Tribunal de grande instance de Paris, 18 février 2022, 19/04388

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Sur la décision

Référence :
TJ Paris, ct0196, 18 févr. 2022, n° 19/04388
Numéro(s) : 19/04388
Importance : Inédit
Identifiant Légifrance : JURITEXT000045652982

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

3ème chambre 2ème section

No RG 19/04388 – No Portalis 352J-W-B7D-CPTCS

No MINUTE :

Assignation du :
10 Avril 2019

JUGEMENT
rendu le 18 Février 2022
DEMANDERESSE

Société FEAR OF GOD
[Adresse 2]
[Adresse 2] (ETATS UNIS)

représentée par Maître Franck VALENTIN du PARTNERSHIPS DLA PIPER FRANCE LLP, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #R235

DÉFENDERESSE

Société [N]
[Adresse 1]
2000 ANVERS (BELGIQUE)

représentée par Maître Virginie ULMANN de la SCP BAKER & MC KENZIE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0445

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Catherine OSTENGO, Vice-présidente
Madame Elise MELLIER, Juge
Madame Linda BOUDOUR, Juge

assistée de Quentin CURABET, Greffier

DÉBATS

A l’audience du 13 Janvier 2022 tenue en audience publique avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 18 Février 2022.

JUGEMENT

Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

La société Fear Of God (ci-après F.O.G.) se présente comme une société californienne spécialisée dans le prêt-à-porter masculin urbain haut-de-gamme.

Elle est titulaire des deux marques américaines suivantes :
- FEAR OF GOD ESSENTIALS no 87828194 déposée en classe 25 pour désigner divers articles textiles ;
- FEAR OF GOD ESSENTIALS no 87828182, déposée en classe 18 pour désigner divers articles de maroquinerie et accessoires.

La société [N] se présente comme une société de droit belge, en charge de la création, de la distribution et de la commercialisation d’articles de prêt-à-porter et d’accessoires de mode.

Elle est notamment titulaire des marques suivantes :
- la marque verbale internationale ESSENTIEL no 780041, désignant outre la France, le Danemark, la Norvège, la Turquie, l’Autriche, la Suisse, l’Allemagne, l’Espagne et l’Italie, déposée le 4 mars 2002 en classes 18 et 25 pour désigner des sacs à main, des vêtements et des chaussures ;
- la marque verbale internationale ESSENTIEL ANTWERP no 1311137 désignant l’Union européenne, le Japon, Singapour, la Turquie, les États-Unis d’Amérique, le Biélorussie, la Suisse, la Chine, le Kazakhstan, la Fédération de Russie et l’Ukraine, déposée le 14 avril 2016 pour désigner des produits et services des classes 14, 18, 25 et 35.

Elle exploite le site internet www.essentiel-antwerp.com, accessible également à l’adresse www.essentiel.be.

Ayant découvert que la société F.O.G utilisait le signe ESSENTIALS pour la commercialisation de sa dernière collection, la société [N], considérant que cet usage portait atteinte à ses marques, lui a vainement adressé le 20 mars 2018 une lettre de mise en demeure avant de saisir le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins d’obtenir notamment des mesures d’interdiction, demande dont elle a été déboutée par ordonnance du 1er juin 2018 confirmée par arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 juin 2019.

C’est dans ce contexte que la société F.O.G a fait assigner la société [N] par acte signifié le 10 avril 2019 aux fins de voir constater l’invalidité de la partie française de la marque verbale internationale ESSENTIEL no 780041.

Elle a parallèlement introduit une demande en nullité de la marque internationale désignant l’Union européenne ESSENTIEL ANTWERP no1311137 devant l’Office de l’Union européenne pour la propriété intellectuelle (EUIPO), qui est actuellement en cours.

La société [N], pour sa part, a introduit une action en contrefaçon au fond en Belgique, tendant notamment à voir prononcer des mesures d’interdiction pan-européennes de l’usage du signe ESSENTIALS par la société F.O.G et la société PACSUN (distributrice des produits marqués ESSENTIALS). Par décision du 13 février 2020, le tribunal de Bruxelles l’a déboutée de ses demandes formées contre la société F.O.G, mais a ordonné à la société PACSUN de cesser l’utilisation du signe « ESSENTIALS » pour commercialiser des produits et des services relevant des classes 18, 25, 35 et 42.

La société [N] ayant ensuite constaté que la société F.O.G offrait à la vente des produits vestimentaires sur son site internet accessible à l’adresse https://fearofgod.com/pages/essentials-fw-2020-lookbook, a saisi le juge des référés du tribunal de Bruxelles qui, dans sa décision du 11 décembre 2020, a prononcé une mesure d’interdiction.

***

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 17 juin 2021, la société F.O.G demande au tribunal de :

Vu l’article 7 du Règlement (UE) 2017/1001 du Parlement européen et du Conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne, lu en combinaison avec l’article 59 du même Règlement,
Vu les articles L. 711-1, L. 711-2, L. 711-3, L. 711-4, L. 714-3, L. 714-6 et R. 714-3 et suivants du code de la propriété intellectuelle,
Vu l’article 1240 du code civil,
Vu les articles 31, 699 et 700 du code de procédure civile,
Vu la jurisprudence citée,
Vu les pièces versées aux débats,

— RECEVOIR la société Fear Of God en ses demandes, fins, moyens et prétentions ;

Y faisant droit,

A titre liminaire,
- DIRE ET JUGER que la société Fear Of God dispose d’un intérêt à agir en nullité de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL no780041 au sens de l’article L. 714-3 du code de la propriété intellectuelle ;

A titre principal,
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 et désignant les produits « sacs à main » en classe 18 et les « vêtements, chaussures » en classe 25, est dépourvue de caractère distinctif en application de l’article L. 711-1 du code de la propriété intellectuelle ;

A titre subsidiaire,
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 et désignant les produits « sacs à main » en classe 18 et les « vêtements, chaussures » en classe 25, est dépourvue de caractère distinctif en vertu des alinéas b) et c) de l’article L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle ;

A titre encore plus subsidiaire,
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 et désignant les produits « sacs à main » en classe 18 et les « vêtements, chaussures » en classe 25, n’a pu acquérir de caractère distinctif du fait de son usage faute d’un usage exclusif;
- DIRE ET JUGER que l’usage requis sous l’empire de l’article L. 711-2 in fine du code de la propriété intellectuelle suppose un usage sans variations susceptibles d’altérer le caractère distinctif du signe en cause.
Dire et juger que l’usage des signes protégés par les marques :

ne peuvent caractériser l’usage de la marque ESSENTIEL aux fins d’analyse de l’acquisition du caractère distinctif.

En conséquence,
- PRONONCER la nullité de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 pour l’intégralité des produits qu’elle désigne en classes 18 et 25 ;
- ORDONNER la transmission d’une copie du jugement à intervenir à l’Institut National de la Propriété Industrielle, aux fins de procéder à son inscription au Registre National des Marques, par réquisitions de Monsieur ou Madame le Greffier en Chef ou à la requête de la partie la plus diligente ;

A titre infiniment subsidiaire,
- CONSTATER la dégénérescence de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 et désignant les produits « sacs à main » en classe 18 et les « vêtements, chaussures » en classe 25, en vertu de l’article L. 714-6 du code de la propriété intellectuelle ;

En conséquence,
- PRONONCER la déchéance de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL, déposée par la société [N] le 4 mars 2002 sous le numéro 780041 pour l’intégralité des produits qu’elle désigne en classes 18 et 25, à compter du 11 avril 2019, date de saisine du tribunal de céans ;
- ORDONNER la transmission d’une copie du jugement à intervenir à l’Institut National de la Propriété Industrielle, aux fins de procéder à son inscription au Registre National des Marques, par réquisitions de Monsieur ou Madame le Greffier en chef ou à la requête de la partie la plus diligente ;

En tout état de cause,
- DÉBOUTER la société [N] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
- CONDAMNER la société [N] à payer à la société Fear Of God la somme de vingt mille (20.000) euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait de l’usage par la société [N] de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL sous le numéro 780041 qu’elle savait nulle ou à tout le moins déchue pour dégénérescence aux fins de s’opposer à l’exploitation de la dénomination « Essentials » par la société Fear of God ;
- ORDONNER la publication du jugement à intervenir par extraits ou résumé sur la partie supérieure de la page d’accueil du site internet accessible à l’adresse www.essentiel-antwerp.com pendant une durée d’un (1) mois à compter de la signification du jugement à intervenir ainsi que dans trois (3) journaux ou revues au choix de la société Fear Of God et aux frais de la société [N] dans la limite de 30.000 (30.000) euros HT pour l’ensemble des insertions ;
- CONDAMNER la société [N] à verser à la société Fear Of God la somme de quinze mille (20.000) euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
- CONDAMNER la société [N] aux entiers dépens, en ce compris les frais, émoluments, dont distraction au profit de Maître Frank Valentin en application de l’article 699 du code de procédure civile ;
- ORDONNER l’exécution provisoire du jugement à intervenir, nonobstant tout appel et sans constitution de garantie.

*

Dans ses dernières conclusions signifiées par voie électronique le 12 mai 2021, la société [N] demande au tribunal de :

Vu les articles L. 711-1, L. 711-2, L. 714-6 et L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle,
Vu les articles 1240 et 1241 du code civil,
Vu les articles 53, 54, 63, 64, 65, 76, 699 et 700 du code de procédure civile,
Vu les pièces versées au débat,

— DIRE ET JUGER que [N] est recevable et bien fondée dans ses écritures ;

— REJETER les demandes, fins et prétentions de Fear of God ;

Sur la demande en nullité de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041

A titre principal,
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article L. 711-2 a) du code de la propriété intellectuelle ;
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article L. 711-2 b) du code de la propriété intellectuelle ;
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 n’est pas dépourvue de caractère distinctif au sens de l’article L. 711-1 du code de la propriété intellectuelle;

En conséquence,
- DEBOUTER Fear of God de ses demandes en nullité de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

A titre subsidiaire,
- DIRE ET JUGER que [N] est recevable à démontrer l’acquisition du caractère distinctif par l’usage de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 a acquis un caractère distinctif par l’usage qui en a été fait au sens de l’article L. 711-2 du code de la propriété intellectuelle dans sa version applicable à la présente instance ;

En conséquence,
- DEBOUTER Fear of God de ses demandes en nullité de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

Sur la demande en déchéance de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No.780041

— DIRE ET JUGER que la demande en déchéance pour dégénérescence de Fear of God est irrecevable en vertu de l’article 70 du code de procédure civile ;

En conséquence,
- DEBOUTER Fear of God de sa demande en déchéance de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

En tout état de cause,
- DIRE ET JUGER que la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 n’encourt pas la déchéance pour dégénérescence au sens de l’article L. 714-6 a) du code de la Propriété Intellectuelle ;

En conséquence,
- DEBOUTER Fear of God de sa demande en déchéance pour dégénérescence de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

Sur les demandes complémentaires de Fear of God

— DIRE ET JUGER que [N] n’a commis aucune faute en déposant et/ou exploitant la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

— DIRE ET JUGER que Fear of God ne rapporte pas la preuve du préjudice résultant du dépôt et/ou de l’exploitation par [N] de la partie française de la marque internationale ESSENTIEL No. 780041 ;

— DIRE ET JUGER qu’il n’y a pas lieu à publication, ni à exécution provisoire du jugement à intervenir ;

En conséquence,
- DEBOUTER Fear of God de sa demande en réparation de préjudices non établis et de ses demandes complémentaires ;

A titre reconventionnel
- DIRE ET JUGER que la présente action à l’encontre de [N] est abusive ;

— CONDAMNER Fear of God à payer à [N] la somme de 30.000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

En tout état de cause,
- CONDAMNER Fear of God à payer à [N] la somme de 30.000 euros au titre de l’article 700 du code de Procédure Civile, ainsi qu’aux dépens.

***

La procédure a été clôturée le 7 octobre 2021.

Par conclusions signifiées le 22 octobre 2021, la société F.O.G a sollicité la révocation de l’ordonnance de clôture aux fins de pouvoir communiquer la décision rendue entre les parties le 11 octobre 2021 par la High Court de Londres ainsi qu’une traduction en français de celle-ci.

Par conclusions du 23 décembre 2021, la défenderesse a sollicité le rejet de la demande de révocation de l’ordonnance de clôture et subsidiairement l’autorisation de communiquer en cours de délibéré le courrier adressé par son conseil à celui de la demanderesse le 30 septembre 2021 et l’arrêt de la cour d’appel de Bruxelles du 25 octobre 2021.

A l’audience, le tribunal, après en avoir délibéré, a considéré que le motif avancé pour solliciter la révocation de l’ordonnance de clôture ne constituait pas une cause grave au sens de l’article 803 du code de procédure civile. La demande de réouverture des débats a en conséquence été rejetée.

L’affaire a donc été plaidée à l’audience du 13 janvier 2022.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait référence aux écritures précitées des parties, pour l’exposé de leurs prétentions respectives et les moyens qui y ont été développés.

MOTIFS

1- Sur la demande en nullité de la marque ESSENTIEL

La société F.O.G demande à titre liminaire que son action soit déclarée recevable et sur le fond, fait valoir que le mot « essentiel » correspond à un incontournable, un indispensable, un basique, qui sera appréhendé comme tel par le grand public francophone et peut être utilisé comme un adjectif qualificatif pour désigner la qualité des produits concernés ou comme un adjectif substantivé, c’est-à-dire comme un nom commun pour désigner les produits visés eux-mêmes et leur espèce. Elle soutient également que ce signe est donc doté d’un caractère laudatif indéniable, en raison de sa signification générique assimilée à une simple formule promotionnelle, déclinable pour tous produits et services, ce qui le rend inapte à remplir le rôle d’indicateur d’origine inhérent et indispensable à une marque.

A titre subsidiaire, la société F.O.G fait valoir que la marque ESSENTIEL est nulle en ce qu’elle désigne sans ambiguïté une caractéristique des produits couverts en l’occurrence leur qualité, mais aussi, selon les cas, leur espèce. Elle expose en effet que le caractère « essentiel » d’un vêtement est inhérent à sa nature et qu’il s’agit bien d’une caractéristique intrinsèque et permanente d’un vêtement ou/et des chaussures que d’être « essentiels ». Elle ajoute que dans ces conditions, les produits visés seront appréhendés par le public pertinent soit comme les éléments essentiels d’une garde-robe soit comme des essentiels à détenir dans sa garde-robe.

En réponse à la défenderesse, elle soutient que l’acquisition du caractère distinctif par l’usage ne s’applique pas à l’inaptitude intrinsèque de la marque litigieuse à distinguer les produits désignés, cette cause de nullité prévue à l’article L. 711-1 du code de la propriété intellectuelle étant autonome de l’exigence de caractère distinctif du signe déposé. Elle ajoute qu’en tout état de cause, l’acquisition du caractère distinctif par l’usage s’apprécie au jour du dépôt de la marque et qu’aucune pièce antérieure à cette date n’est produite par la société [N].

Cette dernière réplique que le terme « ESSENTIEL » étant l’unique terme composant sa marque, rien ne permet d’affirmer qu’il serait utilisé comme adjectif, ce alors qu’il est peu usuel en français d’utiliser un adjectif qualificatif seul et indépendamment du nom qu’il est censé qualifier. Elle considère dans ces conditions que le signe ne pourra être perçu comme une référence à la qualité des produits et services en cause et ajoute qu’une telle appréciation relève de la subjectivité. Elle soutient par ailleurs qu’aucune des pièces versées aux débats par la demanderesse ne démontre que le terme « essentiel », utilisé isolément et non en tant qu’adjectif ou substantif, était usuel dans le langage courant ou professionnel, à la date du dépôt de la marque homonyme et constituait exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle des produits qu’elle désigne. Elle fait enfin valoir qu’à supposer que sa marque ne soit pas jugée intrinsèquement distinctive, elle l’est devenue par l’usage, lequel doit s’apprécier au jour où le tribunal statue.

Sur ce,

L’article L. 711-1 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle dispose dans sa rédaction applicable au litige, que « La marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale ».

L’article L. 711-2 du même code ajoute que le caractère distinctif d’un signe de nature à constituer une marque s’apprécie à l’égard des produits ou services désignés.
Selon ce texte « sont dépourvus de caractère distinctif :
a) Les signes ou dénominations qui, dans le langage courant ou professionnel, sont exclusivement la désignation nécessaire, générique ou usuelle du produit ou du service ;
b) Les signes ou dénominations pouvant servir à désigner une caractéristique du produit ou du service, et notamment l’espèce, la qualité, la quantité, la destination, la valeur, la provenance géographique, l’époque de la production du bien ou de la prestation de service ;
c) Les signes constitués exclusivement par la forme imposée par la nature ou la fonction du produit, ou conférant à ce dernier sa valeur substantielle.
Le caractère distinctif peut, sauf dans le cas prévu au c, être acquis par l’usage ».

Enfin, l’article L. 714-3 du même code dispose qu’ « Est déclaré nul par décision de justice l’enregistrement d’une marque qui n’est pas conforme aux dispositions des articles L. 711-1 à L. 711-4. (…) ».

L’exigence de distinctivité du signe se justifie par la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit ou du service qu’elle désigne, en lui permettant de le distinguer sans confusion possible de ceux ayant une autre provenance. La perception du signe comme indicateur d’origine doit être immédiate et certaine. Les critères d’appréciation du caractère distinctif d’une marque, outre les produits et/ou services visés à son dépôt, sont notamment le territoire qu’elle concerne et la perception du public pertinent.

Cette règle a pour objectif d’éviter que tout opérateur susceptible de proposer dans l’avenir des produits ou des services concurrents de ceux pour lesquels l’enregistrement est demandé, soit privé en raison d’un monopole acquis, de la faculté d’utiliser librement les signes ou indications pouvant servir à décrire leurs caractéristiques.

La distinctivité du signe s’apprécie au terme d’un examen global de tous les éléments le composant, à la date du dépôt et selon la loi en vigueur à cette date, et pour chaque produit visé dans l’enregistrement indépendamment de l’activité effectivement exercée par le titulaire de la marque.

En l’espèce, il sera à titre liminaire relevé que la recevabilité de la demande en nullité n’est pas contestée.

La marque dont la nullité est poursuivie est composée du seul terme « essentiel » et a été déposée en classes 18 et 25 pour désigner des sacs à main, des vêtements et des chaussures.

Selon les définitions usuelles qu’en donnent les dictionnaires de la langue française, le terme « essentiel » est défini soit comme un adjectif pour qualifier un sujet « qui est indispensable », « nécessaire » ou à tout le moins « d’une grande importance », soit comme un substantif pour désigner « ce qu’il y a de plus important » (Pièces DEM 11 à 13).

Ce terme « essentiel » , s’il peut être utilisé pour qualifier un des produits visés à l’enregistrement de la marque (des sacs à main, des vêtements et des chaussures) et ainsi exprimer son caractère nécessaire dans toute garde-robe, ne correspond pas pour autant à la terminologie employée habituellement par le public pertinent – qui doit ici être défini comme un consommateur d’articles de prêt-à-porter d’attention moyenne – pour désigner, à l’époque du dépôt de la marque, les produits litigieux eux-mêmes ou une de leurs caractéristiques essentielles.

Or, un terme est considéré comme descriptif lorsqu’il permet au public concerné d’établir un rapport immédiat et concret avec les produits et services visés à l’enregistrement et de percevoir ainsi, sans autre réflexion, une description de leurs caractéristiques objectives ou prétendues.

Dans ces conditions, la marque « essentiel », qui permet au public concerné d’identifier la provenance des produits sur lesquels elle est apposée, doit donc être jugée conforme aux dispositions de l’article L. 711-1 précité.

Par ailleurs si, comme le relève justement la société F.O.G, le terme « essentiel » peut être appréhendé dans le monde du prêt-à-porter comme un « basique » c’est-à-dire comme une pièce ou un accessoire que chacun se doit de détenir, il n’en demeure pas moins que cette analyse ne fait que traduire une évolution du marché vers une offre de produits « intemporels » dans laquelle s’est certes inscrite la société [N], mais qui ne permet pas de juger qu’à la date de l’enregistrement, le public pertinent et donc les consommateurs, étaient immédiatement et spontanément conduits à percevoir le signe « ESSENTIEL » comme désignant une caractéristique du produit et non comme indiquant son origine. Il sera à cet égard relevé que ce terme est suffisamment général pour pouvoir être associé à n’importe quel service ou produit et donc non exclusivement à ceux qui sont visés à l’enregistrement de la marque et qu’il ne présente donc pas un caractère univoque.

Et les pièces versées aux débats par la société F.O.G (pièce DEM no18) ne remettent pas en cause ces observations, dans la mesure où elles n’établissent pas que le signe « Essentiel » désignait au jour du dépôt de la marque, en 2002, auprès du public pertinent, des chaussures, vêtements, sacs à mains ou une de leurs caractéristiques essentielles. En effet, lorsque le terme « Essentiel » est utilisé, il désigne des pièces « indispensables » dans une garde-robe et ne vise donc pas nécessairement les produits eux-mêmes en tant que tels mais une certaine tendance, qui par essence est évolutive et est susceptible d’intégrer des produits variés. Le signe renvoie donc, dans les pièces versées, à un élément non pas corporel mais plutôt conceptuel et il sera à cet égard relevé que les exemples ainsi communiqués ne pourraient en aucun cas fonder une action en contrefaçon de marque.

Ainsi l’article intitulé « les essentiels de l’automne » paru chez Le Nouvelliste le 26 juillet 2000 a pour objectif de décrire aux lecteurs les tendances de la mode de la saison à venir et ne se cantonne donc pas à désigner des vêtements et accessoires mais au contraire indique que « La base de (vos) vêtements est classique, aussi bien dans les coupes que dans les couleurs, mais elle est agrémentée de teintes gaies grâce à des vestes avec ou sans manches, des châles, des pashminas (superbes châles rectangulaires en cachemire, la folie de la nouvelle saison à ce qu’il paraît) et des accessoires comme chapeaux et gants, bijoux et écharpes, sacs et chaussures, vernis à ongles et rouges à lèvres ».

Il en est de même de l’article paru dans le journal La presse, le 8 décembre 1999 intitulé « L’Essentiel est dans l’accessoire » qui expose « Le [P] Robert va devoir réviser ses classiques et se mettre au diapason d’une tendance lourde : à l’aube de l’an 2000, l’ « accessoire » n’est plus cet « élément associé à une toilette, mais n’en faisant pas partie ». Au contraire, chaussures, sacs, mais aussi gants, foulards et bijoux sont devenus les principaux paramètres. Et, souvent, le seul signe extérieur de style. »

Le même concept est repris dans l’article du Figaro paru le 11 octobre 2000 intitulé « Tendances l’essentiel et l’accessoire » ou dans celui de la revue Affaires intitulé « Mode automne hiver Les essentiels de la rentrée » et enfin dans les différents articles de la presse féminine (pièce DEM no29) qui renvoient tous aux tendances de la mode.

Ensuite, la société F.O.G produit plusieurs couvertures de magazines spécialisés intitulés « L’essentiel de la chaussure » et « L’essentiel de la maroquinerie » (pièce DEM no19), qui permettent seulement d’établir que le terme « essentiel » y est substantivé ce qui ne peut suffire à établir que le signe verbal « ESSENTIEL», désigne de manière spécifique, univoque et objective une caractéristique essentielle des produits en cause, ni du reste qu’il en serait fait un usage à titre de marque.

Ces observations conduisent à considérer que la marque invoquée, si elle est aujourd’hui évocatrice des produits visés à son enregistrement, apparaît cependant suffisamment distinctive pour être jugée valide.

La demande de nullité pour défaut de distinctivité n’a donc pas lieu d’être accueillie de même que la demande indemnitaire présentée sur le même fondement.

2- Sur la demande subsidiaire aux fins de voir constater la déchéance de la marque

2.1- Sur la compétence du tribunal judiciaire de Paris

La société [N] soutient que l’acte introductif d’instance du 10 avril 2019 ne portant que sur la demande en nullité pour défaut de distinctivité et la demande en déchéance pour dégénérescence ayant été formée par conclusions signifiées le 31 août 2020, le droit transitoire impose que la compétence pour trancher ce dernier point soit régie par la loi nouvelle, à savoir l’article L. 716-5 du code de la propriété intellectuelle. Elle considère en conséquence que le tribunal judiciaire de Paris n’est compétent pour juger de la demande en déchéance, qu’à la condition que cette demande constitue une demande principale ou reconventionnelle et soit connexe à une demande relevant de la compétence du tribunal judiciaire et note qu’au cas d’espèce, la demande additionnelle en déchéance formée par la société F.O.G est une demande incidente non connexe avec la demande en nullité puisqu’elles n’ont pas le même objet et ne tendent pas aux mêmes fins. Elle précise que bien qu’elle se soit abstenue de former un incident, le tribunal garde la possibilité de relever d’office son incompétence, conformément aux dispositions de l’article 76 du code de procédure civile.

La société F.O.G réplique que cette exception doit être déclarée irrecevable pour ne pas avoir été soulevée devant le juge de la mise en état, avant toute défense au fond et relève par ailleurs qu’elle n’est pas reprise au dispositif des dernières conclusions de la défenderesse. Sur le fond, elle soutient que cette demande apparaît infondée dans la mesure où l’article 15 II de l’ordonnance du 13 novembre 2019 dispose que les juridictions qui, au 1er avril 2020, sont saisies d’un litige en application des articles L. 716-2 et L. 716-3 du code de la propriété intellectuelle, dans leur rédaction résultant de la présente ordonnance, restent compétentes pour en connaître.

Sur ce,

Selon l’article 768 du code de procédure civile, le tribunal ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des dernières conclusions des parties

En l’espèce, le dispositif des dernières conclusions de la société [N] n’intègre pas l’exception d’incompétence dont la société [N] se prévaut. Il s’ensuit que le tribunal n’en est pas régulièrement saisi.

2.2- Sur la recevabilité de la demande en déchéance

La société [N] soutient que la demande en déchéance, dont le caractère additionnel n’est pas justifié par la survenance d’un fait nouveau, ne présente pas de lien suffisant avec la demande initiale et doit donc être déclarée irrecevable.

La société F.O.G réplique que sa demande de déchéance vise non pas la sanction de l’inexploitation du signe «ESSENTIEL», mais la sanction de l’incapacité de son titulaire à en préserver le caractère distinctif dès lors que celui-ci, à supposer qu’il fût apte à constituer une marque, est devenu au fil du temps incapable de remplir la fonction essentielle d’une marque à savoir, distinguer les vêtements de ceux d’une autre origine, de sorte que l’objet de la demande additionnelle subsidiaire poursuit un but identique à celui de la demande principale en nullité pour défaut de distinctivité.

Sur ce,

L’article 70 alinéa 1er du code de procédure civile dispose que « Les demandes reconventionnelles ou additionnelles ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant ».

En l’espèce, la société F.O.G demande aux termes de son assignation, la nullité de la marque « ESSENTIEL » fondée sur le défaut de distinctivité du signe. Le fait qu’elle ait, dans ses dernières conclusions, présenté une demande de déchéance fondée sur la dégénérescence de la marque ne constitue pas un motif d’irrecevabilité dès lors qu’il ne s’agit pas d’une demande additionnelle sans lien avec la prétention initiale, mais qu’au contraire elle vise le même signe et poursuit le même objectif, à savoir priver la société [N] du signe « ESSENTIEL» pour la commercialisation de vêtements et accessoires.

L’irrecevabilité soulevée par la société [N] sera en conséquence écartée.

2.3- Sur le bien-fondé de la demande en déchéance

La société F.O.G fait valoir que s’il existe une pluralité d’acceptions du terme « essentiel » dans le secteur de la mode, elles renvoient toutes à la désignation d’un vêtement, de chaussures ou d’un accessoire et que la société [N] ne pouvant obtenir l’interdiction de faire usage de ce mot usuel dans la forme du singulier ou du pluriel pour désigner les produits des classes 25 et 18, elle a eu recours à une politique alternative consistant à s’approprier des marques de substitution telles que ESSENTIEL ANTWERP, afin de circonscrire la protection de son droit prétendu. Elle en déduit que la dégénérescence du signe « Essentiel » étant acquise, le tribunal doit en prononcer la déchéance.

La société [N] réplique en premier lieu qu’aucune des définitions opposées par la demanderesse ne mentionnant le terme « essentiel » comme désignant des sacs à mains, vêtements et/ou chaussures, elles ne sauraient être invoquées pour fonder une action en dégénérescence de la marque, ce d’autant qu’on ne peut pas donner une signification univoque à ce terme. Elle rappelle que le seul caractère évocateur de la marque n’est pas suffisant pour conclure qu’un terme serait devenu la désignation usuelle du produit et soutient qu’en tout état de cause, aucun des éléments produits ne démontre le caractère générique que ce terme aurait acquis dans l’esprit du public dans le commerce des sacs à mains, vêtements et chaussures et qu’à la supposer établie, une telle dégénérescence ne pourrait lui être imputée.

Sur ce,

L’article L. 714-6 du code de la propriété intellectuelle dispose qu'« encourt la déchéance de ses droits le titulaire d’une marque devenue de son fait :
a) La désignation usuelle dans le commerce du produit ou du service ;
(…) ».
La déchéance du fait de la dégénérescence du signe suppose que celui-ci soit devenu usuel ou générique à l’égard des produits et/ou services pour lesquels il est enregistré, autrement dit qu’il soit entré dans le langage courant pour les désigner, ce caractère usuel ne devant pas être confondu avec la notoriété de la marque.
Le signe doit être considéré comme devenu usuel s’il n’est plus perçu par le public concerné comme l’indication d’une origine commerciale.

Il appartient donc à la société F.O.G de démontrer que le terme « Essentiel » est utilisé par le public pertinent – qui pour rappel est ici défini comme des consommateurs de prêt-à-porter –, pour désigner des vêtements, chaussures et sacs à main et que la société [N] a laissé ce public employer sa marque de façon usuelle pour désigner ces différents produits.

L’argumentation de la société F.O.G consiste à soutenir que le terme « essentiel » dans le secteur de la mode renvoie nécessairement à la désignation d’un vêtement, de chaussures ou d’un accessoire. Elle s’appuie pour ce faire sur des titres d’articles de nombreux magazines et sites internet datés de 2003 à 2020 (Pièces DEM no36-1 à 37-38, 38-1 à 38-69, 39-1 à 39-14) or, outre le fait que ces pièces n’établissent pas l’utilisation usuelle du signe par le consommateur mais par la presse – essentiellement féminine – ou des blogueuses, certaines d’entre elles démontrent qu’il n’est pas exclusivement utilisé pour désigner des vêtements, chaussures et sacs à main mais également des produits de beauté (Les essentiels de la beauté : Pièce no 37-40), l’équipement du motard (Un essentiel de l’hiver : Pièce no37-39), « la valise de l’été » qui inclut chapeaux et lunettes (pièce no37-41), des sacs à dos (pièce 38-29 et 38-59) ou de plage (pièce 38-40).

Le signe n’est pas non plus utilisé de façon strictement identique à la marque puisqu’il est utilisé quasi-systématiquement au pluriel et systématiquement précédé d’un article défini et/ou d’un adjectif et généralement suivi d’un complément d’objet indirect, par exemple :
- Les essentiels du printemps
- Les essentiels de l’été (de l’automne ou de l’hiver)
- Les nouveaux essentiels
- Les 10 essentiels
- Essentiels mode
- Les essentiels d'[E] [P]
- La collection d’essentiels chics
- Nos essentiels de la saison
- Les essentiels qui font l’allure (ou donnent le ton)
- Une collection de luxueux essentiels
- Les essentiels du style
- 10 essentiels de la parisienne
(…)

En tout état de cause, comme jugé dans le cadre de la demande en nullité de la marque, le terme « essentiel » dans ces articles de presse, renvoie à une tendance plutôt qu’aux produits eux-mêmes.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, la demande tendant à voir constater la déchéance des droits de la société [N] sur la marque « ESSENTIEL » pour désigner en classe 18 des sacs à main et en classe 25 des vêtements et chaussure, doit être rejetée.

3- Sur la demande de dommages et intérêts pour procédure abusive

La société [N] fait valoir que l’introduction d’une action qui s’étoffe au fur et à mesure de l’avancée de la procédure, de nouvelles demandes au principal et subsidiaires et de nouveaux fondements juridiques, souvent invoqués de manière contradictoire, traduit un acharnement de la société F.O.G à vouloir poursuivre et obtenir la nullité de la marque ESSENTIEL au mépris des lois et de la jurisprudence constante. Elle considère que cette attitude qui caractérise un abus du droit d’ester en justice lui est gravement préjudiciable et doit être sanctionnée par des dommages et intérêts pour procédure abusive à hauteur de 30.000 euros.

La société F.O.G réplique être légitime à agir en annulation de la marque litigieuse et ne commettre aucun abus compte tenu du comportement de la société [N] qui prétend, au travers de ses actions judiciaires, lui interdire l’usage du terme « ESSENTIALS » pourtant utilisé par tous les concurrents du secteur du prêt-à-porter.

Sur ce,

En application de l’article 1240 du code civil, la responsabilité du demandeur peut être engagée en raison d’une faute faisant dégénérer en abus, le droit d’agir en justice.

Tel n’est pas le cas en l’espèce dans la mesure où il ne peut sérieusement être reproché à la demanderesse d’avoir abusé de son droit d’ester en justice au seul motif qu’elle a développé de nouveaux arguments en cours de procédure ou qu’elle a considéré que le signe « Essentiel » ne pouvait constituer une marque valable.

4- Demandes relatives aux frais du litige et aux conditions d’exécution de la décision:

La société F.O.G, partie perdante, supportera la charge des dépens et sera condamnée à verser à la société [N], qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 10 000 euros.

Compte tenu de la solution du litige il n’y a pas lieu d’assortir la présente décision de l’exécution provisoire.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant publiquement par jugement mis à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,

DIT n’y avoir lieu de prononcer la nullité de la marque verbale internationale ESSENTIEL no 780041, désignant notamment la France, déposée le 4 mars 2002 en classes 18 et 25 pour désigner des sacs à main, des vêtements et des chaussures,

DÉBOUTE la société FEAR OF GOD de ses demandes indemnitaires et de publication présentées au titre de nullité de la marque ESSENTIEL no 780041,

DÉCLARE la société FEAR OF GOD recevable en sa demande en déchéance pour dégénérescence de la marque ESSENTIEL no 780041,

DÉBOUTE la société FEAR OF GOD de sa demande en déchéance pour dégénérescence de la marque ESSENTIEL no 780041,

DÉBOUTE la société [N] de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive,

CONDAMNE la société FEAR OF GOD à verser à la société [N] une somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société FEAR OF GOD aux dépens,

DIT n’y avoir lieu d’ordonner l’exécution provisoire.

Fait et jugé à Paris le 18 Février 2022

Le GreffierLe Président

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Tribunal de grande instance de Paris, 18 février 2022, 19/04388