Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 2e section, 2 juin 2016, n° 14/08692

  • Montre·
  • Chèque·
  • Erreur·
  • Collection·
  • Contrat de vente·
  • Expertise·
  • Transaction·
  • Consorts·
  • Lunette·
  • Prix

Chronologie de l’affaire

Commentaire0

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 

Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 4e ch. 2e sect., 2 juin 2016, n° 14/08692
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 14/08692

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

4e chambre 2e section

N° RG :

14/08692

N° MINUTE :

Assignation du :

12 Juin 2014

JUGEMENT

rendu le 02 Juin 2016

DEMANDEUR

Monsieur Z A

[…]

[…]

représenté par Me Delphine BARTHELEMY, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant, vestiaire #B1204

DÉFENDEURS

Madame C G D épouse X

[…]

[…]

représentée par Me Clara MASSIS DE SOLERE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #E0553

Monsieur B X

[…]

[…]

représenté par Me Clara MASSIS DE SOLERE, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #E0553

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame STANKOFF, Vice-Président

Madame Y, Juge

Madame ABBASSI-BARTEAU, Vice-président

assistées de Marion PUAUX, Greffier,

DÉBATS

A l’audience du 14 Avril 2016 tenue en audience publique devant Mme Y, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition par le greffe,

Contradictoire

En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur Z A a fait l’acquisition d’une montre Rolex Submariner James Bond, fabriquée le 13 novembre 1958.

Au début de l’année 2013, Monsieur Z A est entré en contact avec Monsieur B X, qui commercialise avec son épouse Madame C D épouse X, sous l’enseigne « OLIVINE », des montres Rolex de collection et d’occasion, aux fins de lui proposer cette montre à la vente, moyennant la somme de 75.000 euros.

Le 23 avril 2013, quelques heures après avoir remis à Monsieur Z A un chèque bancaire d’un montant de 75.000 euros, Monsieur B X l’a informé de ce que la vente projetée ne pourrait pas intervenir, lui a demandé de venir récupérer sa montre et de lui remettre le chèque, ce que Monsieur Z A a refusé.

Par courrier recommandé avec avis de réception du 24 avril 2013, Monsieur B X a réitéré ses demandes, qualifiant le chèque de 75.000 euros de chèque de caution.

Le 26 avril 2013, Monsieur Z A a présenté le chèque de 75.000 euros à l’encaissement et le 30 avril 2013, Monsieur B X a fait opposition au paiement du chèque.

Par recommandé avec avis de réception du 21 mai 2013, Monsieur Z A a mis en demeure Monsieur B X de lui payer la somme de 75.000 euros.

Le 04 juin 2013, Monsieur B X a déposé plainte auprès des services de police pour tentative d’escroquerie, à l’encontre de Monsieur Z X.

Selon acte d’huissier de justice signifié le 07 juin 2013, Monsieur Z A a assigné en référé les époux X aux fins d’obtenir l’exécution du contrat de vente et par ordonnance du 10 septembre 2013, le juge des référé du tribunal de céans a condamné les défendeurs à lui payer la somme provisionnelle de 75.000 euros avec intérêts au taux légal à compter du 22 mai 2013 ainsi que la somme de 1.000 euros au titre de ses frais irrépétibles ; il a par ailleurs ordonné une mesure d’expertise de la montre litigieuse.

Le 21 août 2013, Monsieur Z A a déposé plainte pour escroquerie et opposition illégale au paiement d’un chèque.

Dans le cadre de l’enquête pénale, un rapport d’expertise a conclu au caractère de copies ou de contrefaçons de la carrure, de la lunette, du disque de lunette et du fond de la montre et celle-ci a fait l’objet d’un placement sous scellé sous le numéro parquet 13232000521.

Par arrêt du 06 février 2014, la cour d’appel statuant en référé a infirmé l’ordonnance rendue le 10 septembre 2013, relevant qu’il existait une incertitude sur le sens dans lequel le juge du fond trancherait la question de la validité de la vente conclue entre les parties.

C’est dans ce contexte que selon acte d’huissier de justice signifié le 12 juin 2014, Monsieur Z A a assigné B X et Madame C D épouse X devant le présent tribunal aux fins d’obtenir l’exécution de la vente.

L’enquête pénale diligentée à la suite du dépôt de plainte de Monsieur B X a fait l’objet d’un classement sans suite, notifié à Monsieur Z A 22 août 2014.

*

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 04 novembre 2015 il est expressément référé, Monsieur Z Ademande au tribunal, au visa des articles 1134 et 1583 du code civil, de condamner les défendeurs à lui payer la somme de 75.000 euros au titre de la vente intervenue le 23 avril 2013, avec intérêts au taux légal à compter du 07 juin 2013 et sous astreinte de 2.000 euros par jour de retard passé huit jours calendaires suivant la signification du jugement à intervenir, de débouter les consorts X de l’intégralité de leurs demandes et de les condamner à lui payer la somme de 2.000 euros au titre de ses frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire ; il sollicite en outre qu’il soit statué ce que de droit sur la remise du scellé n°4 dans la procédure numéro parquet 123320000521.

Monsieur Z A conclut au caractère parfait de la vente intervenue entre les parties le 23 avril 2013 dès lors que tant la chose que le prix ont été déterminés, Monsieur B X lui ayant remis un chèque de 75.000 euros correspondant au prix de vente fixé entre les parties. Il ajoute que la procédure commerciale d’achat décrite sur le site Internet de la boutique « Olivine » a en outre été respectée et qu’il n’est pas crédible que Monsieur B X ait négocié le prix avant d’examiner la montre. Il souligne en outre le caractère non probant de l’expertise réalisée en octobre 2013 dans la mesure où les défendeurs étaient en possession de la montre depuis plus de cinq mois, et ajoute que les résultats de cette expertise sont en tout état de cause indifférents pour ce qui est de la question de la validité de la vente.

En réponse à l’argumentation adverse, il expose qu’il ne peut être affirmé que la montre serait une contrefaçon dans la mesure où la majorité de ses composants, parmi lesquels le cadrant, sont des originaux – le cadran représentant selon lui 70% de la valeur de la montre. Il rappelle en outre que la charge de la preuve de l’existence d’un vice du consentement pèse sur celui qui s’en prévaut et soutient que les défendeurs ne démontrent pas l’existence d’une erreur déterminante sur le fondement des articles 1109 et 1110 du code civil dans la mesure où Monsieur B X est spécialiste des montres de marque Rolex, où l’erreur éventuelle commise sur l’authenticité de la carrure, de la lunette, du disque de lunette et du fond n’est pas déterminante, où l’erreur sur la valeur n’étant pas cause de nullité et où cette erreur était en tout état de cause inexcusable de la part d’un expert de grande renommée qui a eu l’occasion d’examiner la montre à deux reprises avant de conclure la transaction. Il conclut également au rejet de l’argumentation fondée sur les dispositions des articles 1109 et 1116 du code civil, affirmant qu’il était, en sa qualité de particulier, convaincu de l’authenticité de la montre proposée à la vente, qu’il ne s’est jamais prévalu de l’existence d’un quelconque certificat d’authenticité et qu’il n’a jamais fait preuve de menaces envers les défendeurs. Il sollicite enfin le rejet du moyen fondé sur les dispositions de l’article 1604 du code civil, rappelant n’avoir aucune compétence particulière en matière d’horlogerie tandis que Monsieur B X, qui a pu examiner à deux reprises la montre avant de finaliser la transaction, est un professionnel de renommée mondiale.

Il conclut également au débouté de la demande reconventionnelle indemnitaire au motif que le délit de tromperie, qui lui était reproché, n’est pas caractérisé, le dossier pénal ayant fait l’objet d’un classement sans suite le 22 août 2014. Il soutient pas ailleurs que les défendeurs n’ont subi aucun préjudice, n’ayant jamais payé le prix convenu en contrepartie de la vente, s’étant abstenu de verser la consignation mise à leur charge au titre de la mesure d’expertise ordonnée en référé, laquelle a finalement été réalisée dans un cadre pénal, et ne caractérisant aucun préjudice moral ou d’image.

*

Dans leurs dernières conclusions notifiées par voie électronique le 09 novembre 2015 auxquelles il est expressément référé, Monsieur B X et Madame C D épouse X au tribunal, au visa de l’article 1583 du code civil, de constater que la vente litigieuse n’a pas été conclue et de débouter Monsieur Z A de l’intégralité de ses demandes ; subsidiairement, au visa des articles 1109, 1110 et 1116 et suivants du code civil, de prononcer la nullité de la vente et de débouter le demandeur de l’intégralité de ses demandes ; à titre reconventionnel et au visa des articles 4, alinéa 1er, du code de procédure civile, L. 213-1 du code de la consommation et 1382 du code civil, de condamner Monsieur Z A à leur payer la somme de 20.000 euros à titre de dommages et intérêts au titre de leur préjudice moral et d’image et du caractère abusif de la procédure engagée ; en toute hypothèse, de condamner le demandeur à leur payer la somme de 10.000 euros au titre de leurs frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens, le tout sous le bénéfice de l’exécution provisoire.

Les consorts X concluent à l’absence de contrat de vente entre les parties et subsidiairement à sa nullité, rappelant que la première qualité substantielle d’une montre de collection Rolex est la parfaite authenticité de l’intégralité des pièces qui la composent ainsi que de leur provenance d’origine, que Monsieur B X a constaté, dans le cadre de son expertise de la montre, que le cadran était un faux et qu’un triple XXX avait été apposé au fond du boîtier, signifiant le refus de la maison Rolex de réviser la montre, et que le caractère contrefait de la montre ainsi que l’importance de ses défauts ont été confirmés dans le cadre de l’enquête pénale.

Ils font valoir que si la vente était conditionnée à la réalisation d’une expertise préalable par Monsieur B X, laquelle n’a été réalisée que lors du rendez-vous du 23 avril 2013, celle-ci ne pourra être jugée parfaite faute d’accord sur la chose au sens de l’article 1583 du code civil, et que s’il devait au contraire être considéré que la vente a bien été conclue entre les parties, celle-ci a en tout état de cause été viciée par l’erreur commise sur les qualités substantielles de la chose, la montre s’étant avérée être une contrefaçon, ou par le dol caractérisé par les manœuvres réalisées par le demandeur, dont l’enquête pénale ainsi que son comportement lors de la transaction ont révélé qu’il n’était pas certain de l’authenticité de sa montre au moment où il l’a proposée à la vente. Ils ajoutent que les manœuvres dolosives réalisées par Monsieur Z A caractérisent le délit de tromperie sur la marchandise prévu par l’article L. 213-1 du code de la consommation, et le délit d’abus de confiance.

Ils soutiennent encore, au visa de l’article 1604 du code civil, que Monsieur Z A a manqué à son obligation de délivrance conforme, de sorte que la vente ne pourra qu’être résolue.

Ils relèvent enfin que la demande d’exécution est infondée dans la mesure où il est constant que la montre litigieuse est conservée sous scellé et que le versement du prix de vente n’aurait en conséquence aucune contrepartie.

A titre reconventionnel, les défendeurs soutiennent avoir subi un préjudice moral et d’image du fait des agissements dolosifs et délictueux de Monsieur Z A, de l’acharnement dont celui-ci a fait preuve et des accusations mensongères et calomnieuses portées à leur encontre. Ils ajoutent que son action en justice revêt un caractère abusif dans la mesure où le demandeur ne pouvait avoir aucune certitude quant à l’authenticité de la montre proposée à la vente et que l’expertise en a depuis confirmé le caractère contrefait.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 janvier 2016.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur l’existence d’un contrat de vente entre les parties

Aux termes de l’article 1583, la vente est parfaite entre les parties, et la propriété est acquise de droit à l’acheteur à l’égard du vendeur, dès qu’on est convenu de la chose et du prix, quoique la chose n’ait pas encore été livrée ni le prix payé.

L’article 1315, alinéa 1er, du code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver.

Il est en l’espèce constant que Monsieur Z A est entré en contact avec Monsieur B X par l’intermédiaire de Monsieur E F, aux fins de lui proposer à la vente une montre de marque Rolex, modèle Submariner James Bond.

Les parties s’accordent à reconnaître que les intéressés se sont rencontrés au moins une fois, dans le cadre d’une approche commerciale, avant le 23 avril 2013, date à laquelle Monsieur Z A a laissé à Monsieur B X la montre litigieuse, moyennant la remise d’un chèque d’un montant de 75.000 euros tiré sur le compte CIC « OLIVINE X » à son attention et daté du 23 avril 2013.

Si les défendeurs contestent aujourd’hui qu’un quelconque accord soit intervenu entre les parties sur la chose et le prix et font valoir que l’échange intervenu le 23 avril 2013 l’a été dans le cadre de la conclusion d’une promesse de vente, réalisée sous condition suspensive de la réalisation d’une expertise par Monsieur B X, il convient néanmoins d’observer que ce dernier était plus nuancé lors de son dépôt de plainte du 04 juin 2013, lors duquel il indiquait aux services de police : « j’ai fait une proposition pour la James Bond à 70 000 euros. Pour la négociation, nous nous sommes finalement mis d’accord pour une transaction à 75 000 euros. Celle-ci a était finalisée le 23 avril 2013 avant le déjeuner que nous avons partagé. La montre m’a été confiée ce jour là aux environs de 14H30. En ce qui concerne le règlement de la transaction, nous nous étions mis d’accord pour que le montant de la transaction soit réglé par virement, auquel s’ajoutait un chèque de caution tiré sur mon compte CIC d’un montant de 75 000 euros ». Monsieur B X a ensuite détaillé les conditions dans lesquelles il avait découvert la présence d’un insert de remplacement et de l’absence d’authenticité du cadran, et ajouté « J’ai tout de suite appelé le vendeur (06 16 17 25 34) pour lui dire que j’annulais la transaction et que je lui confirmais cette annulation par letttre recommandée ».

Monsieur Z A observe en outre, à juste titre, que la procédure de vente détaillée sur le site Internet www.olivine-prestige.com à la rubrique 'Vendre une montre’ ne mentionne à aucun moment l’existence d’une condition suspensive telle que celle invoquée par les défendeurs.

Le tribunal relève encore que si une divergence existe entre les parties concernant les modalités de paiement envisagées ou définies le 23 avril 2013, il est en tout état de cause constant que Monsieur B X a dans un premier temps établi trois ordres de virement d’un montant de 25.000 euros chacun sur un compte bancaire de Monsieur Z A, le premier virement devant intervenir le jour-même, avant de remettre finalement un chèque d’un montant de 75.000 euros à son cocontractant. Les explications des consorts X selon lesquelles ce chèque, correspondant précisément au prix de vente conclu entre les parties à cette date, aurait été émis préalablement à l’examen de la montre, et à simple titre de caution, sont à cet égard peu convaincantes et n’expliquent en tout état de cause pas dans quel contexte ont été établis les ordres de virement que les défendeurs versent eux-mêmes aux débats.

Il est enfin éclairant de lire les déclarations de Monsieur E F lors de son audition par les services de police le 18 juin 2013, date à laquelle il déclarait : « C’était un mardi, sûrement le 23 avril. La vente a été faite, je sais que A voulait que l’argent soit viré à l’étranger, et avait demandé un chèque de caution de 75 000 euros. Le jour de la vente, dans l’après midi ou en fin d’après midi, X m’a contacté pour me dire que le cadran de la montre que A lui avait vendue était faux. J’ai senti que X était mal à l’aise vis-à-vis de moi, je l’ai rassuré et lui ai conseillé de faire ce qu’il avait à faire, c’est à dire annuler la vente et les paiements ».

Si, dans le cadre d’une attestation établie quelques mois plus tard, le 18 septembre 2013, Monsieur E F a indiqué avoir été présent le 23 avril 2013 « lorsque Mr A Z a reçu un chèque de caution de 75.000 euros contre une montre ROLEX James Bond dans un but de cession après expertise de la Boutique Olivine », le tribunal observe néanmoins que le demandeur justifie avoir déposé plainte du chef de fausse attestation à l’encontre de Monsieur E F le 20 novembre 2013, de sorte que la valeur probante de cette attestation, qui contredit notablement les premières déclarations effectuées par l’intéressé devant les services de police, est à tout le moins contestable.

Au regard de ces différents éléments, le tribunal constate qu’un accord est bien intervenu le 23 avril 2013 entre Monsieur Z A et Monsieur B X portant sur la vente d’une montre Rolex Submariner James Bond moyennant la somme de 75.000 euros et ce, sans que l’existence d’une condition suspensive ne soit démontrée par les défendeurs.

Sur la validité du contrat de vente conclu entre les parties

L’article 1109 du code civil dispose qu’il n’y a point de consentement valable si le consentement n’a été donné que par erreur ou s’il a été extorqué par violence ou surpris par dol.

Sur l’existence d’une erreur

Aux termes de l’article 1110, alinéa 1er, du même code, l’erreur n’est une cause de nullité de la convention que lorsqu’elle tombe sur la substance même de la chose qui en est l’objet.

Il est de principe que l’erreur n’est une cause de nullité que dans la mesure où elle est excusable.

Aux termes du rapport d’identification réalisé sur la montre litigieuse par la société ROLEX, dans le cadre de l’enquête pénale diligentée à la suite du dépôt de plainte de Monsieur B X du chef de tentative d', ont été identifiés comme contrefaits la carrure et le fond, la lunette et son disque, et comme modifiés la couronne et les aiguilles ; ont en revanche été identifiés comme authentiques le cadran, le mouvement et le bracelet.

Rien ne permet d’affirmer, comme l’allègue Monsieur Z A, que Monsieur B X aurait pu intervenir sur la montre pour la falsifier entre avril 2013 et la date à laquelle l’objet a été remis à la société Rolex pour expertise.

Étant observé d’une part, que le seul prix déterminé par les parties n’est pas susceptible de prouver l’erreur, Monsieur B X ayant lui-même déclaré lors de son audition du 19 novembre 2013 : « une montre comme celle-ci est rare et bien des collectionneurs seraient prêts à en faire l’acquisition au prix que nous avions fixé », et d’autre part que ce dernier a procédé à l’achat de la montre litigieuse dans le cadre de son activité commerciale de vente de montres de collection, fort de son expertise en la matière, et nécessairement conscient des aléas existant lors de l’achat d’une montre fabriquée en 1958, Monsieur B X ne démontre cependant pas avoir eu la certitude d’acquérir une montre dont l’ensemble des composants étaient authentiques et, partant, avoir commis une erreur lors de la transaction litigieuse.

Il convient en tout état de cause d’observer, à supposer l’erreur établie, que l’enseigne « OLIVINE » se présente comme spécialiste de la montre d’occasion et notamment des montres de marque Rolex et se prévaut, sur son site Internet, d’une expérience de plus de trente ans sur le marché de la montre d’occasion et de collection et de vingt cinq ans sur le marché des montres Rolex, indiquant notamment « OLIVINE PRESTIGE développe depuis de nombreuses années une expertise particulière concernant l’évaluation et la certification d’origine des montres ROLEX d’occasion, de transition, de collection et de grande collection ». Lors de son dépôt de plainte du 04 juin 2013, Monsieur B X, qui exerce sous l’enseigne « OLIVINE » comme conjoint collaborateur de son épouse, s’est lui-même présenté comme le spécialiste français de la Rolex vintage et de collection.

Il appartenait dans ces conditions à Monsieur B X, qui avait nécessairement connaissance du risque important, eu égard à la date de fabrication de la montre et aux difficultés dont il fait lui-même état consécutives au positionnement du service après vente de la société Rolex, de ce qu’un ou plusieurs éléments étaient susceptibles de se révéler inauthentiques, de procéder à l’expertise de la montre préalablement à la conclusion d’un contrat de vente avec Monsieur Z A

En conséquence, à supposer qu’elle puisse être caractérisée de manière certaine, l’erreur invoquée par les défendeurs serait en tout état de cause inexcusable, de sorte que les consorts X sont mal fondés à s’en prévaloir.

Sur l’existence d’un dol

L’article 1116 dispose que le dol, qui ne se présume pas et doit être prouvé, est une cause de nullité de la convention lorsque les manœuvres pratiquées par l’une des parties sont telles, qu’il est évident que, sans ces manœuvres, l’autre partie n’aurait pas contracté.

Outre l’incertitude existant quant à l’existence d’une erreur lors de l’expression du consentement de Monsieur B X au contrat de vente litigieux, les défendeurs ne rapportent pasla preuve qui leur incombe en application de l’article 9 du code de procédure civile de ce que Monsieur Z A aurait commis une quelconque manœuvre ou réticence dolosive de nature à provoquer chez lui une erreur lors de l’expression de ce consentement.

Il n’est effet pas établi que le demandeur ait eu connaissance, lors de la cession litigieuse, du défaut d’authenticité d’une partie des composants de la montre, étant observé que Monsieur Z A n’est pas un professionnel du marché de la montre d’occasion, que la montre avait été considérée comme authentique par la société ARTCURIAL en 2008 et qu’il est constant que lesdits défauts n’étaient pas détectables sans un examen approfondi, Monsieur B X ne les ayant lui-même partiellement identifiés qu’au cours de la réalisation d’une expertise poussée intervenue postérieurement à la conclusion du contrat de vente litigieux.

L’existence d’un dol ne sera en conséquence pas davantage retenue par le tribunal.

Sur la demande de résolution de la vente

En application des dispositions de l’article 1604 du code civil, le vendeur est tenu de délivrer un bien conforme à l’objet du contrat conclu entre les parties ; la preuve de la non-conformité de la chose livrée incombe à l’acquéreur qui soulève cette exception.

En l’espèce, les défendeurs, qui connaissent, en leur qualité de spécialistes du marché de la montre d’occasion, les risques et aléas existant lors de l’achat d’une montre aussi ancienne que celle proposée à la vente par Monsieur Z A, ne démontrent pas que ce dernier ait présenté cette montre et l’ensemble de ses composants comme étant parfaitement et intégralement authentiques et que ces caractéristiques soient rentrées dans le champ contractuel ; il est en particulier notable qu’aucun certificat d’authenticité n’a été présenté par le demandeur antérieurement à la conclusion de la vente.

Le moyen tenant au défaut de conformité de la montre litigieuse – dont il sera observé qu’il n’a pas été repris au dispositif des écritures des consorts X – ne pourra en conséquence qu’être écarté.

Sur la demande en paiement

Aux termes de l’article 1134, alinéa 1er, du code civil, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Dans la mesure où il n’est pas contesté que, nonobstant l’arrêt de la cour d’appel de PARIS en date du 06 février 2014 ordonnant la mainlevée de l’opposition effectuée par les époux X le 30 avril 2013 au paiement du chèque n°0715171 établi à l’ordre de Monsieur Z A, ce dernier n’a pu encaisser ledit chèque faute de s’être vu communiquer l’original, Monsieur B X et Madame C D épouse X seront condamnés à payer à Monsieur Z A la somme de 75.000 euros, en exécution du contrat de vente conclu le 23 avril 2013.

En application des dispositions de l’article 1153 du code civil, cette somme portera intérêts au taux légal à compter du 07 juin 2013, date à laquelle Monsieur Z A a assigné en référé les consorts X aux fins de se voir payer cette somme.

Le prononcé d’une astreinte ne s’impose pas à ce stade et Monsieur Z A sera débouté de sa demande en ce sens.

Sur la demande reconventionnelle indemnitaire

Les consorts X, qui ne caractérisent ni les éléments constitutifs du délit de tromperie sur la marchandise prévu à l’article L. 213-1 du code de la consommation, ni aucun fait de nature à engager la responsabilité civile de Monsieur Z A, ne pourront qu’être déboutés de leur demande reconventionnelle indemnitaire formée à son encontre.

Sur les demandes accessoires

Il n’appartient pas au tribunal de se prononcer quant au sort du scellé établi dans le cadre de la procédure numéro parquet 13232000521, les consorts X devant prendre l’initiative qui leur appartient, conformément aux dispositions de l’article 41-4 du code de procédure pénale, d’en solliciter la restitution auprès du procureur de la République de Paris, compétent à cette fin.

En application des dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, Monsieur B X et Madame C D épouse X, parties perdantes, seront condamnés aux dépens.

L’équité, tenant notamment à la difficulté face à laquelle les consorts X risquent de se trouver confrontés pour se voir restituer la montre litigieuse qui leur appartient, ne commande toutefois pas de faire droit à la demande formée par Monsieur Z A au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

L’ancienneté du litige justifie enfin le prononcé de l’exécution provisoire et celle-ci sera en conséquence ordonnée, en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement, par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire, et rendu en premier ressort,

CONDAMNE Monsieur B X et C D épouse X à payer à Monsieur Z A la somme de 75.000 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 07 juin 2013 ;

DEBOUTE Monsieur Z A du surplus de ses demandes ;

DEBOUTE Monsieur B X et Madame C D épouse X de l’intégralité de leurs demandes ;

CONDAMNE Monsieur B X et Madame C D épouse X aux dépens ;

ORDONNE l’exécution provisoire de la présente décision.

Fait et jugé à Paris le 02 Juin 2016

Le Greffier Le Président

FOOTNOTES

1:

Expéditions

exécutoires

délivrées le:

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Tribunal de grande instance de Paris, 4e chambre 2e section, 2 juin 2016, n° 14/08692