Cour de cassation, Chambre commerciale, 15 mai 2019, 17-19.350, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Stéphane Piédelièvre · L'ESSENTIEL Droit bancaire · 1er juillet 2019
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Sur la décision

Référence :
Cass. com., 15 mai 2019, n° 17-19.350
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 17-19.350
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Nancy, 5 avril 2017
Textes appliqués :
Article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 14 décembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000038508113
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2019:CO00400
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Sur les parties

Texte intégral

COMM.

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 15 mai 2019

Cassation partielle

M. RÉMERY, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 400 F-D

Pourvoi n° J 17-19.350

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par :

1°/ M. Z… U…, domicilié […] ,

2°/ Mme N… U… G…, domiciliée […] ,

contre l’arrêt rendu le 6 avril 2017 par la cour d’appel de Nancy (2e chambre civile), dans le litige les opposant à la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, société anonyme, dont le siège est […] ,

défenderesse à la cassation ;

M. U… invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 19 mars 2019, où étaient présents : M. Rémery, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller, M. Graveline, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme U…, de la SCP Thouin-Palat et Boucard, avocat de la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Donne acte à Mme U… du désistement de son pourvoi ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué et les productions, que, les 7 juillet 2006, 1er octobre 2006 et 5 juin 2007, la société Banque populaire Lorraine Champagne, devenue Banque populaire Alsace Lorraine Champagne, (la banque) a consenti à M. U… trois prêts immobiliers ; qu’assigné en paiement du solde de ces prêts, M. U… a opposé la déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels en raison d’erreurs affectant le taux effectif global mentionné dans chacune des offres de prêt ;

Sur le second moyen :

Attendu qu’il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Mais sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :

Vu l’article L. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016 ;

Attendu que pour rejeter la demande de M. U… de déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels, l’arrêt, après avoir relevé que les conditions particulières des prêts prévoient l’adhésion de l’emprunteur à un fonds collectif de garantie et que les conditions générales stipulent que l’emprunteur constitue les sûretés prévues aux conditions particulières préalablement à la mise à disposition des fonds et qu’il s’oblige notamment, s’il y a lieu, à obtenir le cautionnement préalable et solidaire de la société de cautionnement mutuel ou de l’association mutualiste désignée, retient que, pour autant, la constitution de la garantie, préalable à l’exécution du prêt, n’est pas exigée comme condition de l’octroi de celui-ci dès lors que l’emprunteur n’est pas tenu de justifier y avoir satisfait avant la conclusion du contrat ;

Qu’en statuant ainsi, alors qu’une sûreté, dont la constitution en garantie du remboursement d’un prêt est exigée de l’emprunteur préalablement à la remise des fonds prêtés, constitue une condition de l’octroi de ce prêt, de sorte qu’à supposer son montant déterminable lors de la conclusion du prêt, la charge liée à cette garantie doit être prise en compte pour le calcul du taux effectif global du prêt, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu’il rejette la demande de M. U… de déchéance de la banque de son droit aux intérêts contractuels et en ce qu’il condamne M. U… à payer à la société Banque populaire Lorraine Champagne les sommes de 80 958,20 euros, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,5 % par an sur la somme de 80 055,61 euros et au taux légal sur celle de 800 euros, à compter du 19 janvier 2012, au titre du prêt n° […], de 4 892,11 euros, majorée des intérêts au taux de 3,75 % par an sur la somme de 4 835,11 euros et taux légal sur celle de 50 euros, à compter du 19 janvier 2012, au titre du prêt n° […], et de 104 023,10 euros, majorée des intérêts au taux de 3,9 % par an sur la somme de 102 814,85 euros et au taux légal sur celle de 1 000 euros, à compter du 19 janvier 2012, au titre du prêt n° […], et en ce qu’il statue, à l’égard de M. U…, sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile, l’arrêt rendu le 6 avril 2017, entre les parties, par la cour d’appel de Nancy ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Metz ;

Condamne la société Banque populaire Alsace Lorraine Champagne aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à M. U… la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quinze mai deux mille dix-neuf. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Rousseau et Tapie, avocat aux Conseils, pour M. U….

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l’arrêt partiellement infirmatif attaqué d’avoir débouté M. Z… U… de sa demande de déchéance de la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne de son droit aux intérêts contractuels, et d’avoir condamné M. Z… U…, avec Mme N… G… épouse U…, à payer à la Banque Populaire Lorraine Champagne les sommes de 80 958,20 euros, majorée des intérêts au taux contractuel de 3,5 % sur la somme de 80 055,61 euros et au taux légal sur 800 euros, à compter du 19 janvier 2012, au titre du prêt n°[…], de 4 892,11 euros, majorée des intérêts au taux de 3,75 % l’an sur 4 835,11 euros et taux légal sur 50 euros, à compter du 19 janvier 2012, du prêt n°[…], et de 104 023,10 euros, majorée des intérêts au taux de 3,9 % l’an sur la somme de 102 814,85 euros et au taux légal sur la somme de 1 000 euros, à compter du 19 janvier 2012, au titre du prêt n°[…] ;

Aux motifs que « Sur le taux effectif global : Attendu en premier lieu, qu’il sera rappelé que suivant les dispositions de l’article L. 312-33 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n°2014-344 du 17 mars 2014, la seule sanction tirée de l’inobservation des dispositions de l’article L. 312-8 du code de la consommation, est la perte, en totalité ou en partie, du droit aux intérêts dans la proportion fixée par le juge ; Attendu que ce texte spécial déroge nécessairement, pour les prêts immobiliers qui y sont soumis, aux dispositions générales posées par l’article 1907 du code civil, lequel sanctionne par la nullité l’absence de prescription d’un taux d’intérêt dont l’irrégularité éventuelle est assimilée à une absence ; Attendu que les emprunteurs ne sauraient, sauf à vider de toute substance les dispositions d’ordre public des articles L. 312-1 et suivants du code de la consommation, disposer d’une option entre nullité ou déchéance, notamment en distinguant artificiellement la réitération notariée d’un prêt et l’offre préalable, alors, d’une part qu’aucune disposition légale n’exige qu’un contrat de prêt soit reçu en la forme authentique, prévue essentiellement pour assurer l’information des tiers, de sorte qu’il est parfait à la date d’acceptation de l’offre, d’autre part, que la sanction de l’article L. 312-33 du code de la consommation vise le prêteur et non l’émetteur de l’offre ; Qu’en outre, une telle option, qui prive le juge de l’opportunité de prévoir une sanction proportionnée à la gravité de l’erreur, n’est pas de nature à participer à l’unique objectif recherché par le législateur qui est de donner au taux effectif global une fonction comparative ; Que le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de nullité de la stipulation d’intérêts et n’a examiné les conséquences de l’éventuelle erreur affectant les TEG que sous l’angle de la déchéance du droit aux intérêts ; Attendu que le jugement sera également confirmé en ce qu’il a déclaré non prescrite l’action en déchéance de la stipulation d’intérêts formée par M. et Mme U… le 19 septembre 2012, le délai quinquennal de prescription de l’article L. 110-4 du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi du 17 juin 2008, qui court à compter du jour de la connaissance qu’ont eue ou qu’auraient dû avoir les emprunteurs de l’erreur affectant le taux effectif global, étant reporté, par application de l’article 2222 ancien du code civil, au 19 juin 2008, jour de l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008 ; Attendu suivant l’article L. 313-1 du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi du 17 mars 2014, que pour la détermination du taux effectif global du prêt comme pour celle du taux effectif pris comme référence, sont ajoutés aux intérêts, les frais, commissions ou rémunérations de toute nature, directs ou indirects, y compris ceux qui sont payés ou dus à des intermédiaire intervenus de quelque manière que ce soit dans l’octroi du prêt, même si ces frais, commissions ou rémunérations correspondent à des frais réels ; toutefois pour l’application des articles L. 312-4 à L. 312-8, les charges liées aux garanties dont les crédits sont éventuellement assortis ainsi que les honoraires d’officier ministériel ne sont pas compris dans le taux effectif global défini ci-dessus lorsque leur montant ne peut être indiqué avec précision antérieurement à la conclusion définitive du contrat ; Attendu en l’espèce, qu’il est expressément mentionné aux conditions particulières des offres préalables de prêt que sont exclus du calcul du taux effectif global les frais afférents à l’assurance facultative et le coût de l’adhésion au fonds de garantie Acef ; Attendu en premier lieu, que le premier juge a exactement énoncé que les frais relatifs à l’assurance décès invalidité n’ont pas à être inclus dans le calcul du taux effectif global dès lors qu’il résulte de l’article 6 des conditions générales qu’il s’agit d’une assurance facultative que l’emprunteur est libre de contracter ou de ne pas contracter, la seule indication, au titre des garanties mentionnées aux conditions particulières des offres de prêt, de l’assurance groupe décès et perte totale et irréversible d’autonomie sur la tête de M. U…, ne pouvant s’analyser comme subordonnant l’octroi du prêt à la souscription par l’emprunteur d’une telle assurance ; Que, s’agissant du coût d’adhésion au fonds collectif de garantie, il sera rappelé que suivant la jurisprudence constante, la somme payée par l’emprunteur au titre de la constitution d’un fonds de garantie créé par une société de caution mutuelle pour garantir la bonne exécution du prêt, doit être prise en compte pour le calcul du taux effectif global lorsqu’elle est imposée comme une condition d’octroi du prêt et lorsque son montant est déterminé lors de la conclusion du prêt ; Or attendu en l’espèce, que s’il est prévu aux conditions particulières des prêts, au titre des garanties souscrites, l’adhésion au fonds collectif de garantie, et si l’article 5 des conditions générales stipule que l’emprunteur constitue les sûretés prévues aux conditions particulières préalablement à la mise à disposition des fonds, qu’il s’oblige notamment s’il y a lieu, à obtenir le cautionnement préalable et solidaire de la société de cautionnement mutuel ou de l’association mutualiste désignée, pour autant la constitution de la garantie, préalable à l’exécution du prêt, n’est pas exigée comme condition d’octroi du prêt dès lors que l’emprunteur n’est pas tenu de justifier y avoir satisfait avant la conclusion du contrat ; Attendu que M. et Mme U… seront en conséquence déboutés de leur demande de déchéance du droit de la banque aux intérêts contractuels, et le jugement infirmé sur ce point » ;

Alors 1°) que le juge doit, en toutes circonstances, respecter et faire respecter le principe du contradictoire ; que pour rejeter la demande de M. U… tendant au prononcé de la déchéance du droit de la banque aux intérêts des prêts, la cour d’appel a retenu que s’il était prévu aux conditions particulières l’adhésion au fonds collectif de garantie, et si l’article 5 des conditions générales stipulait que l’emprunteur devait constituer les sûretés prévues aux conditions particulières préalablement à la mise à disposition des fonds, « pour autant la constitution de la garantie, préalable à l’exécution du prêt, n'[était] pas exigée comme condition d’octroi du prêt dès lors que l’emprunteur n'[était] pas tenu de justifier y avoir satisfait avant la conclusion du contrat » ; qu’en statuant de la sorte, sans rouvrir les débats afin de recueillir les observations des parties sur ce moyen relevé d’office, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

Alors 2°) en tout état de cause que les sommes versées par l’emprunteur au titre de la constitution d’un fonds de garantie créé par une société de caution mutuelle pour garantir la bonne exécution du prêt, et dont le montant est déterminé lors de la conclusion du prêt, doivent être intégrées dans le calcul du taux effectif global ; que la cour d’appel, après avoir constaté qu’il était « prévu aux conditions particulières des prêts, au titre des garanties souscrites, l’adhésion au fonds collectif de garantie, et si l’article 5 des conditions générales stipule que l’emprunteur constitue les sûretés prévues aux conditions particulières préalablement à la mise à disposition des fonds, qu’il s’oblige notamment s’il y a lieu, à obtenir le cautionnement préalable et solidaire de la société de cautionnement mutuel ou de l’association mutualiste désignée », a considéré que « pour autant la constitution de la garantie, préalable à l’exécution du prêt, n’est pas exigée comme condition d’octroi du prêt dès lors que l’emprunteur n’est pas tenu de justifier y avoir satisfait avant la conclusion du contrat », ce dont elle a déduit que les frais afférents n’avaient pas à être inclus dans le calcul du taux effectif global des prêts litigieux ; qu’en statuant ainsi, quand il résultait de ses constatations que l’adhésion au fonds de garantie était une condition de l’octroi des prêts, de sorte que les sommes versées par les emprunteurs sur ce fonds devaient être incluses dans le calcul du taux effectif global, peu important que les actes de prêt ne mentionnaient pas que l’emprunteur devait justifier de la constitution de la garantie avant la conclusion des contrats, la cour d’appel a violé les articles L. 312-8 et L. 313-1 du code de la consommation (devenus les articles L. 313-25 et L. 314-1 et du code de la consommation), ensemble l’article 1134 du code civil (nouvel article 1103 du code civil) ;

Alors 3°) en outre qu’ il était stipulé dans les conditions particulières des prêts n°1800154, n°[…] et n°[…] conclus par les époux U… auprès de la Banque Populaire Lorraine Champagne : « l’acceptation de l’offre vaut adhésion au règlement du fonds collectif joint en annexe », et à l’article 5 des conditions générales de chacun de ces prêts : « en garantie du paiement de toutes sommes dues en capital, intérêts et tous accessoires du prêt, l’Emprunteur constitue les sûretés prévues aux conditions particulières préalablement à la mise et disposition des fonds » ; que par ailleurs, les conditions particulières des prêts mentionnaient pour chacun le montant de la garantie ACEF, à hauteur respectivement de 1 180 euros, 70 euros et 1 455 euros, et précisaient que « l’emprunteur et le co-emprunteur solidaire (

) – autorise la banque à prélever sur le compte précité le montant de son versement sus-indiqué pour l’affecter au Fonds Collectif de Garantie cité dans l’exposé liminaire – déclare, en outre, adhérer sans réserve » ; qu’en jugeant que la constitution de la garantie, préalable à l’exécution du crédit, n’était pas exigée comme condition d’octroi du prêt dès lors que l’emprunteur n’était pas tenu de justifier y avoir satisfait avant la conclusion du contrat, quand les trois contrats de prêt prévoyaient le montant devant être versé au fonds de garantie, imposaient aux époux U… d’adhérer à ce fonds et comportaient une clause autorisant la banque à prélever le montant de cette garantie sur le compte des emprunteurs, la cour d’appel a méconnu le sens et la portée de ces contrats, violant ainsi l’article 1134 du code civil (nouveaux articles 1103 et 1192 du code civil).

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir débouté M. Z… U… de ses demandes indemnitaires dirigées contre la Banque Populaire Lorraine Champagne, et en particulier d’avoir débouté M. Z… U… de sa demande de dommages intérêts pour manquement à l’obligation de contracter de bonne foi ;

Aux motifs que « Sur la demande reconventionnelle de M. et Mme U… : Attendu qu’outre les prêts, objets de la demande principale, M. et Mine U… ont contracté auprès de la Banque Populaire Loraine Champagne le 29 avril 2009, un prêt dit de consolidation d’un montant de 32 500 euros, puis le 18 juin 2009, un prêt d’un montant de 120 000 euros également dit de restructuration, avec affectation hypothécaire du bien immobilier leur appartenant situé […] ; Qu’il est constant que les fonds prêtés ont portés par la Banque Populaire Lorraine Champagne au crédit des comptes courants ouverts dans ses livres par différentes sociétés dont M. Z… était le gérant, permettant ainsi la couverture de leurs soldes débiteurs ; Qu’il résulte à cet égard des pièces produites aux débats, que par courriel en date du 26 juin 2009, la banque a informé M. U… qu’elle a débloqué le prêt de consolidation et procédé aux différents virements sur les différentes structures, en lui communiquant la position desdits comptes après réalisation de ces opérations, soit : – société Espace Business : – 8 094,36 euros (après affectation de 32 500 euros) ; – société Espace Immo : – 3 866,36 euros ; – société Espace Finance Conseil : + 6 026,065 euros ; – Financial Service : – 8 911,62 euros ; Qu’il résulte par ailleurs des pièces du dossier que ces sociétés connaissaient dès l’année 2008, de sérieuses difficultés financières qui ont conduit à leur liquidation judiciaire respectivement les 13 septembre 2011, 31 janvier 2012 et 28 janvier 2013 ; Les sociétés Iluxura constituée le 22 janvier 1997 et ayant pour objet la gestion de patrimoine immobilier, Espace Immo constituée le 29 mars 1999 exploitant une agence immobilière, et Espace Business créée le 22 décembre 2006 et ayant pour objet des activités auxiliaires de services financiers, dont M. Z… U… était le gérant, permettant la couverture de leurs soldes débiteurs ; Qu’en effet, – s’agissant de la société Espace Immo, constituée le 29 mars 1999 et exploitant une agence immobilière, elle a réalisé pour l’année 2006, un chiffre d’affaires de 247 471, un résultat d’exploitation de 9 811 et un bénéfice de 4 799 euros ; que pour l’année 2007, son chiffre d’affaires a chuté à 125 776 euros, la perte d’exploitation s’élevant à 48 292 euros et la société réalisant compte tenu d’un résultat exceptionnel de 54 029 euros, un bénéfice de 1 584 euros ; que l’exercice 2008 a généré un chiffre d’affaires encore en baisse, de 95 046 euros pour une perte d’exploitation de 42 250 euros et une perte finale de 45 718 euros ; – s’agissant de la Sarl Espace Business, créée le 22 décembre 2006 et ayant pour objet social l’exercice d’activités auxiliaires de services financiers, elle a réalisé pour l’exercice 2007 un chiffre d’affaires de 131 895 euros pour un bénéfice de 1 330 euros, et pour l’exercice 2008, un chiffre d’affaires de 200 950 euros pour un résultat d’exploitation négatif de 275 euros et un résultat courant avant impôts négatif de 7 364 euros ; – s’agissant de la Sarl Espace Finance Conseil, elle a réalisé, pour l’exercice 2006, un chiffre d’affaires de 889 034 euros, un résultat d’exploitation excédentaire de 46 428 euros et un résultat positif de 30 974 euros, pour l’exercice 2007, un chiffre d’affaires de 802 802 euros, un résultat d’exploitation de 63 511 euros et un résultat net de 29 629 euros, et pour l’exercice 2008, un chiffre d’affaires de 245 580 euros, un résultat d’exploitation négatif de 120 516 euros et une perte de 5 261 euros ; Attendu que concernant M. U…, dirigeant de l’ensemble de ces sociétés, dont l’une, la société Iluxura, de gestion de patrimoine, qu’à l’évidence, il disposait des compétences nécessaires pour apprécier le contenu, la portée et les risques liés aux opérations en cause ; qu’il résulte par ailleurs du mail du 18 février 2009 par lequel la banque l’informe qu’elle va lui exposer ses propositions concernant les solutions les plus adaptées concernant les besoins des sociétés espaces Finance Conseil, Espace Immo et Espace Business, ainsi que du mail du 29 juin 2009 rappelé ci-dessus, que c’est avec son parfait accord que la banque a affecté les fonds, objets des prêts souscrits par lui et son épouse, au renflouement des différentes sociétés dont il était l’associé et le dirigeant ; Qu’il ne peut se prévaloir du fait que la banque ne rapporte pas la preuve de l’ordre de virement qu’il lui aurait adressé, alors que conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation, l’absence de toute protestation ou réserve de sa part après la réception des documents en attestant, les virements sont présumés avoir été opérés avec son accord ; Attendu que M. U… ayant participé à la mise en place du montage financier, en parfaite connaissance des enjeux en cause et des risques qu’il faisait courir sur son patrimoine et celui de son épouse compte tenu de la situation financière obérée desdites sociétés, ne peut soutenir que la banque a manqué à son obligation de contracter de bonne foi à son égard, alors qu’il ne rapporte pas la preuve que le banquier lui aurait imposé un tel montage financier, ni qu’il aurait eu connaissance d’éléments que lui-même ignorait concernant notamment les sociétés en cause et les risques de l’opération, et alors enfin, qu’il ressort d’une lettre du 9 juin 2009, que la banque était dans l’attente d’apports en compte courant d’associé à hauteur de 30 000 euros et d’une augmentation de capital de 32. 00 euros ; Que la demande sera rejetée le concernant ; (

) Attendu, sur la demande pour rupture abusive des contrats, qu’il résulte des historiques des prêts produits aux débats par la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne que les mensualités des prêts de 118 000 euros, 7 000 euros et 145 500 euros ont été réglées jusqu’au mois d’août 2011 pour le premier prêt et jusqu’au mois d’octobre 2011 pour les deux suivants ; que la déchéance du terme prononcée par la banque le 13 janvier 2012, conformément aux prévisions des conditions générales des prêts était, ainsi que l’a exactement énoncé le premier juge, parfaitement justifiée ; Qu’en l’absence de toute faute de la part de la banque, la demande de dommages-intérêts formée par M. U… en réparation du préjudice moral et économique subi est infondée ; que le jugement sera confirmé sur ce point » ;

Alors 1°) que la qualité d’emprunteur averti ne peut se déduire du seul exercice des fonctions de dirigeant de sociétés, serait-ce dans le cadre d’une activité de gestion de patrimoine ; qu’en se bornant à retenir, pour débouter M. U… de son action en responsabilité fondée sur un manquement de la Banque Populaire Lorraine Champagne à son devoir de mise en garde quant au risque d’endettement excessif généré par la souscription de multiples emprunts entre juin 2006 et juin 2009, que ce dernier, « dirigeant de l’ensemble de ces sociétés, dont l’une, la société Iluxura, de gestion de patrimoine (

) disposait des compétences nécessaires pour apprécier le contenu, la portée et les risques liés aux opérations en cause » et qu’il avait donné son accord à l’affectation des fonds objet des prêts d’avril et juin 2009 au renflouement des sociétés dont il était le gérant, la cour d’appel, qui a statué par un motif insuffisant pour caractériser la qualité d’emprunteur averti qu’aurait eue M. U…, qu’il lui appartenait d’apprécier in concreto au regard des connaissances effectives de l’emprunteur pour appréhender les risques des opérations auxquelles il avait souscrit, a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil (nouvel article 1231-1 du code civil) ;

Alors 2°) que le banquier dispensateur de crédit est tenu de contracter de bonne foi et il engage sa responsabilité à l’égard de l’emprunteur, fût-il averti, lorsqu’il fournit à ce dernier un conseil inadapté à sa situation ; qu’en l’espèce, M. U… faisait valoir (ses conclusions d’appel, p. 3 ; p. 16-17 ; p. 20-22) que la Banque Populaire Lorraine Champagne avait manqué à ses obligations de contracter de bonne foi et de conseil en lui faisant souscrire avec son épouse les deux prêts de restructuration d’avril et juin 2009, dans le seul but de renflouer les sociétés qu’il gérait et ainsi, de faire peser sur lui la charge de rembourser les dettes de ses sociétés qui commençaient à connaître d’importantes difficultés économiques ; que pour dire que la responsabilité de la Banque Populaire Lorraine Champagne n’était pas engagée à l’égard de M. U…, la cour d’appel a retenu que ce dernier, « ayant participé à la mise en place du montage financier, en parfaite connaissance des enjeux en cause et des risques qu’il faisait courir sur son patrimoine et celui de son épouse compte tenu de la situation financière obérée desdites sociétés », ne pouvait soutenir que la banque avait manqué à son obligation de contracter de bonne foi à son égard, faute de démontrer que la banque lui aurait imposé le montage en cause ou aurait eu connaissance d’éléments que lui-même ignorait, et dans la mesure où la banque était dans l’attente d’apports en compte courant d’associé à hauteur de 30 000 euros et d’une augmentation de capital de 32 500 euros ; qu’en statuant ainsi, sans rechercher, quand elle constatait par ailleurs que la banque avait informé M. U… dans un mail du 18 février 2009 « qu’elle [allait] lui exposer ses propositions concernant les solutions les plus adaptées concernant les besoins des sociétés espaces Finance Conseil, Espace Immo et Espace Business », si la Banque Populaire Lorraine Champagne n’avait pas cherché à se substituer un débiteur à un autre, dans le but de faire supporter à M. U… la dette des sociétés gérées par ce dernier, et ainsi manqué à ses obligations de bonne foi et de conseil, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil (nouvel article 1231-1 du code civil).

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