Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 13 juillet 2021, n° 20/01685

  • Sociétés·
  • Registre du commerce·
  • Surveillance·
  • Code de commerce·
  • Apport·
  • Capital·
  • Modification·
  • Associé·
  • Ordonnance·
  • Statut

Chronologie de l’affaire

Commentaire1

Augmentez la visibilité de votre blog juridique : vos commentaires d’arrêts peuvent très simplement apparaitre sur toutes les décisions concernées. 
Testez Doctrine gratuitement
pendant 7 jours
Vous avez déjà un compte ?Connexion

Sur la décision

Référence :
CA Angers, ch. a - com., 13 juill. 2021, n° 20/01685
Juridiction : Cour d'appel d'Angers
Numéro(s) : 20/01685
Décision précédente : Tribunal de commerce de Quimper, 5 juillet 2012
Dispositif : Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

D’ANGERS

CHAMBRE A – COMMERCIALE

CC/IM

ARRET N°:

AFFAIRE N° RG 20/01685 – N° Portalis DBVP-V-B7E-EXO2

Ordonnance du 06 Juillet 2012 du Président du TC de QUIMPER

n° d’inscription au RG de première instance 12/05693

Arrêt du 19 Février 2019 de la Cour d’Appel de RENNES

Arrêt du 9 Septembre 2020 de la Cour de Cassation

ARRET DU 13 JUILLET 2021

APPELANTES :

S.A.S.U. D agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[…]

[…]

S.A.S.U. VECTORA Agissant en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège.

Route de Saint E Trolimon

[…]

Représentées par Me A LANGLOIS de la SCP ACR AVOCATS, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 71200313, et Me Alain GENITEAU, avocat plaidant au barreau de BREST

INTIMES :

MONSIEUR LE PROCUREUR GÉNÉRAL PRÈS LA COUR D’APPEL D’ANGERS

[…]

[…]

S.A. GROUPE FRANCAISE DE GASTRONOMIE agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège

[…]

[…]

Représentée par Me Sophie DUFOURGBURG, avocat postulant au barreau d’ANGERS – N° du dossier 21005, et Me E-Jacques LE PEN, avocat plaidant au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR

L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 25 Mai 2021 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme I, Présidente de chambre, qui a été préalablement entendue en son rapport, et Madame ROBVEILLE, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme I, Présidente de chambre

Mme ROBVEILLE, Conseiller

M. BENMIMOUNE, Conseiller

Greffier lors des débats : Mme G

ARRET : contradictoire

Prononcé publiquement le 13 juillet 2021 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Catherine I, Présidente de chambre, et par Sophie G, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

[…]

FAITS ET PROCÉDURE

La société D est spécialisée dans l’élaboration de plats cuisinés en conserve, qu’elle commercialise.

La SASU Vectora est sa société-mère et son associé unique.

Par acte du 14 décembre 2004, la société Vectora, d’une part, et les sociétés Groupe Française de Gastronomie (FDG) et UGMA, d’autre part, ont conclu un protocole d’accord prévoyant le rapprochement des sociétés D et FDG au moyen, d’abord, de l’augmentation du capital social de la société D réservée à la société UGMA par voie d’apport en nature de son fonds de commerce consistant spécialement en un fonds de fabrication et vente de conserves d’escargots et à la société FDG par voie d’apport en numéraire et, ensuite, par l’acquisition par la société FDG de 53 289 actions D à Vectora, de sorte qu’à l’issue de ces opérations, la société FDG détiendrait 38,24 % du capital de la société D et sa filiale, UGMA, en détiendrait 11,76 %, Vectora conservant 50 % de D.

L’apport en nature du fonds de commerce a été évalué à 800.000 euros.

Ce protocole prévoyait que la cession était consentie sous diverses conditions suspensives tenant, notamment à l’augmentation du capital réservé à la société UGMA et réalisée par apport de son fonds de commerce, interviendrait entre le 3 janvier 2005 et le 31 janvier 2005 et prévoyait, également, des

opérations concomitantes telles qu’un contrat d’agent commercial et un contrat d’approvisionnement.

Suivant procès-verbal de délibérations du 30 décembre 2004, la SASU Vectora a approuvé l’apport du fonds de commerce et son évaluation, ainsi que l’augmentation du capital de la SASU D de 586.667 euros pour le porter de 3.300.000 euros à 3.886.667 euros, par la création de 38.756 actions nouvelles, entièrement libérées, et attribuées à la société UGMA, agréée en qualité de nouvelle associé, en rémunération de son apport. Elle convenait de procéder à une refonte complète des statuts afin d’adopter la formule de société par actions simplifiée pluripersonnelle.

Le 20 septembre 2005, la SA FDG, associée unique de la société UGMA, a décidé, sur le fondement de l’article 1844-5 du code civil, la dissolution anticipée de cette dernière par confusion de patrimoine.

Invoquant une surestimation de la valeur de l’apport fait par la société UGMA apparu à travers un rapport obtenu le 20 juin 2007, la SASU Vectora a fait assigner la société D, la SA FDG et la société IEA ayant procédé à l’attribution d’une valeur audit apport en tant que commissaire aux apports, notamment, en annulation des délibérations de l’assemblée générale du 30 décembre 2004.

Par arrêt devenu irrévocable du 24 janvier 2012 après double cassation et double renvoi, la cour d’appel d’Angers a annulé les délibérations de la société Vectora du 30 décembre 2004 et a constaté la caducité du traité d’apport du 14 décembre 2004.

Par délibération du 24 mars 2012, la société Vectora, en qualité d’associé de la société D, prenant 'acte’ de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012, a décidé de constater que la société D n’a jamais cessé d’être une société par actions simplifiée unipersonnel au capital de 3 300 000 euros divisé en actions appartenant toutes à l’associée unique Vectora et que l’absence de transformation de la société D de SAS unipersonnelle en SAS pluripersonnelle atteint également l’augmentation de capital en numéraire souscrite par la société FDG ; en conséquence, a décidé de modifier les statuts afin de ré-adopter la forme de la SASU.

Le 3 avril 2012, à la demande de la 'SASU’ D, le greffier du tribunal de commerce de Quimper a procédé à la modification des mentions au registre du commerce et des sociétés de cette société en y mentionnant l’arrêt du 24 janvier 2012 et en précisant un ensemble de 'modifications suite à cet arrêt' :

'Transformation de la société : arrêt exécutoire de la cour d’appel d’Angers du 24/01/2012 annulant les délibérations prises le 30/12/2004 par la société Vectora, associée unique de la société D et constatant la caducité du contrat d’apport du fonds de la société UGMA en date du 14/12/2004. Modifications suite à cet arrêt : transformation de la société à compter du 30/12/2004. Ancienne forme : société par actions simplifiée (SASS) à associé unique Réduction de capital à compter du 30/12/2004 : partants : D Michel, président ; Z A, administrateur ; B C, administrateur et D E F, administrateur Nouveau : SA Vectora, président Suppression partielle d’activité de l’établissement principal situé […] à compter du 30/12/2004 Activité supprimée : fabrication, achat, échange, vente de toutes marchandises rentrant dans le commerce de l’alimentation et articles de consommation de toute nature, Fabrication et vente de conserves d’escargots. Date d’effet : 30/12/2004.

Complément d’information/forme juridique et capital : Associé unique.'

Saisi par la SA FDG d’une demande d’annulation de ces modifications en application des articles R. 123-87 et R. 123-100 du code de commerce, le greffier du tribunal de commerce de Quimper a refusé d’y faire droit en rappelant qu’il résultait des dispositions des articles R. 123-94 et suivants qu’un greffier n’est pas chargé de l’examen critique des pièces qui lui sont transmises lorsqu’une formalité est requise, mais seulement de la vérification de leur apparente validité.

Par requête du 20 juin 2012, parvenue au greffe le 21 juin 2012, le conseil de la SA FDG a sollicité du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des société de Quimper l’autorisation d’enjoindre au greffe de ce tribunal de procéder à l’annulation des modifications inscrites à l’extrait K-bis de la société D le 3 avril 2012 et de remettre les inscriptions en l’état antérieur à ces modifications prétendument irrégulières et inexactes ; qu’il soit jugé que les statuts déposés au greffe sont ceux qui étaient en vigueur avant cette inscription et résultant de l’assemblée générale du 31 janvier 2005.

Par ordonnance du 6 juillet 2012, au visa de l’article R. 123-84 alinéa 3 du code de commerce, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés a enjoint à son greffe de procéder à l’annulation des modifications inscrites à l’extrait K-bis de la SASU D le 3 avril 2012 et de remettre les inscriptions en l’état antérieur à ces modifications. Il a considéré que l’arrêt invoqué au soutien des modifications annulées devait simplement être porté en observations du même extrait K-bis dans les termes : 'Par arrêt du 24 janvier 2012, la cour d’appel d’Angers a annulé les délibérations de l’associé unique de la société D du 30 décembre 2004 et constaté la caducité du traité d’apport du 14 décembre 2004.' Il a enjoint à la société D de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique actuelle telle qu’elle résultait de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012.

Par acte d’huissier du 17 juillet 2012, la SASU D a fait assigner la SA FDG devant le juge des référés du tribunal de commerce de Quimper aux fins de rétractation de l’ordonnance du 6 juillet 2012.

Par ordonnance du 23 août 2012, le juge des référés a rétracté l’ordonnance rendue le 6 juillet 2012 et a invité la SA FDG à mieux se pourvoir.

Par arrêt du 25 juin 2013, la cour d’appel de Rennes a confirmé l’ordonnance du 23 août 2012.

Par arrêt du 25 novembre 2014, la Cour de cassation a cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 25 juin 2013, et renvoyé les parties devant la cour d’appel de Rennes, autrement composée.

La SASU D a fait l’objet d’une procédure de sauvegarde, la société EP & Associés, prise en la personne de M. X, désignée en qualité de mandataire judiciaire, et M. Y, en qualité d’administrateur judiciaire, sont intervenus à l’instance.

Par arrêt du 18 décembre 2015, la cour d’appel de Rennes, statuant comme cour de renvoi, a annulé l’ordonnance de référé du 23 août 2012 et déclaré irrecevable la demande de rétractation de l’ordonnance du 6 juillet 2012 formée par la SASU Vectora et M. Y ès qualités.

Par arrêt du 3 mai 2018, non spécialement motivé, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par la SASU Vectora à l’encontre de ce dernier arrêt.

Parallèlement, par déclaration du 18 décembre 2015 adressée au greffe du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés par lettre recommandée avec avis de réception arrivée le 21 décembre 2015, les sociétés D et Vectora, se prévalant de ce que le délai d’appel n’avait pas encore commencé à courir à leur encontre du fait que l’ordonnance du 6 juillet 2012 ne leur avait pas été régulièrement notifiée et respecté les formes de la procédure gracieuse, ont formé appel de l’ordonnance du 6 juillet 2012.

Par lettre du 9 février 2016, le président du tribunal de commerce de Quimper et juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés a déclaré ne pas rétracter l’ordonnance du 6 juillet 2012 et a fait transmettre par son greffe le dossier à la cour d’appel de Rennes.

Par arrêt du 19 février 2019, la cour d’appel de Rennes a déclaré irrecevable la SASU Vectora en son action pour défaut de qualité à agir ; a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SA FDG tirée de l’absence d’intérêt et de qualité à agir de la société D ; a rejeté la fin de non-recevoir soulevée par la SA FDG tirée de la prescription ; a infirmé en toutes ses dispositions l’ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés en date du 6 juillet 2012 ; statuant à nouveau, a déclaré irrecevable la requête de la SA FDG en date du 20 juin 2012, a rejeté les autres demandes des parties, a condamné la SA FDG à payer la somme de 8.000 euros à la SASU D au titre de l’article 700 du code de procédure civile et a rejeté les autres demandes formées de ce chef, a condamné la SA FDG aux dépens distraits selon l’article 699 de ce même code.

Par arrêt du 9 septembre 2020, la chambre commerciale de la Cour de cassation a, sur le pourvoi formé par la SA FDG, cassé et annulé, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 19 février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Rennes.

La Cour de cassation a dit que selon l’article L. 123-3 alinéas 1 et 2 du code de commerce, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, à la requête de toute personne, justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés qui ne les aurait pas requises de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu’elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation.

Elle a jugé qu’en retenant, pour déclarer irrecevable la requête de la SA FDG et infirmer l’ordonnance du 6 juillet 2012, qu’aucun texte ne lui permettait de saisir le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés d’une demande d’annulation d’une mention de ce registre afférente à l’inscription d’une autre société, alors que la SA FDG, en qualité d’associé de la SASU D assujettie à l’obligation d’immatriculation, avait un intérêt à saisir le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés pour faire procéder à la rectification de déclarations inexactes de l’assujettie, mentionnées au registre, la cour d’appel a violé l’article L. 123-3 alinéas 1 et 2 du code de commerce.

Par déclaration du 30 novembre 2020, la SASU D et la SASU Vectora ont saisi la cour d’appel d’Angers sur renvoi de la Cour de cassation, intimant la SA FDG et le procureur général près la cour d’appel d’Angers.

La SASU D et la SASU Vectora, la SA FDG et le Ministère public ont conclu.

Une ordonnance du 19 avril 2021 a clôturé l’instruction de l’affaire.

MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties il est renvoyé, en application des dispositions des articles 455 et 954 du code de procédure civile, à leurs dernières conclusions respectivement déposées au greffe

— le 12 avril 2021 pour la SASU Vectora et la SASU D,

— le 13 avril 2021 pour la SA Française de Gastronomie,

— le 22 mars 2021 pour le Ministère public.

La SASU Vectora et la SASU D demandent à la Cour, au vu des articles L. 123-1, L. 123-3, L. 123-5-1, L. 123-6, L. 123-9, L. 210-7, R. 123-53, R. 123-54, R. 123-140, R. 123-141, R. 123-237, R. 123-238 et R. 210-12 du code de commerce, 1839 du code civil, 14, 16, 117 et suivants, 122, 493 et suivants, 503, 528, 579, 680, 700, 950 à 953 du code de procédure civile, et 6 de la Convention

européenne de sauvegarde des droits de l’Homme, de :

— recevoir les sociétés D et Vectora en leur appel,

à titre principal,

— annuler l’ordonnance rendue le 6 juillet 2012 par le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Quimper,

et, dans l’hypothèse où la cour estimerait devoir statuer à nouveau,

— déclarer irrecevables les demandes de la société Groupe Française de Gastronomie,

à défaut,

— rejeter les demandes de la société Groupe Française de Gastronomie,

à titre subsidiaire,

— infirmer ou rétracter en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 6 juillet 2012 par le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés du tribunal de commerce de Quimper,

et, statuant à nouveau,

— déclarer irrecevables les demandes de la société Groupe Française de Gastronomie,

à défaut,

— rejeter les demandes de la société Groupe Française de Gastronomie,

en toute hypothèse,

— rejeter toute demande adverse,

— condamner la société Groupe Française de Gastronomie à payer aux sociétés D et Vectora la somme de 10.000 euros chacune en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La SA Française de Gastronomie demande à la Cour, statuant après cassation sur les recours contre les ordonnances du juge chargé du contrôle du registre du commerce et des sociétés du tribunal de Quimper, des 6 juillet 2012 et 9 février 2016, de :

à titre principal,

— dire et juger que les sociétés D et Vectora étaient irrecevables à exercer tout recours pour défaut de qualité et d’intérêt à agir,

— débouter les sociétés D et Vectora de leurs demandes d’annulation de l’ordonnance du 6 juillet 2012,

à titre subsidiaire,

— dire et juger que les sociétés D et Vectora étaient prescrites pour exercer un recours,

— infirmer l’ordonnance du 9 février 2016 sur ce point,

sur le fond,

— dire et juger que les demandes de la société Française de Gastronomie sont recevables,

— dire et juger que les demandes de la société Française de Gastronomie sont fondées,

en conséquence,

— confirmer l’ordonnance du 6 juillet 2012 rendue par le juge chargé du contrôle du registre du commerce et des sociétés du tribunal de Quimper,

— condamner les sociétés D et Vectora à payer à la société Française de Gastronomie la somme de 10.000 euros chacune, au titre des frais irrépétibles de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner les sociétés D et Vectora aux entiers dépens.

Le Ministère public demande à la Cour, au vu de l’article L. 123-3 du code de commerce, alinéas 1 et 2 du code de commerce, et au vu de l’arrêt de cassation rendu le 9 septembre 2020 par la chambre commerciale, de :

— constater la recevabilité de l’appel formé par les sociétés D et Vectora ;

— confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés e date du 6 juillet 2012 ;

— statuer sur les dépens.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la recevabilité de l’appel de l’ordonnance du 6 juillet 2012 formé par les sociétés D et Vectora

Sur l’expiration du délai pour faire appel

Selon l’article R. 123-141 du code de commerce, l’appel des ordonnances rendues par le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés est formé, instruit et jugé comme en matière gracieuse selon les dispositions des articles 950 à 953 du code de procédure civile.

Le délai d’appel prévu à l’article 538 du code de procédure civile est de quinze jours de la date de la notification de la décision.

En l’absence de notification de l’ordonnance du 6 juillet 2012 à la société Vectora, aucune forclusion ne peut lui être opposée.

La notification de cette ordonnance faite par le greffe le 6 juillet 2012 à la société D n’indique pas le délai de recours contrairement aux prescriptions de l’article R. 123-140 du code de commerce. Elle n’a donc pas pu faire courir le délai d’appel à son endroit.

Aucune forclusion n’est encourue.

Sur le droit d’agir des sociétés D et Vectora

La SA FDG soulève l’irrecevabilité des sociétés D et Vectora à agir contre l’ordonnance du 6 juillet 2012 pour, à la fois, défaut de qualité et défaut d’intérêt à agir de leur part, estimant qu’aucune action ne leur est ouverte.

Elle affirme que la procédure spécifique de contestation des inscriptions au registre du commerce et des sociétés n’est pas contentieuse et ne permet pas à la société immatriculée d’engager une action quelle qu’elle soit ou d’intervenir, de sorte que la SASU D serait dépourvue de qualité à agir ; ni n’autorise davantage l’un des actionnaires de la personne morale immatriculée à intervenir volontairement en la matière, de sorte que la SASU Vectora ne dispose pas non plus de qualité à agir. Elle relève que la SASU D a opéré une confusion évidente entre son propre intérêt inexistant en l’espèce (sauf à vouloir privilégier un de ses actionnaires au détriment de l’autre, rappelant qu’en l’état elle détient 50% du capital de la SAS D), quand bien même les inscriptions en cause la concernaient, et l’intérêt de son associé représentant la famille D et celui de son président. Elle soutient qu’il ne serait pas normal qu’une personne morale puisse engager une action ou intervenir dans un débat ayant pour conséquence éventuelle l’éviction pure et simple de l’un de ses actionnaires.

Mais la société D étant la société qui fait l’objet des modifications contestées des mentions la concernant au RCS et qui a la charge, en vertu de l’article L. 123-3 du code de commerce, de veiller à ce que son immatriculation au registre du commerce et des sociétés soit conforme à la réalité de sa situation juridique, a qualité pour demander qu’il soit procédé à toute rectification en ce sens, et est donc recevable à agir contre l’ordonnance du 6 juillet 2012.

Et dès lors que, selon l’article L. 123-3, alinéas 1 et 2, du code de commerce, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, à la requête de toute personne justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés qui ne les aurait pas requises de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu’elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation, il en résulte que la société Vectora en tant qu’associée de la société D assujettie à l’obligation d’immatriculation a également intérêt et qualité pour agir à ces fins d’autant plus s’agissant d’une inscription modificative sur l’extrait K-bis ayant trait à la forme de la société.

Par suite, les deux sociétés sont recevables à faire appel de l’ordonnance.

Sur la demande en annulation de l’ordonnance du 6 juillet 2012

Sur la dérogation au principe de la contradiction

Les sociétés D et Vectora prétendent que les demandes de la société FDG nécessitaient un débat au fond et contradictoire sur les conséquences à tirer de l’arrêt du 24 janvier 2012, raison pour laquelle celle-ci aurait dû procéder par voie d’assignation et, qu’en tout état de cause, pour statuer sur requête, le premier juge devait caractériser les circonstances justifiant de déroger au principe de la contradiction, ce qu’il n’a pas fait.

La société FDG fait remarquer que les sociétés D et Vectora ont, elles-mêmes, choisi la voie d’une procédure non contradictoire en demandant au greffier la modification litigieuse.

En application des articles L. 123-6 et R. 123-139 du code de commerce, les contestations relatives à l’immatriculation, aux inscriptions modificatives, aux pièces déposées en annexe du RCS et aux pièces justificatives entre l’assujetti et le greffier sont réglées par le juge commis à la surveillance du registre, qui statue par ordonnance.

La saisine de ce juge se fait par requête mais l’ordonnance rendue est une ordonnance spécialement

prévue par la loi qui n’obéit donc pas à l’article 493 du code de procédure civile. Le droit de contester la décision rendue dans le cadre d’un appel suivant la procédure applicable en matière gracieuse permet de rétablir la contradiction.

En conséquence, le grief fait par les sociétés D et Vectora au juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés d’avoir statué ex parte et sans débat sur une requête unilatérale ne saurait être retenu pas plus que le reproche fait à ce juge et à la société FDG dans sa requête, de ne pas avoir, au mépris de l’article 493 du code de procédure civile, invoquer les circonstances susceptibles d’autoriser une dérogation au principe du contradictoire.

Sur l’excès de pouvoir

L’article L. 123-6 du code de commerce dispose que le registre du commerce et des sociétés est tenu par le greffier de chaque tribunal de commerce, sous la surveillance du président ou d’un juge commis à cet effet, compétent pour toute contestations entre l’assujetti et le greffier.

Les sociétés D et Vectora estiment que les demandes de la SA FDG excédaient les pouvoirs du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés tels que définis aux articles L. 123-3 à L. 123-6 du code de commerce en rappelant qu’en vertu d’une jurisprudence constante, ce juge ne peut apprécier au fond la validité des actes qui lui sont remis et ne peut rejeter une demande d’immatriculation formée par l’assujetti que si le dossier est incomplet ou si l’immatriculation sollicitée entraîne une violation d’une règle d’ordre publique ou impérative du droit des sociétés, ce qui n’était pas le cas en l’espèce. Au contraire, elles considèrent que les demandes de la société FDG, qui visaient à substituer des statuts à d’autres statuts, une immatriculation à une autre immatriculation, en contradiction avec la décision sociale du 24 mars 2012 qui avait été déposée au greffe excédaient ces pouvoirs. Elles sollicitent, en conséquence, l’annulation de l’ordonnance du 6 juillet 2012.

La SA FDG conteste tout excès de pouvoir du premier juge, estimant qu’il n’a fait que corriger les opérations irrégulières initiées par la SASU D par le biais de modifications unilatérales et irrégulières des inscriptions la concernant.

Ensuite, s’agissant de l’injonction faite par le premier juge à la société D de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique actuelle telle qu’elle résultait de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012, les sociétés D et Vectora prétendent que la nullité de l’ordonnance précitée est de ce chef encourue parce que aucun texte ne confère au juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés un pouvoir de délivrer l’injonction de mise en conformité des statuts, au surplus en dehors de tout débat contradictoire. Elles relèvent qu’une telle injonction ne ressort que de la compétence du président du tribunal statuant en référé, saisi par voie d’assignation, au vu de l’article L. 123-5-1 du code de commerce.

En outre, elles font valoir que seuls les associés d’une société peuvent en modifier les statuts et approuver des modifications statutaires, à l’exclusion de la société elle-même. Elles en déduisent que la demande d’injonction formée par la SA FDG en ce qu’elle est dirigée contre la SASU D ne pouvait pas prospérer.

La société FDG répond que le pouvoir d’injonction est conforme aux prérogatives du juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés.

Pour les motifs qui seront exposés ci-après, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés n’a pas excédé ses pouvoirs en se bornant à ordonner au greffe de procéder à l’annulation des modifications inscrites à l’extrait K-bis de la SASU D, le 3 avril 2012, de remettre les inscriptions en l’état antérieur à ces modifications et à porter, seulement, mention de l’arrêt du 24 janvier 2012.

L’injonction donnée à la société D de mettre ses statuts en conformité avec sa situation juridique actuelle telle qu’elle résultait de l’arrêt de la cour d’appel d’Angers du 24 janvier 2012 entre dans les pouvoirs conférés au juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés par le 2e alinéa de l’article L. 123-3 du code de commerce selon lequel ce juge peut enjoindre, soit d’office, soit à la requête du procureur de la République ou de toute personne justifiant y avoir un intérêt, à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés de faire procéder aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclaration inexacte.

En effet, ayant pu constater que l’annulation de la modification des mentions au RCS opérée à la demande de la société D ne suffisait pas, même en faisant mentionner les dispositions de l’arrêt du 24 janvier 2012, à donner les indications exactes exigées à l’article R. 210-4 du code de commerce relatives notamment à la forme de la société et au montant du capital social, au regard des conséquences devant être tirées de l’annulation des délibérations de la société Vectora du 30 décembre 2004 et de la caducité du traité d’apport du 14 décembre 2004 sur l’évolution du capital social et la prise de participation de FDG, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés se devait d’enjoindre à la personne assujettie à l’immatriculation à ce registre de se mettre en conformité avec ces dispositions, ce qui suppose une mise en conformité de ses statuts pour qu’ils correspondent à sa nouvelle situation juridique, charge qui incombe effectivement aux associés.

En donnant cette injonction de simple mise en conformité à la société D, le premier juge n’a pas préjugé au fond de la teneur des modifications à apporter en conséquence de l’arrêt du 24 janvier 2012, ce qui nécessite effectivement un débat de fond qui doit s’inscrire dans le cadre prévu aux 2e et 3e alinéas de l’article L. 210-7 du code de commerce, s’agissant d’une société, et qui relève de la compétence du tribunal de commerce en application de l’article R. 210-12 du même code. Et contrairement à ce qui est soutenu par les sociétés D et Vectora, le premier juge n’a pas davantage exercé les pouvoirs réservés au président du tribunal de commerce par l’article L. 123-5-1 du code de commerce qui ne concerne que le dépôt des pièces et actes au registre du commerce, ce qui n’est pas le cas en l’espèce.

Sur la demande de modification des mentions portées au RCS

Le Ministère public observe que les mentions portées au registre du commerce et des sociétés et accessibles à tous ont une fonction purement informative ; que tout intéressé doit en conséquence pouvoir obtenir du juge qu’il enjoigne aux sociétés immatriculées de procéder aux rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes. Il rappelle que selon l’article L. 123-3 du code de commerce, toute personne justifiant y avoir intérêt a qualité à agir à cet effet. Il indique que l’esprit du texte est de leur donner un droit de regard pour améliorer la qualité de l’information légale. Il considère cohérent d’admettre que tout associé puisse saisir le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés, quand bien même la mention erronée ne concernerait pas spécifiquement sa qualité d’associé. Il soutient que même en qualité d’ancien associé, la SA FDG justifie d’un intérêt à agir, indépendamment de la perte de cette qualité.

Selon l’article L. 123-3 alinéas 1 et 2 du code de commerce, le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés peut, à la requête de toute personne, justifiant y avoir intérêt, enjoindre à toute personne immatriculée au registre du commerce et des sociétés qui ne les aurait pas requises de faire procéder soit aux mentions complémentaires ou rectifications qu’elle doit y faire porter, soit aux mentions ou rectifications nécessaires en cas de déclarations inexactes ou incomplètes, soit à la radiation.

La SA FDG qui avait, au moins, jusqu’aux décisions invoquées par la société Vectora sur lesquelles s’appuie la modification des mentions du registre du commerce et des sociétés obtenue par la société D, la qualité d’associé de la SASU D assujettie à l’obligation d’immatriculation, et alors qu’aucune décision judiciaire n’a constaté la perte de cette qualité, avait un intérêt à saisir le juge

commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés pour faire procéder à la rectification de déclarations de l’assujettie qu’elle considérait inexactes, mentionnées au registre.

Au fond, les parties s’opposent sur les conséquences à tirer de l’arrêt du 24 janvier 2012 rendu par la cour d’appel d’Angers.

La société FDG fait valoir que cet arrêt, qui n’a pas eu à connaître de toute l’opération de rapprochement, et notamment pas des contrats et accord, achats d’action survenus en 2005, ne portait que sur la procédure d’apport du fonds de commerce et n’a eu aucune conséquence sur les achats d’actions intervenus en 2005 par la société FDG en l’absence d’indivisibilité prévue au protocole entre les différentes opérations ; qu’il ne saurait être tiré comme conséquence de cet arrêt qu’il lui aurait fait perdre sa qualité d’associée de la société D. Ainsi, elle estime que les sociétés D et Vectora entendent donner à l’arrêt du 24 janvier 2012 une portée qu’il n’a pas.

Les sociétés D et Vectora, excipant de l’effet seulement informatif à l’égard des tiers des mentions figurant au registre du commerce et des sociétés, soutiennent que l’éviction de la SA FDG du capital de la société D ne peut résulter de l’inscription modificative du 3 avril 2012 mais qu’elle est en revanche la conséquence de droit de l’arrêt du 24 janvier 2012 qui n’a pas statué sur le détail des conséquences des annulations prononcées parce que de telles conséquences s’imposaient de plein droit aux parties selon le principe 'ce qui est nul est réputé n’avoir jamais existé.' Elles opposent à la SA FDG que l’augmentation de capital et les cessions d’actions intervenues entre elle et la SASU Vectora en janvier 2015 étaient indivisibles des décisions annulées puisque l’apport du fonds de commerce, l’augmentation de capital subséquente, la modification des statuts, l’augmentation de capital en numéraire et les cessions d’actions intervenues, autant d’opérations prévues au protocole d’accord du 14 décembre 2004, visaient à permettre à la SA FDG de prendre une participation de 50% dans le capital de la SASU D et à organiser les rapports entre les deux associés égalitaires au sein de la société et relèvent que l’augmentation de capital au profit de la société UGMA constituait même une condition suspensive des autres opérations.

En tous les cas, elles observent que l’éviction de la SA FDG a été définitivement actée par les décisions du 24 mars 2012 de la SASU Vectora redevenue associée unique de la SASU D, lesquelles seraient devenues définitivement opposables à la SA FDG, ce que celle-ci conteste.

La réponse à la question de savoir si par l’annulation des délibérations du 30 décembre 2004 approuvant une modification des statuts de la SASU D et une augmentation de capital de la société ont été remis en vigueur les statuts antérieurs de la SASU D, adoptés le 16 octobre 2000, correspondant à une société à associé unique au capital de 3 300 000 euros, n’apparaît pas dans l’arrêt du 24 janvier 2012 qui ne se prononce pas sur les conséquences des annulations prononcées et, plus précisément, sur ce que devenait l’augmentation du capital de la société D qui avait eu lieu entre-temps et sur le statut d’associé de la société FDG. Le greffier du tribunal de commerce, qui doit, en vertu des dispositions de l’article R. 123-93 du code de commerce, s’assurer que les énonciations sont conformes aux pièces justificatives et actes déposés en annexe, sans pouvoir les interpréter, ne pouvait donc faire procéder à la modification des mentions au registre du commerce et des sociétés de la société D touchant à la forme de la société et au montant de son capital social telles qu’elles ont été rappelées dans l’exposé du litige, dès lors que l’anéantissement du protocole d’accord du 14 décembre 2004, au delà de l’annulation de l’apport du fonds de commerce et de l’augmentation du capital en résultant, et de tous les actes qui en sont la suite, et par voie de conséquence, le retour à la situation antérieure à ce protocole, ne résultent pas expressément dudit arrêt.

C’est donc à juste titre que le juge commis à la surveillance du registre du commerce et des sociétés a, exerçant les pouvoirs qui lui sont dévolus par l’article L. 123-3, et en vertu des dispositions de l’article L. 123-6, par la décision entreprise, enjoint au greffe de procéder à l’annulation de ces modifications.

Sur les demandes accessoires

Les sociétés D et Vectora seront condamnées aux dépens d’appel devant la cour d’appel de Rennes dont l’arrêt a été cassé et devant la cour de céans.

L’équité commande de les condamner à payer à la société FDG la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement, par arrêt mis disposition au greffe,

Déclare recevable l’appel formé par les sociétés D et Vectora ;

Confirme l’ordonnance entreprise rendue le 6 juillet 2012 ;

Y ajoutant,

Condamne in solidum les sociétés D et Vectora à payer à la société FDG la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne in solidum les sociétés D et Vectora aux dépens d’appel afférents à l’arrêt de la cour d’appel de Rennes du 19 février 2019 et au présent arrêt.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

S. G C. I

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel d'Angers, Chambre a - commerciale, 13 juillet 2021, n° 20/01685