Conseil d'État, 3ème chambre, 7 mars 2022, 439597, Inédit au recueil Lebon

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Conclusions du rapporteur public · 7 mars 2022

1 N°s 439597 et 439603 M. et Mme Z... 3ème chambre jugeant seule Séance du 27 janvier 2022 Décision du 7 mars 2022 CONCLUSIONS M. Laurent CYTERMANN, Rapporteur public M. Moudasser Z... et son épouse se sont vu notifier des suppléments d'impôt sur le revenu au titre des années 2010 à 2014, faisant suite à une vérification de comptabilité de l'activité de chirurgien de M. Z... et à des contrôles sur pièces. Les chefs de redressement consistant dans une réévaluation des bénéfices non commerciaux perçus par M. Z... et dans la remise en cause de la déductibilité des pensions alimentaires …

 
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Sur la décision

Référence :
CE, 3e chs, 7 mars 2022, n° 439597
Juridiction : Conseil d'État
Numéro : 439597
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Cour administrative d'appel de Versailles, 13 janvier 2020, N° 18VE03003, 18VE03004
Dispositif : Renvoi après cassation
Identifiant Légifrance : CETATEXT000045316720
Identifiant européen : ECLI:FR:CECHS:2022:439597.20220307

Sur les parties

Texte intégral

Vu les procédures suivantes :

1° M. et Mme A… ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer, d’une part, la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, des intérêts de retard et de la majoration pour omission de déclaration, auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2010 et, d’autre part, la décharge partielle des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré, auxquels ils ont été assujettis au titre de l’année 2014. Par un jugement nos 1741462, 1749217 du 28 juin 2018, le tribunal administratif de Montreuil, à qui leurs demandes ont été transmises par ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat prise en application de l’article R. 351-8 du code de justice administrative, a partiellement fait droit à leurs demandes.

Par un arrêt nos 18VE03003, 18VE03004 du 14 janvier 2020, la cour administrative d’appel de Versailles a, en premier lieu, rejeté les appels formés par M. et Mme A… contre ce jugement, en second lieu, faisant droit à l’appel incident formé par le ministre de l’action et des comptes publics, remis à leur charge, s’agissant de l’année 2014, la majoration pour manquement délibéré dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, en troisième lieu, rejeté le surplus des conclusions de l’appel incident formé par le ministre et, en dernier lieu, réformé le jugement du tribunal administratif en ce qu’il avait de contraire.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 mars et 23 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme A… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt en tant qu’il leur est défavorable ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

2° M. et Mme A… ont demandé au tribunal administratif de Lille de prononcer la décharge partielle des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu, des intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2011, 2012 et 2013. Par un jugement n° 1632636 du 31 mai 2018, le tribunal administratif de Montreuil, à qui leur demande a été transmise par ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat prise en application de l’article R. 351-8 du code de justice administrative, a partiellement fait droit à cette demande.

Par un arrêt n° 18VE02442 du 14 janvier 2020, la cour administrative d’appel de Versailles a, d’une part, faisant droit à l’appel formé par le ministre de l’action et des comptes publics contre ce jugement, remis à la charge de M. et Mme A… les impositions et pénalités dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge, d’autre part, rejeté l’appel incident formé par M. et Mme A… contre ce jugement et, enfin, réformé le jugement du tribunal administratif en ce qu’il avait de contraire.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 16 mars et 23 août 2020 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, M. et Mme A… demandent au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler cet arrêt ;

2°) de mettre à la charge de l’Etat la somme de 4 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

…………………………………………………………………………

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu :

 – le code civil ;

 – le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

 – le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. Martin Guesdon, auditeur,

— les conclusions de M. Laurent Cytermann, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SARL cabinet Briard, avocat de M. et Mme A… ;

Considérant ce qui suit :

1. Les pourvois de M. et Mme A… sont relatifs à la situation des mêmes contribuables et présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision.

2. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond qu’à la suite de contrôles sur pièces des déclarations de M. et Mme A…, l’administration fiscale a remis en cause la déduction au titre des années 2010 à 2014 de pensions alimentaires versées aux parents de M. A… qui résident au Liban. Par deux jugements des 31 mai et 28 juin 2018, le tribunal administratif de Montreuil a partiellement fait droit aux demandes de M. et Mme A… tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d’impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes auxquelles ils ont été assujettis à ce titre. Par un arrêt nos 18VE03003, 18VE03004 du 14 janvier 2020, la cour administrative d’appel de Versailles a, dans ses articles 1er, 2 et 4, rejeté les appels qu’ils formaient contre le jugement relatif aux années 2010 et 2014, remis à leur charge, s’agissant de l’année 2014, la majoration pour manquement délibéré, réformé le jugement du tribunal administratif de Montreuil et, dans son article 3, rejeté le surplus des conclusions de l’appel incident formé par le ministre de l’action et des comptes publics. M. et Mme A… doivent être regardés comme demandant, par leur pourvoi n° 439597, l’annulation des articles 1er, 2 et 4 de cet arrêt. Par un arrêt n° 18VE02442 du même jour, la même cour administrative d’appel a, d’une part, faisant droit à l’appel formé par le ministre de l’action et des comptes publics contre le jugement relatif aux années 2011 à 2013, remis à leur charge les impositions et pénalités dont le tribunal administratif avait prononcé la décharge et, d’autre part, rejeté leur appel incident formé contre ce jugement. Sous le n° 439603, M. et Mme A… se pourvoient en cassation contre ce second arrêt.

Sur les motifs de l’arrêt nos 18VE03003, 18VE03004 relatifs à la régularité de la procédure suivie au titre de l’année 2010 :

3. Aux termes de l’article 57 du livre des procédures fiscales : « L’administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaitre son acceptation. (…) Lorsque l’administration rejette les observations du contribuable sa réponse doit également être motivée ». En vertu de ces dispositions, l’administration ne peut mettre en recouvrement des impositions résultant de redressements refusés par le contribuable sans les avoir auparavant confirmés dans une réponse aux observations du contribuable. Si le contribuable conteste que cette réponse lui a bien été notifiée, il incombe à l’administration fiscale d’établir qu’une telle notification lui a été régulièrement adressée et, lorsque le pli contenant cette notification a été renvoyé par le service postal au service expéditeur, de justifier de la régularité des opérations de présentation à l’adresse du destinataire. La preuve qui lui incombe ainsi peut résulter soit des mentions précises, claires et concordantes figurant sur les documents, le cas échéant électroniques, remis à l’expéditeur conformément à la règlementation postale soit, à défaut, d’une attestation de l’administration postale ou d’autres éléments de preuve établissant que l’intéressé a été avisé de ce que le pli était à sa disposition au bureau de poste et n’a pas été retourné avant l’expiration du délai de mise en instance.

4. Pour contester la régularité de la notification de la réponse à leurs observations, M. et Mme A… soutenaient devant la cour administrative d’appel de Versailles qu’il n’était pas établi que le pli contenant cette réponse eût été retourné à l’administration après l’expiration du délai de mise en instance. En se bornant à constater que le pli avait été présenté au domicile des requérants le 27 octobre 2015 et qu’ils en avaient été avisés, sans répondre au moyen tiré de ce que le délai de mise en instance n’avait pas été respecté, la cour a insuffisamment motivé son arrêt.

Sur les motifs des deux arrêts relatifs au bien-fondé de l’imposition :

5. Aux termes de l’article 156 du code général des impôts dans sa rédaction applicable aux années d’imposition en litige : « L’impôt sur le revenu est établi d’après le montant total du revenu net annuel dont dispose chaque foyer fiscal. Ce revenu net est déterminé (…) sous déduction : / (…) II. Des charges ci-après lorsqu’elles n’entrent pas en compte pour l’évaluation des revenus des différentes catégories : / (…) 2° (…) pensions alimentaires répondant aux conditions fixées par les articles 205 à 211, 367 et 767 du code civil (…). ». Il résulte de ces dispositions qu’une pension alimentaire n’est déductible du revenu imposable à l’impôt sur le revenu que si elle répond aux conditions fixées par les dispositions des articles 205 à 211 du code civil, en vertu desquels les enfants ne doivent des aliments qu’à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. Les conditions fixées par les dispositions des articles 205 à 211 du code civil doivent être remplies alors même que cette pension est versée à l’étranger.

6. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond, d’une part, que les requérants produisaient devant la cour des attestations du maire de la commune de résidence des parents de M. A…, affirmant que la mère de M. A… n’a jamais exercé d’activité professionnelle et que son père a cessé son activité en 2003 pour des raisons de santé, ainsi que des relevés bancaires du compte ouvert à la banque SGBL sur lesquels apparaissaient les virements correspondant aux frais médicaux engagés par les parents de M. A…. D’autre part, il ressort des attestations du maire, mais également de celles d’un avocat, que les biens dont ils étaient propriétaires ont tous été cédés entre 2007 et 2009 pour un montant d’environ 78 000 dollars, à l’exception de leur résidence principale et d’un « petit terrain ». Si les informations transmises par les services fiscaux libanais à l’administration française indiquent que les parents de M. A… étaient toujours en possession de ces biens en 2016, les requérants faisaient valoir sans être contestés que la législation libanaise n’imposait pas d’enregistrer les transactions sur les registres de propriété dans un délai déterminé. Enfin, il est constant, ainsi que l’a relevé la cour, que M. et Mme A… prenaient en charge les traitements et soins médicaux des parents de M. A…, qui n’étaient affiliés à aucun régime de sécurité sociale. Ainsi, en estimant que les contribuables n’apportaient pas la preuve de l’état de besoin dans lequel se trouvaient les parents de M. A… au cours des années en litige, la cour a dénaturé les pièces du dossier.

7. Il résulte de ce qui précède, sans qu’il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de leurs pourvois, que M. et Mme A… sont fondés à demander l’annulation de l’arrêt n° 18VE02442 du 14 janvier 2020 ainsi que des articles 1er, 2 et 4 de l’arrêt nos 18VE03003, 18VE03004 du même jour.

8. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de l’Etat la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.


D E C I D E :

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Article 1er : L’arrêt n° 18VE02442 du 14 janvier 2020 et les articles 1er, 2 et 4 de l’arrêt nos 18VE03003, 18VE03004 du même jour de la cour administrative d’appel de Versailles sont annulés.

Article 2 : Les affaires sont renvoyées, dans cette mesure, à la cour administrative d’appel de Versailles.

Article 3 : L’Etat versera à M. et Mme A… la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : La présente décision sera notifiée à M. et Mme A… et au ministre de l’économie, des finances et de la relance.

Délibéré à l’issue de la séance du 27 janvier 2022 où siégeaient : M. Guillaume Goulard, président de chambre, présidant ; M. Stéphane Verclytte, conseiller d’Etat et M. Martin Guesdon, auditeur-rapporteur.

Rendu le 7 mars 2022.

Le président :

Signé : M. Guillaume Goulard

Le rapporteur :

Signé : M. Martin Guesdon

La secrétaire :

Signé : Mme B… C…

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