Cour d'appel de Versailles, 12e chambre, 18 février 2021, n° 18/04903
Chronologie de l’affaire
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Sur la décision
Référence : | CA Versailles, 12e ch., 18 févr. 2021, n° 18/04903 |
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Juridiction : | Cour d'appel de Versailles |
Numéro(s) : | 18/04903 |
Décision précédente : | Tribunal de grande instance de Pontoise, 18 juin 2018, N° 15/00002 |
Dispositif : | Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours |
Sur les parties
- Président : François THOMAS, président
- Avocat(s) :
- Cabinet(s) :
- Parties :
Texte intégral
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 30C
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 FEVRIER 2021
N° RG 18/04903 – N° Portalis DBV3-V-B7C-SQJG
AFFAIRE :
Z G Y C
…
C/
Décision déférée à la cour : Jugement rendu(e) le 19 Juin 2018 par le Tribunal de Grande Instance de PONTOISE
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 15/00002
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Corinne ROUX
Me Franck LAFON,
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT FEVRIER DEUX MILLE VINGT ET UN,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Monsieur Z G Y C
né le […] à […]
de nationalité Française
[…]
[…]
Représentant : Me Corinne ROUX de l’ASSOCIATION ASSOCIATION ROUX PIQUOT-X, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 564
N° SIRET : 809 97 1 3 93
[…]
[…]
Représentant : Me Corinne ROUX de l’ASSOCIATION ASSOCIATION ROUX PIQUOT-X, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 564
APPELANTS
****************
N° SIRET : B51 393 455 4
[…]
[…]
Représentant : Me Franck LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20180301
Représentant : Me Antoine ATTIAS, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C2306 -
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Novembre 2020 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant
Monsieur Bruno NUT, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Mme Véronique MULLER, Conseiller,
Monsieur Bruno NUT, Conseiller,
Greffier, lors des débats : Monsieur Alexandre GAVACHE,
EXPOSE DU LITIGE
Suivant acte authentique reçu par Me A B, notaire à Arcueil, le 12 octobre 2000, M. Z Y
C a consenti à la société Hôtel la Savoie, représentée par son gérant M. F D E, un
bail commercial sur des locaux situés […]
centiares) à Argenteuil, comportant d’une part un bâtiment à usage d’hôtel meublé élevé sur caves, de quatre
étages et combles comprenant 23 chambres, salles de bains et WC, ascenseur au milieu du bâtiment
desservant tous les étages et d’autre part un appartement situé au rez-de chaussée, comprenant réception,
bureau, hall, salon avec cuisine américaine, salle d’eau et WC, et au premier étage une chambre, salle de bains
avec WC, pour une durée de 9 années entières et consécutives à compter du 1er novembre 2000, moyennant
un loyer annuel de 64.028,59 € payable mensuellement. Aucun dépôt de garantie n’a été convenu. Il est
précisé que le bailleur est également propriétaire de l’immeuble situé à Argenteuil, […] et
que le preneur supportera une servitude de passage sur l’immeuble objet du bail au profit de l’immeuble situé
au 227, du rez-de-chaussée au 4e étage.
Suivant acte authentique reçu par Me A B le 17 mai 2001, M. Y C a consenti à M.
F D E un bail commercial sur des locaux à usage de restaurant situés 225 (cadastré
section BW numéro 10 pour 2 ares […]) et […],
lieu-dit […], les deux locaux devant être réunis par le
preneur, pour une durée de 9 années entières et consécutives à compter du 17 mai 2001, moyennant un loyer
annuel de 36.587,76 € payable mensuellement. Un dépôt de garantie de 3.048,98 € a été versé par le preneur.
Suivant acte authentique reçu par Me A B le 2 mars 2005, M. Y C et la société Hôtel la
Savoie ont modifié le bail initial du 12 octobre 2000 quant à la désignation des lieux loués et au montant du
loyer, toutes les autres conditions restant inchangées. Le bail portait désormais non seulement sur l’immeuble
du […], mais également sur l’immeuble contigu situé […] comprenant :
un bâtiment à usage d’hôtel meublé sur un sous-sol et 4 étages composé de 16 chambres avec salle de bains et
de combles au-dessus. Le bailleur s’est engagé à aménager l’intérieur des combles au profit du preneur dans un
délai d’un mois, les combles étant compris dans le prix du loyer. Le nouveau loyer annuel a été fixé à 14.300 €
H.T., payable mensuellement à compter du 1er avril 2005.
En 2009, la société Hôtel la Savoie et M. D E ont été déclarés en redressement judiciaire par le
tribunal de commerce de Pontoise, le tribunal ayant constaté la confusion de leurs patrimoines, et ont
bénéficié d’un plan de redressement en juin 2010.
Par jugement du 27 septembre 2013, le tribunal a prononcé la résolution du plan, ouvert une procédure de
liquidation judiciaire à l’égard de la société Hôtel la Savoie et de M. F D E, et désigné
Me Hart de Keating en qualité de liquidateur.
Par ordonnance du 16 décembre 2013, le juge commissaire de la procédure de liquidation judiciaire a autorisé
la vente de gré à gré du fonds de commerce d’hôtel de la société Hôtel la Savoie et du fonds de commerce de
restaurant de M. D E au profit de la société Hôtel Berbère au prix de 325.000 € hors droits et
hors frais. L’acte de cession a été reçu en la forme authentique par Me Christophe Nottet, notaire à
Pierrefitte-sur-Seine, avec le concours de Me Jean-Marc Mateu, notaire associé à Magny-en-Vexin, le 6 mai
2014.
Suivant exploit du 27 juin 2014, la société Hôtel Berbère a fait délivrer à M. Y C une demande de
renouvellement du bail portant sur les locaux à usage d’hôtel.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 7 novembre 2014, elle a notifié à son bailleur un
mémoire préalable pour voir fixer le loyer du bail renouvelé au 1er octobre 2014 à la somme hors taxes et hors
charges de 19 750 euros, correspondant selon elle à la valeur locative des locaux.
C’est dans ces conditions que par acte extrajudiciaire du 5 janvier 2015, la société Hôtel Berbère a assigné M.
Y C devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Pontoise aux mêmes
fins, et aux fins de le voir condamné à lui verser le différentiel de loyer ayant couru depuis le 1er octobre 2014
ainsi que le complément de dépôt de garantie.
Le 23 juillet 2015, M. Z Y C a fait apport des deux immeubles situés […], numéro
10, lieu-dit '[…]', pour une contenance de 2 ares et […]) et […]
(section BW, numéro 9, lieu-dit '[…]', pour une contenance d'1 are 98 centiares) à
Argenteuil à la société Périphérique par acte notarié de Me B enregistré le 6 août 2015.
Par jugement du 10 novembre 2015, le juge des loyers commerciaux a :
— débouté M. Y C de sa demande de sursis à statuer,
— dit n’y avoir lieu pour le juge des loyers de prononcer la réduction d’un bail
— déclaré la Sarl Hôtel Berbère recevable en sa demande en fixation du prix du bail renouvelé,
— avant dire droit, sur la valeur locative des locaux, ordonné une expertise et désigné pour y procéder M.
Sixdenier, en qualité d’expert avec pour mission de déterminer la valeur locative du local considéré
conformément aux dispositions de l’article R 145-10 du code de commerce (…).
La cour d’appel de Versailles, par arrêt du 29 novembre 2016, a confirmé le jugement en toutes ses
dispositions.
Le rapport de l’expert judiciaire a été déposé le 30 juin 2016.
Par jugement du 7 avril 2017, le juge des loyers commerciaux a ordonné un complément d’expertise judiciaire
pour que les éléments servant à la détermination de la recette théorique puissent être vérifiés à partir des
documents comptables et des facturations émises par la société Hôtel Berbère.
L’expert judiciaire a établi son complément d’expertise le 21 décembre 2017.
L’affaire a été renvoyée à l’audience du juge des loyers commerciaux du 10 avril 2018.
Par courriers des 7, 15, 19 mars et 9 avril 2018, M. Y C et la société Périphérique ont demandé que
l’affaire soit renvoyée à une audience ultérieure.
Par courriers et mails du 12,15 mars et 9 avril 2018, la société Hôtel Berbère s’est opposée à la demande de
renvoi.
L’affaire a été retenue et mise en délibéré au 12 juin 2018.
Par courriers et mail du 10 avril 2018 et du 10 mai 2018, le conseil de M. Y C et de la société
Périphérique a demandé au juge des loyers de reconsidérer la retenue de l’affaire et de faire droit à sa demande
de renvoi ou de réouverture des débats en faisant valoir être dans l’attente de documents déterminants portant
sur l’offre de reprise du fonds de commerce de la société Hôtel la Savoie par la société Hôtel Berbère.
Par jugement du 19 juin 2018, le tribunal de grande instance de Pontoise a:
— Rejeté la demande de réouverture des débats,
— Fixé le loyer du bail renouvelé au 1er octobre 2014 à la somme de 42 250 euros hors taxes et hors charges,
— Dit que les restitutions de loyers porteront intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2015, en ce qui
concerne les échéances de loyer déjà réglées à cette date puis au fur et à mesure de leurs règlements pour les
échéances postérieures et dit que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article 1
343-2 du code civil.
— Rejeté ou dit sans objet les demandes plus amples ou contraires des parties,
— Dit que les dépens comprenant les frais de l’expertise judiciaire seront partagés par moitié,
— Ordonné l’exécution provisoire de la décision,
Par déclaration du 11 juillet 2018, M. Y-C et la société Périphérique ont interjeté appel du
jugement.
Par ordonnance d’incident du 23 mai 2019, le conseiller de la mise en état a :
— Débouté la société Hôtel Berbère de sa demande de radiation de l’affaire du rôle de la cour,
— Déclaré la demande de sursis à statuer de M. Y-C et de la société Périphérique irrecevable,
— Débouté les parties de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
— Condamné la société Hôtel Berbère aux dépens de l’incident.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par conclusions notifiées le 22 janvier 2020, la société Périphérique et M. Y C demandent à la
cour de :
— Rejeter l’exception d’irrecevabilité fondée sur le caractère prétendument nouveau de la demande de fixation
du loyer litigieux.
— Infirmer le jugement rendu par le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de
Pontoise le 19 juin 2018, en ce qu’il a :
— Fixé le loyer du bail renouvelé au 1er octobre 2014 à la somme de 42.250 euros hors
taxes et hors charges,
— Dit que les restitutions de loyers porteront intérêts au taux légal à compter du 5 janvier 2015, en ce qui
concerne les échéances de loyers déjà réglées à cette date puis au fur et à mesure de leurs règlements pour les
échéances postérieures et dit que les intérêts seront capitalisés conformément aux dispositions de l’article
1343-2 du code civil.
Statuant à nouveau :
— Fixer le prix du bail renouvelé au 1er octobre 2014, portant sur les locaux commerciaux sis à […]
d’Oise) consistant en :
I ' Un […], comprenant :
Un bâtiment à usage d’hôtel meublé élevé sur caves de quatre étages et comprenant vingt-trois chambres,
salles de bains et WC, ascenseur au milieu du bâtiment desservant tous les étages.
Un appartement situé au rez-de-chaussée comprenant : réception, bureau, hall, salon avec cuisine américaine,
salle d’eau et WC et d’un premier étage comprenant : une chambre, salle de bains avec WC ;
II ' Un immeuble sis […], comprenant :
Un bâtiment à usage d’hôtel meublé comprenant le sous-sol, quatre étages composés de seize chambres avec
salle de bains et de combles au-dessus à la somme annuelle de 94 883,15 euros HT et hors charges et,
subsidiairement, à la somme annuelle de 82.923 euros HT et hors charges.
— Condamner la société Hôtel Berbère au paiement des intérêts au taux légal sur les loyers arriérés,
conformément aux dispositions de l’article 1155 du code civil et dire que les intérêts dus pour plus d’une année
entière seront eux-mêmes capitalisés par application de l’article 1154 du même code ;
— Condamner la société Hôtel Berbère à verser à la société Périphérique et à M. Y C la somme à
chacun de 10.000 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
— Débouter la société Hôtel Berbère de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions.
— Condamner la société Hôtel Berbère aux entiers dépens, dont distraction au profit de Maître Corinne Roux,
membre de l’association Roux Piquot-X, avocats aux offres de droit sur le fondement de l’article 699 du
code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 20 janvier 2020, la société Hôtel Berbère demande à la cour de :
A titre principal :
— Déclarer M. Y et la société Périphérique irrecevables en leurs demandes
— Fixer le prix du loyer du bail en renouvellement pour une durée de 9 années à compter du 1er octobre 2014
des lieux donnés à bail par M. Y aux droits duquel se trouve la société Periphérique à la somme de
22.500 euros par an hors taxes et hors charges
Subsidiairement :
— fixer le prix du loyer du bail en renouvellement pour une durée de 9 années à compter du 1er octobre 2014
des lieux donnés à bail par M. Y aux droits duquel se trouve la société Périphérique à la somme de
25.700 euros par an hors taxes et hors charges
Très subsidiairement :
— fixer le prix du loyer du bail en renouvellement pour une durée de 9 années à compter du 1er octobre 2014
des lieux donnés à bail par M. Y aux droits duquel vient la société Périphérique à la somme de 39.500
euros par an hors taxes et hors charges
Encore plus subsidiairement :
— fixer le prix du loyer du bail en renouvellement pour une durée de 9 années à compter du 1er octobre 2014
des lieux donnés à bail par M. Y aux droits duquel vient la société Périphérique à la somme de 41.900
euros par an hors taxes et hors charges
A titre infiniment subsidiaire :
— confirmer le jugement déféré en ce qu’il a fixé le montant du loyer renouvelé au 1er octobre 2014 à la
somme de 42.250 euros HT et HC.
En toute hypothèse :
— Condamner M. Y et la société Périphérique au règlement de la différence entre le loyer réglé et le
loyer dû à compter de cette date et le loyer versé
— Dire que les sommes dues porteront intérêt au taux légal à compter du 7 novembre 2014 (date de notification
du premier mémoire) avec capitalisation des intérêts conformément à l’article 1343-2 du code civil
— Condamner solidairement M. Y et la société Périphérique au paiement de la somme de 10.000 euros
au titre des frais irrépétibles de 1re instance
— Condamner solidairement M. Y et la société Périphérique au paiement de la somme de 5.000 euros au
titre des frais irrépétibles d’appel
— Condamner solidairement M. Y et la société Périphérique en tous les dépens, dont distraction au
profit de Maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure
civile, y compris les frais d’expertise.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 janvier 2020.
La cour a reçu des conclusions le 24 janvier 2020 de la part de la société Hôtel Berbère reprenant ses
précédentes prétentions et demandant la révocation de l’ordonnance de clôture. Le 27 janvier 2020 M.
Y C et la société Périphérique ont déposé de nouvelles conclusions.
Sur ce, la cour,
Sur la procédure
La recevabilité de l’appel n’est pas contestée et l’examen des pièces de la procédure ne révèle l’existence
d’aucune fin de non-recevoir susceptible d’être relevée d’office.
L’article 901 du code de procédure civile dispose que la déclaration d’appel est faite par acte contenant
notamment, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l’article 54 et le troisième alinéa de l’article 57
(dans sa version en vigueur au 1er janvier 2021), et à peine de nullité, les chefs du jugement expressément
critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est
indivisible.
Il ressort de l’article 562 alinéa 1er du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891
du 6 mai 2017, que l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément
et de ceux qui en dépendent.
Il est rappelé qu’en application de l’article 954 alinéas 3 et 4 du code de procédure civile la cour ne statue,
dans la limite de l’effet dévolutif de l’appel, que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières
conclusions des parties et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la
discussion, étant précisé qu’en application de l’article 4 du code de procédure civile, l’objet du litige est
déterminé par les prétentions respectives des parties.
Les parties qui ont conclu devant la cour après le prononcé de l’ordonnance de clôture demandent la
révocation de l’ordonnance de clôture aux termes de ces mêmes conclusions.
Il ressort de l’article 803 du code de procédure civile applicable à la procédure d’appel en raison des
dispositions de l’article 907 du même code que :
L’ordonnance de clôture ne peut être révoquée que s’il se révèle une cause grave depuis qu’elle a été rendue ;
la constitution d’avocat postérieurement à la clôture ne constitue pas, en soi, une cause de révocation.
Si une demande en intervention volontaire est formée après la clôture de l’instruction, l’ordonnance de clôture
n’est révoquée que si le tribunal ne peut immédiatement statuer sur le tout.
L’ordonnance de clôture peut être révoquée, d’office ou à la demande des parties, soit par ordonnance
motivée du juge de la mise en état, soit, après l’ouverture des débats, par décision du tribunal.
La société Hôtel Berbère, qui soutient que M. Y a conclu le 22 janvier à 19 heures 11 en ayant
considérablement modifié les éléments du litige en soutenant qu’une partie des locaux aurait été exploitée et
qu’elle n’a pas pu prendre connaissance des conclusions adverses, demande la révocation de l’ordonnance
prononcée le lendemain 23 janvier.
Or, les conclusions ayant été signifiées le 22 janvier 2020, la cause grave est survenue avant la clôture
prononcée le 23. La société Hôtel Berbère sera dans ces conditions déboutée de sa demande de révocation de
l’ordonnance de clôture.
Par ailleurs, la société Hôtel Berbère ne précise pas en quoi les conclusions des appelants du 22 janvier 2020
nécessitaient une réponse et portaient atteinte aux droits de la défense.
En tout état de cause, ces conclusions déposées le 22 janvier 2020 n’appelaient pas de réponse puisqu’elles
constituaient une réponse aux moyens présentés par la société intimée le 20 janvier 2020 sur l’appréciation de
la valeur locative, l’obligation de délivrance et la non exploitation des 3e, 4e et 5e étages des locaux.
Dès lors la demande subsidiaire de rejet des conclusions présentée par la société Hôtel Berbère ne peut être
accueillie.
Ainsi, les conclusions déposées par les parties les 20 et 22 janvier 2020 avant la clôture, seront retenues
comme étant les dernières conclusions sur lesquelles la cour est tenue de statuer conformément à l’article 954
du code de procédure civile.
Pour un exposé plus détaillé des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie à leurs dernières écritures
conformément à l’article 455 du code de procédure civile.
Sur le fond
-Sur l’irrecevabilité des demandes des appelants
La société Hôtel Berbère soutient que les prétentions présentées par M. Y et la société Périphérique
tendant à voir fixer le loyer à la somme de 94 883,15 euros hors taxes et hors charges et subsidiairement à 82
923 euros sont des prétentions nouvelles qui sont irrecevables faute d’avoir été présentées dans leur mémoire
remis en première instance après le dépôt du rapport complémentaire d’expertise.
M. Y et la société Périphérique répondent que leurs prétentions ne sont pas nouvelles puisqu’elles
tendent aux mêmes fins que les prétentions soumises au premier juge tendant à fixer le loyer de l’immeuble.
***
L’article 564 du code de procédure civile dispose que :
Les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation,
faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la
survenance ou de la révélation d’un fait.
L’article 565 du même code énonce que :
Les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier
juge, même si leur fondement juridique est différent.
Ainsi, en ayant demandé pour la première fois devant la cour d’appel que le loyer en renouvellement soit fixé
à la somme de 94 883,15 euros hors taxes et hors charges et subsidiairement à la somme de 82 923 euros
également hors taxes et hors charges, alors qu’ils n’avaient pas notifié de mémoire postérieurement au dépôt
par l’expert de son rapport complémentaire et avaient demandé aux termes de leur dernier mémoire que la
société Hôtel Berbère soit sommée de communiquer ses états financiers séparés de son établissement
d’Argenteuil pour les années 2014, 2015 de même qu’un état provisoire pour l’année 2016 ainsi que les
livres-journal des exercices 2014, 2015 et 2016 pour son établissement d’Argenteuil, M. Y et la société
Périphérique n’ont pas opposé de compensation, fait écarter les prétentions de la société intimée ou demandé à
juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait et ont bien
présenté une prétention nouvelle qui ne tend pas aux mêmes fins que celles tendant à communiquer les états
financiers, un état provisoire et les livres-journal qu’ils ont soumises au premier juge. Les demandes en
fixation de loyer et en restitution des loyers présentées par M. Y et la société Périphérique pour la
première fois en cause d’appel seront déclarées irrecevables.
-Sur la fixation du prix du loyer du bail renouvelé
Le premier juge a considéré qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer la méthode hôtelière appropriée à l’hôtellerie
traditionnelle compte tenu du caractère particulier de l’exploitation de cet hôtel de type préfecture, non classé
touristique, la clientèle étant constituée de personnes placées par le Samu social. Il a considéré que c’est à
juste titre que l’expert a tenu compte de la situation de l’hôtel, de ses spécificités et de sa capacité à générer du
chiffre d’affaires au 1er octobre 2014, date du renouvellement du bail, seuls les deux premiers étages étant
exploitables.
La société Hôtel Berbère rappelle à l’appui de ses prétentions que la valeur locative des immeubles affectés à
une exploitation hôtelière est déterminée sur la base d’une recette théorique globale hors taxes en application
de l’article 23-8 du décret du 30 septembre 1953. Elle considère que la valeur locative doit s’apprécier par
rapport à la recette théorique maximale tenant compte des prix affichés et d’un taux d’occupation mais aussi de
la segmentation de la clientèle à la date d’effet du renouvellement du bail, soit au 1er octobre 2014, et que la
conclusion de l’expert selon laquelle seuls les 1er et 2e étage de l’immeuble étaient exploitables au 1er
octobre 2014 et retenant une valeur locative de 25 509 euros sont parfaitement conformes au droit.
Elle s’oppose à la fixation de la valeur locative calculée à l’appui des articles L.145-33 et R.145-3 et suivants
du code de commerce. Elle précise qu’à la suite de l’acquisition du fonds de commerce par ordonnance du juge
commissaire et avant même la signature de l’acte devant le notaire, elle s’est rapprochée de M. Y C
pour l’exécution des travaux qui incombent au bailleur, aucune clause particulière du bail ne transférant au
preneur la charge de ces travaux.
Elle considère que la méthode de calcul du loyer du bail renouvelé retenue par le premier juge, fondée sur le
nombre de personnes hébergées ne repose sur aucun usage et se trouve dénuée de base légale et qu’il convient
de fixer la valeur locative selon les critères de la méthode hôtelière classique en recherchant la recette idéale
en fonction du prix des tarifs affichés et par chambre. Elle rappelle que l’hôtel n’avait pas été exploité durant
une année à la suite de la liquidation judiciaire de la société Hôtel la Savoie, le tribunal n’ayant pas autorisé la
poursuite de l’activité en 2013 et qu’à la date du 1er octobre 2014, l’exploitation de l’hôtel avait repris depuis à
peine quelques mois à la suite de la cession du fonds de commerce ordonnée par le juge commissaire le 16
décembre 2013 et confirmée par l’acte de cession notariée du 6 mai 2014. Elle conclut subsidiairement sur la
valeur locative déterminée par une recette théorique fondée sur la tarification par personne placée et par jour,
puis très subsidiairement en comprenant l’entièreté des chambres en ce compris celles qui était inexploitables.
M. Y C et la société Périphérique considèrent pour leur part que le prix du bail renouvelé doit
prendre en considération la consistance du bail dans son intégralité et que le premier juge ne pouvait
restreindre la fixation du loyer du bail renouvelé en ne retenant que la valeur locative des 1er et 2e étages.
Ils soutiennent qu’il convient de prendre en considération les renonciations consenties par la société Hôtel
Berbère lors de l’acquisition du fonds de commerce en précisant que l’acte de cession de fonds de commerce
du 6 mai 2014 mentionne explicitement la consistance du bail cédé, l’état des 3e, 4e et 5e étages de
l’immeuble et l’avis défavorable de la commission de sécurité de la ville d’Argenteuil. Ils s’opposent au
manquement de délivrance invoqué par la société intimée en raison de la clause de l’acte de cession du fonds
de commerce selon laquelle la société Hôtel Berbère a déclaré faire son affaire personnelle de toutes les
prescriptions et travaux de remise aux normes qui pourraient être mises à sa charge en relation avec cette
réglementation sans recours contre le représentant du cédant et le bailleur. Ils soutiennent qu’il convient dès
lors de prendre en considération les 4 étages de l’immeuble loué et que la société Hôtel Berbère avait la
possibilité d’exploiter en y faisant exécuter des travaux de mise aux normes qui lui incombaient.
Ils contestent les critiques opérées par la société intimée sur la valeur locative déterminée selon la méthode
hôtelière par l’expert. Ils estiment qu’il convient de prendre en considération le potentiel de l’immeuble pour
déterminer une recette théorique journalière puis annuelle ensuite corrigée d’un taux d’occupation pour tenir
compte de la fréquentation de l’hôtel et d’un pourcentage variant selon la catégorie de l’hôtel.
***
L’article R.145-10 du code de commerce dispose que :
Le prix du bail des locaux construits en vue d’une seule utilisation peut, par dérogation aux articles L.145-33
et R. 145-3 et suivants, être déterminé selon les usages observés dans la branche d’activité considérée.
La demande de fixation de loyer du bail renouvelé présentée par les appelants étant déclarée irrecevable, la
cour est tenue de statuer sur le seul appel incident formé par la société Hôtel Berbère.
Le premier juge a relevé, sans que cela soit contesté par les parties au procès, que l’activité exercée dans les
locaux situés […] est celle d’un hôtel de type préfecture, non classé
tourisme, la clientèle se composant de personnes placées par le Samu social.
Le bail venant à renouvellement le 1er octobre 2014, le prix du bail renouvelé doit ainsi être apprécié à la date
du renouvellement, les éléments d’appréciation liés à la gestion du preneur (d’ordre comptable, fiscal ou
financier) ne pouvant être postérieurs à la date de prise d’effet du bail renouvelé.
M. Y en sollicitant le débouté des demandes de la partie adverse soutient qu’il convient de prendre en
considération la valeur des 3e et 4e étages dans le calcul du prix du loyer du bail renouvelé. Toutefois,
la valeur locative sera appréhendée à la date d’effet du renouvellement du bail soit le 1er octobre 2014, date à
laquelle seuls les 1er et 2e étages étaient exploitables en raison d’un avis défavorable à l’exploitation des
3e et 4e étages de l’immeuble de l’hôtel en l’absence d’accès possible par une échelle aérienne due à la
présence de câbles EDF devant la façade émis par la commission communale de sécurité de la ville
d’Argenteuil le 28 janvier 2013. Un avis favorable à l’exploitation des quatre étages de l’immeuble a été donné
le 30 juin 2015, après la date de renouvellement, à la suite de la réunion de la commission communale de
sécurité du 28 mai 2015.
Si en matière de location hôtelière s’agissant de baux en vue d’une seule utilisation, il convient pour évaluer le
prix du bail de se référer aux usages observés dans la branche d’activité considérée, c’est à raison que le
premier juge a considéré, compte tenu du caractère particulier de l’exploitation exercée par la société Hôtel
Berbère, de ses spécificités d’accueil de personnes bénéficiant d’aides sociales envoyées par un organisme
spécialisé dans l’hébergement social par rapport à une activité hôtelière classique et des pratiques d’occupation
des chambres dans le secteur de l’hébergement d’urgence, qu’il n’y a pas lieu d’appliquer la méthode dite
'hôtelière’ appropriée à l’hôtellerie traditionnelle consistant à déterminer la valeur locative par référence à une
recette théorique globale calculée en multipliant le prix des chambres par le nombre de chambres, puisque la
recette de l’établissement est fonction du prix par personne, par jour, et du nombre de personnes par chambre.
La société Hôtel Berbère ne conteste pas le calcul de la recette théorique selon la capacité d’accueil de 50
personnes, soit pour un prix de 15 euros par personne relevé par l’expert une somme hors taxes pour une
année de 15 euros x 50 personnes x 365 jours / 1,055 TVA de 259 479 euros.
S’agissant du taux d’occupation, le pourcentage proposé par l’expert à hauteur de 85% a été fixé en tenant
compte de 'l’explosion des besoins d’hébergements en hôtels sociaux depuis 2007 qui se traduit par un taux de
remplissage optimum de ce type d’hôtels'. La contestation de la société Hôtel Berbère, qui fait état d’un taux
de 75%, selon laquelle à la date du 1er octobre 2014, l’exploitation de l’hôtel avait repris depuis à peine
quelques mois pour fixer ce taux à 75% apparaît dès lors dépourvue de pertinence. La valeur s’élève donc à
259 479 x 85% soit 220 556,86 euros
La société intimée reconnaît qu’il n’y a pas lieu d’effectuer d’abattement pour les 'remises à la clientèle',
l’exploitant travaillant essentiellement avec des organismes sociaux dont les prix sont fixés à l’avance.
La société Hôtel Berbère ne conteste pas non plus le taux sur recettes retenu par l’expert à hauteur de 18%,
l’application de ce taux permettant de fixer une valeur locative de 220 556,86 euros x 18% soit la somme de
39 700,23 euros, à laquelle l’expert à ajouté la valeur de l’appartement de fonction à hauteur de 6 000 euros,
somme non contestée par la société intimée.
La valeur locative globale s’élève donc à la somme de 45 700,23 euros arrondie à la somme de 45 700 euros.
Le bail prévoyant une accession au bailleur de tous travaux et embellissements en fin de jouissance, l’expert a
procédé à une majoration de 1,15 qui n’est pas contestée par la société Hôtel Berbère, soit 45 700 euros x 1,15
= 52 555 euros.
La société intimée ne conteste pas non plus la somme de 5 613 euros retenue au titre de la part de la taxe
foncière de l’année 2014 supportée par l’hôtel.
En revanche, s’agissant de la minoration de 10% de la valeur locative retenue par l’expert en raison de la
clause mettant à la charge du preneur les gros travaux, la société intimée n’explique pas la raison pour laquelle
elle souhaite que cette minoration soit fixée à 5%.
Ainsi, au vu de ce qui précède, la valeur locative de la totalité des lieux loués s’élève à la somme de 42 247,80
euros ((52 555 euros – 5 613 euros)x0,90) arrondie à la somme de 42 250 euros. Le jugement entrepris est
donc confirmé quant au montant du loyer du bail renouvelé.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement sera confirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles de première
instance.
Chacune des parties supportera ses dépens d’appel, ainsi que les frais irrépétibles engagés devant la cour.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,
DECLARE irrecevables M. Z Y C et la société Périphérique en leurs demandes de fixation du
loyer du bail renouvelé et de restitution des loyers,
CONFIRME le jugement dont appel en toutes ses dispositions,
REJETTE toute autre demande,
DIT que chaque partie conserve ses dépens.
prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été
préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure
civile.
signé par Monsieur François THOMAS, Président et par Monsieur GAVACHE, greffier, auquel la minute de
la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le président,