Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1 3, 29 février 2024, n° 21/06406

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, ch. civ. 1 3, 29 févr. 2024, n° 21/06406
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 21/06406
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal judiciaire de Nanterre, 7 juillet 2021, N° 19/08122
Dispositif : Autre
Date de dernière mise à jour : 5 mars 2024
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Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 60A

Chambre 1 – 3

ARRET N°

REPUTE

CONTRADICTOIRE

DU 29 FEVRIER 2024

N° RG 21/06406

N° Portalis DBV3-V-B7F-UZOJ

AFFAIRE :

[Z] [E], représentée par ses co-tuteurs Mme [T] [M] veuve [E] et l’UDAF du CALVADOS

C/

S.A. AXA ASSURANCES IARD

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Juillet 2021 par le TJ de NANTERRE

N° chambre : 2

N° RG : 19/08122

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Claire RICARD

Me Christophe DEBRAY

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT NEUF FEVRIER DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [Z] [E]

née le [Date naissance 1] 1993 à [Localité 12] (14)

[Adresse 8]

[Localité 2]

représentée par Madame [T] [M] veuve [E] (née le [Date naissance 3] 1968 à [Localité 12] demeurant [Adresse 15] [Localité 7]), agissant en sa qualité de co-tutrice aux biens par décisions des 24 novembre 2014 et 15 novembre 2019 et du 16 Juin 2021) ainsi que l’UDAF du CALVADOS (sis [Adresse 5] à [Localité 12], agissant en sa qualité de co-tuteur désigné par décision du tribunal judiciaire d’ARGENTAN du 16 juin 2021 en remplacement de Madame [R] [G]

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622

Représentant : Me Marie-eléonore AFONSO, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0979

APPELANTE

****************

S.A. AXA ASSURANCES IARD

[Adresse 4]

[Localité 9]

Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627

Représentant : Me Jérôme CHARPENTIER, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E1216

INTIMEE

CPAM DE L’ORNE

[Adresse 13]

[Adresse 13]

[Localité 6]

INTIMEE DEFAILLANTE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 26 octobre 2023 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Florence PERRET, Président, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Florence PERRET, Président,

Madame Gwenael COUGARD, Conseiller,

Monsieur Bertrand MAUMONT, Conseiller

Greffier, lors des débats : Mme FOULON,

— -----------

FAITS ET PROCEDURE :

Le 20 novembre 2013, Mme [Z] [E], âgée de 20 ans, a été victime d’un accident de la circulation sur l’autoroute A13 dans le sens [Localité 17]/[Localité 12], le véhicule dont elle était passagère, conduit par M. [Y] [L] et assuré auprès de la société Axa Assurances IARD (ci-après 'la société Axa'), ayant glissé sur une plaque de verglas puis ayant été percuté par un deuxième véhicule conduit par M. [K] [P], également assuré auprès de la société Axa, laquelle ne conteste pas le droit à indemnisation.

Gravement blessée, Mme [E] a été transportée dans un coma profond au CHU de [Localité 12] et présentait, notamment, les lésions suivantes :

— une fracture de l’os temporal gauche,

— une fracture transverse des deux rochers avec comblement des oreilles moyennes, condyle en place,

— une fracture du condyle occipital droit non déplacée,

— une fracture complexe de la base du crâne, passant par les canaux carotidiens,

— une facture multiple du massif facial,

— une hémorragie méningée avec inondation du 4eme ventricule, de la citerne prépontique, de la citerne suprachiasmatique des cornes occipitales,

— une contusion frontale gauche et pariétale droite,

— une sténose serrée de la partie V3 et V4 de l’artère vertébrale droite au contact de la fracture occipitale,

— polygone de Willis : 'aque au contact de la carotide interne, intra-caverneuse avec aspect asymétrique des sinus caverneux sans élargissement de la veine : plaie carotidienne ou fistule carotide-caverneuse,

— une fracture du poignet droit,

— une fracture de la 'bula droite,

— une fracture de la malléole interne de la jambe droite,

— une fracture de la jambe droite.

Mme [E] a été hospitalisée du 20 novembre 2013 au 8 janvier 2014 au sein du service de réanimation chirurgicale, puis du 8 au 9 janvier 2014 en neurochirurgie et a subi plusieurs interventions chirurgicales.

Le 9 janvier 2014, elle a été transférée au centre de rééducation et de réadaptation fonctionnelles [16] à [Localité 14] mais a dû subir d’autres interventions au sein du service de neurochirurgie du CHU de [Localité 12].

Une nouvelle hospitalisation au sein du service de neurochirurgie du CHU de [Localité 12] est intervenue du 17 au 20 mai 2014, puis au sein du service de chirurgie à la Polyclinique d'[Localité 10] du 24 au 25 novembre 2014.

Par jugement du 20 novembre 2014, le juge des tutelles du tribunal d’instance de [Localité 12] a placé Mme [E] sous tutelle et désigné sa mère, Mme [M], veuve [E], en qualité de tutrice.

En 2015, Mme [E] a été prise en charge à temps complet par le centre de rééducation [16], à l’exception de retours au domicile de sa mère à raison de deux fins de semaines par mois organisées à partir de l’été 2015.

En décembre 2015, Mme [E] a subi une nouvelle intervention en raison de complications des suites de son traumatisme crânien.

Du 29 août au 2 septembre 2016, la victime a été hospitalisée en raison d’une pyélonéphrite aïgue.

Mme [E] a ensuite été prise en charge par le centre de médecine physique et de réadaptation de [Localité 11] du 21 mars 2017 au 28 octobre 2017, date de son retour définitif à domicile.

Une première expertise amiable de Mme [E] a été réalisée le 3 novembre 2015, avant consolidation. Les docteurs [N] [B], médecin de recours, et [X] [A], médecin conseil de la société Axa, ont établi un rapport amiable le 24 novembre 2015.

Par actes d’huissier de justice en date des 24 et 26 avril 2017, Mme [E] a sollicité en référé la désignation d’un expert judiciaire, ainsi que la condamnation de la société Axa au versement d’une provision de 500 000 euros.

Par ordonnance en date du 13 juillet 2017, le juge des référés a désigné en qualité d’expert le docteur [C] [O], a alloué à la Mme [E] une indemnité de 300 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice corporel, et à sa mère, Mme [M] veuve [E], la somme de 30 000 euros à valoir sur la réparation de son préjudice, outre celle de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance en date du 6 février 2018, le docteur [V] a été commis en qualité d’expert en lieu et place du docteur [O].

L’expert a procédé à sa mission et, aux termes d’un rapport dressé le 10 décembre 2018, a conclu ainsi que suit :

— Consolidation le 28 octobre 2017,

— DFTT : du 20 novembre 2013 au 28 octobre 2017,

— DFP : 90 % au regard des lourdes séquelles mais également en tenant compte des capacités restantes,

— Préjudice professionnel : présent et évident. Impossibilité de reprendre ses activités antérieures d’animatrice ou de peintre, compte tenu des séquelles motrices et cognitives,

— Préjudice de la douleur: 6/7,

— Préjudice esthétique permanent : 6/7,

— Préjudice esthétique temporaire : 6/7,

— Préjudice sexuel : présent et total, en l’absence de rapport sexuel depuis l’accident, les difficultés de procréation compte tenu du handicap neurologique et cognitif,

— Préjudice d’établissement : présent, en rapport avec les difficultés de fonder une famille,

— Tierce personne :

— Tierce personne active : 8 heures par jour,

— Tierce personne passive : 16 heures par jour,

— Préjudice d’agrément : présent et total, impossibilité de pratiquer l’équitation,

— Aménagement du domicile : il est noté que les aménagements actuels dont l’extension architecturale et la construction d’un studio accessible avec une salle d’eau de plain-pied disposant d’un receveur plat et accessible en fauteuil roulant, ainsi qu’une petite salle de repos, un petit salon sont conformes sur le plan ergonomique et ont été faits par l’architecte de la société Axa avec l’agrément de la société Axa au domicile de la mère de Mme [E],

— Préjudice professionnel : présent et total,

— Le projet de vie de Mme [E] serait différent et consisterait à acquérir un logement indépendant. Elle souhaite un projet de vie autonome selon le principe de réparation intégrale du préjudice corporel,

— Frais futurs: voir liste communiquée par l’ergothérapeute,

Mme [E] nécessite en outre :

— Kinésithérapie 2 fois par semaine en raison de la spasticité de l’atteinte incomplète avec le risque de raideur pendant les 5 premières années, à réévaluer ensuite,

— Orthophonie 1 fois par semaine pendant 2 ans à réévaluer ensuite,

— Psychothérapie à vie neuropsychologique : 1 fois par semaine, à réévaluer après 2 ans,

— Suivi psychiatrique 1 fois par mois pendant 1 an.

Au vu de ce rapport, par actes d’huissier de justice en date du 12, 16 et 19 août 2019, Mme [E], sa mère, Mme [M] veuve [E], et son frère, M. [E] ont assigné devant le tribunal de grande instance de Nanterre la société Axa, la CPAM de l’Orne, la société Viademis et la mutuelle Malakoff Médéric en indemnisation de leurs préjudices des suites de l’accident survenu le 20 novembre 2013.

Par jugement du 8 juillet 2021, le tribunal judiciaire de Nanterre a :

— dit que le véhicule conduit par M. [K] [P] et assuré par la société Axa Assurances Iard était impliqué dans la survenance de l’accident du 20 novembre 2013,

— dit que le droit à indemnisation de Mme [Z] [E] est entier,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer à Mme [E], représentée par sa mère et tutrice, Mme [T] [M] veuve [E] ainsi que Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter de ce jour :

au titre des dépenses de santé restées à charge''''''''''.'……….659,07 euros

au titre des frais divers'''..''''''''''''''.'…………11 274,98 euros

au titre de la tierce personne temporaire'''''''''''''' ……..75 444 euros

au titre des pertes de gains avant consolidation'''''…''''……… 31 126,96 euros

au titre des dépenses de santé futures''''''''…''''.. ………..87 007,39 euros

au titre de la tierce personne permanente au titre des arrérages échus………….715 585,61 euros

au titre des pertes de gains professionnels futurs au titre des arrérages échus…10 702,06 euros,

au titre des pertes de gains professionnels futurs pour l’avenir payable sous forme de rente viagère le 1er novembre de chaque année '''''….''' ………………………………….431 531,45 euros

au titre de l’incidence professionnelle''''''''''''''………..150 000 euros

au titre de l’aménagement du véhicule'''''''''..''… ………..148 880,03 euros

au titre du dé’cit fonctionnel temporaire''''''''..'''.'.. ………..35 975 euros

au titre des souffrances endurées '''''''''''.'''''…………50 000 euros

au titre du préjudice esthétique temporaire''''''''.'..'''………. 12 000 euros

au titre du dé’cit fonctionnel permanent'''''''''..'''. …………630 450 euros

au titre du préjudice esthétique permanent ''''''''..''''………..50 000 euros

au titre du préjudice d’agrément'''''''''''''…'…' ………..30 000 euros

au titre du préjudice sexuel '''''''''''''''….'''………40 000 euros

au titre du préjudice d’établissement'''''''''''..'..''………..50 000 euros

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer, provisions non déduites, à Mme [E], représentée par sa mère et tutrice, Mme [M] veuve [E] ainsi que Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d’un montant de 43 680,53 euros, un capital représentatif de 10 186 476,64 euros, à compter du 1er janvier 2021 et qui sera suspendue en cas d’hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical spécialisé supérieure à 45 jours,

— dit que cette rente sera payable à terme échu avec intérêts au taux légal à compter de chaque échéance échue et sera révisable chaque année conformément aux dispositions de l’article 45 de la loi du 5 juillet 1985, étant précisé que l’indexation n’interviendra et les intérêts ne seront dus qu’à compter du jugement déféré,

— dit que les intérêts échus des capitaux produiront intérêts dans les conditions fixées par l’article 1343-2 du code civil,

— réservé les droits de Mme [E] en ce qui concerne l’acquisition et l’aménagement de son logement futur ainsi que le système de transfert,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer, provisions non déduites, à Mme [M] veuve [E] la somme de 25 000 euros en réparation de son préjudice d’affection,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer, provisions non déduites, à Mme [M] veuve [E] la somme de 10 000 euros en réparation des troubles dans ses conditions d’existence,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer, provisions non déduites, à Mme [M] veuve [E] la somme de 212 165 euros en réparation de son préjudice matériel,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer, provisions non déduites, à M. [F] [E] la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice d’affection,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer à Mme [E], représentée par sa mère et tutrice, Mme [M] veuve [E] ainsi que Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, les intérêts au double du taux de l’intérêt légal sur le montant de l’offre effectuée le 30 mars 2020, avant imputation de la créance des tiers payeurs et déduction des provisions versées, à compter du 10 mai 2019 et jusqu’au 30 mars 2020,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer à la mutuelle Malakoff Médéric Prévoyance, la somme de 57 618,83 euros,

— condamné la société Axa Assurances Iard aux dépens dont distraction au pro’t des avocats de la cause, chacun pour ce qui le concerne, en application de l’article 699 du code de procédure civile,

— condamné la société Axa Assurances Iard à payer à Mme [E] la somme de 5 000 euros, à Mme [M] veuve [E] et M. [F] [F] [E] la somme de 1 000 euros chacun, et à la mutuelle Malakoff Médéric la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— déclaré le jugement déféré commun à la CPAM de l’Orne,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement déféré en totalité en ce qui concerne l’indemnité allouée, les frais irrépétibles et les dépens,

— rejeté pour le surplus.

Par acte du 20 octobre 2021, Mme [Z] [E] représentée par sa co-tutrice Mme [M] a interjeté appel et prie la cour, par dernières écritures du 26 septembre 2023 de :

— la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

— débouter la société Axa Assurance Iard de sa demande d’irrecevabilité des prétentions formulées par Mme [Z] [E] représentée par Mme [M], veuve [E].

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a liquidé la tierce personne passée et future en distinguant les taux horaires « active » et « passive », distinction qui n’existe pas, ni chez les prestataires de services, ni dans la convention collective du particulier employeur, ni dans les missions fixées par les juridictions,

— infirmer le jugement déféré en ce qu’il a liquidé les pertes de gains professionnels futurs sur la base d’un salaire de référence mensuelle de 1700 euros sans tenir compte de l’évolution de carrière inhérente à 42 ans de vie professionnelle,

— infirmé le jugement en ce qu’il a fixé la date de départ, l’assiette et la date de fin des intérêts au double du taux légal de manière erronée et contraire aux dispositions du code des assurances,

Statuant à nouveau :

— faire application du barème de capitalisation publié à la Gazette du Palais le 31 octobre 2022 au taux de -1%, et subsidiairement du taux de 0%,

— condamner la société Axa à verser à Mme [E] représentée par sa tutrice Mme [M] veuve [E] les sommes suivantes :

Assistance tierce personne passée : 151 800 euros

Assistance tierce personne future :

1 242 817,90 euros en capital pour les arrérages échus du 28 octobre 2017 au 31 décembre 2023 à titre principal et subsidiairement la somme de 1 188 673,90 euros ;

21 244 217,60 euros en application du barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2022 au taux de -1% qui sera réglée sous forme de rente annuelle viagère de 279 842,16 euros, payable à compter du 1er janvier 2024, le 1 er de chaque trimestre pour un montant trimestriel de 69 960,54 euros, et subsidiairement un capital représentatif de 15 539 914,98 euros en application du barème de capitalisation de la Gazette du Palais 2022 au taux de 0%, qui sera réglée sous forme de rente annuelle viagère de 279 842,15 euros de rente annuelle viagère payable à compter du 1er janvier 2024, le 1er de chaque trimestre pour un montant trimestriel de de 69 960,54 euros, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L. 434-17 du code de la sécurité sociale qui sera suspendue en cas d’hospitalisation continue supérieure à 60 jours.

Pertes de gains professionnels futurs qui seront réglés :

55 678,08 euros en capital, au titre des arrérages échus du 29 octobre 2017 au 31 décembre 2023

1 451 869,37 euros, à titre principal, sous forme de rente viagère annuelle de 19 124,93 euros (1 451 869,37/75,915) payable à compter du 1er janvier 2024, par trimestre pour un montant de 4 781,23 euros, le 1 er de chaque période, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L. 434-17 du code de la sécurité sociale et, à titre subsidiaire, la somme de 889 270,97 euros sous forme de rente viagère annuelle de 16 013,95 euros payable à compter du 1er janvier 2024 par trimestre pour un montant de 4 003,49 euros le 1 er de chaque période, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L. 434-17 du code de la sécurité sociale.

— confirmer le jugement déféré pour le surplus.

— débouter la société Axa France IARD de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions.

— condamner la société Axa France IARD à verser à Mme [E] représentée par sa tutrice Mme [M] veuve [E], la somme de 94 780,80 (TTC) par application de l’article 700 du code de procédure civile.

— déclarer l’arrêt à intervenir commun et opposable aux organismes sociaux,

— condamner la société Axa aux entiers dépens dont distraction au profit de Me Claire Ricard, avocat aux offres de droit.

Par dernières écritures du 20 septembre 2023, la société Axa France Iard prie la cour de :

— juger irrecevables les demandes nouvelles présentées par Mme [E] à l’occasion de ses dernières conclusions en application des dispositions de l’article 564 du code de procédure civile,

— confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré,

— débouter Mme [E] de ses demandes,

— laisser à chacune des parties la charges de ses dépens.

Mme [E] représentée par Mme [M] a fait signifier la déclaration d’appel et ses conclusions à la CPAM de l’Orne par actes du 7 décembre 2021 et 21 janvier 2022 remis à personne morale. Néanmoins, cette intimée n’a pas constitué avocat.

La cour renvoie aux écritures des parties en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile pour un exposé complet de leur argumentation.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 28 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DECISION :

1°) Sur l’irrecevabilité des demandes nouvelles soulevée par la société Axa Assurances Iard :

La société Axa Assurances Iard fait valoir sur le fondement des articles 910-1 et 910-4 du code de procédure civile que la procédure d’appel exige que les prétentions de l’appelant soient figées dès ses premières conclusions. Elle ajoute qu’il ressort de l’article 954 alinéa 3 du code de procédure civile que « La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion».

Elle souligne que Mme [E] a ajouté dans ses dernières conclusions, outre la condamnation au doublement des intérêts, l’application d’un barème de capitalisation. Elle demande donc à la cour de déclarer irrecevables ces demandes nouvelles sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile. S’agissant du barème de capitalisation, Axa Assurance Iard conteste l’argument selon lequel ce barème ne serait qu’une simple actualisation, soulignant qu’il est établi sur des éléments factuels et des choix financiers qu’elle estime faussement présentés et critiquables. A titre subsidiaire, elle sollicite l’application du barème BCRIV 2021.

Enfin, la société Axa Assurances Iard soulève l’irrecevabilité de la demande de l’appelante portant sur le taux horaire à retenir pour l’évaluation du poste de préjudice de l’aide humaine. Elle soutient que l’appelante ne viserait ni dans sa déclaration d’appel ni dans le dispositif de ses premières conclusions le taux horaire de la tierce personne.

Mme [E], tant sur le fondement des articles 910 ' 4 et 565 du code de procédure civile que sur celui de la jurisprudence de la Cour de cassation soutient que c’est en vertu du principe d’actualisation des demandes qu’elle formule sa demande qui ne saurait, selon elle, être considérée comme nouvelle, cette dernière tendant à la même fin d’indemnisation du préjudice subi. Pour la liquidation de ses préjudices permanents, la victime demande à la cour de faire application du barème publié par la Gazette du Palais le 31 octobre 2022, à titre principal en sa version retenant un taux d’actualisation de -1%, à titre subsidiaire en celle retenant un taux d’actualisation de 0%.

S’agissant des taux horaires du poste tierce personne, Mme [E] soutient avoir dans la déclaration d’appel, demandé à la cour d’infirmer le jugement en ce qu’il avait distingué l’aide active de l’aide passive, et donc appliqué des taux horaires différents de ceux réclamés par la concluante.

Elle ajoute avoir, dans le dispositif de ses conclusions d’appelant, rappelé que tant la distinction aide active et aide passive que les taux horaires retenus n’étaient pas pertinents, sollicitant par voie de conséquence l’infirmation du jugement.

Elle précise en outre qu’elle sollicitait la condamnation de la société Axa Assurances Iard au versement de la somme de 144 900 euros pour l’ATP passée et 16 760 102,90 euros pour l’ATP future, ce qui impliquait nécessairement que ces montants correspondent au préjudice calculé avec les taux horaires sollicités par la concluante.

Sur ce,

S’agissant du barème de capitalisation :

L’article 564 du code de procédure civile dispose qu’à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d’un fait.

Selon les articles 565et 566 du même code, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent et les les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.

L’application d’un barème étant un simple élément d’un calcul ayant pour objectif d’évaluer les préjudices post-consolidation, les demandes portant sur le choix d’un tel barème ne sauraient être considérées comme des demandes nouvelles au sens des articles précités. Les juges du fond ont un pouvoir souverain d’appréciation quant au choix d’un barême.

Partant, s’il est exact que le nouveau barème de la Gazette du Palais 2022 a pris en compte la rupture dans le fonctionnement de l’économie, qui se traduit notamment par la résurgence de l’inflation, et l’a conduit à retenir un taux d’actualisation compris entre -1 % et 0 %, les rédacteurs ont souligné la forte incertitude qui pèse sur l’évolution des hypothèses macro-économiques à moyen terme qui rend difficile de conclure de manière robuste entre ces deux bornes. Par conséquent, le choix est laissé ouvert et le barème peut être utilisé avec le taux de 0 % ou le taux -1% afin de lui préserver une capacité d’ajustement aux évolutions à venir des hypothèses macro-économiques.

Enfin, cette table est établie à partir de données démographiques les plus récentes publiées par l’INSEE, fussent -elles provisoires. Elle prend aussi en compte des données économiques actualisées et objectives concernant le rendement des placements et l’inflation qui affecte ce rendement.

La cour fera ainsi application du barème de capitalisation de la Gazette du Palais du 31 octobre 2022 avec le taux d’actualisation de -1%.

S’agissant du taux horaire de l’assistance par tierce personne :

La cour relève que dans sa déclaration d’appel, Mme [M] représentant Mme [E] lui demande de réformer ou annuler le jugement dont appel en ce qu’il a « condamné la société Axa Assurances Iard à payer à Mme [E] représentée par sa mère et tutrice Mme [M] ainsi que Mme [R] '[G] (remplacée par l’UDAF du Calvados), co-tutrice au biens, les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel avec intérêts au taux légal à compter à compter de ce jour :

-75 444 euros au titre de la tierce personne temporaire, en distinguant aide active aux taux de 24 euros de l’heure et aide passive au taux de 18 euros de l’heure et en rejetant la demande d’aide humaine durant l’hospitalisation,

—  715 585,61 euros au titre de la tierce personne permanente au titre des arrérages échus en distinguant aide active au taux de 24 euros de l’heure et aide passive au taux de 18 euros de l’heure ».

Il ressort des premières conclusions que l’appelante demandait à la cour notamment de «  REFORMER le jugement du 8 juillet 2021 en ce qu’il a liquidé la tierce personne passée et future en distinguant les taux horaires « active » et « passive » distinction qui n’existe pas ni chez les prestataires de services ni dans la convention collective du particulier employeur,

(')

Statuant à nouveau :

CONDAMNER la société Axa Assurances Iard à verser à Mme [E] représentée par ses tutrices Mme [M] et l’UDAF du Calvados, mandataire judiciaire à la protection des majeurs les sommes suivantes:

— Assistance tierce personne passée : …………………….. 144 900,00 €

— Assistance tierce personne future : ………………… 16 760 102,90 €

— Pertes de gains professionnels actuels : ………………… 46 686,00 €

— Pertes de gains professionnels futurs : ………………. 885 712,65 €

DIRE ET JUGER que le poste d’assistance tierce personne future, représentant un montant capitalisé de 16 760 102,90 euros, sera réglé comme suit :

— sous forme de capital pour les arrérages échus du 28 octobre 2017 au 31 décembre 2021 (à parfaire) à hauteur de 771 321,88 euros ;

— sous forme d’une rente viagère annuelle de 279 842 euros payable à compter du 1 er janvier 2022, par trimestre pour un montant de 69 960 euros, le 1 er de chaque période, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L. 434-17 du Code de la sécurité sociale. Cette rente sera en outre suspendue en cas d’hospitalisation continue supérieure à 60 jours. »

En application des dispositions des articles 564 et suivants et 910-4 du code de procédure civile, il y a lieu de rejeter la demande d’irrecevabilité soulevée par la société Axa Assurances Iard puisqu’il ressort de l’étude tant de la déclaration d’appel que des premières conclusions d’appelant, que Mme [E], représentée par Mme [M] a toujours visé les taux horaires litigieux, d’abord en en contestant la distinction opérée par le tribunal entre l’aide active et l’aide passive, distinction qui a pour conséquence l’application d’un taux horaire différent ,mais également en demandant à la cour de condamner la société Axa Assurances Iard au paiement de sommes calculées sur la base des taux horaires plus élevées que ceux retenus par le jugement

S’agissant du doublement des intérêts :

En application de l’article 910- 4 du code de procédure civile, la cour constate que dans sa déclaration d’appel, l’appelante n’a pas visé ce chef de demande figurant dans le dispositif de la décision critiquée.

Partant, il y a lieu de déclarer irrecevable la demande tendant à la réformation du jugement en ce qu’il a fixé la date de départ, l’assiette et la date de fins des intérêts au double du taux légal de manière erronée et contraire aux dispositions du code des assurances.

Sur l’assistance par tierce personne temporaire :

Le tribunal a retenu que compte tenu des séquelles de Mme [E], cette dernière nécessitait une surveillance continue justifiant d’un taux horaire de 24 euros pour les heures actives et 18 euros pour les heures passives évaluant ainsi ce poste de préjudice à 75 444 euros.

Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a refusé l’indemnisation de ce poste de préjudice pendant la période d’hospitalisation et en ce qu’il a retenu une distinction entre les heures actives et les heures passives d’assistance par tierce personne, Mme [M] représentant Mme [E], fait valoir qu’il ressort du rapport d’expertise que sa fille était dépendante d’un tiers pour tous les actes de la vie courante. Elle conteste le bien-fondé de la distinction opérée entre les heures actives et les heures passives dès lors que la tierce personne est susceptible d’intervenir auprès d’une victime qui présente des risques vitaux en cas de non intervention, Mme [E] souffrant de crises d’épilepsie rendant nécessaire une surveillance permanente et active Elle ajoute que doivent être indemnisées 4086 heures d’assistance par tierce personne durant les permissions thérapeutiques et 2814 heures durant les quatre années d’hospitalisation, soulignant sur le fondement de la jurisprudence de la Cour de cassation que Mme [E] est parfaitement fondée à solliciter l’indemnisation d’une tierce personne durant son hospitalisation.

En outre, elle soutient que le juge doit se placer à la date où il statue pour évaluer les conséquences du dommage et demande que ce poste de préjudice soit liquidé sur la base de 22 euros de l’heure.

En réponse, la société Axa Assurances Iard relève que le conseil de Mme [E] faisait la distinction entre l’aide active et l’aide passive lors des opérations d’expertise. Elle ajoute que si la tierce personne passive peut être amenée à intervenir d’urgence, son rôle se distingue de celui d’une tierce personne active en ce qu’elle n’a pas vocation à apporter les soins nécessaires et répondre aux besoins quotidiens de la victime. Ainsi, Axa Assurances Iard estime que le rôle d’une aide passive est d’intervenir en cas de complication. Enfin, elle souligne que Mme [M] ne produit aucune facture au titre de son besoin en aide humaine avant consolidation.

Sur ce,

Le besoin d’une présence auprès de Mme [E] d’une tierce personne n’est pas contesté dans son principe. Toutefois, l’indemnisation de ce poste de préjudice est discutée d’une part, lors des hospitalisations de Mme [E], d’autre part à raison de son taux horaire et de la répartition heures actives/ heures passives.

La cour relève que l’expert retient que Mme [E] a en besoin d’une aide humaine 24H/24 à raison de 8 heures de présence active et de 16 heures de présence passive.

Il sera rappelé qu’il est de jurisprudence constante que quelles que soient les modalités choisies par la victime, le tiers responsable est tenu d’indemniser le recours à cette aide humaine indispensable, qui ne saurait être réduit en cas d’aide familiale, ni subordonné à la production des justificatifs des dépenses effectuées.

La société Axa Assurances Iard demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu les conclusions de l’expert judiciaire qui a distingué les heures actives d’un coût horaire de 24 euros des heures passives d’un coût horaire de 18 euros.

Malgré les objections de Mme [E], la cour retient la distinction heures actives/ heures passives dans la mesure où ces dernières à mission d’alerte et de surveillance n’excluent nullement l’intervention d’une aide humaine en cas de problème urgent et imprévu telle celle de l’épilepsie qui est mise en avant par le conseil de la victime mais est qualifié de 'traité’ par l’expert. Quant au risque de 'fausse route’ mis en avant pour justifier une aide active 24h/ 24, il ne se produit qu’au cours des repas lesquels se déroulent pendant les plages d’aide active.

L’expert a très longuement et précisément la journée type de Mme [E] de sorte que cette distinction est justifiée.

La Cour de cassation étend aux périodes d’hospitalisation, l’aide humaine pour certains actes de la vie quotidienne pour lesquels la victime, qui n’est pas en mesure de les effectuer elle-même, a un réel besoin d’assistance (Cass civ 2ème, 10 novembre 2021, n°19-10.058). Il y a donc lieu d’indemniser les périodes d’hospitalisations de Mme [E] à un taux horaire de 18 euros pour quelques heures par semaine destinées à lui permettre de faire accomplir les démarches et les achats indispensables à sa situation . Le jugement sera infirmé sur ce point.

L’indemnisation de la tierce personne temporaire pendant ces périodes sera décomposée de la manière suivante :

— durant la période d’hospitalisation initiale au CHU de [Localité 12] du 20 novembre 2013 au 9 janvier 2014, il y a lieu d’évaluer le besoin en tierce personne à 3 heures par semaine.

*(7 semaines x 3 heures= 21 heures x 18 euros) = 378 euros

— durant la période d’hospitalisation au centre de rééducation du 9 janvier 2014 au 28 octobre 2017, il y a lieu d’évaluer le besoin à 5 heures par semaine:

*(197 semaines x 5 heures= 985 heures) x 18 euros = 17 730 euros

— durant les permissions thérapeutiques :

La cour constate que Mme [E] s’est vu accorder des permissions thérapeutiques comme en atteste le rapport d’expertise du docteur [V]. L’expert relève ainsi que des week-ends thérapeutiques ont été mis en place à partir de la fin juillet 2014 à raison d’un week-end sur deux du samedi 14h30-15h jusqu’au dimanche 21h30, puis de mi- avril 2017 au 28 octobre 2017, une fois par semaine, de samedi 14 heures à dimanche 18 heures. Il ajoute que, outre une permission thérapeutique d’une semaine en novembre 2014, Mme [E] a bénéficié d’un séjour d’une semaine au domicile familial pendant les fêtes de Noël en 2014 ainsi que d’un séjour de 15 jours au mois d’août 2015.

S’agissant des week-ends thérapeutiques de fin juillet 2014 à mars 2017 :

La cour estime que c’est à juste titre que le tribunal a, après avoir retenu qu’il résultait du rapport d’expertise que lors de la réadaptation, des weekends thérapeutiques avaient été mis en place et souligné que la distance entre le centre de rééducation et le domicile de Mme [E] était de 150 kms, retenu que Mme [E] était présente au domicile le samedi 8 heures (de 16h00 à 0h00) et les dimanches 20 heures (de 00h00 à 20h00) soit 28 heures par weekends. Mme [E] a donc passé 66 jours dans le cadre de ces week-ends au domicile familial. La cour appliquant un taux horaire unique pour évaluer ce poste de préjudice qu’elle a estimé à 18 euros, et retenant que Mme [E] avait 1 heure 30 de trajet soit 3 heures de trajets par week-ends, le poste sera évalué comme suit :

*66 jours x 28 heures x 18 euros= 33 264 euros

S’agissant des week-end thérapeutiques de mi-avril 2017 au 28 octobre 2017 :

C’est à juste titre que le tribunal a retenu qu’il résultait du rapport d’expertise que des week-ends thérapeutiques ont été organisés à partir de mi-avril 2017 au 28 octobre 2017, une fois par semaine, du samedi 14 heures au dimanche 18 heures.

Déduction faite du temps de trajet, Mme [E] passait au domicile familial 8h30 le samedi et 16h30 le dimanche soit 25 heures par week-ends.

Le nombre de jours passés au domicile familial s’élevant sur cette période à 48 jours, il y a lieu de calculer ce poste comme suit :

*48jours x 25 heures x 18 euros = 21 600 euros

S’agissant des permissions d’une semaine, accordées en 2014 et celle de 15 jours accordée en 2015:

Le rapport d’expertise fait état de permissions thérapeutiques d’une semaine accordées en novembre 2014, et en décembre 2014 et de 15 jours en août 2015 soit 29 jours au total.

Le calcul sera établi comme suit :

29j x 24 heures x 18 euros = 12 528 euros

Dès lors, la cour évalue à 85 500 euros le poste d’assistance par tierce personne temporaire, il y a donc lieu d’infirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur l’assistance par tierce personne permanente :

Le tribunal a indemnisé ce poste à hauteur de 715 585, 61 euros au titre des arrérages échus et 10 186 476,64 euros au titre des arrérages à échoir.

Mme [E] représentée par Mme [M] fait valoir que le tribunal a liquidé l’aide future sur la même base horaire que l’aide passée. Elle considère que l’appréciation des juges de première instance ne respecte pas le principe de réparation intégrale du préjudice et réitère sa contestation du bien-fondé de la distinction opérée entre les heures actives et les heures passives. Mme [M] demande à la cour, s’agissant des arrérages échus, de retenir un taux horaire de 25 euros et s’agissant des arrérages à échoir de retenir un taux de 30 euros pour tenir compte de la réalité économique, sans distinction aide active/passive.

En réponse, Axa Assurances Iard fait de nouveau valoir la pertinence de la distinction entre l’assistance par tierce personne active et celle par tierce personne passive : intervenir en cas d’urgence ce qui ne se ramène pas à une absence d’aide humaine. Enfin, elle soutient sur le fondement de la jurisprudence de la Cour de cassation que le juge peut retenir un coût horaire plus faible s’il constate l’absence de recours effectif à des professionnels. La société Axa Assurances Iard demande en conséquence la confirmation du jugement déféré.

Sur ce,

Il s’agit d’indemniser les besoins en aide humaine postérieurement à la

consolidation.

La jurisprudence admet une indemnisation en fonction des besoins et non en fonction de la dépense justifiée (Cass Civ. 2, 2 février 2017, n° 16-12.217). Partant, la victime n’a pas à démontrer l’effectivité de la dépense en aide humaine.

Comme précédemment, l’indemnisation de ce poste de préjudice doit se faire à un taux horaire différent selon que l’aide est active ou passive selon un taux horaire de 18 et 24 euros de l’heure.

Le poste de préjudice d’assistance par tierce personne permanente sera évalué comme suit :

S’agissant de la période échue du 28 octobre 2017 au jour de l’arrêt fixé au 6 février 2024 soit une période de 2292 jours.

Les arrérages échus sont calculés comme suit :

*2292 jours x9 heures x 24 euros= 495 072 euros

*2292 jours x 15 heures x18 euros = 618 840 euros

La cour relève que depuis le 29 octobre 2017 Mme [E] perçoit de la CPAM une majoration pour tierce personne d’un montant annuel de 20 194,32 euros (Pièce n°20 appelante) soit 55,32 euros par jours.

*2292 x 55,32 euros = 126 793,44 euros

Soit après imputation des créances des Tiers Payeurs (495 072 + 618 840 euros – 126 793,44 euros = 987 118,56 euros) les arrérages échus sont évalués à 987 118,56 euros.

S’agissant de la demande d’assistance au titre de la tutelle aux biens, Mme [E] sollicite la somme totale de 14 082 euros.

La cour relève que par décision du 15 novembre 2019, le juge des tutelles a désigné Mme [R]- [G] en qualité de tutelle en biens. Le coût de la tutelle représentant 283,04 euros par mois soit 9,3 euros par jours.

*1 544 jours (nombres de jours entre le 15 novembre 2019 et le 6 février 2024) x 9,3 = 14 359,2 euros.

Au 6 février 2024 ce coût est évalué à 14 359,2 euros.

En définitif, le montant des arrérages échus s’élève à 1 001 477,76 euros (987 118,56 euros + 14 359,2 euros).

Les arrérages à échoir de la présente décision et pour l’avenir sont calculés comme suit :

L’indemnité est calculée par capitalisation sur la base de 75,915 de l’euro rente (en application la table de capitalisation de la Gazette du Palais du 31 octobre 2022 au taux -1% pour une femme âgée de 30 ans au jour où la cour statue).

Soit :

*s’agissant des heures actives : 9 heures x412 j x 24 euros = 88 992 euros

*s’agissant des heures passives: 15 heuresx412jx18 euros= 111 240 euros

Soit un total de 200 232 euros.

Il résulte de l’état des débours de la CPAM que Mme [E] a perçu 20 194 euros de majoration tierce personne CPAM.

*200 232 ' 20 194= 180 038 euros

Soit,

*180 038 x 75,915 (euros de rente viager Gazette du Palais au taux -1% pour une femme âgée de 30 ans au jour de la décision) = 13 667 584,8 euros

Comme le relevait la cour, Mme [R]- [G] a, par décision du 15 novembre 2019 du juge des tutelles, été désignée en qualité de tutelle en biens. Le coût de la tutelle représentant 283,04 euros par mois soit 3 396, 48 euros par an. Il convient de capitaliser le coût de la tutelle comme suit :

*3 396, 48 euros (coût annuel de la tutelle) x 75,915 (euros de rente viager Gazette du Palais au taux -1% pour une femme âgée de 30 ans au jour de la décision) = 257 843,779 euros

Au total, ce poste de préjudice sera fixé à la somme de 13 925 428, 8 euros (13 667 584,8 euros +257 843,779 euros).

La somme de 14 926 906,3 (1 001 477,76 euros arrérages échus + 13 925 428, 8 euros arrérages à échoir) correspondant à la créance de la victime arrêtée au jour de l’arrêt. Elle sera payée en capital par la somme de 1 001 477,76 euros et le restant, soit 13 925 428, 8 d’euros sera converti en une rente annuelle viagère d’un montant de 183 434,483 euros annuel (13 925 428, 8 euros / 75,915) réglée les 1er de chaque trimestre, soit 45 858,62 euros (183 434,483 euros/ 4) indexée conforment aux dispositions de l’article L 434-17 du code de la sécurité sociale qui sera payée à compter du 1er mars 2024.

Il y a donc lieu d’infirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur les pertes de gains professionnels futurs :

Le tribunal a liquidé ce poste de préjudice sur la base d’un revenu mensuel de 1 700 euros et a condamné la société Axa Assurances Iard à payer la somme de 431 531,45 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs sous forme de rente viagère le 1er novembre de chaque année.

Mme [E], représentée par sa mère Mme [M] fait valoir que l’expert a conclu à l’existence d’un préjudice professionnel total. Elle affirme être inapte à la reprise de toute activité professionnelle et notamment du métier de peintre en bâtiment auquel elle se destinait et soutient qu’elle était, avant l’accident, à la recherche d’un emploi. Elle produit au débat une fiche métier peintre bâtiment selon laquelle un peintre en bâtiment percevrait entre 19 800 euros et 26 750 euros à l’année. Partant, elle demande à la cour de retenir un salaire de 2 300 euros pour évaluer le préjudice.

La société Axa Assurances Iard demande la confirmation du jugement déféré. Elle rappelle que au moment de l’accident, Mme [E] était sans emploi et n’avait jamais obtenu de contrat stable à la suite de sa formation sauf un contrat d’usage de deux jours. Elle considère que le salaire d’un peintre évolue en moyenne de 1271 euros à 1717 euros net mensuel et précise que les évolutions salariales envisageables d’un peintre en bâtiment tiennent compte tant de son expérience que de ses diplômes. Enfin, elle relève que le SMIC était en 2017 de 1 151,60 euros et en 2020 de 1 218,60 euros.

Sur ce,

Ce poste de préjudice est destiné à indemniser la victime de la perte ou de la diminution directe de ses revenus à compter de la date de consolidation, consécutive à l’invalidité permanente à laquelle elle est désormais confrontée dans la sphère professionnelle à la suite du fait dommageable.

La cour retient après étude des pièces versées aux débats que c’est à juste titre que le tribunal, a retenu un salaire de référence mensuel net d’un montant de 1700 euros, soit 20 400 euros par an.

En effet, il ressort de l’analyse même des pièces que Mme [E] aurait pu prétendre à un salaire amené à évoluer entre 19 800 à 26 270 euros brut annuels, soit 1 271 euros à 1717 euros nets par mois.

Ce poste de préjudice sera donc évalué comme suit :

— arrérages échus de la consolidation au présent arrêt: 1700 euros / 30jours = 56,7 euros x 2292 jours = 129 956,4 euros.

Afin de déterminer le montant total des arrérages échus il y a lieu de chiffrer les rentes AT qui sont calculées comme suit :

Annuité rente AT = 18 575,57 euros

18 575,57 euros/365 jours =50,8 euros par jour

Le total des arrérages échus des rentes AT s’élèvent à 116 644,4 euros (50,8 euros x 2292 jours), Les arrérages échus sont évalués à 13 312 euros (129 956,4 euros- 116 644,4 euros).

— arrérages à échoir : 1 700 euros x 12 mois = 20 400 euros

20 400 x 75,915 (taux de l’euro de rente viager Gazette du Palais 2022 au taux -1% pour une femme âgée de 30 ans) = 1 548 666 euros.

Il ressort de la créance définitive de la CPAM du Calvados versée aux débats (pièce appelante n°20) que le capital représentatif de la rente AT au 6 novembre 2019 s’élevait à 757 808,95 euros. A la date de l’arrêt, ce capital représentatif de la rente AT est estimé à 641 164,55 euros (757 808,95 euros – 116 644,4 euros).

Ainsi, les pertes de gains professionnels futurs capitalisées peuvent être fixées à 907 501,45 euros (1 548 666 euros. -641 164,55 euros).

Il y a lieu d’infirmer le jugement de ce chef et de condamner la société Axa Assurances Iard à verser en capital la somme de 13 706,16 euros à Mme [E] au titre des arrérages échus du 29 octobre 2017 au 6 février 2024.

La société Axa Assurances Iard sera condamnée à payer la somme de 907 501,45 euros au titre des arrérages à échoir sous forme de rente viagère annuelle de 11 954,17 euros (907 501,45 euros/ 75,915) payable à compter du 1er mars 2024, par trimestre pour un montant de 2 988,54 euros (11 954,17euros/ 4), le 1er de chaque période, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L . 434-17 du code de la sécurité sociale.

Il y a donc lieu d’infirmer le jugement déféré de ce chef.

Sur les frais et dépens :

Mme [E] sollicite la somme de 94 780 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Cette dernière estime que l’assureur, de mauvaise foi, doit prendre en charge les frais irrépétibles qu’elle a dû engager et liste les dépenses qu’elle chiffre à 64 080 euros en première instance et 30 700, 80 euros au titre de la procédure d’appel.

La société Axa Assurances Iard demande la confirmation du jugement déféré de ce chef en ce qu’il l’a condamnée au paiement de la somme de 5000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur ce,

Les dispositions concernant les frais irrépétibles de première instance dont le remboursement a été alloué à hauteur de 5 000 euros en première instance sont infirmées et la somme portée à 20 000 euros.

Succombant, la société Axa Assurances Iard sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel et à payer la somme de 10 000 euros à Mme [E] représentée par sa co-tutrice Mme [M] en application de l’article 700 du code de procédure civile. Les autres demandes fondées sur ces dispositions seront rejetées.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement déféré de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La cours statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire, mis à disposition,

Infirme le jugement en ce qu’il a :

— condamné la société Axa France Iard à payer à Mme [Z] [E], représentée par mére et tutrice, Mme [T] [M] veuve [E] ainsi que Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du jugement déféré :

* 75 444 euros au titre de la tierce personne temporaire,

* 715 585,61 euros au titre de la tierce personne permanente au titre des arrérages échus,

*10 702,06 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs au titre des arrérages échus,

* 431 531,45 euros au titre des pertes de gains professionnels futurs pour l’avenir payable sous forme de rente viagère le ler novembre de chaque année,

— condamné la société Axa France Iard à payer, provisions non déduites, à Mme [E], représentée par sa mère et tutrice, Mme [M] veuve [E] ainsi que par Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, une rente trimestrielle et viagère au titre de la tierce personne d’un montant de 43.680,53 euros, un capital représentatif de 10 l86.476,64 euros, à compter du le 1er janvier 2021 et qui sera suspendue en cas d’hospitalisation ou de prise en charge en milieu médical spécialisé supérieure à 45 jours,

— condamné la société Axa France Iard à payer à Mme [E] la somme de 5 000 euros de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Confirme le jugement pour le surplus,

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [E], représentée par mère et tutrice, Mme [M] veuve [E] ainsi que Mme [W] [R]-[G], co-tutrice aux biens, les sommes suivantes, à titre de réparation de son préjudice corporel, provisions non déduites, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt :

Assistance par tierce personne temporaire : ''''''''''………85 500 euros

Assistance par tierce personne permanente :

Arrérages échus ''''''''''''''..''……. 1 001 477,76 euros

Arrérages à échoir : 13 925 428,8 d’euros convertie en une rente annuelle viagère d’un montant de 183 434,483 euros annuel réglée les 1er de chaque trimestre, soit 45 858,62 euros indexée conformément aux dispositions de l’article L 434-17 du code de la sécurité sociale,

o Dit que cette rente sera payée à compter du 1er mars 2024,

Pertes de gains professionnels futurs :

Arrérages échus :''''''''''''''''''……………………..13 312 euros

Arrérages à échoir : 907 501,45 euros sous forme de rente viagère annuelle de 11 954,17 euros payable à compter du 1er mars 2024, par trimestre pour un montant de 2 988,54 euros, le 1er de chaque période, revalorisable chaque année et majorée de plein droit, selon les coefficients et revalorisation prévus à l’article L. 434-17 du code de la sécurité sociale,

Condamne la société Axa France Iard à payer à Mme [E], représentée par sa mère et tutrice Mme [M] la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour leurs frais irrépétibles engagés en cause d’appel,

Condamne la sociétés Axa France Iard au entiers dépens d’instance,

Déclare le présent arrêt commun aux organismes sociaux.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Madame F. PERRET, Président et par Madame K. FOULON, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

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Cour d'appel de Versailles, Chambre civile 1 3, 29 février 2024, n° 21/06406