 18/04788
Décision précédente : Tribunal de grande instance d'Évreux, 23 octobre 2018, N° 18/00206
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 18/04788 – N° Portalis DBV2-V-B7C-IAPU

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE

ARRET DU 14 NOVEMBRE 2019

DÉCISION

DÉFÉRÉE :

[…]

TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE D’EVREUX du 24 Octobre 2018

APPELANT :

Monsieur Z A

[…]

[…]

représenté et assisté par Me Thierry CLERC, avocat au barreau de ROUEN, substitué par Me Sarah BAUDIN, avocat au barreau de ROUEN

INTIMEES :

SAS B LIVE GROUP prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

[…]

représentée par Me H PEUGNIEZ de la SELARL DE BEZENAC & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN, postulant

assistée par Me Edouard DEVILDER, avocat au barreau de PARIS, plaidant

SAS SILENCE ! prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[…]

[…]

représentée par Me H PEUGNIEZ de la SELARL DE BEZENAC & ASSOCIES, avocat au barreau de ROUEN, postulant

assistée par Me Edouard DEVILDER, avocat au barreau de PARIS, plaidant

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 786 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 18 Juin 2019 sans opposition des avocats devant Madame BERTOUX, Conseiller rapporteur,

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame BRYLINSKI, Président

Madame MANTION, Conseiller

Madame BERTOUX, Conseiller

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame X,

DEBATS :

A l’audience publique du 18 Juin 2019, où l’affaire a été mise en délibéré au 19 Septembre 2019, délibéré prorogé ce jour.

ARRET :

Contradictoire

Prononcé publiquement le 14 novembre 2019, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame BRYLINSKI, Présidente et par Madame X, greffier..

*

* *

FAITS ET PROCEDURE

Suivant requête en date du 9 mars 2018, les sociétés B Live Group, dont le siège social est situé […] et la société Silence, dont le siège social est situé […] ont saisi le président du tribunal de grande instance d’Evreux sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, aux fins de commettre un huissier de justice avec mission de se rendre dans les locaux de la société Silence situés 1118, […] et/ou au domicile de M. B A, M. Z A, M. D E, Mme F G, M. H I, ou en tout autre lieu où ces personnes se trouveraient, accéder aux bureaux, postes informatiques, tablettes, téléphones (de type smartphone ou autre) professionnels et personnels ou tout autre support en vue de rechercher des données, fichiers, documents, correspondances quel qu’en soit le support sur une période allant du premier janvier 2017 jusqu’à l’exécution de la mesure d’instruction et comportant au moins l’un des termes ou locution, racine, déployée ou agrégée, en majuscules ou en minuscules suivants (suit une liste de l’ordre de 150 signifiants), en prendre copie et dresser un inventaire des pièces obtenues sous forme d’un procès verbal, l’huissier désigné devant être autorisé à se faire assister pour sa mission par M. J K, expert informatique près la cour d’appel de Paris.

Il a été fait droit à la requête par ordonnance en date du 14 mars 2018 du président du tribunal de

grande instance d’Evreux, qui a désigné la SCP M Y N O, titulaire d’un office d’huissier de justice à Evreux pour y procéder, l’huissier désigné étant tenu de conserver par devers lui sous séquestre les données et/ou documents recueillis jusqu’à ce qu’il soit autrement ordonné par décision de justice contradictoire ou jusqu’à l’accord amiable des parties.

Suivant procès verbal de constat en date du 15 mars 2018, Maître Thierry Y, membre de la SCP M Y N O a fait part de la réalisation de la mission confiée par ordonnance du 14 mars 2018.

Par acte d’huissier en date du 12 juin 2018, la société B Live et la société Silence ont fait assigner M. Z A devant le président du tribunal de grande instance d’Evreux statuant en référé, afin de voir valider la mesure d’instruction ordonnée le 14 mars 2018 et ordonner à l’huissier commis de remettre l’intégralité des éléments appréhendés, demande à laquelle M. Z A s’est opposé sollicitant la rétractation de l’ordonnance du 14 mars 2018.

Par ordonnance du 24 octobre 2018, le président du tribunal de grande instance d’Evreux a :

— débouté M. Z A de sa demande tendant à la rétractation pure et simple de l’ordonnance prise le 14 mars 2018 sur la requête de la société Silence et de la société B Live ;

— ordonné à Maître L Y, huissier de justice instrumentaire, assisté si besoin de M. J K, expert informatique près la cour d’appel de Paris ou tout autre expert substitué, de supprimer des éléments ou documents recueillis lors de l’exécution de l’ordonnance prise le 14 mars 2018, tous ceux retenus sur les seuls mots-clés suivants :

versail ; versaille ; versailles ; château de versailles ; sébastien ; sebastien ; nicolas ; bernard ; alexis ; mathieu ; david ; julie ; jean ; luc ; jean luc ; jean-luc ; vincent ; cedric ; laurence ; jean ; manuel ; jean manuel ; jean-manuel ; odile ; yannick ; eric ; barthelemy ; hugo ; gilles ;

— dit que Maître L Y, huissier de justice instrumentaire, devra convoquer par tout moyen qu’il jugera utile M. Z A, ainsi que les représentants des sociétés Silence et B Live Group, afin qu’ils assistent aux opérations de vérification des éléments sélectionnés ;

— dit qu’à l’issue de ces opérations, Maître L Y remettra à la société Silence et à la société B Live Group les documents recueillis lors de ses opérations du 15 mars 2018 expurgées de celles exclues par l’ordonnance ;

— condamné M. Z A à verser à la société Silence et à la société B

Live Group ensemble une somme de 800 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— débouté M. Z A de sa demande formée en application des

dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamné M. Z A aux dépens.

***

M. Z A a formé appel de cette ordonnance, par déclaration reçue le 19 novembre 2018 au greffe de la cour.

Aux termes de ses dernières conclusions en date du 24 décembre 2018, auxquelles il convient de se

reporter pour l’exposé détaillé des moyens développés, il demande à la cour au visa des articles 145, 146, 232 à 284-1, 493, 495, 496 et 497 du code de procédure civile, des articles 9, 11, 14, 17 du code de procédure civile, de l’article L.1121-1 du code du travail, de l’article L.615-5 du code de la propriété intellectuelle, de:

A titre principal

— réformer l’ordonnance entreprise et statuant à nouveau,

— rétracter l’ordonnance sur requête en date du 14 mars 2018 avec

toutes conséquences de droit et de fait,

— constater la perte du fondement juridique de la mesure d’exécution

diligentée le 15 mars 2018 par l’huissier instrumentaire en application de l’ordonnance du 14 mars 2018, et par conséquent la dire nulle et non avenue,

— dire que l’huissier instrumentaire ayant effectué les opérations en date du 15 mars 2018 devra restituer à M. Z A les documents et données recueillis lors desdites opérations,

En tout état de cause

— condamner les sociétés B Live Group et Silence à verser à M. Z A la somme de 3.000 € au titre des frais irrépétibles,

— condamner les sociétés B Live Group et Silence aux dépens de première instance et d’appel.

Il fait valoir pour l’essentiel que les conditions requises par les articles 145 et 493 du code de procédure civile ne sont pas réunies; que l’existence même d’une ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce Lille, dès le 8 mars 2018, avant même le dépôt de la requête à Mme le Président, anéantit les circonstances invoquées par les intimées pour justifier la mesure d’instruction sollicitée en l’absence de risque de dépérissement des preuves et de nécessité de rechercher l’effet de surprise à l’égard de leur salarié; que sa coopération au cours de la mesure d’instruction, corrobore le caractère non justifié du recours à la procédure sur requête, ce comportement n’ayant aucunement pour effet de ratifier juridiquement des actes et mesures illicites; que les intimées disposaient avant le jour où le premier juge statuait, de suffisamment d’éléments pour convoquer M. Z A en vue de son licenciement pour faute grave selon leur courrier du 14 mars 2018 ; que la violation du secret des correspondances de leur salarié Z A était donc inutile et disproportionnée; que les demandes des intimées se fondent exclusivement sur des affirmations, sans aucun commencement de preuve de la légitimité de la mesure sollicitée; que les modalités mêmes de la levée du séquestre est contraire aux dispositions de l’article 66-5 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971, le secret professionnel des avocats ne s’étendant pas aux documents détenus par l’adversaire de leur client ; que l’exécution sur minute de l’ordonnance n’est pas justifiée; que la mesure sollicitée a permis aux sociétés B Live Group et Silence d’éviter les contraintes d’une procédure de saisie contrefaçon qui est en réalité poursuivie.

***

Par conclusions en date du 24 janvier 2019, les sociétés B Live Group et Silence demandent à la cour au visa des articles 145, 249, 493, 700 et 874 du code de procédure civile, de:

A titre principal:

— confirmer l’ordonnance de référé n° […] rendue par le tribunal de grande instance d’Evreux le 24 octobre 2018, sauf en ce qu’elle a ordonné à Maître L Y, de supprimer des éléments ou documents recueillis lors de l’exécution de l’ordonnance prise le 14 mars 2018, tous ceux retenus sur les seuls mots-clés suivants : versail ; versaille ; versailles ;chateau de versailles; sebastien; sebastien; nicolas; bemard; alexis;mathieu; david; julie ; jean; luc; jean luc ; jean-luc; vincent; cedric;laurence ; jean; manuel ; jean manuel ; jean-manuel; odile ;yam1ick ; eric ; barthelemy ; hugo ; gilles ;

— ordonner à l’huissier, désigné séquestre des documents recueillis, de remettre aux sociétés B Live et Silence les éléments appréhendés lors de la réalisation de la mesure d’instruction le 15 mars 20.18 et qui n’ont pas été remis à Silence et B Live à ce jour, des suites des prescriptions de l’ordonnance du 24 octobre 2018 ;

— dire et juger que les sociétés B Live et Silence sont bien fondées à obtenir la communication de l’ensemble des éléments d’information recueillis au titre des mesures d’instruction réalisées ;

Subsidiairement:

— confirmer l’ordonnance de référé rendue par le tribunal de grande instance d’Evreux le 24 octobre 2018 en toutes ses dispositions ;

En tout état de cause,

— condamner M. Z A à verser aux sociétés B Live et Silence une somme de 5.000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Les sociétés B Live Group et Silence entendent que soit retenu que l’ordonnance est suffisamment motivée par référence au motifs de la requête et que le motif légitime à obtenir la mesure sollicitée est établi.

SUR CE:

Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé.

Par application de l’article 493 du même code, l’ordonnance peut être rendue sur requête, non contradictoirement, dans le cas où le requérant est fondé à ne pas appeler de partie adverse.

Pour qu’il soit fait droit à la demande de mesure d’instruction sur le fondement des articles 145 et 493 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi de la requête, de vérifier que la mesure sollicitée est fondée sur des motifs légitimes, et que les circonstances imposent qu’elle ne soit pas contradictoirement ordonnée, de sorte que le juge saisi d’une demande de rétractation de l’ordonnance rendue doit procéder aux mêmes vérifications.

Les sociétés B Live Group et Silence ont indiqué dans leur requête au président du tribunal de grande instance d’Evreux qu’en 2013, la société Silence a accepté le rachat, dans le cadre d’un plan de cession, de la société Multi-Concept en liquidation judiciaire mais que malgré d’intenses efforts pour remettre à flot son activité, celle-ci est demeurée déficitaire de telle sorte que la société Silence a dû annoncer la fermeture de son site d’Evreux à l’automne 2017.

Dans ce contexte, elle a proposé aux salariés et notamment à M. Z A, un reclassement au siège de la société Silence à Saint-Denis, proposition que ce dernier a refusée par lettre en date du 15

novembre 2017, son licenciement pour motif économique lui ayant été notifié par lettre recommandée avec accusé de réception en date du 19 janvier 2018, à la suite d’un entretien préalable du 4 janvier 2018, lui rappelant que son contrat de travail prendra fin à l’issue d’un délai de préavis de trois mois.

Les sociétés B Live Group et Silence indiquent en outre qu’alors que le contrat de travail de M. Z A était toujours en cours et que le salarié était toujours tenu à une obligation de confidentialité, des contacts ont été pris par ce salarié avec la société Alive Technology filiale de la société Alive Group qui détient également la société Alive Events, leurs concurrentes, ASO, client historique de la société Silence lui ayant annoncé le 8 février 2018, à l’issue d’une offre de marché, qu’elle lui préférait la société Alive Techology, ASO ayant pour activité l’organisation d’événements de grande ampleur tels que le Tour de France ou les arts et spectacles vivants dans le cadre du Château de Versailles.

Les relevés d’appels professionnels des plusieurs salariés laissaient penser que ces derniers entretenaient des relations en lien avec l’activité de sociétés concurrentes et particulièrement la société Alive Technology, M. Z A ayant notamment reçu un devis en date du 6 février 2018 de la Sarl Aluminium adressé à 'Alive Technology M. Z A’ et ayant eu des contacts avec ladite société en vue notamment de son recrutement.

Ces faits étant détaillés dans la requête, l’ordonnance du 24 octobre 2014 qui s’y réfère expressément répond aux exigences de l’article 495 du code de procédure civile, aucune nullité n’étant encourue sur ce point.

Aucune nullité n’est par ailleurs encourue en raison du fait que l’huissier qui a procédé à la mesure d’instruction n’aurait pas été en possession de la minute de l’ordonnance du 14 mars 2018, ce fait étant contesté par les sociétés B Live Group et Silence qui versent aux débats une attestation de Maître Y indiquant qu’il a exécuté la mesure ordonnée en présentant l’original de l’ordonnance sur requête.

Dans tous les cas, si l’article 495 du code de procédure civile dispose que l’ordonnance est exécutoire sur minute, il n’est ni prétendu, ni démontré que la copie de l’ordonnance n’a pas été remise à M. Z A, de telle sorte que les dispositions de l’article 495 alinéa 3 du code de procédure civile ayant été respectées, aucune nullité n’est encourue.

S’agissant de l’appréciation du caractère légitime de la requête et partant de la mesure ordonnée non contradictoirement, M. Z A fait valoir que les sociétés B Live Group et Silence disposaient déjà de l’ordonnance rendue le 8 mars 2018 par le président du tribunal de grande instance désignant la SCP P Q R S, titulaire d’un office d’huissier de justice à Lille avec mission de se rendre dans le locaux des sociétés Alive Group, Alive technology, Alive Events notamment pour rechercher les données, fichiers et documents et/ou correspondances sur une période allant du premier janvier 2017 jusqu’à l’exécution de la mesure d’instruction.

Or, cette ordonnance tendant à établir des faits de débauchage et/ou de concurrence déloyale, n’a pas le même objet que celle déposée devant le tribunal de grande instance d’Evreux fondée sur le manquement de salariés à leur obligation de confidentialité dans le cadre de l’exécution de leur contrat de travail, la saisine du président du tribunal de grande instance d’Evreux territorialement compétent s’agissant de M. Z A s’imposant en ce que les mesures ordonnées non contradictoirement doivent permettre lors de l’exécution la saisine du juge des référés en vu d’un débat contradictoire sur le bien fondé et les modalités de la mesure.

Enfin, aucun détournement de procédure n’est démontré s’agissant de l’allégation de M. Z A selon laquelle le constat ordonné de manière non contradictoire aurait pour objet de contourner les règles de la saisie contrefaçon, les demandes des sociétés B Live Group et Silence visant à évaluer

l’importance des faits de concurrence déloyale auxquels ses salariés et particulièrement M. Z A sont susceptibles d’avoir participé, cette possibilité étant suffisamment établie au regard des faits ci-dessus.

Dans ce contexte, le risque de disparition des preuves justifiait la mesure prise de manière non contradictoire, les supports informatiques servant notamment aux communication étant susceptibles d’être supprimés après transfert des données sensibles pour l’entreprise, l’objectif de la mesure étant d’identifier les informations qui ont pu être récupérées en violation des droits des sociétés requérantes tels que les fichier clients, étant rappelé que M. Z A exerçait la fonction de chargé d’affaires eu sein de la société Silence.

Ainsi, c’est à bon droit que le président du tribunal de grande instance d’Evreux a refusé de rétracter l’ordonnance du 14 mars 2018, les moyens invoqués par M. Z A devant la cour tendant à contester la réalité du détournement de clientèle ou de marchés n’étant pas recevables, la mesure d’instruction sollicitée étant destinée à les établir.

Enfin, M. Z A conteste la légitimité de la mesure d’instruction en ce que les mesures ordonnées sont disproportionnées dès lors qu’elles visent un salarié non tenu par une clause de non-concurrence et qu’elles ont permis l’accès à sa boîte mail personnelle en méconnaissance du droit au secret des correspondances, alors que les éléments de preuve recherchés ne présentent aucun caractère indispensable dans le cadre du litige commercial qui oppose le groupe B Live à la société Alive, alors même que B Live était en possession d’une ordonnance rendue par le président du tribunal de commerce de Lille dès avant le dépôt de la requête ici contestée.

Il sera rappelé qu’au sens de l’article 145 du code de procédure civile, les

mesures légalement admissibles sont celles prévues par les articles 232 à 284-1 du code de procédure civile.

En l’espèce, il a été rappelé ci-dessus qu’à défaut de clause de non concurrence, M. Z A était tenu contractuellement à une obligation de ne pas dévoiler à qui que ce soit pendant l’exercice de ses fonctions et après cessation de celle-ci , aucune information concernant les comptes ou finances, procédés, méthodes, transactions ou quelque autre chose se rapportant aux affaires de la société.

Par ailleurs, la mesure ordonnée a été expressément limitée dans le temps sur la période à compter du premier janvier 2017 jusqu’au constat devant avoir lieu au plus tard dans le mois suivant l’ordonnance du 14 mars 2018, les documents copiés étant conservés sous séquestre jusqu’à ce qu’il soit autrement statué, cette disposition étant destinée à éviter que les éléments bruts soient communiqués, sans qu’un débat contradictoire n’ait pu s’instaurer, ce qui a justifié la saisine par les sociétés B Live Group et Silence du président du tribunal de grande instance d’Evreux statuant en référé en vue de la levée de la mesure de séquestre.

Or, l’ordonnance frappée d’appel a tenu compte des arguments opposés par

M. Z A en indiquant que, sans qu’il y ait lieu de rétracter l’ordonnance, il convenait de supprimer les documents comportant les mots clefs par prénoms compte tenu de leur caractère non discriminant présentant un risque d’atteinte à la vie privée pour M. Z A, ce qui a permis d’extraire des documents sous séquestre sans lien avec des concurrents des sociétés B Live Group et Silence, les conditions posées par l’ordonnance du 24 octobre 2018 pour la levée partielle du séquestre garantissant l’absence d’atteinte disproportionnée à la vie privée.

La mesure a d’ailleurs été exécutée dans les conditions prévues, ainsi qu’il ressort du procès verbal établi le 5 novembre 2018 par Maître L Y, qui a procédé, sur la base des lots établis par M. J K, expert informatique qui l’assistait, au retrait des documents contenant les mots

clefs visés par l’ordonnance du 24 octobre 2018, cette opération ayant eu lieu en présence du conseil des sociétés B Live Group et Silence et de M. Z A, en personne, sans que ne soit démontrée une atteinte aux règles de confidentialité de 66-5 de la loi n°71-1130du 31 décembre 1971.

En effet, ce texte dont la violation est invoquée par M. Z A est relatif au secret dû par l’avocat s’agissant des consultations adressées à son client ou destinées à celui-ci et généralement à toutes les pièces du dossier couvertes par le secret professionnel et ne fait pas obstacle aux dispositions prises dans le cadre d’une procédure contradictoire par la décision judiciaire encadrant la levée de la mesure de séquestre précédemment ordonnée, cette levée partielle ayant eu lieu le 5 novembre 2018 en présences des parties ou de leurs représentant, étant souligné que M. Z A qui était présent n’a formulé aucune observation lors de l’établissement du procès verbal.

Ainsi, il y a lieu, compte tenu de ce qui précède, de débouter M. Z A

des fins des son appel et de confirmer l’ordonnance entreprise sauf s’agissant des dépens et des dispositions prise en application de l’article 700 du code de procédure civile.

En effet, s’agissant des dépens, il convient de noter que l’ordonnance sur requête nécessitait pour son exécution que le juge soit saisi en vue de la levée de la mesure de séquestre, demande à laquelle il n’a été fait que partiellement droit de telle sorte qu’il y a lieu de dire que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens.

Chacune des parties conservant la charge de ses propres dépens, il n’y a pas lieu en outre de prononcer de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par décision rendue contradictoirement,

Confirme l’ordonnance du 24 octobre 2019, sauf s’agissant des dépens et de l’article 700 du code de procédure civile,

Statuant à nouveau de ces chefs,

Rejette les demandes formées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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