Cour administrative d'appel de Paris, Formation plénière, 17 octobre 2012, 09PA03922

  • Affichage de panneaux relatifs à des activités culturelles·
  • Formalités de publicité et de mise en concurrence requises·
  • Installation et exploitation d'éléments de mobilier urbain·
  • Injonction aux parties de saisir le juge du contrat·
  • Annulation d'un acte détachable d'un contrat·
  • Absence dans les circonstances de l'espèce·
  • Règles de procédure contentieuse spéciales·
  • 911-1 du code de justice administrative)·
  • Office du juge de l'exécution (article l·
  • Marchés et contrats administratifs

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

L’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales subordonne la qualification de délégation de service public à la réunion de deux conditions cumulatives : une mission de service public confiée par une personne morale de droit public à un délégataire public ou privé et une rémunération du cocontractant liée substantiellement aux résultats de l’exploitation du service. Selon ce même article, les délégations de service public doivent être soumises par l’autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes.,,,Si une convention ayant pour objet l’installation et l’exploitation de colonnes et de mâts porte-affiches, que le maire d’une commune a été autorisé, en vertu d’une délibération du conseil municipal, à signer avec une société, peut être regardée comme faisant participer le cocontractant à une mission d’intérêt général consistant en la promotion d’activités culturelles sur le territoire de cette commune, elle n’a toutefois pas pour effet de confier à ce dernier une délégation de service public, en l’absence de stipulations contractuelles caractérisant l’intention de la personne publique d’ériger cette activité en service public.,,,En l’espèce, les contraintes imposées par la ville de Paris pour déterminer l’emplacement des colonnes et des mâts porte-affiches ainsi que la part de ces éléments de mobilier urbain réservée, à des tarifs préférentiels, à l’annonce de certains spectacles ne sauraient suffire à caractériser une telle intention, sachant notamment que la convention litigieuse laisse par ailleurs à la discrétion du cocontractant les modalités de choix et d’affichage des annonces ainsi que le niveau des tarifs applicables, préférentiels ou non…. ,,En outre, les modalités de contrôle et de sanction prévues par la convention, qui ont pour seul objet de permettre à la ville de s’assurer du respect des clauses de ce contrat, ne lui confèrent pas un droit de regard sur l’ensemble de l’activité exercée par la société prestataire dans le cadre de cette convention…. ,,Compte tenu de l’ensemble de ces circonstances, la convention en cause ne présente pas le caractère d’une délégation de service public.,,,[RJ1].

Entrent dans la catégorie des marchés publics, en vertu de l’article 1er du code des marchés publics, les contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public, au nombre desquelles sont incluses, selon l’article 2 du même code, les collectivités territoriales, afin de répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. La passation des contrats répondant à ces critères est soumise à des obligations de publicité et de mise en concurrence garantissant le respect des principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures…. ,,Une autorisation d’exploiter commercialement, de manière exclusive, des éléments de mobilier urbain, accordée par une collectivité territoriale, en vertu d’une convention, à un cocontractant, peut être regardée comme constituant un avantage consenti à titre onéreux, alors même qu’il ne se traduit par aucune dépense effective pour la collectivité et s’accompagne de l’engagement de la société bénéficiaire à verser, en contrepartie, une redevance calculée en fonction du chiffre d’affaires et comprenant une part fixe garantie.,,,En l’espèce, l’exposé des motifs de la délibération du conseil de Paris autorisant le maire à signer avec une société la convention litigieuse soulignait « la volonté de pérenniser et de renforcer la promotion de l’ensemble de l’activité culturelle parisienne » en retenant, à cet effet, « une proposition de tarification de l’affichage destinée à garantir une pluralité de représentation des différents acteurs culturels et notamment une tarification préférentielle au profit des théâtres ».,,,Or, il résulte de ces motifs, ainsi que des stipulations de la convention liant les parties, qui fixent des contraintes dépassant, en tout état de cause, les obligations imposées, en matière d’affichage, par les articles 22 et 23 du décret du 21 novembre 1980 pour le type de mobilier urbain en cause et excédant celles gouvernant, plus largement, l’occupation du domaine public, que l’objet de cette convention était, outre d’autoriser l’occupation en elle-même de ce domaine, de permettre la réalisation et la fourniture de prestations de service à la Ville de Paris pour la promotion d’activités culturelles.,,,En particulier, alors que les stipulations de l’article 4 de la convention laissaient à la ville le soin de déterminer, fût-ce en concertation avec son cocontractant, l’emplacement des éléments de mobilier urbain en cause, celles de l’article 10 garantissaient, en réservant aux théâtres, aux cirques et au cinéma d’art et d’essai une part substantielle des supports, à des tarifs préférentiels, la diversité de l’information délivrée et la promotion des activités spécifiques ainsi visées.,,,Dès lors, et sans qu’il soit nécessaire de déterminer si la fourniture de ces prestations constituait un élément accessoire ou principal de l’objet de cette convention, celle-ci doit être regardée comme ayant été conclue pour répondre aux besoins de la Ville de Paris, au sens des dispositions précitées du code des marchés publics.,,,Par suite, une telle convention signée par la Ville de Paris présentait, tout en constituant par ailleurs une convention d’occupation domaniale, le caractère d’un marché public, dont la conclusion était ainsi soumise au respect des règles de passation fixées par le code des marchés publics.,,,Or, si la Ville de Paris a organisé une procédure ad hoc de mise en concurrence pour la passation de cette convention, il n’en demeure pas moins que les modalités de celle-ci n’avaient pas été définies dans le respect des dispositions de ce code, ce qui a eu pour effet d’entacher d’illégalité la délibération autorisant le maire à la signer.,,,[RJ2].

L’annulation d’un acte détachable d’un contrat n’implique pas nécessairement que le contrat en cause doive être annulé. En vertu de l’article L. 911-1 du code de justice administrative, il appartient au juge de l’exécution, après avoir pris en considération la nature de l’illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, d’enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d’une particulière gravité, d’inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d’entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu’il en règle les modalités s’il estime que la résolution peut être une solution appropriée.,,,En l’espèce, l’illégalité entachant la délibération contestée, tirée de ce que la Ville de Paris n’a pas respecté les dispositions du code des marchés publics, n’est pas d’une gravité telle qu’elle implique nécessairement la résolution des relations contractuelles ou, à défaut d’entente entre les parties, la saisine du juge du contrat, alors surtout que la ville avait organisé une procédure ad hoc de mise en concurrence pour le choix de son cocontractant.,,,En revanche, cette illégalité justifie qu’il soit enjoint à la ville de procéder à la résiliation de la convention, dès lors que, les parties à celle-ci se bornant à invoquer de façon très générale les objectifs de stabilité des relations contractuelles et de sécurité juridique et à faire état, sans même les chiffrer, des possibles répercussions financières d’une interruption de l’exécution de cette convention, il n’est pas établi qu’une telle résiliation porterait une atteinte excessive à l’intérêt général.,,,Eu égard, toutefois, aux contraintes liées au type de mobilier urbain en cause, et notamment aux difficultés d’un éventuel démontage de celui-ci, ainsi qu’à la nécessité d’assurer la continuité de la mission d’intérêt général à laquelle cette convention participe, il y a lieu d’accorder à la Ville de Paris un délai de huit mois à compter de la notification de l’arrêt pour procéder à cette résiliation, afin de lui laisser la possibilité de mener à terme une nouvelle procédure de passation, conformément aux dispositions du code des marchés publics.,,,[RJ3].

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, formation plén., 17 oct. 2012, n° 09PA03922
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 09PA03922
Type de recours : Excès de pouvoir
Décision précédente : Tribunal administratif de Paris, 23 avril 2009, N° 0516044/6-1
Précédents jurisprudentiels : [RJ1] Rappr. CE, 4 novembre 2005, Société J-C Decaux, n°s 247298 et 247299
CE, Ville de Paris et Association Paris Jean Bouin, 3 décembre 2010, n°s 338272 et 338527., ,,[RJ2] Rappr. CE, 15 décembre 2008, Communauté urbaine de Dunkerque, n° 310380
CE, 4 février 2009, Commune de Toulon, n° 311344
CE, Ville de Paris et Association Paris Jean Bouin, 3 décembre 2010, n°s 338272 et 338527.,,,[RJ3] Rappr. CE, 1er octobre 1997, Avrillier, n° 133849
CE, 28 décembre 2009, Commune de Béziers, n° 304802
CE, 21 février 2011, Société Ophrys c/ CA Clermont-Communauté,, ,n°s 337349 et 337394).
Identifiant Légifrance : CETATEXT000026564035

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 26 juin 2009, présentée pour la Ville de Paris, représentée par son maire en exercice, par Me Foussard ; la Ville de Paris demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0516044/6-1 du 24 avril 2009 par lequel le Tribunal administratif de Paris a, à la demande de la société CBS Outdoor, annulé la délibération du conseil de Paris du 26 septembre 2005 autorisant le maire de Paris à signer avec la société JC Decaux une convention ayant pour objet l’installation et l’exploitation de colonnes et de mâts porte-affiches et mis à la charge de la ville le versement à la société CBS Outdoor de la somme de 2 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société CBS Outdoor devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de cette société la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la note en délibéré, enregistrée le 1er octobre 2012, présentée pour la Ville de Paris, par Me Foussard ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le code des marchés publics ;

Vu le décret n° 80-923 du 21 novembre 1980 portant règlement national de la publicité en agglomération et déterminant les conditions d’application à certains dispositifs publicitaires d’un régime d’autorisation pour l’application de la loi n° 79-1150 du 29 décembre 1979 relative à la publicité, aux enseignes et préenseignes ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 28 septembre 2012 :

— le rapport de Mme Sirinelli ;

— les conclusions de M. Dewailly, rapporteur public ;

— les observations de Me Froger, substituant Me Foussard, représentant la Ville de Paris ;

— les observations de Me Thiriez, représentant la société JC Decaux ;

— les observations de Me Guénaire, représentant la société CBS Outdoor ;

1. Considérant que, par une délibération en date du 26 septembre 2005, le conseil de Paris a autorisé le maire de Paris à signer avec la société JC Decaux une convention ayant pour objet l’installation et l’exploitation de 550 colonnes et 700 mâts porte-affiches ; que cette convention a été signée le 18 octobre 2005 ; que, saisi par la société CBS Outdoor, anciennement dénommée Giraudy Viacom Outdoor, concurrent évincé de la procédure, le Tribunal administratif de Paris a, par un jugement du 24 avril 2009, annulé la délibération du 26 septembre 2005 ; que la Ville de Paris relève régulièrement appel de ce jugement ; que, pour sa part, la société CBS Outdoor présente, par la voie du recours incident, des conclusions tendant à ce que la Cour enjoigne à la Ville de Paris de prendre toutes mesures nécessaires pour priver d’effet la convention signée le 18 octobre 2005 ;

Sur l’intervention de la société JC Decaux :

2. Considérant que la société JC Decaux, titulaire du contrat dont la délibération du 26 septembre 2005 a autorisé la signature, qui n’avait pas été appelée à la cause en première instance, justifie d’un intérêt à l’annulation du jugement attaqué ; qu’ainsi, son intervention au soutien de la requête est recevable ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant qu’aux termes de l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales : « Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d’un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l’exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d’acquérir des biens nécessaires au service. / Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l’autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d’Etat (…) » ;

4. Considérant qu’aux termes de l’article 22 du décret du 21 novembre 1980 susvisé, alors en vigueur : « Les colonnes porte-affiches ne peuvent supporter que l’annonce de spectacles ou de manifestations culturelles » ; qu’aux termes de l’article 23 du même décret : « Les mâts porte-affiches ne peuvent comporter plus de deux panneaux situés dos à dos et présentant une surface maximale unitaire de 2 mètres carrés utilisable exclusivement pour l’annonce de manifestations économiques, sociales, culturelles ou sportives » ; qu’aux termes de l’article 4 de la convention signée le 18 octobre 2005 entre la Ville de Paris et la société JC Decaux, ayant pour objet l’installation et l’exploitation de tels éléments de mobilier urbain : «  (…) La Ville de Paris détermine en concertation avec le cocontractant les emplacements des colonnes et des mâts porte-affiches afin d’assurer une répartition homogène des différentes installations de l’ensemble des mobiliers urbains. (…) Les emplacements ne peuvent être modifiés et retenus qu’après accord exprès de la Ville de Paris pour chacun d’eux. (…) » ; qu’aux termes de l’article 10 de la même convention : «  Le cocontractant affecte à l’affichage des théâtres et des cirques les supports suivants, aux conditions telles que précisées ci-après: / – 150 colonnes historiques à la colle, à plus ou moins 10 %, devront être destinées exclusivement à l’affichage des théâtres à des conditions tarifaires préférentielles. / – 100 colonnes lumineuses, historiques ou modernes, à plus ou moins 10 %, devront être destinées exclusivement à de l’affichage pour les théâtres et les cirques. Le cocontractant appliquera des tarifs préférentiels pour ces annonceurs. / Le total des colonnes destinées aux catégories particulières d’annonceurs ne peut excéder 250 unités. / Le cocontractant accorde un tarif privilégié sur 65 mâts porte-affiches et sur 160 colonnes lumineuses pour les films »d’art et essai«   » ; qu’en outre, aux termes de l’article 22 de la convention : «  La Ville de Paris aura le droit de faire effectuer par ses agents toutes les vérifications, au besoin sur site, qu’elle jugera utiles pour s’assurer que les clauses du contrat seront régulièrement observées et que ses intérêts seront sauvegardés. (…) Le compte-rendu annuel (…) comportera un volet financier et un volet d’activité. (…) Le volet d’activité présente une analyse de la qualité de l’exploitation des édicules. Il comprend toutes les justifications relatives à l’affichage réservé, prévu à l’article 10 (notamment les conditions tarifaires mises en oeuvre) et tous éléments relatifs au fonctionnement de la convention (…) » ; qu’enfin, l’article 23 de cette convention stipule que : " [d]es sanctions (…) pourront être prononcées par la Ville de Paris en cas de : (…) irrespect des dispositions relatives à l’affichage réservé (…) » ;

5. Considérant que, pour annuler la délibération du 26 septembre 2005, le Tribunal administratif de Paris a jugé que la convention en cause présentait le caractère d’une délégation de service public et, par suite, que la Ville de Paris avait entaché sa passation d’irrégularité en ne se conformant pas aux règles gouvernant la procédure de publicité prévue à l’article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales ; que, si cette convention peut être regardée comme faisant participer le cocontractant à une mission d’intérêt général consistant en la promotion d’activités culturelles sur le territoire parisien, il ne ressort toutefois pas des pièces du dossier, et notamment des stipulations précitées de la convention litigieuse, que la Ville de Paris aurait entendu ériger cette activité en service public ; qu’en particulier, et contrairement à ce qu’ont estimé les premiers juges, les contraintes imposées par la ville pour déterminer l’emplacement des colonnes et des mâts porte-affiches, ainsi que la part de ces éléments de mobilier urbain réservée, à des tarifs préférentiels, à l’annonce de certains spectacles, ne sauraient suffire à caractériser une telle intention ; qu’en effet, la convention laisse par ailleurs à la discrétion du cocontractant les modalités de choix et d’affichage des annonces ainsi que le niveau des tarifs applicables, préférentiels ou non ; qu’en outre, les modalités de contrôle et de sanction prévues par la convention, qui ont pour seul objet de permettre à la ville de s’assurer du respect des clauses de celle-ci, ne lui confèrent pas un droit de regard sur l’ensemble de l’activité exercée par la société JC Decaux dans le cadre de cette convention ; que, par suite, c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris s’est fondé sur le fait que la convention en cause présenterait le caractère d’une délégation de service public pour annuler la délibération du 26 septembre 2005 ;

6. Considérant, toutefois, qu’il appartient à la Cour, saisie de l’ensemble du litige par l’effet dévolutif de l’appel, d’examiner les autres moyens soulevés par la société CBS Outdoor à l’encontre de la délibération contestée devant le Tribunal administratif de Paris et devant la Cour ;

Sur la légalité de la délibération du 26 septembre 2005 :

Sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens invoqués par la société CBS Outdoor ;

7. Considérant que la société CBS Outdoor a fait valoir, devant le Tribunal administratif de Paris, que la convention en litige présentait le caractère d’un marché public et que la Ville de Paris était dès lors tenue, pour procéder à sa passation, de respecter les règles de publicité et de mise en concurrence applicables en telle hypothèse ;

8. Considérant qu’aux termes de l’article 1er du code des marchés publics, dans sa rédaction alors en vigueur : « Les marchés publics sont les contrats conclus à titre onéreux avec des personnes publiques ou privées par les personnes morales de droit public mentionnées à l’article 2, pour répondre à leurs besoins en matière de travaux, de fournitures ou de services. Quel que soit leur montant, les marchés publics respectent les principes de liberté d’accès à la commande publique, d’égalité de traitement des candidats et de transparence des procédures. Ces principes permettent d’assurer l’efficacité de la commande publique et la bonne utilisation des deniers publics. Ils exigent une définition préalable des besoins de l’acheteur public, le respect des obligations de publicité et de mise en concurrence et le choix de l’offre économiquement la plus avantageuse. (…) » ; qu’il résulte de l’article 2 du même code que les dispositions de celui-ci sont applicables aux marchés conclus par les collectivités territoriales ;

9. Considérant, d’une part, que la convention signée le 18 octobre 2005 prévoit que la Ville de Paris autorise son cocontractant à exploiter commercialement, de manière exclusive, les éléments de mobilier urbain concernés ; que l’autorisation ainsi accordée peut être regardée comme constituant un avantage consenti à titre onéreux, alors même qu’il ne se traduit par aucune dépense effective pour la collectivité et s’accompagne de l’engagement de la société JC Decaux à verser, en contrepartie, une redevance variant de 41 % à 55 % du chiffre d’affaires et comprenant une part fixe garantie ;

10. Considérant, d’autre part, qu’aux termes de l’exposé des motifs de la délibération contestée : « (…) La volonté de pérenniser et de renforcer la promotion de l’ensemble de l’activité culturelle parisienne a conduit à apprécier dans le cadre de la consultation une proposition de tarification de l’affichage destinée à garantir une pluralité de représentation des différents acteurs culturels et notamment une tarification préférentielle au profit des théâtres (…) » ; qu’il résulte de ces motifs, ainsi que des stipulations précitées de la convention du 18 octobre 2005, qui fixent des contraintes dépassant, en tout état de cause, les obligations imposées par les articles 22 et 23 précités du décret du 21 novembre 1980 pour le type de mobilier urbain en cause et celles gouvernant, plus largement, l’occupation du domaine public, que l’objet de cette convention était, outre d’autoriser l’occupation en elle-même de ce domaine, de permettre la réalisation et la fourniture de prestations de service à la Ville de Paris pour la promotion d’activités culturelles ; qu’en particulier, alors que les stipulations de l’article 4 de la convention laissent à la ville le soin de déterminer, fût-ce en concertation avec son cocontractant, l’emplacement des éléments de mobilier urbain en cause, celles de l’article 10, dont il n’est aucunement démontré par la Ville de Paris qu’elles résulteraient de la seule volonté de la société JC Decaux, garantissent, en réservant aux théâtres, aux cirques et au cinéma d’art et d’essai une part substantielle des supports, à des tarifs préférentiels, la diversité de l’information délivrée et la promotion des activités spécifiques ainsi visées ; que, dès lors, et sans qu’il soit nécessaire de déterminer si la fourniture de ces prestations constitue un élément accessoire ou principal de l’objet de cette convention, celle-ci doit être regardée comme ayant été conclue pour répondre aux besoins de la Ville de Paris, au sens des dispositions précitées du code des marchés publics ;

11. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la convention signée par la Ville de Paris avec la société JC Decaux présente, tout en constituant par ailleurs une convention d’occupation domaniale, le caractère d’un marché public ; que sa conclusion était ainsi soumise au respect des règles de passation fixées par le code des marchés publics ; que, si la Ville de Paris a organisé une procédure ad hoc de mise en concurrence pour la passation de cette convention, il est constant que les modalités de celle-ci n’avaient pas été définies dans le respect des dispositions de ce code ; qu’il suit de là, sans qu’il soit besoin de rechercher si la ville a respecté les obligations qu’elle s’était elle-même fixées dans le cadre de cette procédure, que la Ville de Paris et la société JC Decaux ne sont pas fondées à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé la délibération litigieuse ;

Sur les conclusions d’appel incident de la société CBS Outdoor :

12. Considérant qu’aux termes de l’article L. 911-1 du code de justice administrative : « Lorsque sa décision implique nécessairement qu’une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d’un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d’un délai d’exécution » ;

13. Considérant que la société CBS Outdoor a demandé en appel, par la voie du recours incident, qu’il soit enjoint à la Ville de Paris, à titre principal, de procéder à la résolution de la convention conclue avec la société JC Decaux ou, à défaut d’entente avec cette dernière, de saisir le juge du contrat, et, à titre subsidiaire, de résilier ladite convention ; que l’annulation de la délibération du 26 septembre 2005, confirmée par le présent arrêt, implique nécessairement qu’en soient tirées des conséquences quant à la poursuite de l’exécution de la convention signée le 18 octobre suivant ; que des conclusions à cette fin peuvent être présentées pour la première fois en appel ; qu’en outre, eu égard au lien établi par l’article L. 911-1 précité du code de justice administrative entre la décision juridictionnelle et la définition de ses mesures d’exécution, ces conclusions ne présentent pas à juger un litige distinct de celui portant sur l’annulation de la délibération contestée ; que, par suite, la société CBS Outdoor est recevable à demander à la Cour, par la voie du recours incident, d’enjoindre à la Ville de Paris de prendre toutes mesures nécessaires pour priver d’effet la convention conclue entre celle-ci et la société JC Decaux ;

14. Considérant que l’annulation d’un acte détachable d’un contrat n’implique pas nécessairement que le contrat en cause doive être annulé ; qu’il appartient au juge de l’exécution, après avoir pris en considération la nature de l’illégalité commise, soit de décider que la poursuite de l’exécution du contrat est possible, éventuellement sous réserve de mesures de régularisation prises par la personne publique ou convenues entre les parties, soit, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l’intérêt général, d’enjoindre à la personne publique de résilier le contrat, le cas échéant avec un effet différé, soit, eu égard à une illégalité d’une particulière gravité, d’inviter les parties à résoudre leurs relations contractuelles ou, à défaut d’entente sur cette résolution, à saisir le juge du contrat afin qu’il en règle les modalités s’il estime que la résolution peut être une solution appropriée ;

15. Considérant que l’illégalité entachant la délibération contestée, tirée de ce que la Ville de Paris n’a pas respecté les dispositions du code des marchés publics, n’est pas, en l’espèce, d’une gravité telle qu’elle implique nécessairement la résolution des relations contractuelles ou, à défaut d’entente entre les parties, la saisine du juge du contrat, alors surtout que, comme il a été dit, la ville avait organisé une procédure ad hoc de mise en concurrence pour le choix de son cocontractant ; qu’en revanche, cette illégalité justifie qu’il soit enjoint à la ville de procéder à la résiliation de la convention dès lors que, les parties à celle-ci se bornant à invoquer de façon très générale les objectifs de stabilité des relations contractuelles et de sécurité juridique et à faire état, sans même les chiffrer, des possibles répercussions financières d’une interruption de l’exécution de cette convention, il ne résulte pas de l’instruction qu’une telle résiliation porterait une atteinte excessive à l’intérêt général ; qu’eu égard, toutefois, aux contraintes liées au type de mobilier urbain en cause, et notamment aux difficultés d’un éventuel démontage de celui-ci, ainsi qu’à la nécessité d’assurer la continuité de la mission d’intérêt général à laquelle cette convention participe, il y a lieu d’accorder à la Ville de Paris un délai de huit mois à compter de la notification du présent arrêt pour procéder à cette résiliation, afin de lui laisser la possibilité de mener à terme une nouvelle procédure de passation, conformément aux dispositions du code des marchés publics ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la Ville de Paris, en application de ces dispositions, le versement d’une somme de 4 000 euros au titre des frais exposés par la société CBS Outdoor et non compris dans les dépens ; que ces mêmes dispositions font, en revanche, obstacle à ce que soit mise à la charge de la société CBS Outdoor, qui n’est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la Ville de Paris demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu’enfin, outre qu’elles feraient obstacle, pour la même raison, aux conclusions présentées à ce titre par la société JC Decaux, cette dernière, qui n’a pas la qualité de partie à l’instance, n’est en tout état de cause pas recevable à en invoquer le bénéfice ;

DECIDE :


Article 1er : L’intervention de la société JC Decaux est admise.


Article 2 : La requête de la Ville de Paris est rejetée.


Article 3 : Il est enjoint à la Ville de Paris de procéder à la résiliation de la convention signée le 18 octobre 2005 avec la société JC Decaux, au plus tard à l’expiration d’un délai de huit mois à compter de la notification du présent arrêt.


Article 4 : La Ville de Paris versera une somme de 4 000 euros à la société CBS Outdoor en application des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


Article 5 : Les conclusions présentées en intervention par la société JC Decaux sur le fondement des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.


Article 6 : Le surplus des conclusions de la société CBS Outdoor est rejeté.

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N° 09PA03922

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Cour administrative d'appel de Paris, Formation plénière, 17 octobre 2012, 09PA03922