CJUE, n° C-340/20, Arrêt de la Cour, Bank Sepah contre Overseas Financial Limited et Oaktree Finance Limited, 11 novembre 2021

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Chronologie de l’affaire

Commentaires5

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Philippe Théry · Gazette du Palais · 21 juin 2022
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Sur la décision

Référence :
CJUE, Cour, 11 nov. 2021, C-340/20
Numéro(s) : C-340/20
Arrêt de la Cour (première chambre) du 11 novembre 2021.#Bank Sepah contre Overseas Financial Limited et Oaktree Finance Limited.#Demande de décision préjudicielle, introduite par la Cour de cassation (France).#Renvoi préjudiciel – Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) – Mesures restrictives contre la République islamique d’Iran – Règlement (CE) no 423/2007 – Gel des fonds de personnes, d’entités ou d’organismes reconnus par le Conseil de l’Union européenne comme participant à la prolifération nucléaire – Notions de “gel des fonds” et de “gel des ressources économiques” – Possibilité d’appliquer une mesure conservatoire sur des fonds et des ressources économiques gelés – Créance antérieure au gel des avoirs et étrangère au programme nucléaire et balistique iranien.#Affaire C-340/20.
Date de dépôt : 24 juillet 2020
Précédents jurisprudentiels : Afrasiabi e.a., C-72/11, EU:C:2011:874
arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a., C-72/11, EU:C:2011:874
Commission, C-402/05 P et C-415/05 P, EU:C:2008:461
Möllendorf et Möllendorf-Niehuus, C-117/06, EU:C:2007:596
Solution : Renvoi préjudiciel
Identifiant CELEX : 62020CJ0340
Identifiant européen : ECLI:EU:C:2021:903
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Sur les parties

Texte intégral

ARRÊT DE LA COUR (première chambre)

11 novembre 2021 ( *1 )

« Renvoi préjudiciel – Politique étrangère et de sécurité commune (PESC) – Mesures restrictives contre la République islamique d’Iran – Règlement (CE) no 423/2007 – Gel des fonds de personnes, d’entités ou d’organismes reconnus par le Conseil de l’Union européenne comme participant à la prolifération nucléaire – Notions de “gel des fonds” et de “gel des ressources économiques” – Possibilité d’appliquer une mesure conservatoire sur des fonds et des ressources économiques gelés – Créance antérieure au gel des avoirs et étrangère au programme nucléaire et balistique iranien »

Dans l’affaire C-340/20,

ayant pour objet une demande de décision préjudicielle au titre de l’article 267 TFUE, introduite par la Cour de cassation (France), par décision du 10 juillet 2020, parvenue à la Cour le 24 juillet 2020, dans la procédure

Bank Sepah

contre

Overseas Financial Limited,

Oaktree Finance Limited,

LA COUR (première chambre),

composée de M. L. Bay Larsen, vice-président de la Cour, faisant fonction de président de la première chambre, MM. J.-C. Bonichot et M. Safjan (rapporteur), juges,

avocat général : M. G. Pitruzzella,

greffier : M. A. Calot Escobar,

vu la procédure écrite,

considérant les observations présentées :

pour Bank Sepah, par Mes L. Vidal et J.-M. Thouvenin, avocats,

pour Overseas Financial Limited et Oaktree Finance Limited, par Me P. Spinosi, avocat,

pour le gouvernement français, par M. J.-L. Carré ainsi que par Mmes E. de Moustier et A. Daniel, en qualité d’agents,

pour la Commission européenne, par MM. A. Bouquet et J. Roberti di Sarsina, en qualité d’agents,

ayant entendu l’avocat général en ses conclusions à l’audience du 17 juin 2021,

rend le présent

Arrêt

1

La demande de décision préjudicielle porte sur l’interprétation de l’article 1er, sous h) et j), et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) no 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2007, L 103, p. 1), de l’article 1er, sous h) et i), et de l’article 16, paragraphe 1, du règlement (UE) no 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement no 423/2007 (JO 2010, L 281, p. 1), ainsi que de l’article 1er, sous j) et k), et de l’article 23, paragraphe 1, du règlement (UE) no 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement no 961/2010 (JO 2012, L 88, p. 1).

2

Cette demande a été présentée dans le cadre d’un litige opposant Bank Sepah, une société établie à Téhéran (Iran), à Overseas Financial Limited et à Oaktree Finance Limited, établies dans l’État de Delaware (États-Unis), au sujet de la possibilité d’appliquer, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, des mesures conservatoires sur des fonds et des ressources économiques gelés dans le cadre de mesures restrictives prises contre la République islamique d’Iran.

Le cadre juridique

Le droit international

3

En vue de faire pression sur la République islamique d’Iran afin que cette dernière mette fin à ses activités nucléaires présentant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, le Conseil de sécurité des Nations unies (ci-après le « Conseil de sécurité ») a, le 23 décembre 2006, adopté, sur le fondement de l’article 41 du chapitre VII de la charte des Nations unies, la résolution 1737 (2006), laquelle instaure un certain nombre de mesures restrictives contre cet État.

4

Aux termes des points 2 et 12 de ladite résolution, le Conseil de sécurité :

« 2. Décide, dans ce contexte, que l’Iran doit suspendre sans plus tarder ses activités nucléaires posant un risque de prolifération […]

[…]

12. Décide que tous les États devront geler les fonds, avoirs financiers et ressources économiques se trouvant sur leur territoire à la date de l’adoption de la présente résolution ou à tout moment ultérieur, qui sont la propriété ou sous le contrôle des personnes ou entités visées dans l’Annexe, ainsi que ceux des autres personnes ou entités que le Conseil ou le Comité [des sanctions] pourront désigner comme participant, étant directement associées ou apportant un appui aux activités nucléaires de l’Iran posant un risque de prolifération et à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, ou des personnes ou entités agissant en leur nom ou sur leurs instructions, ou des entités qui sont leur propriété ou sont sous leur contrôle, y compris par des moyens illicites […], et décide au surplus que tous les États devront veiller à empêcher leurs ressortissants ou toute personne ou entité se trouvant sur leur territoire de mettre à la disposition de ces personnes ou entités des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques ou d’en permettre l’utilisation à leur profit ».

5

Par la résolution 1747 (2007), du 24 mars 2007, le Conseil de sécurité a inscrit Bank Sepah sur la liste des entités concourant au programme nucléaire ou de missiles balistiques iranien, dont les avoirs devaient être gelés.

Le droit de l’Union

La position commune 2007/140/PESC

6

Afin de mettre en œuvre la résolution 1737 (2006), le Conseil de l’Union européenne a adopté la position commune 2007/140/PESC, du 27 février 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran (JO 2007, L 61, p. 49).

7

Les considérants 1 et 9 de cette position commune énonçaient :

« (1)

Le 23 décembre 2006, le Conseil de sécurité […] a adopté la résolution 1737 (2006), dans laquelle il engage l’Iran à suspendre sans plus tarder certaines activités nucléaires posant un risque de prolifération et instaure certaines mesures restrictives à l’encontre de ce pays.

[…]

(9)

Par ailleurs, la résolution 1737 (2006) impose un gel des fonds, avoirs financiers et ressources économiques qui appartiennent à des personnes ou entités que le Conseil de sécurité ou le Comité [des sanctions] désigne comme participant, étant directement associées ou apportant un appui aux activités nucléaires de l’Iran posant un risque de prolifération ou à la mise au point de vecteurs d’armes nucléaires, ou à des personnes ou entités agissant en leur nom ou sur leurs instructions, ou à des entités qui sont leur propriété ou sont sous leur contrôle, y compris par des moyens illicites, de même qu’un gel des fonds, avoirs financiers et ressources économiques que ces personnes ou entités possèdent, détiennent ou contrôlent, directement ou indirectement. Elle interdit en outre de mettre à la disposition de ces personnes ou entités ou de dégager à leur profit des fonds, avoirs financiers ou ressources économiques. »

8

L’article 5, paragraphe 1, de ladite position commune disposait :

« Sont gelés tous les fonds et ressources économiques appartenant aux personnes et entités ci-après, de même que tous les fonds et ressources économiques que ces personnes ou entités possèdent, détiennent ou contrôlent, directement ou indirectement :

a)

les personnes et entités désignées à l’annexe de la résolution 1737 (2006), ainsi que les autres personnes et entités désignées par le Conseil de sécurité ou par le Comité [des sanctions] conformément au point 12 de la résolution 1737 (2006) ; ces personnes et entités sont énumérées à l’annexe I ;

[…] »

Le règlement no 423/2007

9

Sur le fondement de la position commune 2007/140, le Conseil a adopté le règlement no 423/2007, entré en vigueur le 20 avril 2007.

10

Aux termes du considérant 3 de ce règlement :

« [Les] mesures [restrictives prévues par la position commune 2007/140] entrent dans le champ d’application du traité instituant la Communauté européenne et, par conséquent, afin notamment d’en garantir l’application uniforme par les opérateurs économiques de tous les États membres, un acte communautaire est nécessaire pour en assurer la mise en œuvre en ce qui concerne la Communauté. »

11

L’article 1er, sous h) et j), dudit règlement prévoyait :

« Aux seules fins du présent règlement, on entend par :

[…]

h)

“gel des fonds”, toute action visant à empêcher tout mouvement, transfert, modification, utilisation ou manipulation de fonds qui aurait pour conséquence un changement de leur volume, de leur montant, de leur localisation, de leur propriété, de leur possession, de leur nature, de leur destination ou toute autre modification qui pourrait en permettre l’utilisation, notamment la gestion de portefeuilles ;

[…]

j)

“gel des ressources économiques”, toute action visant à empêcher l’utilisation de ressources économiques afin d’obtenir des fonds, des biens ou des services de quelque manière que ce soit, et notamment, mais pas exclusivement, leur vente, leur location ou leur mise sous hypothèque ».

12

L’article 7 du même règlement disposait :

« 1. Sont gelés tous les fonds et ressources économiques qui appartiennent aux personnes, aux entités ou aux organismes cités à l’annexe IV, de même que tous les fonds et ressources économiques que ces personnes, entités et organismes possèdent, détiennent ou contrôlent. L’annexe IV comprend les personnes, entités et organismes désignés par le Conseil de sécurité […] ou par le comité des sanctions conformément au paragraphe 12 de la résolution 1737 (2006) […]

[…]

3. Aucun fonds ni aucune ressource économique n’est mis, directement ou indirectement, à la disposition des personnes physiques ou morales, des entités ou des organismes cités aux annexes IV et V, ni dégagé à leur profit.

4. Il est interdit de participer sciemment et volontairement à des activités ayant pour objet ou pour effet direct ou indirect de contourner les mesures visées aux paragraphes 1, 2 et 3. »

13

Aux termes de l’article 8 du règlement no 423/2007 :

« Par dérogation à l’article 7, les autorités compétentes des États membres mentionnées sur les sites [I]nternet énumérés à l’annexe III peuvent autoriser le déblocage de certains fonds ou ressources économiques gelés, pour autant que les conditions suivantes soient réunies :

a)

les fonds ou ressources économiques font l’objet d’un privilège ou d’une décision judiciaire, administrative ou arbitrale prise avant le 23 décembre 2006 ;

[…] »

14

L’article 9 de ce règlement prévoyait :

« Par dérogation à l’article 7 et pour autant qu’un paiement soit dû par une personne, une entité ou un organisme cité aux annexes IV ou V au titre d’un contrat, d’un accord ou d’une obligation souscrit par la personne, l’entité ou l’organisme concerné avant la date à laquelle il ou elle a été désigné par le comité des sanctions, le Conseil de sécurité ou le Conseil, les autorités compétentes des États membres mentionnées sur les sites [I]nternet énumérés à l’annexe III peuvent autoriser, dans les conditions qu’elles jugent appropriées, le déblocage de certains fonds ou ressources économiques gelés, pour autant que les conditions suivantes soient réunies :

a)

l’autorité compétente concernée a établi que :

i)

les fonds ou les ressources économiques seraient utilisés par une personne, une entité ou un organisme cité aux annexes IV et V pour effectuer un paiement ;

ii)

le contrat, l’accord ou l’obligation ne favoriserait pas la fabrication, l’achat, la vente, le transfert, l’exportation, l’importation, le transport ou l’utilisation des biens et des technologies énumérés aux annexes I et II, et

iii)

le paiement n’enfreindrait pas l’article 7, paragraphe 3 ;

b)

si l’article 7, paragraphe 1, s’applique, l’État membre concerné a notifié au comité des sanctions les éléments établis et son intention d’accorder une autorisation, et ledit comité n’a pas formulé d’objection dans un délai de dix jours ouvrables suivant la notification; et enfin

c)

si l’article 7, paragraphe 2, s’applique, l’État membre concerné a notifié aux autres États membres et à la Commission les éléments établis par son autorité compétente et son intention d’accorder une autorisation, au moins deux semaines avant la délivrance de l’autorisation. »

15

L’article 10 dudit règlement disposait :

« 1. Par dérogation à l’article 7, les autorités compétentes des États membres mentionnées sur les sites [I]nternet énumérés à l’annexe III peuvent autoriser, dans les conditions qu’elles jugent appropriées, le déblocage ou la mise à disposition de certains fonds ou ressources économiques gelés, pour autant que les conditions suivantes soient réunies :

a)

l’autorité compétente concernée a établi que les fonds ou les ressources économiques sont :

i)

nécessaires pour répondre aux besoins essentiels des personnes citées aux annexes IV ou V et des membres de leur famille qui sont à leur charge, notamment pour le paiement des vivres, des loyers ou des mensualités de prêts hypothécaires, des médicaments et des frais médicaux, des impôts, des primes d’assurance et des factures de services d’utilité publique ;

ii)

destinés exclusivement au règlement d’honoraires d’un montant raisonnable et au remboursement de dépenses engagées pour la prestation de services juridiques ; ou

iii)

destinés exclusivement au règlement de frais ou de commissions liés à la garde ou à la gestion courante des fonds ou des ressources économiques gelés ; et

[…]

2. Par dérogation à l’article 7, les autorités compétentes des États membres mentionnées sur les sites [I]nternet énumérés à l’annexe III peuvent autoriser le déblocage de certains fonds ou ressources économiques gelés ou la mise à disposition de certains fonds ou ressources économiques, après avoir établi que les fonds ou les ressources économiques concernés sont nécessaires pour régler des dépenses extraordinaires, pour autant que :

a)

si l’autorisation concerne une personne, une entité ou un organisme cité à l’annexe IV, l’État membre concerné ait notifié sa décision au comité des sanctions et que celui-ci l’ait approuvée ; et

b)

si l’autorisation concerne une personne, une entité ou un organisme cité à l’annexe V, l’autorité compétente ait notifié aux autres autorités compétentes des États membres et à la Commission, au moins deux semaines avant l’octroi de l’autorisation, les raisons pour lesquelles elle estime qu’une autorisation spécifique devrait être accordée.

[…] »

16

À la suite de l’adoption de la résolution 1747 (2007), le Conseil a adopté la position commune 2007/246/PESC, du 23 avril 2007, modifiant la position commune 2007/140 (JO 2007, L 106, p. 67).

17

La Commission a adopté le règlement (CE) no 441/2007, du 20 avril 2007, modifiant le règlement no 423/2007 (JO 2007, L 104, p. 28). Par le règlement no 441/2007, Bank Sepah a été inscrite sur la liste figurant à l’annexe IV du règlement no 423/2007.

18

Le 25 octobre 2010, le Conseil a adopté le règlement no 961/2010, par lequel le règlement no 423/2007 a été abrogé. Le règlement no 961/2010 a été abrogé, à son tour, par le règlement no 267/2012.

19

L’article 1er, sous h) et i), et l’article 16 du règlement no 961/2010 ainsi que l’article 1er, sous j) et k), et l’article 23 du règlement no 267/2012 sont, en substance, identiques à l’article 1er, sous h) et j), et à l’article 7 du règlement no 423/2007. Le nom de Bank Sepah a été inscrit sur les listes contenues à l’annexe VII du règlement no 961/2010 et à l’annexe VIII du règlement no 267/2012.

Le droit français

Le code des procédures civiles d’exécution

20

L’article L. 521-1 du code des procédures civiles d’exécution énonce :

« La saisie conservatoire peut porter sur tous les biens mobiliers, corporels ou incorporels, appartenant au débiteur. Elle les rend indisponibles. […] »

21

L’article L. 522-1 de ce code prévoit :

« Le créancier qui a obtenu ou possède un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut faire procéder à la vente des biens qui ont été rendus indisponibles jusqu’à concurrence du montant de sa créance. »

22

L’article L. 523-1 dudit code dispose :

« Lorsque la saisie porte sur une créance ayant pour objet une somme d’argent, l’acte de saisie la rend indisponible à concurrence du montant autorisé par le juge ou, lorsque cette autorisation n’est pas nécessaire, à concurrence du montant pour lequel la saisie est pratiquée. La saisie produit les effets d’une consignation prévus à l’article 2350 du code civil. »

23

Aux termes de l’article L. 531-1 du code des procédures civiles d’exécution :

« Une sûreté judiciaire peut être constituée à titre conservatoire sur les immeubles, les fonds de commerce, les actions, parts sociales et valeurs mobilières. »

24

L’article L. 531-2 de ce code est libellé comme suit :

« Les biens grevés d’une sûreté judiciaire demeurent aliénables. Le prix en est payé et distribué dans les conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Toutefois, en cas de vente de valeurs mobilières inscrites sur un compte tenu et géré par un intermédiaire habilité, le prix peut être utilisé pour acquérir d’autres valeurs qui sont alors subrogées aux valeurs vendues. »

Le code civil

25

L’article 2333 du code civil prévoit :

« Le gage est une convention par laquelle le constituant accorde à un créancier le droit de se faire payer par préférence à ses autres créanciers sur un bien mobilier ou un ensemble de biens mobiliers corporels, présents ou futurs.

[…] »

26

L’article 2350 de ce code dispose :

« Le dépôt ou la consignation de sommes, effets ou valeurs, ordonné judiciairement à titre de garantie ou à titre conservatoire, emporte affectation spéciale et droit de préférence au sens de l’article 2333. »

Le litige au principal et les questions préjudicielles

27

Par arrêt du 26 avril 2007, la cour d’appel de Paris (France) a condamné Bank Sepah à payer à Overseas Financial et à Oaktree Finance les sommes de 2500000 dollars des États-Unis (USD) (environ 1800000 euros) et de 1500000 USD (environ 1100000 euros) respectivement, majorées des intérêts au taux légal à compter de cette date.

28

Après l’obtention de paiements partiels intervenus entre l’année 2007 et l’année 2011, Overseas Financial et Oaktree Finance ont, le 2 décembre 2011, demandé au ministre chargé de l’Économie (France) d’autoriser, en vertu de l’article 8 du règlement no 423/2007, le déblocage du solde restant dû. Overseas Financial et Oaktree Finance ont introduit un recours en annulation contre le rejet implicite de leur demande devant le tribunal administratif de Paris (France). Ce dernier a rejeté ce recours par jugement du 21 octobre 2013.

29

Le 17 mai 2016, Overseas Financial et Oaktree Finance ont fait délivrer des commandements de payer aux fins de saisie-vente contre Bank Sepah avant de faire pratiquer, le 5 juillet 2016, des saisies-attributions et des saisies de droits d’associés et de valeurs mobilières entre les mains d’une banque française. Par jugement du 9 janvier 2017, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Paris (France) a validé ces saisies ainsi que leur montant, comprenant les intérêts prévus par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 avril 2007. Si Bank Sepah a considéré qu’elle était tenue de payer le principal des sommes auxquelles elle avait été condamnée, elle a estimé, en revanche, ne pas être redevable des intérêts et a, dès lors, contesté les mesures d’exécution devant ce juge de l’exécution. Elle a notamment fait valoir qu’elle ne pouvait être tenue redevable des intérêts, estimant avoir été placée dans l’impossibilité de payer sa dette par un cas de force majeure découlant du gel de ses avoirs par le règlement no 423/2007, ce qui a entraîné la suspension de ces intérêts.

30

Cette argumentation ayant été rejetée par ledit juge de l’exécution, Bank Sepah s’est pourvue en appel. Par arrêt du 8 mars 2018, la cour d’appel de Paris a rejeté cet appel au motif que l’indisponibilité provisoire des fonds et des ressources économiques de Bank Sepah n’avait pas eu d’incidence sur le cours des intérêts.

31

En outre, cette juridiction a relevé, d’une part, qu’un délai de prescription de cinq ans s’appliquait aux circonstances de l’espèce et, d’autre part, que rien n’interdisait à Overseas Financial et à Oaktree Finance d’engager des mesures d’exécution à titre conservatoire, lesquelles auraient pu interrompre cette prescription. De telles mesures n’ayant pas été entreprises avant les commandements de payer du 17 mai 2016, les intérêts auxquels Overseas Financial et Oaktree Finance pouvaient prétendre devaient, par conséquent, être limités à ceux courant à partir du 17 mai 2011, à savoir cinq ans avant ces commandements.

32

Tant Bank Sepah qu’Overseas Financial et Oaktree Finance se sont pourvues en cassation devant la Cour de cassation (France). Overseas Financial et Oaktree Finance contestent, en particulier, la partie dudit arrêt d’appel relative au délai de prescription de cinq ans des intérêts.

33

À cet égard, la juridiction de renvoi estime que la solution du litige au principal dépend du point de savoir si Overseas Financial et Oaktree Finance auraient pu interrompre la prescription en appliquant une mesure conservatoire ou d’exécution forcée sur les avoirs gelés de Bank Sepah.

34

Cette juridiction relève que ni le règlement no 423/2007 ni les règlements nos 961/2010 et 267/2012 ne comportent d’interdiction expresse pour un créancier de diligenter une mesure conservatoire ou d’exécution forcée. Eu égard aux définitions données aux notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques » dans ces actes, il ne saurait être exclu que des mesures ne relevant d’aucune des prohibitions visées par ces définitions puissent être mises en œuvre sur des avoirs gelés.

35

Plus particulièrement, elle s’interroge sur la possibilité d’entreprendre, sans autorisation préalable, des mesures qui n’ont pas d’effet attributif, telles que les sûretés judiciaires et les saisies conservatoires. En effet, d’une part, une sûreté judiciaire, qu’elle soit constituée sur un immeuble, à savoir une hypothèque, sur un fonds de commerce ou sur des parts sociales et des valeurs mobilières, à savoir un nantissement, n’emporterait aucune obligation pour le titulaire des biens ou des droits concernés de les céder et n’affecterait pas son droit de choisir la personne à laquelle il les cède. Elle aurait pour seul effet que, en cas de cession des biens ou des droits sur lesquels elle est constituée, la créance du constituant de la sûreté doit être réglée par priorité au moyen du prix de la cession. D’autre part, en ce qui concerne les saisies conservatoires, celles-ci seraient également dépourvues d’effet attributif dans la mesure où les biens, les créances et les droits saisis restent dans le patrimoine du débiteur, produisant les effets d’une consignation ayant pour conséquence une affectation spéciale et un droit de préférence selon le code civil.

36

Toutefois, la juridiction de renvoi se demande si de telles mesures n’auraient pas pour effet une modification de la « destination » des fonds qui en font l’objet, au sens de la définition de la notion de « gel des fonds », ou, plus généralement, si elles ne seraient pas susceptibles de permettre une « utilisation » des fonds et des ressources économiques gelés, au sens des règlements nos 423/2007, 961/2010 et 267/2012. Par ailleurs, elle s’interroge sur le point de savoir si, aux fins de répondre à cette question, la circonstance que la cause de la créance soit étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et soit antérieure au gel des avoirs de Bank Sepah est pertinente.

37

Dans ces conditions, la Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour les questions préjudicielles suivantes :

« 1)

[L’article] 1er, sous h) et j), et [l’article] 7, paragraphe 1, du règlement […] no 423/2007, [l’article] 1er, sous i) et h), et [l’article] 16, paragraphe 1, du règlement […] no 961/2010 ainsi que [l’article] 1er, sous k) et j), et [l’article] 23, paragraphe 1, du règlement […] no 267/2012 doivent-ils être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que soit diligentée sur des avoirs gelés, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, une mesure dépourvue d’effet attributif, telle une sûreté judiciaire ou une saisie conservatoire, prévues par le code des procédures civiles d’exécution […] ?

2)

La circonstance que la cause de la créance à recouvrer sur la personne ou l’entité dont les avoirs sont gelés soit étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et antérieure à la résolution 1737 (2006) […] est-elle pertinente aux fins de répondre à la première question ? »

Sur les questions préjudicielles

Sur la première question

38

Par sa première question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et j), de ce règlement, l’article 16, paragraphe 1, du règlement no 961/2010, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et i), de ce dernier règlement, et l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 267/2012, lu en combinaison avec l’article 1er, sous j) et k), de ce dernier règlement, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que soient diligentées, sur des fonds ou des ressources économiques gelés dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, des mesures conservatoires qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers, même si de telles mesures n’ont pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

39

À titre liminaire, il convient de relever que, dès lors que les dispositions des règlements nos 961/2010 et 267/2012 citées au point précédent sont, en substance, identiques à l’article 1er, sous h) et j), et à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007, les considérations relatives aux dispositions de ce dernier règlement s’appliquent également aux dispositions des deux premiers règlements.

40

Il y a lieu de relever que l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007 prévoit que sont gelés tous les fonds et les ressources économiques qui appartiennent aux personnes, aux entités ou aux organismes cités à l’annexe IV de ce règlement, de même que tous les fonds et les ressources économiques que ces personnes, entités et organismes possèdent, détiennent ou contrôlent.

41

Les notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques » sont définies respectivement à l’article 1er, sous h), et à l’article 1er, sous j), de ce règlement.

42

L’article 1er, sous h), du règlement no 423/2007 définit la notion de « gel des fonds » comme « toute action visant à empêcher tout mouvement, transfert, modification, utilisation ou manipulation de fonds qui aurait pour conséquence un changement de leur volume, de leur montant, de leur localisation, de leur propriété, de leur possession, de leur nature, de leur destination ou toute autre modification qui pourrait en permettre l’utilisation, notamment la gestion de portefeuilles ».

43

Il ressort de cette définition que le gel des fonds vise à limiter au maximum les opérations susceptibles d’être engagées sur des fonds gelés, ce qu’attestent le nombre élevé d’hypothèses visées et le recours au terme « tout ». S’agissant des moyens pour parvenir à limiter ces opérations, ceux-ci sont également définis de manière extensive par le législateur de l’Union.

44

Les considérations qui précèdent sont également valables en ce qui concerne la notion de « gel des ressources économiques ». En effet, cette notion est définie, à l’article 1er, sous j), du règlement no 423/2007, comme « toute action visant à empêcher l’utilisation de ressources économiques afin d’obtenir des fonds, des biens ou des services de quelque manière que ce soit, et notamment, mais pas exclusivement, leur vente, leur location ou leur mise sous hypothèque ».

45

Il s’ensuit que les notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques » visées par le règlement no 423/2007 sont définies de manière très large.

46

S’agissant de mesures telles que celles en cause au principal, qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers, il y a lieu de constater que, ainsi que l’a relevé M. l’avocat général aux points 55 à 61 de ses conclusions, de telles mesures ont pour effet un changement de la destination des fonds gelés et sont de nature à permettre une utilisation des ressources économiques gelées afin d’obtenir des fonds, des biens ou des services.

47

Il s’ensuit que de telles mesures relèvent des notions de « gel de fonds » et de « gel de ressources économiques » au sens de l’article 1er, sous h) et j), et de l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007.

48

La circonstance selon laquelle de telles mesures n’ont pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur n’est pas susceptible de remettre en cause cette conclusion.

49

En effet, d’une part, la notion de « gel des fonds » englobe toute utilisation de fonds ayant pour conséquence, notamment, un changement de la destination de ces fonds, même si une telle utilisation des fonds n’a pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

50

D’autre part, en ce qui concerne la définition de la notion de « gel des ressources économiques », celle-ci mentionne, à titre d’exemple, l’utilisation de ressources économiques par leur mise sous hypothèque. Or, une telle mesure n’a pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

51

Par conséquent, il convient de constater que les définitions mêmes des notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques » visent notamment des mesures n’ayant pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

52

Cette interprétation est corroborée par les objectifs du règlement no 423/2007, mettant en œuvre des mesures restrictives adoptées contre la République islamique d’Iran.

53

À cet égard, il convient de relever que le règlement no 423/2007 assure, selon son considérant 3, la mise en œuvre de la position commune 2007/140, adoptée pour réaliser dans l’Union européenne les objectifs de la résolution 1737 (2006) et vise ainsi à mettre en œuvre cette dernière. Partant, il y a lieu de tenir compte du texte et de l’objet de ladite résolution aux fins d’interpréter ledit règlement (arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a., C-72/11, EU:C:2011:874, point 43).

54

Or, il ressort des termes tant de la résolution 1737 (2006), en particulier de ses points 2 et 12, que de la position commune 2007/140, en particulier de ses considérants 1 et 9, que les mesures restrictives adoptées contre la République islamique d’Iran ont une vocation préventive en ce sens qu’elles visent à empêcher un risque de prolifération nucléaire dans cet État (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a., C-72/11, EU:C:2011:874, point 44).

55

Les mesures de gel des fonds et des ressources économiques visent par conséquent à éviter que l’avoir concerné par une mesure de gel soit utilisé pour procurer des fonds, des biens ou des services susceptibles de contribuer à la prolifération nucléaire en Iran, contre laquelle visent à lutter la résolution 1737 (2006), la position commune 2007/140 et le règlement no 423/2007 (voir, en ce sens, arrêt du 21 décembre 2011, Afrasiabi e.a., C-72/11, EU:C:2011:874, point 46).

56

Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 50 de ses conclusions, pour atteindre ces buts, il est non seulement légitime, mais également indispensable que les définitions des notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques » revêtent une interprétation large parce qu’il s’agit d’empêcher toute utilisation des avoirs gelés qui permettrait de contourner les règlements en cause et d’exploiter les failles du système.

57

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de constater que le gel des fonds et des ressources économiques prévu à l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et j), de ce règlement, s’oppose à ce que soient diligentées sur des avoirs gelés des mesures conservatoires qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers, même si de telles mesures n’ont pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

58

Il y a encore lieu de préciser que, si l’article 7 du règlement no 423/2007 pose le principe du gel des fonds et des ressources économiques des personnes et des entités désignées également en ce qui concerne ces mesures, une autorisation préalable peut néanmoins être délivrée par l’autorité nationale compétente conformément aux dérogations prévues aux articles 8 à 10 de ce règlement, sous réserve que les conditions qu’ils exigent soient remplies.

59

Eu égard aux considérations qui précèdent, il convient de répondre à la première question que l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et j), de ce règlement, l’article 16, paragraphe 1, du règlement no 961/2010, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et i), de ce dernier règlement, et l’article 23, paragraphe 1, du règlement no 267/2012, lu en combinaison avec l’article 1er, sous j) et k), de ce dernier règlement, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que soient diligentées, sur des fonds ou des ressources économiques gelés dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, des mesures conservatoires qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers, même si de telles mesures n’ont pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

Sur la seconde question

60

Par sa seconde question, la juridiction de renvoi demande, en substance, si la circonstance que la cause de la créance à recouvrer sur la personne ou sur l’entité dont les fonds ou les ressources économiques sont gelés est étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et antérieure à la résolution 1737 (2006) est pertinente aux fins de répondre à la première question.

61

À cet égard, il y a lieu de relever que les définitions des notions de « gel des fonds » et de « gel des ressources économiques », contenues à l’article 1er, sous h) et j), du règlement no 423/2007 et aux dispositions correspondantes des règlements nos 961/2010 et 267/2012, n’établissent pas de distinction selon la cause de la créance à recouvrer auprès de la personne ou de l’entité faisant l’objet des mesures restrictives.

62

En outre, l’article 7, paragraphe 1, du règlement no 423/2007 et les dispositions correspondantes des règlements nos 961/2010 et 267/2012 ne distinguent pas davantage, en cas de gel de fonds ou de ressources économiques, selon la cause de cette créance.

63

Ainsi que l’a relevé M. l’avocat général au point 68 de ses conclusions, il convient, dans ces conditions, d’apprécier la possibilité de mettre en œuvre une mesure sur des avoirs gelés en fonction des seuls effets juridiques qu’elle déploie, et non en fonction de la cause de la créance afférente à cette mesure.

64

Il importe d’ajouter que les articles 8 à 10 du règlement no 423/2007, lesquels prévoient et détaillent les conditions limitatives dans lesquelles certaines mesures dont l’effet est contraire au gel des fonds et des ressources économiques peuvent être autorisées par les autorités nationales compétentes, ne se réfèrent pas à des situations où la cause de la créance à recouvrer serait étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et antérieure à la résolution 1737 (2006).

65

Par ailleurs, si la circonstance que la cause de la créance est étrangère à ce programme et antérieure à la résolution 1737 (2006) devait être prise en compte, il conviendrait d’établir, dans chaque cas d’espèce, l’existence d’une telle circonstance, ce qui impliquerait des risques réels de contournement du gel des fonds et des ressources économiques et mettrait les États membres devant de délicats problèmes de mise en œuvre (voir, par analogie, arrêt du 11 octobre 2007, Möllendorf et Möllendorf-Niehuus, C-117/06, EU:C:2007:596, point 58).

66

En outre, la Cour a déjà jugé que l’importance des objectifs poursuivis par un acte de l’Union établissant un régime de mesures restrictives est de nature à justifier des conséquences négatives, même considérables, pour certains opérateurs, y compris pour ceux qui n’ont aucune responsabilité quant à la situation ayant conduit à l’adoption des mesures concernées, mais qui se trouvent affectés notamment dans leurs droits de propriété (voir, par analogie, arrêt du 3 septembre 2008, Kadi et Al Barakaat International Foundation/Conseil et Commission, C-402/05 P et C-415/05 P, EU:C:2008:461, point 361 ainsi que jurisprudence citée).

67

Eu égard à ce qui précède, il y a lieu de répondre à la seconde question que la circonstance que la cause de la créance à recouvrer sur la personne ou l’entité dont les fonds ou les ressources économiques sont gelés est étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et antérieure à la résolution 1737 (2006) n’est pas pertinente aux fins de répondre à la première question.

Sur les dépens

68

La procédure revêtant, à l’égard des parties au principal, le caractère d’un incident soulevé devant la juridiction de renvoi, il appartient à celle-ci de statuer sur les dépens. Les frais exposés pour soumettre des observations à la Cour, autres que ceux desdites parties, ne peuvent faire l’objet d’un remboursement.

Par ces motifs, la Cour (première chambre) dit pour droit :

1)

L’article 7, paragraphe 1, du règlement (CE) no 423/2007 du Conseil, du 19 avril 2007, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et j), du règlement no 423/2007, l’article 16, paragraphe 1, du règlement (UE) no 961/2010 du Conseil, du 25 octobre 2010, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement no 423/2007, lu en combinaison avec l’article 1er, sous h) et i), du règlement no 961/2010, et l’article 23, paragraphe 1, du règlement (UE) no 267/2012 du Conseil, du 23 mars 2012, concernant l’adoption de mesures restrictives à l’encontre de l’Iran et abrogeant le règlement no 961/2010, lu en combinaison avec l’article 1er, sous j) et k), du règlement no 267/2012, doivent être interprétés en ce sens qu’ils s’opposent à ce que soient diligentées, sur des fonds ou des ressources économiques gelés dans le cadre de la politique étrangère et de sécurité commune, sans autorisation préalable de l’autorité nationale compétente, des mesures conservatoires qui instaurent, au profit du créancier concerné, un droit d’être payé par priorité par rapport aux autres créanciers, même si de telles mesures n’ont pas pour effet de faire sortir des biens du patrimoine du débiteur.

2)

La circonstance que la cause de la créance à recouvrer sur la personne ou l’entité dont les fonds ou les ressources économiques sont gelés est étrangère au programme nucléaire et balistique iranien et antérieure à la résolution 1737 (2006) du Conseil de sécurité des Nations unies, du 23 décembre 2006, n’est pas pertinente aux fins de répondre à la première question préjudicielle.

Bay Larsen

Bonichot

Safjan

Ainsi prononcé en audience publique à Luxembourg, le 11 novembre 2021.

Le greffier

A. Calot Escobar

Le président

K. Leanerts


( *1 ) Langue de procédure : le français.

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CJUE, n° C-340/20, Arrêt de la Cour, Bank Sepah contre Overseas Financial Limited et Oaktree Finance Limited, 11 novembre 2021