Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 18 novembre 2020, n° 18/10808

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 9, 18 nov. 2020, n° 18/10808
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 18/10808
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 29 août 2018, N° F15/02725
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoires

REPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le

 : AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 9

ARRET DU 18 NOVEMBRE 2020

(n° , 15 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/10808 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6N74

Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Août 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° F15/02725

APPELANT

Monsieur F X

[…]

[…]

Représenté par Me Sylvie KONG THONG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0069

INTIMEE

SASU LOGISTA FRANCE

[…]

[…]

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Graziella HAUDUIN, présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Graziella HAUDUIN, présidente de chambre

Mme Sandra ORUS, présidente de chambre

Mme Françoise SALOMON, présidente de chambre

Greffier, lors des débats : Mme Anouk ESTAVIANNE

ARRÊT :

— contradictoire

— mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile

— signé par Madame Graziella HAUDUIN, présidente et par Madame Anouk ESTAVIANNE greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Vu le jugement en date du 30 aout 2018 par lequel le conseil de prud’hommes de Créteil, statuant dans le litige opposant M. F X à SAS Logista France a':

— Requalifié le licenciement pour faute grave de M. X en licenciement pour cause réelle et sérieuse';

— Condamné la SAS Logista France à payer à M. X, dont la moyenne des douze derniers salaires s’élève à 9 471,64 euros, les sommes suivantes :

25 502,73 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

2 550,20 euros à titre de congés payés afférents au préavis,

136 320 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

1 300,00 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Débouté M. X du surplus de ses demandes';

— Débouté la SAS Logista France de sa demande d’application de l’article 700 du code de procédure civile';

— Rappelé que le présent jugement est exécutoire de plein droit en application de l’article R.1454-28 du code du travail';

— Rappelé que l’intérêt légal avec anatocisme (article 1343-2 du code civil) est applicable

— à partir de la saisine du conseil pour les salaires et accessoires de salaires (article 1231-6 du code civil),

à partir de la mise à disposition du jugement en ce qui concerne les dommages et intérêts (article 1231-7 du code civil) ;

— Condamné la SAS Logista France aux dépens comprenant les éventuels frais d’exécution en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Vu l’appel interjeté le 26 septembre 2018 par M. F X de cette décision qui lui a été notifiée le 3 septembre 2018.

Vu les conclusions des parties auxquelles il est renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel .

'

Aux termes de conclusions transmises le 26 aout 2020 par voie électronique, M. X demande à la cour de':

— 'Dire et juger M. X recevable et bien fondé en son appel ;

— 'Réformer le jugement entrepris en ses dispositions faisant grief à M. X, en ce qu’il l’a débouté de ses demandes tendant à voir :

— Requalifier son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

— 'Condamner la société Logista France condamnée au paiement des sommes suivantes :

— '227 320 euros bruts à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (24 mois de salaire);

— '56 830 euros bruts à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct (6 mois de salaire);

—  13 470,71 euros, à titre de rappel de bonus annuel pour 2015,

—  4 420,47 euros à titre de rappel de bonus annuel pour 2016,

—  737,45 euros au titre du variable de l’année 2011 ;

—  397,87euros, au titre du variable de l’année 2012;

—  656,21euros au titre du variable de l’année 2013

—  542,4 euros au titre du variable de l’année 2014 ;

-1 347 euros au titre du variable de l’année 2015 ;

—  176,8 euros au titre du variable de l’année 2016 ;

— Et en ce qu’il a limité à 1 300 euros la somme allouée à M. X au titre des frais irrépétibles';

— Déclarer recevables les demandes nouvelles de nullité de son licenciement, de réintégration et de paiement d’une indemnité de réintégration, formulées en cause d’appel par M. X (article R.1452-7 du code du travail dans sa version applicable aux faits de l’instance);

— Débouter l’intimée de toutes ses demandes, fins et conclusions ;

— Fixer la rémunération moyenne mensuelle de M. X à 9 621,81 euros';

A titre principal

— Dire et juger que le licenciement de M. X est nul en ce qu’il constitue :

— une discrimination indirecte en raison de l’activité syndicale ;

— ' une violation de sa liberté d’expression ;

— Prononcer en conséquence la nullité de son licenciement ;

— 'Ordonner la réintégration de M. X au sein des effectifs de Logista France ;

— 'Condamner la société Logista France à payer à M. X une indemnité au moins égale aux salaires échus entre sa sortie des effectifs (10 novembre 2015) et le jour de sa réintégration effective, soit 9 621,81 euros par mois ;

— 'Condamner la société Logista France à remettre à M. X les bulletins de salaire afférents.

A titre subsidiaire,

— Dire et juger que le licenciement de M. X est dépourvu de cause réelle et sérieuse -'Condamner Logista France à payer à M. X les sommes suivantes :

25 502,73 euros, outre 2.550 020 euros à titre de congés payés afférents';

138 554 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement ;

230 923, 44 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse (24 mois de salaire);

A titre infiniment subsidiaire,

— Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

En tout de cause.

— Condamner Logista France à payer à M. X les sommes suivantes :

57 730 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral distinct (6 mois de salaire);

13 470,71euros à titre de rappel de bonus annuel pour 2015';

4 420,47 euros à titre de rappel de bonus annuel pour 2016';

737,45 euros à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2011 ;

397,87euros, à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2012 ;

656,21euros à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2013;

542,4 à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2014;

1 347 euros à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2015;

176,8 euros à titre de rappel de congés payés sur bonus au titre de l’année 2016.

— Condamner Logista France à 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens ;

— Assortir les condamnations des intérêts au taux légal et prononcer la capitalisation des intérêts en application des dispositions de l’article 1154 du code civil ;

'

Aux termes de conclusions transmises le 28 juillet 2020 par voie électronique, la société Logista France demande à la cour':

In limine litis :

— Déclarer, sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile, M. X irrecevable en ses demandes de nullité du licenciement, de réintégration au sein des effectifs de la société Logista France et de paiement des salaires échus entre son licenciement et le jour de sa réintégration, ses demandes étant nouvelles en cause d’appel ;

Sur le fond, à titre principal :

— réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Créteil le 30 août 2018 en ce qu’il a requalifié le licenciement pour faute grave de M. X en licenciement pour cause réelle et sérieuse et qu’il a condamné la société Logista France des chefs suivants :

— requalifier le licenciement pour faute de M. X en licenciement pour cause réelle et sérieuse,

— 'condamner la SAS Logista France à payer à M. X dont la moyenne des douze derniers salaires s’élève à 9 471,64 euros, les sommes suivantes :

— '25 502,73 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

—  2 550,20 euros à titre de congés payés afférents au préavis,

—  10,00 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

—  1 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— Débouter la SAS Logista France de sa demande d’application de l’article 700 du code de procédure civile';

— condamner la SAS Logista France aux dépens comprenant les éventuels frais d’exécution en application de l’article 699 du code de procédure civile ;

— 'confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Créteil le 30 août 2018 pour le reste et rejeter l’intégralité des demandes de M. X ;

— dire et juger, en tout état de cause, que la demande en nullité du licenciement formulée par M. X est infondée et injustifiée ;

— 'dire et juger que le licenciement de M. X n’est pas fondé sur un motif discriminatoire ;

— dire et juger que la société Logista France n’a porté aucune atteinte à la liberté d’expression de M. X et à ses droits de la défense ;

— 'dire et juger que le licenciement de M. X est bien-fondé sur une faute grave parfaitement justifiée et privative des indemnités de rupture et, plus globalement, qu’il repose sur une cause réelle et sérieuse ;

— dire et juger que M. X ne démontre pas avoir subi quelque préjudice spécifique que ce soit du fait de la rupture de son contrat de travail ;

— dire et juger que M. X ne démontre pas que des conditions « brutales et/ou injurieuses'»

auraient présidé à son licenciement ;

— prendre acte de ce que la société Logista France a versé et régularisé à M. X la somme nette de 10 705,34 euros, le remplissant ainsi intégralement de ses droits ;

— 'dire et juger qu’aucun rappel de bonus supplémentaire, en particulier au titre des années 2015 et 2016, ni, en conséquence, de congés payés y afférents, n’est dû à M. X ;

— dire et juger que les demandes de M. X formulées « au titre du variable » des années 2011, 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016 sont infondées et injustifiées ;

'En conséquence :

— 'débouter M. X de sa demande de requalification de la rupture de son contrat de travail en licenciement nul et, à titre subsidiaire, sans cause réelle et sérieuse ;

— débouter M. X de sa demande de réintégration au sein des effectifs de la société Logista France ;

— ''débouter M. X de sa demande de paiement des salaires échus entre son licenciement et le jour de sa réintégration ;

— 'débouter M. X de ses demandes formulées au titre des indemnités de rupture du contrat de travail ;

— débouter M. X de sa demande de dommages et intérêts pour prétendues « circonstances brutales » de son licenciement ;

— débouter M. X de ses demandes de rappels de salaire à titre de bonus et de congés payés y afférents ;

— débouter M. X de ses demandes formulées « au titre du variable » des années 2011, 2012, 2013, 2014, 2015 et 2016 ;

— débouter M. X de l’intégralité de ses demandes ;

A titre subsidiaire :

— fixer la rémunération mensuelle moyenne de M. X à la somme de 9 169,82 euros brut ;

— fixer le montant de l’indemnité conventionnelle à laquelle pourrait prétendre M. X à la somme de 132 045,37 euros ;

'Reconventionnellement :

— condamner M. X au paiement de la somme de 5 000 euros à la société Logista France au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner le même aux entiers dépens.

Vu la clôture du'1er septembre 2020 et la fixation de l’affaire à l’audience du'23 septembre 2020.

'

SUR CE, LA COUR :

M. X a été engagé par contrat à durée indéterminée à compter du 1er avril 1983 par la société SEITA, en qualité de cadre de gestion. Le contrat de travail s’est ensuite poursuivi au sein de la société Altadis Distribution France, puis au sein de la SAS Logista France. Il a occupé en dernier lieu et depuis le 1er avril 2009 l’emploi de directeur régional de la distribution sur le site de Lyon.

Par lettre en date du 14 octobre 2015, M. X a été convoqué pour un entretien préalable à une éventuelle mesure de licenciement devant se tenir le 23 octobre 2015 puis son licenciement pour faute grave lui a été notifié par lettre du 10 novembre 2015, motivée comme suit :

'(') A ce titre, il vous appartient, notamment, d’assurer la maîtrise et le contrôle des indicateurs de performance économique, sociaux et de productivité, en visant leur amélioration permanente par la mise en 'uvre d’orientation et de plan d’action précis, chiffrés, planifiées sur l’organisation physique des flux et l’organisation opérationnelle et humaine des ateliers.

Vous avez également la mission de développer une relation sociale de qualité avec une communication permanente et transparente auprès des IRP et du personnel pour assurer la mise en 'uvre efficace de ces plans, tout en respectant l’ensemble des obligations légales auxquelles nous sommes soumis, notamment en termes de conditions de travail de sécurité et de temps de travail.

Enfin, vous avez pour mission de représenter la société Logista France auprès des institutionnels du marché (fabricants, buralistes, services de l’État, forces de l’ordre), ceci en véhiculant une image professionnelle et responsable de l’entreprise.

Vos responsabilités sont certaines, votre mission d’importance, et ce d’autant que la DRD de Lyon a bénéficié, sur les années 2014 et 2015, d’un investissement de 6 millions d’euros afin que ses installations et son organisation soient modifiées dans une perspective de croissance des volumes traités et d’augmentation de ses effectifs.

Or, malgré diverses alertes et mises au point, nous sommes au regret de constater votre incapacité à mener à bien les missions qui vous ont été confiées, ce qui a été à l’origine de graves dysfonctionnements au sein de la direction dont vous avez la responsabilité, dysfonctionnements dont vous n’avez jamais jugé utile d’alerter votre hiérarchie.

Pourtant, face à vos difficultés avérées à assurer correctement vos missions contractuelles, votre direction vous a, depuis plusieurs mois, assuré un accompagnement sans faille et un soutien permanent afin de vous aider à rétablir la situation dégradée du site de Lyon.

Malheureusement, nous ne pouvions nous douter que cette situation n’était, en fait, que la résultante de votre propre comportement, lequel est en parfaite contradiction avec vos obligations professionnelles et contractuelles.

En effet, il nous a récemment été révélé que derrière ces résultats ' que nous avons, au demeurant, découvert être bien plus catastrophiques que nous le pensions ' vous usiez de méthodes de gestion et de management des plus inacceptables et nuisibles.

Ainsi, nous avons, tout d’abord, appris, le 23 septembre 2015, dans le cadre de la réunion trimestrielle sur la Charte de la Distribution avec la Confédération des Buralistes, que vous vous étiez permis d’adresser, en date du 7 septembre 2015, à nos clients, débitants de tabac, une lettre circulaire que vous avez établie en fraude des obligations et règles concurrentielles des marchés que la Société LOGISTA FRANCE se doit de respecter.

Nous avons alors été abasourdis par la lecture de ce courrier et de ses annexes, lesquels ternissent, tant sur la forme que sur le fond, l’image et le professionnalisme de LOGISTA FRANCE.

En effet, au-delà du fait que le niveau de qualité rédactionnelle de ce courrier n’est pas acceptable eu égard à vos fonctions et responsabilités, et qu’il contient des mentions (attenantes, notamment, aux modalités de livraison ou de reprise des produits) erronées, vous n’avez pas hésité à conseiller aux débitants de tabac d’avoir recours au service de la société Européenne de Cautionnement (EDC).

Vous allez même, dans ce courrier, jusqu’à faire la promotion de l’EDC, assurant aux débitants de tabac que celle-ci est « toujours soucieuse d’améliorer les services proposés à ses clients, [et qu’elle] offre la possibilité de demander, à un coût avantageux, un cautionnement supplémentaire pour couvrir [les] dépassements temporaires ».

L’insertion et la diffusion d’une telle mention est intolérable et constitue, comme vous ne pouvez l’ignorer, une entrave grave au traitement équitable des intervenants sur le marché du tabac.

Du fait de notre position dominante sur le marché de la distribution du tabac, nous ne sommes, en effet, pas en droit de privilégier et/ou de promouvoir quelque organisme de cautionnement que ce soit, sous peine de créer une distorsion de concurrence au profit d’un établissement, qui plus est lorsque l’on sait que LOGISTA FRANCE est actionnaire de l’EDC.

Vous n’êtes, pourtant, pas sans savoir que nous avions, en date du 2 Août 2010, été sévèrement rappelés à l’ordre par la DGCCRF quant au respect de cette règle.

Nous avions, d’ailleurs, en ce sens, modifié tous les documents établis à destination de nos clients pour leur préciser qu’ils étaient libres du choix de leur organisme de cautionnement.

Nonobstant, vous avez fait le choix délibéré de leur conseiller l’EDC, ce qui aurait pu être lourd de conséquences pour LOGISTA FRANCE si nous n’avions pas, dès que nous avons eu connaissance de votre correspondance, indiqué aux représentants de la Confédération des Buralistes qu’ils ne devaient pas tenir compte de ce courrier et qu’ils avaient une liberté totale dans leur choix d’organisme de cautionnement.

Interpellé sur la gravité de votre comportement à cet égard lors de votre entretien préalable, vous n’avez fourni aucune explication à votre attitude, ni n’avez accepté de vous remettre en cause, considérant, de toute évidence, que ce non-respect des règles de concurrences légales ne vous concernait pas.

Votre conduite est, pourtant, inacceptable, d’autant plus au regard de votre positionnement hiérarchique.

Cet évènement nous a astreints à une analyse des plus vigilantes des résultats de votre activité après clôture, le 30 septembre 2015, de l’année fiscale 2014/2015.

C’est alors avec autant de consternation que d’effarement que nous avons pris connaissance des conditionnement des produits du tabac insérant un pictogramme destiné aux femmes enceintes, vous n’avez, faute d’avoir établi des indicateurs de suivi, pas été en mesure de mettre en 'uvre quelque mesure corrective et adaptée que ce soit.

C’est alors avec autant de consternation que d’effarement que nous avons pris connaissance des résultats et du mode de gestion obtenus et usités par vous sur notre site de Lyon et que nous avons découvert que votre manière d’exercer vos fonctions était gravement défaillante.

À titre d’illustration, il est ressorti de l’analyse de votre administration du site de Lyon des carences inexcusables en termes de gestion du personnel.

En effet, alors qu’il vous appartient, en votre qualité de Directeur Régional de Distribution, de tenir régulièrement à jour les tableaux de bord et autres indicateurs de suivi du travail du personnel de votre site, il est apparu que vous n’aviez jamais daigné remplir correctement cette mission, pourtant fondamentale.

C’est ainsi que, pour faire face au surcroît d’activité inconnue Logista France au mois d’août 2015 du à la mise en application de l’arrêté du 24 février 2015 relatif aux modalités d’inscription des invertis de caractère sanitaire sur les unités de conditionnement des produits du tabac insérant un pictogramme destiné aux femmes enceintes, vous n’avez, faute d’avoir établi des indicateurs de suivi, pas été en mesure de mettre en 'uvre quelque mesure corrective et adaptée que ce soit.

Il en est résulté une situation non maîtrisée quant à la gestion de l’intérim et des heures supplémentaires que nous ne pouvons tolérer.

Quelle ne fut, en effet, pas notre surprise de découvrir que, sur la période allant du 1er janvier au 15 septembre 2015, le volume d’heures supplémentaires effectuées par le personnel dont vous avez la responsabilité s’est élevée à plus de 4915 heures, la moyenne d’heures supplémentaires réalisées par personne s’établissant à plus de 67 heures, soit plus du double de ce qui est acceptable pratiqué au sein des autres BRT !

Il est à peine besoin de préciser qu’une telle situation représente un risque majeur, tant pour la santé et la sécurité des salariés, que pour l’entreprise elle-même, que vous n’avez, au demeurant, jamais jugé utile d’informer de la situation.

Le bilan de l’intérim assez, quant à lui, révélé d’autant plus désastreux puisque vous n’avez pas hésité à faire régulariser à des salariés en mission au sein de notre des centaines de contrats de mission d’une journée sur un même poste !

À titre d’exemple, nous avons découvert qu’une salariée intérimaire, Mme Y avait enchaîné depuis le début de l’année pas moins de 33 contrats de mission de quelques jours chacun, au surplus sans aucun respect de la législation en vigueur (délai de carence notamment).

Il n’est pas pensable de laisser s’installer de telles situations qui sont en totale violation des règles qu’il vous appartient de faire respecter, d’autant que nous vous avions, au mois de mai et juin 2015, proposer les axes de réflexion et d’arbitrage afin que vous puissiez gérer au mieux cette hausse temporaire d’activité.

Sans aucune remise en question du scrupule, vous vous êtes, sur ce point contenté de vous indiquer, lors de votre entretien préalable, que vous ne voyez pas comment faire autrement.

Pourtant, l’intégralité des autres PRD de Logista France a parfaitement pu gérer cette situation sans enfreindre quelques dispositions légales que ce soit.

Votre attitude et, ainsi, révélatrices de votre singulière mauvaise foi et de votre volonté d’éluder les faits pour tenter d’harmoniser votre responsabilité.

Plus globalement, ces faits ont révélé votre absence totale de prise en main du pilotage du chantier de la DRD de Lyon, pilotage qui consistait en votre mission principale.

Pourtant, dès le début de l’année 2015, nous avions été contraints de vous alerter quant aux carences et dysfonctionnements constatées dans la mise en 'uvre de ce pilotage.

Ainsi, et dès le 28 janvier 2015, nous organisions, en vos lieu et place, une réunion de chantier afin de redéfinir les rôles et responsabilités de chacun.

À nouveau, le 15 avril 2015, nous vous alertions encore sur la mauvaise conduite de votre chantier, vous rappelant, notamment, l’impérieuse nécessité de planifier l’organisation du pilotage de votre DRD, ceci en intégrant une remise à plat de notre accord 35 heures.

Toutes ces alertes et cet accompagnement ont, malheureusement, été vains, ce que nous vous rappelions, au demeurant, lors de votre entretien annuel d’évaluation de mi-année, réalisé le 27 avril 2015.

Ce constat d’échec nous a alors conduit à des le décalages, à plusieurs reprises, de l’intégration des volumes automatiques de la DRD de Vitrolles, qui s’est étalé entre le 11 mai et le 5 juin, soit deux mois de retard.

De surcroît, face à l’impossibilité de votre DRD à prendre en charge dépannage client, nous avons été contraints de demander à la DRD de Vitrolles de conserver ce jour, et ce jusque fin octobre, générant, de nouveau, la mise en place de moyens supplémentaires.

Pire encore, à la fin de l’exercice clos, nous ne pouvons que constater que vous n’avez toujours pas daigné mettre en place l’organisation cible de la DRD dont vous avez la responsabilité.

Une telle inaction, alors même que l’accompagnement qui vous a été octroyé en la matière était plus que suffisant, est intolérable et dénote votre mauvaise volonté à exécuter les consignes qui vous sont données.

Les conséquences de votre attitude sont sans commune mesure pour LOGISTA FRANCE puisqu’après clôture de l’année fiscale 2014/2015, nous avons été contraints de constater que vos résultats étaient catastrophiques.

Ainsi :

' les coûts de distribution du tabac sont en hausse de 8 % par rapport au budget est de 15 % par rapport à l’année précédente, le taux d’emploi, préparation des cartons complets s’est dégradé de 7,8 % par rapport au budget et ce malgré une baisse des volumes respectivement de 0,3 % et de 6,6 %,

' le taux d’emploi global est également dégradé de 3,6 % par rapport au budget pour une augmentation de volume de 15,6 % par rapport au budget, le taux de réclamations fondées s’établit à 24,4 % soit 2 348 réclamations client par rapport à un budget de 10,9 % et un réel l’année passée de 16,2 %.

Un tel constat aurait, au demeurant, pu être évité si vous aviez préparé un bilan complet et détaillé de la situation de votre DRD et un plan d’action précis, ce que nous vous avions demandé lors de chaque Comité de Direction Tabac, outre durant les réunions que vous avez eu avec votre responsable hiérarchique, Monsieur H C, en date des 22 janvier, 23 février, 25 juin, 24 septembre et 31 septembre 2015.

Vous n’étiez, ainsi, pas sans savoir que la construction et la consolidation de votre activité et du chiffre d’affaires réalisé par la DRD dont vous aviez la responsabilité ne pouvait passer que par une organisation rigoureuse d’un plan d’action.

Il n’est pas admissible que, malgré nos relances, vous n’ayez toujours pas mis en place quelque plan d’action ou correctif que ce soit.

Mais, au-delà du non-respect de vos principales missions, nous ne pouvons que déplorer votre défaillance dans la réalisation de vos responsabilités en termes de management et d’accompagnement des salariés restés sous votre responsabilité.

À cet égard, nous vous rappelons que, dans le cadre de vous haver la responsabilité de faire adhérer aux collaborateurs autorisation de l’entreprise et de leur apporter les réponses et encouragements nécessaires à la réalisation de leurs actions.

Il est aussi nécessaire de les associer à la réflexion et aux décisions à prendre pour mener à bien la gestion du chantier a été confié.

Or, sur ce point également, et malgré notre accompagnement, vos manquements et déficiences perdurent, et ce, de manière inacceptable.

Votre comportement a d’ailleurs été à l’origine de dysfonctionnements avérés dans la bonne application de la stratégie de la politique de l’entreprise que nous ne pouvons plus tolérer.

En effet, à de nombreuses reprises, votre responsable hiérarchique, Monsieur H C, ou les membres de la Direction, ont été contraints de vous suppléer dans votre rôle de manager.

Les salariés de votre site sont, ainsi mal informés des décisions prises par la Direction Générale, ils ont, au surplus,une position critique des intervenants extérieurs (prestataires ou personnes d’autres DRD)qui n’est que le reflet de votre propre analyse et perception de la situation.

Déjà alerté de cet état de fait au mois de mai 2015, nous vous avions alors expressément demandé de réagir.

Une fois de plus, vous n’avez toutefois nullement tenu compte de nos alertes..

Pire encore, nous avons directement été alertés, le 25 septembre 2015, par l’un des salariés de votre site, Monsieur J D, sur les conséquences de votre management déficient.

Comme vous le savez, ce salarié a, en effet, adressé à la direction de LOGISTA FRANCE un courrier faisant état de ses difficultés professionnelles à réaliser ses missions et de son état psychologique dégradé du seul fait de son travail sur le site dont vous avez la responsabilité.

Doit-on vous rappeler que dans ce courrier, Monsieur J D va jusqu’à indiquer :

« j’ai besoin d’aide, je suis en train de craquer devant cette pression et ce manque de soutien de mes responsables » '

Nous avons alors dû rencontrer ce salarié en date du 14 octobre 2015 et organiser une visite médicale avec le Médecin du travail.

Les révélations qu’il nous a faites ont alors été stupéfiantes et ont mis en exergue la désorganisation totale que vous avez créée sur votre propre site. Nous avons ainsi découvert, à titre d’illustration, l’existence :

' d’une inadéquation totale des heures d’ouverture avec la charge de travail administratif opérationnel à réaliser dans le temps hors ouverture pour respecter les 35 heures ;

' une absence de programmation des approvisionnements des CR pour être réalisé en dehors des ouvertures au client, ce qui a entraîné une indisponibilité temporaire du GCR pour l’accueil et l’ange encaissement des clients et/ou une charge de travail complémentaire pour les chauffeurs ;

' une accumulation des tâches d’approvisionnement et des calculs des besoins de commande ne permettant pas d’assurer, notamment la tâche impératif de l’inventaire hebdomadaire.

Force est, de surcroît, de constater qu’une telle désorganisation n’existe qu’au sein de votre DRD, celle-ci étant due à votre absence de management, de prise de décision, d’organisation et de suivi de vos équipes de travail.

De tels constats sont particulièrement anormaux.

Votre qualité de cadre de haut niveau et votre niveau de responsabilité auraient, pourtant, dû vous contraindre à réagir.

Alerté sur ces différents points lors de votre entretien préalable, vous vous êtes, pour seule réponse, contenté de nous indiquer : « ce n’est pas pour ça que vous me licenciez, il y a d’autres raisons ».

Nous sommes stupéfaits de constater que l’énoncé des griefs ci-avant évoqués ne semblent, selon vous, pas suffisamment graves pour justifier quelque sanction que ce soit.

Un tel laxisme doublé d’une absence totale de remise en question est inconvenable.

De toute évidence, votre niveau d’implication et d’activités au sein de notre société sont totalement inacceptables et nous permettent plus de poursuivre notre collaboration.

Suite à notre entretien préalable, vous avez sollicité la réunion d’un conseil de discipline, lequel s’est tenu le 6 novembre 2015.

Lors de cette séance, nous vous avons, à nouveau, expliquer les griefs que nous vous reprochions.

Quelle ne fut alors pas notre surprise de constater que, là encore vous n’aviez aucune explication à formuler !

Vous êtes contentés de remettre un mémoire écrit aux participants du conseil, via lequel vous vous contentez de nier vos responsabilités de directeur et de rejeter les conséquences de nos fautes et errements aux salariés qui sont placés sous votre direction à votre hiérarchie.

Un tel comportement est révélateur de votre mauvaise foi et de votre refus de vous remettre en question.

Ainsi, compte tenu de votre comportement et de vos divers manquements rappelés ci-dessus, auxquels s’ajoute notre obligation, en qualité d’employeur, d’assurer la sécurité et la protection de la santé physique des salariés, votre maintien dans l’entreprise s’avère totalement impossible.

En conséquence, nous sommes contraints, par la présente, de vous notifier votre licenciement pour faute grave (')'.

Il a saisi le 23 novembre 2015 le conseil de prud’hommes de Créteil d’une demande principale de requalification de son licenciement pour faute grave en licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur la recevabilité des demandes de nullité du licenciement, de réintégration et de paiement des salaires échus entre son licenciement et le jour de sa réintégration :

Il résulte des articles 8 et 45 du décret n° 2016-660 du 20 mai 2016 que les dispositions de l’article R. 1452-7 du code du travail, aux termes desquelles les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel, demeurent applicables aux instances introduites devant les

conseils de prud’hommes antérieurement au 1er août 2016.

M. X, qui a saisi le conseil de prud’hommes de Créteil le 23 novembre 2015, soit antérieurement au 1er août 2016, est donc recevable à former des demandes nouvelles devant la cour.

Le moyen d’irrecevabilité soulevé par la société Logista France sera donc écarté.

Sur le licenciement :

L’article L.1132-1 du code du travail énonce un principe général de non-discrimination envers le salarié qui ne doit ni être écarté d’une procédure de recrutement, l’accès à un stage ou une période de formation en entreprise, ni être sanctionné ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire directe ou indirecte notamment en matière de rémunération, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat à raison de son origine, de son sexe, de ses m’urs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille ou de sa grossesse, de ses caractéristiques génétiques, de la particulière vulnérabilité résultant de sa situation économique, apparente ou connue de son auteur, , de son appartenance ou de sa non-appartenance , vraie ou supposée à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap.

L’article L. 1134-1 du même code dispose que lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance de ces dispositions, le candidat à un emploi, à un stage ou à une période de formation en entreprise ou le salarié présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte.

En l’espèce, le fait d’avoir bénéficié, comme d’autres salariés placés dans une situation identique, par l’effet de la signature d’un accord de substitution le 2 août 2007 du maintien d’avantages acquis au sein de la société Seita lors du transfert de son contrat de travail au sein de la société Altadis aux droits de laquelle vient la société Logista France, que M. X L lui- même d''»appartenance à un statut collectif négocié par les syndicats'», ne peut être considéré comme une discrimination à raison d’activités syndicales ou mutualistes, dont le salarié ne se prévaut au demeurant pas, et n’entre donc pas dans les prévisions des dispositions légales précitées.

Le moyen de nullité du licenciement pour discrimination sera donc rejeté.

Tout d’abord, M. X, qui a été licencié le 10 novembre 2015, ne peut se prévaloir des dispositions de l’article L. 1235-2-1 du code du travail, issues de l’ordonnance du 22 septembre 2017, applicables aux seuls licenciements prononcés après le 23 septembre 2017.

Ensuite, et étant rappelé le principe selon lequel la lettre de licenciement fixe les limites du litige, le grief ainsi formulé par l’employeur : «Les salariés de votre site sont, ainsi mal informés des décisions prises par la Direction Générale, ils ont, au surplus,une position critique des intervenants extérieurs (prestataires ou personnes d’autres DRD) qui n’est que le reflet de votre propre analyse et perception de la situation», ne peut être considéré, ainsi que le soutient le salarié, comme la reprise indirecte du grief de critique systématique de la direction générale et en conséquence constituer une violation de sa liberté d’expression. Ne l’est pas davantage la constatation dans la lettre du licenciement par l’employeur de l’absence d’explications données par M. X à l’énonciation des griefs lors du conseil de discipline dont il avait sollicité la réunion, de la remise d’un mémoire rejetant ses responsabilités sur ses subordonnés et la direction, de la mauvaise foi du salarié et de son refus de se remettre en question. En effet, le rappel de la position adoptée par M. X durant la procédure de licenciement, suivie par l’appréciation critique par la société de celle-ci, ne peut en l’espèce être tenue comme constitutive d’une atteinte à la liberté d’expression du salarié.

Le moyen de nullité du licenciement pour violation de la liberté d’expression sera également écarté.

La preuve des faits constitutifs de faute grave incombe à l’employeur et à lui seul et il appartient au juge du contrat de travail d’apprécier au vu des éléments de preuve figurant au dossier si les faits invoqués dans la lettre de licenciement sont établis, imputables au salarié, et s’ils ont revêtu un caractère de gravité suffisant pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

Tout d’abord, les reproches faits par par l’employeur dans la lettre de licenciement d’avoir usé de «'méthodes de gestion et de management des plus inacceptables et nuisibles'», établi une lettre circulaire «en fraude des obligations et règles concurrentielles des marchés'»et terni , «'tant sur la forme que sur le fond l’image et le professionnalisme de Logista'», le fait de qualifier la conduite de l’intéressé d’inacceptable s’agissant de son absence de remise en cause quand il a été placé devant son non-respect des règles de concurrence légales, aussi sa manière d’exercer ses fonctions de gravement défaillante, d’évoquer ses carences inexcusables en termes de gestion de personnel, de lui reprocher son inaction intolérable dans la mise en place de l’organisation cible de la DRD qui dénote sa mauvaise volonté à exécuter les consignes qui lui sont données ou enfin de faire état de son laxisme, excédent la simple insuffisance professionnelle et font apparaître que les insuffisances alléguées sont causées par la mauvaise volonté délibérée du salarié et ses abstentions volontaires et sont ainsi la conséquence de comportements du salarié jugés fautifs par l’employeur. Les dispositions de l’article L. 1332-4 du code du travail relatives à la prescription des faits fautifs dont l’employeur a eu connaissance plus de deux mois avant l’engagement de la procédure disciplinaire sont donc applicables.

Pour le premier grief, il est établi que M. X a annexé à la lettre circulaire du 7 septembre 2015 adressée aux clients, débitants de tabac, soit celui intitulé «'rappels pour une bonne reprises'» et qui mentionne différentes informations relatives aux livraisons, aux dépannages, aux reprises des produits et pour ce qui concerne les conditions de paiement renvoie à l’EDC, soit la société Européenne de cautionnement, pour obtenir un cautionnement supplémentaire.

Or, la société Logista France justifie que cette pratique, révélée lors d’une enquête de la direction régionale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes en 2007 et 2008 au sein de à la société Altadis aux droits de laquelle elle vient, était susceptible de constituer un abus de position dominante au sens des dispositions de l’article L420-2 du code du commerce et que la DGCCRF avait pris acte en juin 2009 de l’envoi le 8 octobre 2008, sous couvert des directeurs de la DRD, d’une nouvelle lettre circulaire régularisée et conforme aux équipes d’administration des ventes et de recouvrement ainsi qu’aux débitants de tabac, en sorte que la direction n’entendait pas proposer de saisine de l’Autorité de la concurrence aux fins de sanction. La société Altadis a en effet envoyé un courrier, sous couvert des directeurs régionaux de distribution, daté du 8 octobre 2008 sur les procédures de cautionnement et rappelé le droit pour les buralistes de faire appel à l’organisme bancaire ou d’assurance de leur choix et la prohibition de pratiques anticoncurrentielles qui pourraient imiter ou orienter les buralistes dans leur choix de leur organisme de cautionnement La société établit aussi que M. X, en sa qualité de directeur régional distribution, dans la zone Paris-Est et de Mions à compter du 1er mai 2009, avait donc connaissance de cette situation. Il ressort aussi du compte rendu du CODIR des 16 et 17 septembre 2010, auquel assistait M. X, qu’un courrier de la DGCCRF relatif à l’information donnée aux débitants de tabac sur les organismes de cautionnement a été évoqué avec la nécessité que tous les sites se servent du même modèle qui sera envoyé le 25 novembre 2010. L’interdiction de privilégier la société EDC, dont par ailleurs la société Logista est l’actionnaire, ne peut être confondue avec la perception par la société Logista pour le compte de EDC des cotisations auprès des buralistes ayant déjà contracté avec cette société de cautionnement, rappelée par le courriel du 8 octobre 2015 adressé aux directeurs régionaux.

Il convient en conséquence de considérer ce grief en rapport avec l’envoi de la lettre du 7 septembre 2015, comme établi, non prescrit en considération de l’engagement de la procédure de licenciement

le 14 octobre 2015 et constitutif d’un manquement du salarié qui a ignoré les règles relatives à la concurrence dont il avait pourtant connaissance et qu’il lui appartenait de respecter en sa qualité de directeur régional.

Ensuite, il convient de constater pour ce qui a trait aux griefs repris par l’employeur au titre des manquements aux obligations professionnelles, que si l’absence de maîtrise du travail intérimaire et des heures supplémentaires par M. X était connue de la société employeur comme le révèlent les attestations de Mmes Z et A, respectivement directrice et responsable des ressources humaines dès avril 2015 et que que le salarié y a remédié en mettant en place l’organisation préconisée par le service RH en juin suivant, il y a lieu de relever que M. X a continué à recourir au travail intérimaire de Mme B, notamment du 31 août au 4 septembre 2015, soit durant une période non atteinte par la prescription, de manière irrégulière, étant observé que la circonstance que celle-ci était la fille d’un salarié de la société ne pouvait constituer un obstacle à la contestation des contrats précaires dont elle avait bénéficié. Ce grief est donc établi.

En revanche, les reproches relatifs à l’absence totale de prise en main du pilotage du chantier de la DRD ressortent soit de l’attestation de M. C, dont la qualité de directeur général doit conduire à la priver de valeur probante, et/ou sont en rapport avec des faits connus de l’employeur depuis plus de deux mois avant l’engagement de la procédure de licenciement comme en témoignent les échanges de courriels entre M. C et M. X en avril et juin 2015 et ses entretiens annuels d’évaluation de décembre 2014 et mars 2015 et doivent donc être considérés comme prescrits. Il ressort aussi de l’attestation précitée de Mme Z qu’elle a été informée dès le mois de juin 2015 par M. D lui-même de l’absence totale de prise en compte de ses difficultés par M. X, si bien que les faits relatifs à M. D doivent être également tenus pour prescrits. Il n’est produit aucune pièce à établir la réalité des autres griefs énoncés dans la lettre de rupture et/ou de permettre de considérer qu’ils ne sont pas prescrits.

Au vu des développements précédents, de la poursuite de ses fonctions par M. X nonobstant la révélation à l’employeur du fait pourtant L par la société de suffisamment grave pour justifier à lui seul du licenciement pour faute grave et ce jusqu’à la notification de la rupture le 10 novembre 2015 et enfin de l’absence d’éléments de nature à démontrer que la décision de rompre le contrat de travail de l’intéressé serait fondé sur un motif économique, la société justifiant l’avoir remplacé par M. E, il y a lieu de confirmer la décision des premiers juges qui ont retenu l’existence d’une cause réelle et sérieuse de licenciement, mais écarté l’existence d’une faute grave.

L’indemnité de préavis est égale aux salaires et avantages que le salarié aurait reçus s’il avait continué à travailler durant trois mois en application de l’article 35 de la convention collective du commerce de gros appliquée par les premiers juges et qui ne fait l’objet d’aucune contestation utile. Le jugement entrepris sera confirmé sur les dispositions allouant à M. X cette indemnité et les congés payés afférents, sommes qui ne font l’objet d’aucune contestation dans leur montant, même formée subsidiairement.

En application de l’article 4-de l’avenant cadre de la convention collective, l’indemnité de licenciement pour un cadre ayant plus de 5 années de présence dans l’entreprise est de 3/10 de mois par année de présence dans la tranche de 0 à 9 ans inclus, de 4/10 de mois par années de présence dans la tranche de 10 à 19 ans inclus et de 5/10 de mois par année de présence à partir de 20 ans ; le calcul est effectué sur la base du 12e de la rémunération des 12 derniers mois ou, selon la formule la plus avantageuse pour l’intéressé, le tiers des 3 derniers mois, étant entendu que, dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel qui aurait été versée au salarié pensant cette période ne serait prise en compte qu’au prorata temporis, l’indemnité ne pouvant dépasser un maximum de 12 mois ; lorsque le cadre licencié est âgé de plus de 50 ans révolus et compte au moins 15 ans d’ancienneté comme cadre dans l’entreprise, l’indemnité de licenciement fixée ci-dessus est majorée de 15% entre 50 et 55 ans et de 20% à partir de 55 ans révolus.

En considération d’un salaire moyen de 9 169,82 euros calculé en excluant le montant de 3 621,88 euros transféré sur le Perco, de l’ancienneté de M. X de 32 ans et 10 mois et de son âge supérieur à 55 ans au moment de la rupture, du plafonnement à 110 037,81 euros et de la majoration de 20%, il lui sera alloué, par infirmation du jugement entrepris, une indemnité conventionnelle de licenciement de 132 045,37 euros.

Sur le préjudice moral distinct :

Il n’est pas justifié de l’existence de circonstances vexatoires et brutales ayant entouré le licenciement ou d’atteintes à la dignité du salarié, en sorte que le jugement sera confirmé dans son rejet de cette demande indemnitaire.

Sur les rappels de bonus annuels 2015 et 2016 :

Il est constant que la rémunération du salarié était constituée d’une partie variable dénommée bonus annuel pouvant représenter 20% de son salaire annuel fixe basé sur la réalisation d’objectifs personnels fixés annuellement à hauteur de 40% et des objectifs financiers collectifs à hauteur de 60%.

En l’espèce, il n’a été fixé aucun objectif personnel à M. X pour l’année 2015, en sorte que le salarié est en droit de percevoir un bonus en fonction de ce qui a été pratiqué les années précédentes, et non pas seulement, comme le propose la société, un montant correspondant uniquement à la partie du bonus relatif aux performances collectives, soit en l’espèce la somme nette de 10 705,34 euros ou la somme en brut de 13 052,12 euros que le salarié reconnaît avoir perçue, ni non plus le montant total du bonus comme ce dernier le revendique. Il sera donc alloué à M. X au titre du bonus 2015 et au vu des éléments produits, soit les bulletins de salaire des mois de janvier 2011 à 2015, une somme complémentaire de 1 739,75 euros.

Pour ce qui a trait au bonus 2016, à défaut d’exécution d’un quelconque travail durant cette année en raison de la rupture du contrat de travail le 10 novembre 2015, le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté cette demande,

Sur les rappels de congés payés sur les bonus des années 2011 à 2016 :

Le calcul du bonus annuel pouvant représenter 20% de son salaire annuel fixe s’opérant sur l’année entière, soit confondant les périodes de travail et de congés, le paiement de congés payés sur cette part variable équivaudrait à payer partiellement au salarié une seconde fois, si bien le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté ces demandes.

Sur les autres demandes :

Le jugement sera confirmé en ses autres dispositions.

Les solutions apportées aux différents points en litige commandent de laisser à la charge de chaque partie les dépens d’appel engagées par elle et de ne pas faire application en appel de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Rejette le moyen d’irrecevabilité des demandes de nullité du licenciement, de réintégration et de paiement des salaires échus entre son licenciement et le jour de sa réintégration soulevé par la société Logista France ;

Rejette les moyens de nullité du licenciement soulevés par M. F X ;

Confirme le jugement en ses dispositions relatives au licenciement, à l’indemnité compensatrice de préavis, aux congés payés y afférents, au bonus 2016, aux rappels de congés payés sur les bonus 2011 à 2016, au préjudice moral, aux intérêts, à la capitalisation, aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile ;

L'infirme pour le surplus, statuant à nouveau et y ajoutant ;

Fixe le salaire mensuel moyen à 9 169,82 euros ;

Condamne la société Logista France à payer à M. F X les sommes suivantes :

— indemnité conventionnelle de licenciement : 132 045,37 euros,

— rappel de bonus 2015 : 1 739,75 euros ;

Rejette toutes autres demandes des parties ;

Laisse à la charge de chaque partie les dépens d’appel engagées par elle ;

Dit n’y avoir lieu à application en appel de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

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Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 9, 18 novembre 2020, n° 18/10808