Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre , 7 novembre 2013, 12PA03823, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CAA Paris, 2e ch., 7 nov. 2013, n° 12PA03823
Juridiction : Cour administrative d'appel de Paris
Numéro : 12PA03823
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Melun, 25 juin 2012, N° 0904633
Identifiant Légifrance : CETATEXT000028170254

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête, enregistrée le 10 septembre 2012, présentée pour la société à responsabilité limitée (SARL) BB Constructions, dont le siège est 112 avenue de Paris à Vincennes (94300), représentée par son gérant en exercice, par la société d’avocats Dubault-Biri et associés ; la SARL BB Constructions demande à la Cour :

1°) d’annuler le jugement n° 0904633 du 26 juin 2012 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre des années 2005 et 2006, ainsi que des pénalités y afférentes ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée ;

3°) de mettre à la charge de l’État le versement de la somme de 3 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

……………………………………………………………………………………………………….

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne ;

Vu la déclaration des droits de l’homme et du citoyen ;

Vu le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 modifiée ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 16 octobre 2013 :

— le rapport de Mme Appèche, président,

— et les conclusions de M. Egloff, rapporteur public ;

1. Considérant que, par un jugement n° 0904633 du 26 juin 2012, le Tribunal administratif de Melun, saisi par la SARL BB Constructions d’une demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt qui lui ont été assignées au titre des exercices clos en 2005 et 2006, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été assignés au titre de la période couvrant les années 2005 et 2006 et des pénalités y afférentes, a, d’une part, déchargé la société des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et pénalités afférents au mois d’octobre 2006, d’autre part, rejeté le surplus des conclusions à fin de décharge de la société et, enfin, constaté qu’il n’y avait plus lieu pour lui de statuer sur les conclusions à fin de sursis de paiement présentées par celle-ci ; que la SARL BB Constructions relève appel de ce jugement en tant qu’il a rejeté le surplus de ses conclusions à fin de décharge ;

Sur la régularité de la procédure d’imposition :

2. Considérant qu’il résulte de l’instruction que les impositions restant en litige devant la Cour ont été établies selon la procédure d’imposition d’office en ce qui concerne, d’une part, l’impôt sur les sociétés et les contributions additionnelles à cet impôt pour les exercices clos en 2005 et 2006 et, d’autre part, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée pour les périodes couvrant les mois de janvier à novembre 2005, de janvier à mai 2006, ainsi que de septembre, novembre et décembre 2006 ; que, pour les autres mois des années 2005 et 2006, les rappels de taxe sur la valeur ajoutée ont été assignés à la société BB Constructions selon la procédure contradictoire ;

3. Considérant, en premier lieu, que la société requérante soutient devant la Cour, comme elle le faisait devant le tribunal administratif, qu’elle n’a pas reçu notification de l’avis de vérification en date du 2 avril 2008 et invoque, comme en première instance, une méconnaissance des articles L. 10 et L. 47 du livre des procédures fiscales, de l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne et de l’article 14 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen ; qu’il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d’écarter ces moyens ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales :

" § 1. Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle (…) » ; que la société requérante, qui a pu introduire auprès de l’administration une réclamation pour contester les suppléments d’imposition assortis de pénalités qui lui ont été assignés et a ensuite pu saisir le tribunal administratif et la Cour de céans, n’est pas fondée à soutenir qu’elle aurait été privée du droit garanti par les stipulations précitées, lesquelles ne peuvent, au surplus, être utilement invoquées qu’en ce qui concerne les pénalités ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 223 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : « 1. Les personnes morales et associations passibles de l’impôt sur les sociétés sont tenues de souscrire les déclarations prévues pour l’assiette de l’impôt sur le revenu en ce qui concerne les bénéfices industriels et commerciaux. Toutefois, la déclaration du bénéfice ou du déficit est faite dans les trois mois de la clôture de l’exercice ou, si aucun exercice n’est clos au cours d’une année, au plus tard le 30 avril de l’année suivante (…) » ; qu’aux termes de l’article 287 du même code : « 1. Tout redevable de la taxe sur la valeur ajoutée est tenu de remettre au service des impôts dont il dépend et dans le délai fixé par arrêté une déclaration conforme au modèle prescrit par l’administration. (…) » ; qu’aux termes de l’article 39 de l’annexe IV au code général des impôts, dans sa rédaction applicable au litige : " 1. 1° La date limite à laquelle les redevables sont tenus de remettre ou d’envoyer au service des impôts la déclaration ou le paiement mentionnés aux 1 et 3 de l’article 287 du code général des impôts est fixé[e] comme suit : (…) Toutes sociétés autres que les sociétés anonymes : au plus tard le 19 du mois suivant (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 286 du livre des procédures fiscales : « Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d’une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d’un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, ou d’un procédé télématique ou informatique homologué permettant de certifier la date d’envoi. » ; qu’aux termes de l’article L. 66 du même livre : " Sont taxés d’office : (…) 2° à l’impôt sur les sociétés, les personnes morales passibles de cet impôt qui n’ont pas déposé dans le délai légal leur déclaration, sous réserve de la procédure de régularisation prévue à l’article L. 68 ; 3° aux taxes sur le chiffre d’affaires, les personnes qui n’ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu’elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevables des taxes. » ; qu’aux termes de l’article L. 68 du même livre : « La procédure de taxation d’office prévue aux 2° et 5° de l’article L. 66 n’est applicable que si le contribuable n’a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d’une mise en demeure » ;

6. Considérant qu’il résulte de la combinaison de ces dispositions qu’il appartient au contribuable d’établir qu’il a respecté ses obligations déclaratives dans les délais prévus par la loi lorsqu’il entend contester, devant le juge de l’impôt, la mise en oeuvre de la procédure de taxation d’office sur le fondement des dispositions susrappelées ; que, toutefois, lorsque, comme en l’espèce, il est constant que la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée du contribuable a bien été adressée à l’administration par voie postale au moyen d’un courrier simple et qu’elle a bien été reçue, il appartient à l’administration, seule en mesure de le faire, de produire devant le juge de l’impôt l’enveloppe dans laquelle a été acheminée cette déclaration et portant le cachet de la Poste faisant foi de sa date d’expédition ; qu’à défaut pour l’administration de produire cette enveloppe, la déclaration ne peut être tenue pour tardive, à moins qu’un autre document versé au dossier soumis à la juridiction, tel que la copie de ladite déclaration datée par le contribuable lui-même, ne fasse apparaître que celle-ci a été établie tardivement ;

7. Considérant qu’en l’espèce, l’administration a appliqué la procédure de taxation d’office prévue par les dispositions précitées de l’article L. 66 du livre des procédures fiscales en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée pour les périodes couvrant les mois de janvier à novembre 2005, de janvier à mai 2006, ainsi que de septembre, novembre et décembre 2006, au motif que les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée n’avaient pas été reçues par le service dans le délai légal ; que le ministre admet que son administration a reçu les déclarations de taxe sur la valeur ajoutée litigieuse adressées en courrier simple par voie postale, à l’exception de celles afférentes aux mois de février 2005 et décembre 2006, dont il est constant qu’elles n’ont pas été déposées ; que, s’agissant du mois de septembre 2006, le ministre a produit la copie de l’enveloppe contenant la déclaration de taxe sur la valeur ajoutée de la société requérante portant un cachet postal confirmant le caractère tardif de ladite déclaration ; que, pour les déclarations faites au titre des mois de mars 2005, avril 2005 et février 2006, si l’administration ne produit pas les enveloppes correspondantes, il ressort de la copie des déclarations du contribuable versées au dossier du tribunal administratif qu’elles étaient tardives, le déclarant y ayant lui-même porté une date postérieure à l’expiration du délai qui lui était imparti pour transmettre sa déclaration ; qu’en revanche, pour le mois de janvier 2005, la période allant de mai à novembre 2005, le mois de janvier 2006, la période allant de mars à mai 2006 et le mois de novembre 2006, l’administration ne produit pas les enveloppes contenant ces déclarations, qu’elle admet avoir reçues par voie postale ; qu’aucun autre document versé au dossier ne corrobore la tardiveté des déclarations en cause ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que lesdites déclarations ne peuvent être tenues pour tardives et que l’administration n’a pu régulièrement évaluer d’office les bases d’imposition à la taxe sur la valeur ajoutée pour les périodes correspondantes ; qu’en conséquence, la société requérante est en droit d’obtenir la décharge, en droits et pénalités, des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre du mois de janvier 2005, de la période allant de mai à novembre 2005, du mois de janvier 2006, de la période allant de mars à mai 2006 et du mois de novembre 2006 ;

8. Considérant qu’il résulte également de la combinaison des dispositions précitées que, s’agissant de la taxe sur la valeur ajoutée, l’administration n’est nullement tenue, avant de procéder par voie de taxation d’office, d’adresser une mise en demeure au contribuable ; que la société requérante ne saurait utilement se prévaloir à cet égard des stipulations de l’article 11 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui était dépourvue, à la date d’établissement des impositions litigieuses, de la force juridique qui s’attache à un traité introduit dans l’ordre juridique interne et qui ne figurait pas au nombre des actes de droit communautaire dérivé susceptibles d’être invoqués devant les juridictions nationales ; qu’elle ne saurait davantage, s’agissant de la procédure d’imposition, utilement invoquer la doctrine administrative sur le fondement de l’article L. 80 A du livre des procédures fiscales ;

9. Considérant, par ailleurs, que, si la société BB Constructions a entendu contester devant la Cour le recours à la procédure d’imposition d’office en ce qui concerne également les suppléments d’impôt sur les sociétés et de contributions additionnelles à cet impôt, il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d’écarter les moyens présentés pour ce faire ;

10. Considérant, en quatrième lieu, qu’aux termes de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales : « L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation. (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 76 du même livre : " Les bases ou éléments servant au calcul des impositions d’office et leurs modalités de détermination sont portées à la connaissance du contribuable trente jours au moins avant la mise en recouvrement des impositions. Cette notification est interruptive de prescription. Lorsque le contribuable est taxé d’office en application de l’article L. 69, à l’issue d’un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d’affaires peut être saisie dans les conditions prévues à l’article L. 59 (…) ;

11. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la proposition de rectification en date du 1er octobre 2008, qui précise que les rectifications concernent l’impôt sur les sociétés et la taxe sur la valeur ajoutée, mentionne notamment, tant au titre de l’impôt sur les sociétés que de la taxe sur la valeur ajoutée, la nature de la procédure appliquée, identifiant en particulier, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, les périodes pour lesquelles a été appliquée la procédure de taxation d’office et celles pour lesquelles a été mise en oeuvre la procédure contradictoire ; que cette proposition précise le fondement légal des différentes rectifications opérées ; qu’elle mentionne qu’aucune comptabilité n’a été présentée, décrit les modalités de la reconstitution du chiffre d’affaires effectuée sur la base des encaissements bancaires portés au crédit du compte se terminant par H 49 ouvert dans les livres de la banque BPI et indique le montant forfaitaire des charges retenues ; que, s’agissant des rectifications opérées au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, la proposition de rectification précise, en les distinguant par année, les modalités de reconstitution de la base imposable à la taxe sur la valeur ajoutée, d’évaluation de l’insuffisance de taxe collectée et de réintégration de la taxe déductible ; que cette proposition récapitule les rectifications opérées ; que la circonstance que, s’agissant du montant des rectifications opérées au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, les redressements n’aient pas fait l’objet d’une ventilation entre les rectifications opérées dans le cadre de la procédure de taxation d’office et celles établies selon la procédure contradictoire, n’a pas privé la société de la possibilité de faire valoir utilement ses observations sur ce point et ne saurait faire regarder la motivation de la proposition de rectification comme insuffisante ; que l’erreur de plume commise dans ladite proposition de rectification concernant la date de dépôt de deux déclarations de taxe sur la valeur ajoutée n’est pas davantage de nature à faire regarder cette proposition comme insuffisamment motivée et est sans incidence sur la régularité de la procédure d’imposition ; que, dans ces conditions, la SARL BB Constructions n’est pas fondée à soutenir qu’elle aurait été privée des garanties prévues en matière de procédure contradictoire, ni que la proposition de rectification serait insuffisamment motivée au regard des dispositions de l’article L. 57 du livre des procédures fiscales ou de l’article L. 76 du même livre ;

12. Considérant, en cinquième lieu, qu’aux termes de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales : « L’administration est tenue d’informer le contribuable de la teneur et de l’origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s’est fondée pour établir l’imposition faisant l’objet de la proposition prévue au premier alinéa de l’article L. 57 ou de la notification prévue à l’article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande. » ;

13. Considérant qu’il résulte de l’instruction que la proposition de rectification mentionne que, dans le cadre de l’exercice de son droit de communication auprès de la banque BPI, dans les livres de laquelle la société requérante est titulaire d’un compte se terminant par H 49, l’administration a obtenu la copie des relevés bancaires pour la période allant du 1er janvier 2005 au 31 décembre 2006 ; que cette proposition précise également que, l’étude des copies recto-verso des chèques encaissés ayant permis d’identifier la provenance des encaissements, lesquels correspondent à des règlements de sociétés du bâtiment, l’administration a, dans le cadre de l’exercice de son droit de communication, obtenu auprès des sociétés Sogesmi, Engetsrami-Mtlf, Maisons d’aujourd’hui et Demeure Zenith des copies des factures correspondant à ces versements, ainsi que la copie du compte fournisseur ouvert au nom de la société requérante dans la comptabilité de ces dernières ; que la SARL BB Constructions, qui n’établit pas, ni même d’ailleurs n’allègue qu’elle aurait sans succès demandé communication de ces pièces, n’est pas fondée à soutenir que l’administration aurait méconnu les dispositions précitées de l’article L. 76 B du livre des procédures fiscales ;

14. Considérant, en sixième lieu, que si, en ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée due au titre des mois de décembre 2005, juin, juillet, août et octobre 2006, la situation de la société requérante relevait de la procédure contradictoire, il résulte de l’instruction que celle-ci ne s’est présentée à aucun des entretiens qui lui étaient fixés et a bénéficié en outre de toutes les garanties attachées à cette procédure contradictoire ; qu’il en résulte que la société requérante n’est pas fondée à soutenir que, du fait de l’administration, elle aurait été privée d’un débat oral et contradictoire alors qu’au surplus, les pièces obtenues par l’administration dans le cadre de l’exercice de son droit de communication ne peuvent être regardées comme des pièces de la comptabilité de la SARL BB Constructions ; que, s’agissant du surplus des impositions mises à la charge de la société requérante suivant la procédure de taxation d’office, le moyen tiré de l’absence de débat oral et contradictoire ne peut qu’être écarté comme inopérant ;

15. Considérant, en septième lieu, qu’aux termes de l’article L. 256 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable au litige : « Un avis de mise en recouvrement est adressé par le comptable public à tout redevable des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature dont le recouvrement lui incombe lorsque le paiement n’a pas été effectué à la date d’exigibilité. Un avis de mise en recouvrement est également adressé par le comptable public pour la restitution des sommes, droits, taxes et redevances de toute nature mentionnés au premier alinéa et indûment versés par l’État. L’avis de mise en recouvrement est individuel. Il est signé et rendu exécutoire par l’autorité administrative désignée par décret. Les pouvoirs de l’autorité administrative susmentionnée sont également exercés par le comptable public. Les modalités d’application du présent article sont fixées par décret en Conseil d’État » ; qu’aux termes de l’article R. 256-1 du livre des procédures fiscales : « L’avis de mise en recouvrement prévu à l’article L. 256 indique pour chaque impôt ou taxe le montant global des droits, des pénalités et des intérêts de retard qui font l’objet de cet avis. Lorsque l’avis de mise en recouvrement est consécutif à une procédure de rectification, il fait référence à la proposition prévue à l’article L. 57 ou à la notification prévue à l’article L. 76 et, le cas échéant, au document adressé au contribuable l’informant d’une modification des droits, taxes et pénalités résultant des rectifications. (…) » ;

16. Considérant qu’il résulte de l’instruction que l’avis de mise en recouvrement établi le 3 décembre 2008 mentionne, pour chaque impôt, le montant global des droits et pénalités ; que ce même avis renvoie, pour chacune des impositions concernées, à la proposition de rectification en date du 1er octobre 2008, laquelle indiquait, pour chacune des impositions, le fondement légal des rectifications opérées, ainsi que, pour chaque imposition et par année, les conséquences financières du contrôle, pour des montants repris dans ledit avis ; que la circonstance que, sur cet avis, ne figurent pas tous les articles du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales mentionnés dans la proposition de rectification ne saurait faire regarder celui-ci comme insuffisamment motivé au regard des dispositions susénoncées et de celles de la loi du 11 juillet 1979 susvisée ; que la société requérante n’est, en outre, pas fondée à soutenir que les dispositions réglementaires susrappelées seraient contraires aux dispositions combinées des articles 14, 15, 16 et 17 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen du 26 août 1789, lesquels n’ont pas la portée qu’elle leur prête ; qu’elle ne peut utilement invoquer l’incompatibilité des dispositions précitées de l’article R. 256-1 du livre des procédures fiscales avec les principes contenus dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, laquelle, en tout état de cause, était, à la date d’émission de l’avis de mise en recouvrement, dépourvue de la force juridique qui s’attache à un traité introduit dans l’ordre juridique interne et ne figurait pas au nombre des actes de droit communautaire dérivé susceptibles d’être invoqués devant les juridictions nationales ;

Sur le bien-fondé des impositions :

17. Considérant que la société BB Constructions supporte la charge de démontrer l’absence de bien-fondé des impositions mises à sa charge selon la procédure d’imposition d’office, ainsi que de celles établies dans le cadre de la procédure de rectification contradictoire, dès lors qu’elle s’est abstenue de répondre dans le délai légal à la proposition de rectification qui lui était notifiée ;

18. Considérant que la société requérante se borne, en appel, à faire valoir qu’elle aurait produit devant le tribunal administratif de nombreuses copies de factures établies, selon elle, par ses fournisseurs, ainsi que de déclarations de ses résultats ; que, toutefois, au vu des seules pièces effectivement versées par la société BB Constructions au dossier du tribunal administratif et à celui de la Cour dans le litige qui l’oppose à l’administration fiscale, la société BB Constructions n’invalide pas les résultats de son activité tels qu’ils ont été rectifiés par l’administration au titre des exercices clos en 2005 et 2006 et dont il ressort qu’ils ne sont pas déficitaires, et n’établit pas que les impositions supplémentaires mises à sa charge seraient exagérées ; qu’elle ne démontre pas davantage que les bénéfices qui n’ont pas été mis en réserve ou incorporés au capital ne constituaient pas des revenus distribués au sens du 1° de l’article 109-1 du code général des impôts ; qu’elle n’est, sur ce point, pas fondée à invoquer la doctrine administrative relative aux avances faites aux associés et remboursées par ceux-ci, et notamment les paragraphes 15, 22 et 24 de la documentation administrative 4-J-1212 du 1er novembre 1995 et une note du

19 septembre 1957, BOE 1957-I-1749, BOCD 1957-II-196, dans les prévisions desquelles elle n’établit pas rentrer ;

Sur les pénalités et intérêts de retard :

19. Considérant, en premier lieu, qu’il résulte des motifs qui précèdent qu’à l’exception des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la société BB Constructions au titre du mois de janvier 2005, de la période allant de mai à novembre 2005, du mois de janvier 2006, de la période allant de mars à mai 2006 et du mois de novembre 2006, pour lesquels il est fait droit aux conclusions en décharge, tant en droits qu’en pénalités, présentées par l’intéressée, le surplus des conclusions à fin de décharge de la société requérante doit être rejeté ; qu’il en résulte que le moyen tiré de ce que la décharge des impositions supplémentaires entraînerait, par voie de conséquence, la décharge des pénalités assignées à la société requérante ne peut, dans cette mesure, qu’être écarté ;

20. Considérant, en deuxième lieu, qu’aux termes de l’article 1728 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : « 1. Lorsqu’une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts s’abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l’acte déposé tardivement est assorti de l’intérêt de retard visé à l’article 1727 et d’une majoration de 10 %. » ; qu’aux termes de l’article 1729 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions dues au titre de l’année 2005 : « 1. Lorsque la déclaration ou l’acte mentionnés à l’article 1728 font apparaître une base d’imposition ou des éléments servant à la liquidation de l’impôt insuffisants, inexacts ou incomplets, le montant des droits mis à la charge du contribuable est assorti de l’intérêt de retard visé à l’article 1727 et d’une majoration de 40 % si la mauvaise foi de l’intéressé est établie ou de 80 % s’il s’est rendu coupable de manoeuvres frauduleuses ou d’abus de droit au sens de l’article L. 64 du livre des procédures fiscales. » ; qu’aux termes de l’article 1729 du même code, dans sa rédaction applicable aux impositions dues au titre de l’année 2006 : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l’indication d’éléments à retenir pour l’assiette ou la liquidation de l’impôt ainsi que la restitution d’une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l’Etat entraînent l’application d’une majoration de : a.

40 % en cas de manquement délibéré (…) » ; qu’aux termes de l’article L. 80 D du livre des procédures fiscales : « Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l’amélioration des relations entre l’administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. » ;

21. Considérant, d’une part, qu’il résulte de l’instruction que la proposition de rectification en date du 1er octobre 2008, revêtue du visa d’un inspecteur principal, comporte un paragraphe spécifiquement consacré aux majorations ; que cette proposition indique, pour chacune des pénalités mises en oeuvre, l’imposition à laquelle elle se rapporte et en précise le fondement légal ; que, s’agissant de la mise en oeuvre, au titre de l’impôt sur les sociétés, de la pénalité visée à l’article 1728 du code général des impôts, la proposition de rectification indique également qu’elle découle du défaut de déclaration de résultats dans les délais légaux ; que, s’agissant de la mise en oeuvre, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée, de la pénalité visée à l’article 1729 du même code, la proposition de rectification mentionne que l’examen des déclarations a mis en évidence des minorations de recettes et que les mentions sur les déclarations de recettes n’ont pu être vérifiées ; qu’enfin, cette proposition de rectification précise le taux de la majoration mise en oeuvre, l’assiette de cette majoration et son montant ; que, par suite, le moyen tiré de l’insuffisance de motivation des pénalités litigieuses doit être écarté ;

22. Considérant, d’autre part, qu’il résulte de l’instruction que, s’agissant de la mise en oeuvre de la pénalité visée à l’article 1728 du code général des impôts, cette pénalité n’a été appliquée qu’au titre de l’impôt sur les sociétés ; qu’il résulte de l’instruction que la SARL BB Constructions n’a pas déposé les déclarations qu’elle était tenue de souscrire au titre de l’impôt sur les sociétés dans les délais légaux ; qu’elle n’est donc pas fondée à soutenir que c’est à tort que l’administration a fait application de la pénalité visée à l’article 1728 du code général des impôts ; que, s’agissant de la mise en oeuvre de la pénalité visée à l’article 1729 du même code, eu égard au caractère répété des omissions de recettes, qui se sont poursuivies sur deux années consécutives, l’administration était fondée à faire application de cette pénalité ;

23. Considérant, en troisième lieu, qu’aux termes de l’article 1727 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable aux impositions en litige : "I. – Toute somme, dont l’établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n’a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d’un intérêt de retard. A cet intérêt s’ajoutent, le cas échéant, les sanctions prévues au présent code. (…) ; (…) III. – Le taux de l’intérêt de retard est de 0,40 % par mois. Il s’applique sur le montant des sommes mises à la charge du contribuable ou dont le versement a été différé. (…) » ; qu’il résulte de ces dispositions et du niveau de l’intérêt de retard de 0,40 % par mois appliqué en l’espèce, qui, contrairement à ce que soutient la société requérante, n’est pas manifestement excessif au regard du taux moyen pratiqué par les prêteurs privés pour un découvert non négocié, que l’application de cet intérêt, dont l’objet est de réparer le préjudice subi par le Trésor du fait du retard dans le paiement de l’impôt, est indépendante de la bonne foi du contribuable et n’est pas constitutive d’une sanction ;

24. Considérant, d’une part, qu’il suit de là que la société requérante n’est pas fondée, sur le terrain de la loi fiscale, à soutenir que la mise en oeuvre de l’intérêt de retard visé à l’article 1727 du code général des impôts aurait dû être décidée par un fonctionnaire habilité et faire l’objet d’une motivation spécifique, ni que le taux d’intérêt devrait être soumis au pouvoir de modulation du juge ;

25. Considérant, d’autre part, que la société BB Constructions ne peut utilement se prévaloir des termes de la documentation de base 13 L-1611, ni de l’instruction 13-L-05 du 23 mars 2005, qui sont relatives à la procédure d’imposition et ne comportent aucune interprétation formelle de la loi fiscale ; qu’elle n’est pas fondée à se prévaloir des réponses ministérielles Voisin, Gerbaud, Weber, Gauthier, Yamgnane, Idrac, Morano, Deprez, Mathieu, Blanc, Cova et Marlin, qui ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle ayant conduit aux pénalités litigieuses ;

26. Considérant, par ailleurs, que la SARL BB Constructions ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l’article 14 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, qui sont sans portée dans le cadre des rapports institués entre la puissance publique et un contribuable à l’occasion de l’établissement de l’impôt ;

27. Considérant, enfin, qu’en assortissant les impositions en cause des pénalités et intérêts de retard prévus par les dispositions précitées pour assurer, dans l’intérêt général, le paiement des impôts, l’administration n’a pas méconnu les stipulations de l’article 1er du premier protocole additionnel à la convention susmentionnée ;

28. Considérant qu’il résulte de tout ce qui précède que la société BB Constructions est seulement fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a refusé de la décharger des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, en droits et pénalités, au titre du mois de janvier 2005, de la période allant de mai à novembre 2005, du mois de janvier 2006, de la période allant de mars à mai 2006 et du mois de novembre 2006 ; que le surplus des conclusions à fin de décharge présentées par la société requérante doit être rejeté ; qu’il en va de même de ses conclusions à fin d’injonction, dès lors que le présent arrêt n’appelle aucune mesure d’exécution et n’implique pas que l’administration fiscale prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société BB Constructions sur le fondement de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;


D É C I D E :


Article 1er : La société BB Constructions est déchargée, en droits et pénalités, des suppléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie, en droits et pénalités, au titre du mois de janvier 2005, de la période allant de mai à novembre 2005, du mois de janvier 2006, de la période allant de mars à mai 2006 et du mois de novembre 2006.


Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de la société BB Constructions est rejeté.


Article 3 : Le jugement n° 0904633 du 26 juin 2012 du Tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

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N° 12PA03823

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Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre , 7 novembre 2013, 12PA03823, Inédit au recueil Lebon