Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 15 avril 2021, n° 19/01874

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Aix-en-Provence, ch. 1-9, 15 avr. 2021, n° 19/01874
Juridiction : Cour d'appel d'Aix-en-Provence
Numéro(s) : 19/01874
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Grasse, 19 décembre 2018, N° 17/00158
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-9

ARRÊT AU FOND

DU 15 AVRIL 2021

N°2021/354

Rôle N° RG 19/01874 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDXAF

X, Y, A Z

C/

Société F G A/S

SA MONTE PASCHI BANQUE

Société TRÉSOR PUBLIC […]

Société DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES – SIP CANNES

Société TRÉSOR PUBLIC DE MOUGINS

Copie exécutoire délivrée le :

à :

Me ERMENEUX

Me ESSNER

Me SIMON-THIBAUD

Décision déférée à la Cour :

Jugement du Tribunal de Grande Instance de GRASSE en date du 20 Décembre 2018 enregistré au répertoire général sous le n° 17/00158.

APPELANT

Monsieur X, Y, A Z

né le […] à […], demeurant […]

représenté par Me Agnès ERMENEUX de la SCP ERMENEUX-ARNAUD- CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, substitué par Me Marie BOUIRAT, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Michel LOPRESTI, avocat au barreau de GRASSE, plaidant

INTIMEES

Société F G A/S société de droit danois, au capital de 720 000 000 DKK immatriculée au registre du commerce danois sous le n° 17616 et à l’époque F G LONDON sont succursales, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités au siège social sis […]

représentée par Me Renaud ESSNER de la SELARL CABINET ESSNER, avocat au barreau de GRASSE, assistée de Me Aurélie BOULBIN de l’AARPI NGO JUNG & PARTNERS, avocat au barreau de PARIS, plaidant

SA MONTE PASCHI BANQUE prise en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité audit siège

demeurant […]

représentée par Me Roselyne SIMON-THIBAUD de la SCP BADIE SIMON-THIBAUD JUSTON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assisté de Me Jean-François TOGNACCIOLI, avocat au barreau de NICE

Le TRÉSOR PUBLIC […] pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié es qualité en ses Bureaux sis, demeurant […]

assigné à jour fixe le 14.02.19 à personne habilitée

défaillante

La DIRECTION DÉPARTEMENTALE DES FINANCES PUBLIQUES – […], représenté par son Directeur Départemental en exercice, domicilié es qualité en ses Bureaux sis, demeurant […]

assignée à jour fixe le 14.02.19 à personne habilitée

défaillante

Le TRÉSOR PUBLIC DE MOUGINS pris en la personne de son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité en ses Bureaux sis, demeurant […]

assigné à jour fixe le 21.02.19 à personne habilitée

défaillante

-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Février 2021 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sylvaine ARFINENGO, Président, et Madame Pascale POCHIC, Conseiller.

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président, a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Sylvaine ARFINENGO, Président

Madame Pascale POCHIC, Conseiller

Monsieur B C, Magistrat honoraire

Greffier lors des débats : Madame Ingrid LAVIGNAC.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2021.

ARRÊT

Réputé contradictoire,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 15 Avril 2021.

Signé par Madame Sylvaine ARFINENGO, Président et Madame Ingrid LAVIGNAC, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

La société F G A/S poursuit à l’encontre de M. X Z suivant commandement de Me ERCOLI, Huissier de Justice associé à Saint Laurent du Var, en date du 21 avril 2017, publié le 29 mai 2017, la vente de biens et droits immobiliers consistant en une villa sise […] à Mougins (06), […] pour une contenance de 23 a 91 ca, une parcelle à usage de court de tennis cadastrée section BA n° 008 pour une contenance de 07 a 23 ca et une parcelle cadastrée section […] pour une contenance de 05 a24 ca, […] à Mougins (06), pour paiement de la somme de 3 266 970,96 € en vertu de la copie exécutoire d’un acte reçu le 31 juillet 2008 par Me Roger D E, notaire associé à Vallauris.

Par jugement d’orientation du 20 décembre 2018 dont appel du 31 janvier 2019, le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Grasse a :

— Débouté Monsieur X Z de sa fin de non-recevoir tirée de la prescription de la créance,

— Dit et jugé prescrite l’action en nullité du prêt invoquée pour référence à une ou plusieurs monnaies étrangères utilisées comme monnaie de paiement et l’action en nullité du prêt fondée sur l’existence d’une condition potestative concernant le taux d’intérêt variable et en a débouté Monsieur X Z,

— Débouté Monsieur X Z de ses autres moyens de contestation,

— Dit que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 du Code des procédures civiles d’exécution sont réunies et que le créancier poursuivant a satisfait au respect des dispositions du Code des procédures civiles d’exécution,

— Dit que la société de droit danois dénommée F G A/S poursuit la saisie immobilière au préjudice de Monsieur X Z pour une créance liquide et exigible, d’un montant de 3.266.970,96 € en principal, frais, intérêts et autres accessoires arrêté au 20 mars 2017 sans préjudice des intérêts postérieurs jusqu’à la distribution du prix de vente à intervenir et au plus tard à la date prévue par l’article R. 334-3 du Code des procédures civiles d’exécution,

— Ordonné la vente forcée des biens et droits immobiliers saisis selon les modalités du cahier des conditions de vente, en autorisant une publicité aménagée.

Le juge de l’exécution énonce en ses motifs que :

— sur la fin de non-recevoir tirée de la prescription, les intérêts de la période du 23 janvier au 24 avril 2015 étant exigible au terme de ladite période, soit le 24 avril 2015, il ne saurait y avoir prescription en ce que le commandement de payer a été délivré le 21 avril 2017 et il en est de même quant au capital exigible, la déchéance du terme étant intervenu le 13 janvier 2017,

— sur la nullité du prêt pour référence à une ou plusieurs monnaies étrangères utilisées comme monnaie de paiement, il ne saurait être contesté que les termes du contrat de prêt sont connus de l’emprunteur le jour de la signature dudit contrat, que le délai de l’action nullité en résultant a commencé à courir le 31 juillet 2008 et s’est donc achevé le 31 juillet 2013, de sorte que l’action nullité ayant été introduite par conclusions du 7 septembre 2017, il y a lieu d’en constater la prescription,

— le moyen tiré de la condition potestative concernant le taux d’intérêt variable invoqué par la partie saisie est prescrit pour les mêmes raisons,

— sur les contestations relatives au taux effectif global, outre le fait que la partie saisie procède par simple affirmation, il est constant que les frais relatifs à l’assurance incendie résultent d’une obligation de l’emprunteur de constituer une garantie suffisante à l’égard du prêteur et qu’ils ne participent des frais d’octroi du prêt, de sorte que celui-ci n’est pas subordonné à la souscription d’une telle assurance,

— sur le moyen tiré de ce que toute dépréciation de l’euro par rapport au franc suisse ou à la livre sterling a pour conséquence d’augmenter le montant du capital restant dû et rend donc la clause de choix de monnaie de compte abusive, le contrat de prêt critiqué est rédigé de manière tout à fait claire et compréhensible pour un emprunteur normalement averti et celui-ci est libre de choisir puis de modifier la monnaie de compte du prêt à tout moment et de façon discrétionnaire, écartant ainsi le risque d’un déséquilibre significatif, de sorte que les conditions de remboursement du prêt ne revêtent pas un caractère accessoire mais définissent l’essence même du rapport contractuel et la clause de monnaie de compte est dès lors insusceptible d’entrer dans le champ d’application des règles régissant l’élimination des clauses abusives que pour autant qu’elle ne soit pas rédigée de manière claire et compréhensible, or M. Z a été clairement et objectivement informé, par l’offre de prêt et ses annexes, des caractéristiques du contrat et de l’impact des évolutions du taux de change sur la durée d’amortissement et sur le coût du crédit,

— sur le manquement de la banque à son obligation d’information et de mise en garde invoqué par la partie civile, l’emprunteur ne pouvait ignorer, comme tout investisseur normalement avisé, qu’un placement effectué dans une monnaie étrangère était nécessairement soumis aux fluctuations des taux de change et à la date de la souscription, les éléments du patrimoine et des actifs professionnels de M. Z, qui est un professionnel de l’immobilier et qui ne saurait donc sérieusement invoquer être un emprunteur non averti, étaient suffisants pour couvrir le montant du prêt.

Par ordonnance en date du 6 février 2019, M. X Z a été autorisé à assigner à jour fixe et l’assignation délivrée à cette fin par exploits des 14, 15, 19, 21 février et 2 mai 2019 a été remise au greffe le 28 février 2019.

Vu les dernières conclusions déposées le 1er juillet 2019 par M. X Z, appelant, aux fins de voir :

— Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et statuant à nouveau,

— Dire et juger nul et de nul effet le commandement de payer valant saisie du 21 avril 2017 et

la procédure de saisie immobilière subséquente.

— Ordonner la radiation du commandement de payer valant saisie délivré le 21 avril 2017 publié le 29 mai 2017, volume 2017S n°48, ainsi que toute inscription d’hypothèque prise du chef de la Société de droit danois F G A/S au préjudice de Monsieur X Z sur les biens et droits immobiliers cadastrés section BA n°9, […], pour 23 ares et […], sis sur le territoire de la commune de […], […].

A titre principal,

— Faire notamment application des articles 122 du Code de Procédure Civile et L218-2 du Code de la Consommation et dire et juger la Société F G A/S irrecevable en sa procédure pour prescription.

En conséquence,

— Dire et juger nul et de nul effet le commandement de payer valant saisie du 21 avril 2017 et la procédure de saisie immobilière subséquente.

— Ordonner la radiation du commandement de payer valant saisie délivré le 21 avril 2017 ainsi que toute inscription d’hypothèque prise du chef de la Société de droit danois F G A/S au préjudice de Monsieur X Z sur les biens et droits immobiliers cadastrés section BA n°9, […], pour 23 ares et […], sis sur le territoire de la commune de […], […].

A titre subsidiaire,

— Dire et juger que la Société F G A/S ne satisfait pas aux exigences de l’article L3ll-2 du code des procédures civiles d’exécution et qu’el1e ne justifie ni d’un titre exécutoire valable, ni en toute hypothèse d’un titre exécutoire susceptible de constater une créance liquide et exigible et susceptible de lui permettre de procéder à une saisie immobilière.

— Dire et juger nul l’acte de prêt reçu par Maître D E Notaire associé en date à Golfe Juan du 31 juillet 2008, ledit acte de prêt ayant été consenti par référence à une ou plusieurs monnaies étrangères utilisées non seulement comme monnaie de compte, mais également comme instrument de paiement, alors que des stipulations permettant à un prêteur de prétendre au paiement en monnaie étrangère, sont prohibées et sanctionnées par une nullité d’ordre public.

— Faire notamment application des dispositions des articles 1134 et 1174 anciens du Code Civil (articles 1103, 1104 et 1304-2 du Code Civil) et dire et juger nulles et de nul effet les clauses relatives à la stipulation du taux d’intérêts, la variation du taux d’intérêts telle que stipulée dans l’acte de prêt litigieux n’intervenant pas selon des données objectives et externes à la banque ayant octroyé le crédit de telle sorte que la clause est donc affectée d’une condition purement potestative.

— Faire notamment application des dispositions de l’article L 212-1 du Code de la Consommation et dire et juger abusives et en conséquence inopposables et nulles et de nul effet les clauses stipulées dans le contrat de prêt litigieux ayant pour objet ou pour effet de créer au détriment de Monsieur X Z un déséquilibre significatif entre les droits et

obligations des parties au contrat, soit en l’occurrence la mise à la charge exclusive de l’emprunteur du risque de change, les stipulations énoncées à l’article 11 page 6 de l’acte de prêt créant et produisant un déséquilibre significatif au préjudice du seul emprunteur.

— Dire et juger en conséquence que la Société F G A/S ne justifie pas d’un titre exécutoire

valable ni en toute hypothèse d’un titre exécutoire susceptible de constater une créance liquide et exigible, alors en outre que l’acte de prêt litigieux ne respecte pas les exigences de la stipulation d’un taux d’intérêts et les règles relatives à la mention du taux effectif global et ce, en infraction notamment avec les articles 1907 du Code Civil, L314-1 et

suivants et R3l4-1 et suivants du Code de la consommation et qu’en conséquence, à supposer

valable le prêt litigieux, seul un intérêt au taux légal peut être appliqué.

— Dire et juger en conséquence qu’au regard des sommes payées par l’emprunteur, une nécessaire reconstitution des opérations doit intervenir, les paiements qui ont pu être déjà opérés s’imputant différemment dès lors que le taux d’intérêts de référence ne pourra être que

le taux légal.

En conséquence,

— Dire et juger nul et de nul effet le commandement de payer valant saisie du 21 avril 2017 et

la procédure de saisie immobilière subséquente.

— Ordonner la radiation du commandement de payer valant saisie délivré le 21 avril 2017 publié au Service de la Publicité Foncière d’Antibes 1er Bureau le 29 mai 2017, volume 2017S n°48, ainsi que toute inscription d’hypothèque prise du chef de la Société de droit danois F G A/S au préjudice de Monsieur X Z sur les biens et droits immobiliers cadastrés section BA n°9, […], pour 23 ares et […], sis sur le territoire de la commune de […], […].

A titre très subsidiaire,

— Faire notamment application des dispositions de l’article 1147 ancien du Code Civil (article

1231-1 du Code Civil) et dire et juger que la Société F G A/S a failli à la bonne et loyale exécution de son obligation d’information et de mise en garde au regard non seulement des charges du prêt, mais aussi des capacités financières et du risque de l’endettement né de l’octroi du prêt litigieux.

— Condamner en conséquence la Société F G A/S à payer à titre de dommages et intérêts à Monsieur X Z en réparation de son préjudice une somme équivalente à

l’accroissement du capital, soit en l’occurrence a minima une somme à parfaite de 1.200.000€ outre intérêts de droit.

— Dire et juger que la créance dont peut se prévaloir le cas échéant la Société F G A/S à l’égard de Monsieur X Z ne peut être au maximum que d’un montant de 1.900.000 € et ce, toutefois sous les plus expresses réserves de tous paiements dores et déjà reçus, lesquels doivent venir en diminution du montant du prêt en principal.

En toute hypothèse,

— Débouter la Société F G A/S de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

— Condamner la Société F G A/S à payer à Monsieur X Z la somme de 6.000 € au titre de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

— Condamner la Société F G A/S aux entiers dépens, en ce compris les coûts et frais de mainlevée et radiation du commandement de payer valant saisie délivré le 21 avril 2017 et de toutes inscriptions d’hypothèques qu’a pu inscrire la Société F G A/S au préjudice de Monsieur X Z sur les biens et droits immobiliers objets des poursuites aux fins de saisie immobilière, ceux d’appel distraits au profit de Maître Agnès ERMENEUX, avocat, membre de la SCP d’Avocats ERMENEUX-ARNAUD-CAUCHI & associés, aux offres de droit.

Vu les dernières conclusions déposées le 15 janvier 2021 par la société de droit danois F G A/S, intimée, aux fins de voir dire et juger irrecevables les contestations formulées par M. Z postérieurement à l’audience d’orientation, le dire mal fondé en son appel et confirmer le jugement du 20 décembre 2018, outre condamnation de M. Z au paiement d’une somme de 20 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, aux motifs :

— que les contestations portant sur le caractère international du prêt, la substitution d’une demande tendant à voir réputée non écrite l’article 4 du contrat de prêt à sa demande de nullité, l’absence de mention du TEG sur les lettres de roll-over et la faculté pour l’emprunteur de procéder à un changement de monnaie de compte à chaque roll-over du prêt sont irrecevables pour avoir été soulevées postérieurement à l’audience orientation,

— que le délai de prescription quinquennale de l’action en nullité du contrat de prêt a commencé à courir à compter de la signature du contrat qui fait clairement apparaître le caractère multidevise du prêt, de sorte que la demande en nullité du contrat formulée plus de neuf ans après sa signature est nécessairement prescrite,

— que si la Cour considère la demande de M. Z recevable, l’objet d’un prêt multidevise est précisément d’offrir à l’emprunteur la faculté de choisir sa monnaie de compte au moment du tirage du prêt puis de la modifier au cours de l’exécution du prêt, de sorte que la clause de choix de monnaie de compte est parfaitement valable, M. Z ayant en outre remboursé les échéances trimestrielles du prêt en euro et ne démontrant pas avoir dû procéder à des opérations de change pour rembourser son prêt,

— que M. Z, qui tente de faire échec à la prescription en soutenant qu’il n’a pu se rendre compte du caractère contestable du taux d’intérêt à l’occasion des poursuites, avait nécessairement conscience lors de la signature du contrat que le taux d’intérêt du prêt est composé du taux de base bancaire de F G, de sorte que la date de révélation de l’erreur se confond avec la date de signature du contrat,

— que la jurisprudence considère qu’un taux d’intérêt variable en fonction du taux de base bancaire est parfaitement valable,

— que pour contester la validité du TEG, M. Z se contente d’indiquer qu’il ne prendrait pas en compte la délégation de l’assurance incendie, or comme l’a jugé la Cour de Cassation, les frais relatifs à l’assurance incendie résultent de l’obligation pour l’emprunteur de constituer une garantie suffisante à l’égard du prêteur et ne participe pas des frais d’octroi du prêt,

— que s’agissant de la demande tendant à faire constater l’existence d’une clause abusive dans le contrat de prêt, il est difficile de déterminer si M. Z demande à la cour de déclarer abusive la clause de choix de monnaie de compte stipulée à l’article 2 ou la clause de l’article 11 qui permet à la banque de convertir le prêt en livre sterling en cas de dépassement d’un certain seuil d’endettement mais pour la première, en raison notamment de l’option initiale dont dispose l’emprunteur de choisir la monnaie de compte du prêt et pour la seconde, compte tenu de ce que cette faculté ouverte à la banque n’est que la contrepartie des droits ouverts aux clients, aucune de ces clauses n’est abusive,

— que l’échéance d’intérêts du 23 janvier au 24 avril 2015 étant devenue exigible le 24 avril 2015 et la déchéance ayant été prononcée le 13 janvier 2017, la créance de la banque n’est pas prescrite,

— que la société F G A/S s’en rapporte à justice sur la possibilité pour la Cour de relever d’office la compétence du juge de l’exécution sur la demande en responsabilité formée par M. Z, la demande est en tout état de cause prescrite pour avoir été formulée plus de 5 ans après la souscription du prêt.

Vu les dernières conclusions déposées le 15 avril 2019 par la SA MONTE PASCHI BANQUE, intimée, aux fins de voir constater que l’appelant n’a formé aucune contestation ou demande à son encontre et condamner tout succombant au paiement d’une somme de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Le TRESOR PUBLIC […], auquel la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par exploit en date du 14 février 2019 délivré à personne se déclarant habilitée à recevoir l’acte, n’a pas comparu.

La Direction Départementale des Finances Publiques […], à laquelle la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par exploit en date du 14 février 2019 délivré à personne se déclarant habilitée à recevoir l’acte, n’a pas comparu.

Le TRESOR PUBLIC MOUGINS, auquel la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par exploit en date du 21 février 2019 délivré à personne se déclarant habilitée à recevoir l’acte n’a pas comparu.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu que M. Z conclut à la nullité du prêt du 31 juillet 2008, consenti en franc suisse et assorti de clauses sous ses articles 6 et 7 prévoyant respectivement la perception d’une commission de gestion et d’une indemnité de remboursement anticipé payables en livre sterling et d’une clause de variation des taux de change sous son article 11, au motif qu’il en résulte que le prêt a été consenti par référence à une ou plusieurs monnaies étrangères utilisées comme monnaie de compte mais également comme monnaie de paiement, or des stipulations permettant au prêteur de prétendre au paiement en monnaie étrangère sont prohibées et sont sanctionnées par une nullité d’ordre public ;

Mais attendu que s’agissant d’un contrat qui a reçu exécution puisque des échéances ont été réglées, l’action en nullité est soumise à la prescription quinquennale qui, s’agissant d’un prêt consenti à un particulier, court à compter du jour de la découverte du vice, or le vice allégué étant décelable à la simple lecture des clauses litigieuses, lesquelles font en effet expressément état d’un paiement en livre sterling pour les deux premières tandis que la troisième énonce en termes clairs et précis que la banque sera autorisée à prendre certaines mesures pour le cas où l’endettement viendrait à dépasser le montant de 1 672 000 livres sterling « en fonction de la variation des taux de change », de sorte que la prescription, qui a donc couru à compter de la date de l’acte de prêt, était acquise le 31 juillet 2013 ;

Que M. Z se prévaut d’un arrêt de la première chambre civile en date du 31 janvier 2018 pour soutenir qu’une défense au fond au sens de l’article 71 du code de procédure civile échappe à la prescription mais attendu qu’aux termes de cette décision, la Cour de Cassation a simplement dit que le moyen de fond que constitue l’argument selon lequel l’engagement de caution d’une personne physique manifestement disproportionné à ses biens et revenus se trouve privé d’effet à l’égard du créancier professionnel échappe à la prescription, de sorte que ne concernant pas l’action en nullité d’un contrat de prêt, la jurisprudence tirée de cet arrêt est inapplicable à l’espèce ;

Et attendu que le moyen tiré de ce que le prêt litigieux n’est pas constitutif d’un contrat international, est irrecevable par application de l’article R 311-5 du code des procédures civiles d’exécution, applicable tant aux demandes nouvelles qu’aux moyens nouveaux, faute en effet d’avoir été soulevé pour l’audience d’orientation ;

Que l’action en nullité du contrat de prêt introduite par conclusions du 7 septembre 2017 est en conséquence irrecevable car prescrite à cette date ;

Et attendu qu’est prescrite, pour les mêmes raisons, la demande tendant à voir prononcer la nullité du taux d’intérêt variable au motif qu’il crée une condition potestative, dans la mesure en effet où l’acte de prêt mentionnant expressément que le taux d’intérêt correspond à un prêt en euros et « au taux F G à la date de la présente offre » et que « il sera modifié en fonction du taux F G Funding applicable à la date du tirage du prêt », l’argument selon lequel M. Z n’a pu se rendre compte du caractère contestable de ces stipulations qu’à l’occasion des poursuites de saisie immobilière ne peut prospérer, la date de révélation du vice allégué se confondant nécessairement avec la date de signature du contrat;

Attendu qu’est par ailleurs irrecevable par application de l’article R 311-5 du code des procédures civiles d’exécution, le moyen fondé sur le caractère non écrit de la clause d’intérêt au motif qu’elle n’est pas rédigée de manière claire et compréhensible, faute en effet d’avoir été soulevé pour l’audience d’orientation ;

Attendu que M. Z invoque à titre subsidiaire le caractère erroné du TEG qu’il tire d’une part de la référence au taux F G pour l’intérêt conventionnel et d’autre part du fait que les frais relatifs à l’assurance incendie n’ont pas été pris en compte pour son calcul ;

Mais attendu qu’irrecevable à contester la validité de l’intérêt conventionnel, c’est sans en faire la démonstration que M. Z affirme, sans produire le moindre calcul au soutien de cette affirmation, que le TEG est erroné et s’agissant de l’assurance incendie, l’octroi du prêt n’était pas subordonné à la souscription d’une telle assurance dès lors que les frais relatifs à celle-ci, comme plus généralement à l’assurance habitation, résultent uniquement de l’obligation pour l’emprunteur de constituer une garantie suffisante à l’égard du prêteur ;

Et attendu que le moyen tiré de ce que F G n’a pas fait figurer le nouveau TEG sur les lettres Roll-Over adressées trimestriellement aux emprunteurs, est irrecevable par application de l’article R 311-5 du code des procédures civiles d’exécution, faute en effet d’avoir été soulevé pour l’audience d’orientation ;

Attendu qu’aux termes de ses dernières conclusions, M. Z demande que soient déclarées abusives, par application de l’article L 212-1 du Code de la Consommation, les stipulations énoncées à l’article 11 de l’acte de prêt, au motif que mettant à la charge exclusive de l’emprunteur le risque de change, elles créent et produisent un déséquilibre significatif au préjudice du seul emprunteur ;

Que toutefois, l’avantage qu’une clause peut créer au profit d’une partie n’a aucun caractère abusif au sens de l’article L 212-1 du Code de la Consommation qui dispose que sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat, si elle n’est que la contrepartie de l’avantage procuré à l’autre partie, or aux termes du prêt litigieux, l’emprunteur dispose de la liberté de choisir la monnaie de compte lui permettant de bénéficier du taux d’intérêt le plus avantageux et de la modifier sur ce critère en cours de contrat, ce qui n’est pas sans incidence, au risque du prêteur, sur la valeur de la sûreté immobilière exprimée dans une autre monnaie, la possibilité offerte au prêteur à l’article 11 du contrat étant par ailleurs conditionnée au dépassement d’un seuil élevé d’endettement, et comme l’a relevé à juste titre le premier juge, M. Z a bénéficié avec l’offre de prêt et ses annexes d’une information claire et objective sur les caractéristiques du contrat et de l’impact des évolutions du taux de change sur la durée d’amortissement et sur le coût du crédit, de sorte que la demande tendant à voir dire et juger abusives les stipulations de l’article 11 du contrat de prêt ne peut prospérer ;

Attendu que M. Z invoque la prescription biennale de la créance de la société F G ;

Qu’à l’égard d’une dette payable par termes successifs, la prescription se divise comme la dette elle-même et court à l’égard de chacune de ses fractions à compter de son échéance, de sorte que, si l’action en paiement des mensualités impayées se prescrit à compter de leurs dates d’échéance successives, l’action en paiement du capital restant dû se prescrit à compter de la déchéance du

terme, qui emporte son exigibilité ;

Que l’échéance du terme ayant été prononcée le 13 janvier 2017, la créance en capital n’était pas atteinte par la prescription le 21 avril 2017, date de signification du commandement de payer aux fins de saisie immobilière ;

Que pour les mensualités impayées objets du commandement, l’échéance se situant au terme de chaque période de roll-over, les mensualités venant à échéance au 24 avril 2015, à savoir celles correspondant à la période du 23 janvier au 24 avril 2015, étaient d’autant moins atteintes par la prescription à la date du commandement, que le règlement d’une somme de 29 675,66 € CHF effectué par M. Z au titre des échéances antérieures, acte interruptif de prescription au sens de l’article 2246 du Code civil en ce que ce paiement constitue une reconnaissance de la dette, a fait courir un nouveau délai de deux ans à compter du 3 juin 2015 ;

Que la fin de non recevoir tirée de la prescription de la créance ne peut ainsi prospérer ;

Attendu qu’à titre très très subsidiaire, M. Z sollicite la condamnation de la société F G au paiement d’une somme a minima de 1 200 000 € à titre de dommages et intérêts, au motif que cette dernière a failli à la bonne et loyale exécution de son obligation d’information et de mise en garde ;

Mais attendu que le juge de l’exécution, saisi de la contestation d’une mesure d’exécution, n’est pas compétent pour se prononcer sur une action en responsabilité qui n’est pas fondée sur l’exécution ou l’inexécution dommageable de cette mesure, de sorte que la demande de dommages et intérêts est irrecevable ;

Que le jugement dont appel doit être ainsi confirmé en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. Z de sa demande de dommages intérêts à l’encontre de la société F G pour manquement à son obligation d’information et de mise en garde.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant par arrêt réputé contradictoire, par mise à disposition au greffe

Vu l’article R 311-5 du code des procédures civiles d’exécution,

Déclare irrecevables le moyen tiré de ce que le prêt litigieux n’est pas constitutif d’un contrat international, le moyen fondé sur le caractère non écrit de la clause d’intérêt et le moyen tiré de ce que F G n’a pas fait figurer le nouveau TEG sur les lettres Roll-Over adressées trimestriellement aux emprunteurs ;

Confirme le jugement dont appel en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté M. Z de sa demande de dommages intérêts à l’encontre de la société F G pour manquement à son obligation d’information et de mise en garde,

Et statuant à nouveau sur le chef infirmé,

Déclare M. X Z irrecevable en sa demande de dommages intérêts à l’encontre de la société F G pour manquement à son obligation d’information et de mise en garde ;

Y ajoutant,

Vu l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute la SA MONTE PASCHI BANQUE de sa demande ;

Condamne M. X Z à payer à la société F G la somme de 2000 € (deux mille euros) ;

Déboute les parties de leurs demandes autres ou plus amples ;

Condamne M. X Z aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel d'Aix-en-Provence, Chambre 1-9, 15 avril 2021, n° 19/01874