Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 6 avril 2022, n° 20/02657

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Chronologie de l’affaire

Commentaires5

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www.bouhana-avocats.com · 19 avril 2023

Voici la seconde partie de l'article sur les discriminations salariales en 2022. Lire la 1ère partie : [STEPHANE JE TE LAISSE METTRE LE LIEN DE LA 1ERE PARTIE ] Voici ce qu'il faut savoir en 2022 sur la discrimination hommes / femmes et la discrimination liée à l'état de santé. La discrimination hommes / femmes en entreprise. Comment est-elle sanctionnée en entreprise ? Cour d'Appel de Reins chambre sociale arrêt du 6 avril 2020 RG n°21/01098 Une Responsable des Ressources Humaines licenciée pour inaptitude saisit la Cour d'Appel pour discrimination hommes / femmes en soutenant …

 

www.bouhana-avocats.com · 6 janvier 2023

En savoir plus : https://www.village-justice.com/articles/salaries-sachez-contester-les-discriminations-dont-vous-etes-victimes,32539.html Voici une synthèse de ce qu'il faut retenir en 2022 pour se défendre face aux discriminations en entreprise. Un système de preuves allégées pour le salarié discriminé Cour d'Appel de Versailles 17ème chambre, 6 avril 2022 RG n°20/02657. Le salarié discriminé doit présenter des éléments de fait laissant supposer l'existence de cette discrimination, et non la preuve de la discrimination. L'employeur doit alors prouver de son côté que la décision …

 

Maître Judith Bouhana- Avocat Spécialiste · LegaVox · 22 novembre 2022
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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 17e ch., 6 avr. 2022, n° 20/02657
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 20/02657
Sur renvoi de : Cour de cassation, 29 septembre 2020
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

17e chambre

ARRÊT N°


CONTRADICTOIRE


DU 6 AVRIL 2022


N° RG 20/02657


N° Portalis DBV3-V-B7E-UFQB


AFFAIRE :

Z X


C/

SAS MONOPRIX EXPLOITATION


Décision déférée à la cour :


Jugement rendu le 21 avril 2016 par le Conseil de prud’hommes de Nanterre


Section: Encadrement


N° RG: F 11/03436


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Valérie GOUTTE

Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE SIX AVRIL DEUX MILLE VINGT DEUX,


La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

DEMANDERESSE devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation (Chambre sociale) du 30 septembre 2020 cassant et annulant partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles (11ème chambre) du 17 janvier 2019

Madame Z X née le […] à Paris

de nationalité française

[…]

[…]


Comparante et assistée de Me Valérie GOUTTE, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : E0230

****************

DÉFENDERESSE DEVANT LA COUR DE RENVOI:

SAS MONOPRIX EXPLOITATION


N° SIRET : 552 083 297

[…]

[…]


Représentée par Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629

et Me Pascal PETREL de la SELARL P & A SOCIETE D’AVOCATS, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0016, susbtitué à l’audience par Maître ABOUDRARE Ahmed, avocat au barreau de PARIS

****************

Composition de la cour :


En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 février 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseiller,


Greffier, lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU


Par jugement du 21 avril 2016, le conseil de prud’hommes de Nanterre (section encadrement), en sa formation de départage, a :


- pris acte de ce que le syndicat SCID/CFDT ne formule plus aucune demande à l’encontre de la société Monoprix,


- débouté les parties de leurs demandes,
- dit n’y avoir lieu à capitalisation des intérêts,


- dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,


- condamné Mme Z X aux dépens.


Par déclaration adressée au greffe le 9 mai 2016, Mme X a interjeté appel de ce jugement.


Par arrêt du 17 janvier 2019, la 11ème chambre sociale de la cour d’appel de Versailles a :


- confirmé le jugement entrepris en toutes ses dispositions hormis celles relatives au manquement de l’employeur à son obligation de sécurité et à la dévalorisation des droits à la retraite en raison d’une discrimination syndicale,

statuant de nouveau des dispositions infirmées,


- condamné la société Monoprix à payer à Mme X :

. 8 000 euros en réparation du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité,

. 8 000 euros en réparation du préjudice lié à la dévalorisation de ses droits à la retraite,


- dit que ces sommes à caractère indemnitaire produiront intérêts au taux légal à compter de l’arrêt,


- ordonné la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,


- débouté les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,


- condamné la société Monoprix aux dépens de première instance et d’appel,


- condamné la société Monoprix à payer à Mme X la somme de 2 000,00 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.


Par arrêt du 30 septembre 2020, la Chambre sociale de la Cour de cassation a :


- cassé et annulé, sauf en ce qu’il déboute Mme X de ses demandes au titre du rappel de prime d’habillage et du rappel de prime de transport et de tickets restaurant ainsi que de sa demande en dommages-intérêts pour discrimination en raison de l’âge et en ce qu’il condamne la société Monoprix à payer à Mme X la somme de 8 000 euros en réparation du manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité, l’arrêt rendu le 17 janvier 2019 entre les parties, par la cour d’appel de Versailles,


- remis, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état ou’ elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée,


- condamné la société Monoprix exploitation aux dépens,


- en application de l’article 700 du code de procédure civile, rejeté la demande formée par la société Monoprix exploitation et la condamné à payer à Mme X la somme de 3 000 euros,


- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé.


Par déclaration adressée au greffe le 27 novembre 2020, Mme X a saisi la cour d’appel de
Versailles désignée comme cour d’appel de renvoi.


Par conclusions remises et soutenues oralement à l’audience par son conseil, Mme X demande à la cour de :


- la recevoir en son appel et y faire droit,


- infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,


- dire recevable la déclaration de saisine et la dire valable,


- dire que l’effet dévolutif de l’appel est opérant,

en conséquence,


- dire qu’elle est victime de discrimination, au sens des articles L. 1132-1 et suivants du code du travail, de la part de son employeur la société Monoprix et que celle-ci a entravé et entrave son évolution de carrière et de sa rémunération,


- constater le défaut de respect de l’obligation de sécurité de résultat,


- constater son défaut de reclassement depuis sa mise en inaptitude à son poste de chef de département parapharmacie du magasin de Beaugrenelle,


- constater les modifications substantielles du contrat de travail et le défaut d’avenant y compris pour les périodes concernées par le mi-temps thérapeutique,

en conséquence,


- fixer son salaire au 1er janvier 2007 à la somme de 3 431,00 euros bruts mensuels,

en conséquence de la fixation de son salaire de référence à la somme de 3 431,00 euros,


- condamner la société Monoprix au paiement de la différence entre les salaires perçus et ceux qu’elle aurait dû percevoir en tenant compte des cotisations sociales patronales et salariales, notamment celles inhérentes à la retraite de base et complémentaire, des 13èmes mois, soit la somme de 146 357,00 euros bruts outre les congés payés soit 14 635,00 euros (sauf à parfaire),


- déterminer l’évolution de ses salaires depuis le 1er janvier 2007 jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,


- ordonner à la société Monoprix d’établir les bulletins de salaires rectifiés dans un délai de trois mois et ce sous astreinte de 50,00 euros par jour de retard,


- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 8 000,00 euros pour défaut du non-respect de l’obligation de sécurité de résultat,


- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 61 758,00 euros pour défaut d’entretien d’évaluation annuelle,


- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 300 000,00 euros pour discrimination syndicale,


- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 123 516,00 euros pour discrimination du fait de l’âge et du handicap,
- rembourser la somme de 35 euros de timbre fiscal qu’elle a payée lors de la saisine du conseil de prud’hommes,


- rembourser la somme de 500 euros de participation à la médiation que la société Monoprix a interrompue unilatéralement,


- augmenter des intérêts au taux légal à compter de la saisine,


- ordonner la capitalisation des intérêts,


- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile à lui verser.


Par dernières conclusions remises au greffe le 11 novembre 2021, la société Monoprix Distribution demande à la cour de :

à titre principal,


- dire que l’acte de saisine est nul,


- dire que l’effet dévolutif de l’appel n’a pas opéré faute pour Mme X d’avoir précisé dans le dispositif de ses conclusions les chefs de jugement à infirmer,


- dire que la cour d’appel n’est saisie d’aucun appel,


- dire que les demandes de madame X sont irrecevables,

à titre subsidiaire,

- confirmer le jugement de départage du conseil de prud’hommes de Nanterre,

en conséquence,


- débouter Mme X de l’intégralité de ses demandes,

en tout état de cause,


- condamner reconventionnellement Mme X à lui payer la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,


- condamner Mme X aux entiers dépens.

LA COUR,

Mme Z X a été engagée par la société Monoprix, en qualité d’acheteuse adjointe, par contrat de travail à durée indéterminée, à compter du 12 février 1996.


Elle a occupé par la suite les postes de chef de produit, acheteur et responsable qualité en charge des produits cosmétiques et produits d’entretien.


Les relations contractuelles étaient régies par la convention collective nationale des grands magasins et des magasins populaires.


Le 23 février 2004, Mme X a été nommée représentante syndicale au comité d’entreprise.
Depuis juin 2004, elle est déléguée du personnel, membre du comité d’entreprise et secrétaire du comité d’entreprise du siège.


Par courrier du 6 juillet 2005, Mme X a indiqué à la direction des ressources humaines de la société Monoprix qu’elle était candidate au plan de départs volontaires afin de réaliser un projet personnel de naturopathe.


Le 16 décembre 2005, la SAS Monoprix a sollicité auprès de l’inspecteur du travail l’autorisation de licencier Mme X. Le 6 février 2006, l’inspecteur du travail donnait son accord.


Le 21 avril 2006, sur requête de la salariée, l’inspecteur a annulé son autorisation de licenciement motif pris de ce que la salariée ne souhaitait plus initier son projet personnel et n’était plus volontaire au départ.


Le 4 septembre 2006, à la suite d’un arrêt maladie, le médecin du travail a déclaré Mme X apte à son poste dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique.

Mme X a travaillé en mi-temps thérapeutique du 5 septembre 2006 au 31 décembre 2006 et du 2 janvier 2007 au 30 avril 2007. Elle a été mutée pour occuper les fonctions d’adjointe de l’espace pharmacie du magasin Monoprix de Beaugrenelle.


Le 19 décembre 2006, Mme X a été désignée représentante syndicale CFDT au comité d’établissement du magasin de Beaugrenelle.


Le 24 mars 2009, le médecin du travail la déclarait apte à son poste, mais proposait une mutation sur un poste de type administratif.


A l’issue de deux visites médicales des 4 et 18 novembre 2010, la salariée a été déclarée inapte au poste de pharmacienne, le médecin du travail concluant à la nécessité de procéder à son reclassement professionnel sur un poste de type administratif ne nécessitant pas de mouvements répétitifs des épaules au-dessus de l’horizontale, ni de travail accroupi, ni de port de charges, ni de station debout prolongée.


Par courrier du 19 mai 2011, la société Monoprix a proposé à Mme X des postes de reclassement en qualité d’assistante de directeurs commerciaux régionaux et de gestionnaire comptabilité.


Par lettres du 18 juillet 2011 et le 21 octobre 2011, Mme X a été convoquée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement.


Ces deux procédures de licenciement n’ont pas abouti.


Le 13 décembre 2011, la société Monoprix a sollicité de l’inspection du travail l’autorisation de procéder au licenciement de la salariée.


Le 27 décembre 2011, Mme X a saisi le conseil de prud’hommes de Nanterre pour obtenir des rappels de primes et solliciter la condamnation de son employeur pour discrimination syndicale, discrimination du fait de l’âge et discrimination du fait du handicap.


Depuis le mois de novembre 2010, la salariée est dispensée d’activité.


Le 17 janvier 2017, la salariée a fait l’objet d’un nouvel avis d’inaptitude du médecin du travail.


Par lettre du 10 avril 2017, Mme X a reçu une convocation à un entretien préalable à un licenciement, fixé le 28 avril 2017.


Le 11 mai 2017, la société Monoprix a informé Mme X qu’une demande d’autorisation de licenciement était envoyée le même jour à l’Inspection du travail.


Le 4 juillet 2017, l’inspecteur du travail a notifié sa décision de refus de licenciement aux parties.


Le 14 mars 2018, le ministère du travail a rejeté le recours hiérarchique effectué par la société Monoprix.


Le 3 novembre 2020, la cour administrative d’appel de Paris, a rejeté la requête de la société Monoprix visant à obtenir l’annulation de la décision du 9 mai 2019 rendue par le tribunal administratif de Paris qui statuait sur la demande d’annulation de la décision de l’inspecteur du travail refusant d’autoriser le licenciement de Mme X du 4 juillet 2017.

SUR CE,

Sur la nullité de l’acte de saisine :


La société se fonde sur les articles 1033, 910 et 58 du code de procédure civile et soutient que l’acte de saisine de la salariée ne permet pas de savoir qu’il s’agit d’une saisine après renvoi après cassation puisque seul le jugement y est mentionné.


En réplique, la salariée expose que la société, qui a été présente à tous les stades de la procédure, ne peut se méprendre sur la portée de son acte de saisine et expose que la société ne justifie d’aucun grief.


L’article 1032 du code de procédure civile prescrit en son premier alinéa que la juridiction de renvoi est saisie par déclaration au greffe de cette juridiction.


L’article 1033 prévoit que la déclaration contient les mentions exigées pour l’acte introductif d’instance devant cette juridiction ; une copie de l’arrêt de cassation y est annexée.


En l’espèce, la déclaration de saisine de la salariée en date du 27 novembre 2020 ne mentionne pas qu’il s’agit d’un renvoi après cassation. Toutefois, il apparaît qu’en application de l’article 1036 du code de procédure civile, le greffe de cette cour a, le 27 novembre 2020 :

. accusé à la salariée réception de sa déclaration de saisine « accompagnée de la copie de l’arrêt de la cour de cassation »,

. avisé la société, par courrier ayant pour objet « renvoi après cassation », de ce que la cour d’appel de Versailles avait été saisie par la salariée.


Dès lors, non seulement l’irrégularité alléguée n’est pas établie, l’article 1033 ne prescrivant pas de mentionner dans la déclaration au greffe que la cour est saisie d’un renvoi après cassation mais seulement d’annexer une copie de l’arrêt de cassation, ce qui a été fait. Mais en outre, la société avait une connaissance parfaite du cadre procédural dans lequel la cour d’appel de Versailles était saisie ; cadre à propos duquel elle ne pouvait avoir aucun doute de sorte que, comme le soutient à juste titre la salariée, à la supposée établie l’irrégularité ne lui aurait fait aucun grief.


La demande de nullité de l’acte de saisine sera en conséquence rejetée.

Sur la demande de confirmation motif pris de l’absence de mention, dans le dispositif des conclusions de l’appelante, des chefs du jugement dont la réformation est demandée :
La société se fonde sur les articles 4, 561, 562, 542 et 954 du code de procédure civile et expose que la salariée se contente, dans le dispositif de ses conclusions, de former des demandes sans préciser l’infirmation ou la confirmation des chefs de jugement dont la réformation est sollicitée.


La salariée réplique que ces articles et en particulier les articles 542, 561, 562 et 954 du code de procédure civile visés par l’employeur n’ont pas vocation à s’appliquer à la cause s’agissant d’un appel qui a été interjeté avant le 1er août 2016.


L’article 542 du code de procédure civile prévoit que l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.


Cet article est issu de l’article 7 du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile.


Il ressort de l’article 53-II bis dudit décret, notamment que :

« I. – Les dispositions du présent décret s’appliquent à compter du 1er septembre 2017. II. – Par exception au I, les dispositions des articles 1 et 2 s’appliquent aux décisions rendues à compter du 1er septembre 2017.

(') »


Le décret n° 2017-1227 du 2 août 2017 modifiant les modalités d’entrée en vigueur du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 relatif aux exceptions d’incompétence et à l’appel en matière civile prévoit en son article 1 : « Le décret du 6 mai 2017 susvisé est ainsi modifié : (') 2° L’article 53 est ainsi modifié :

a) Au II, les mots : « Par exception au I, les » sont remplacés par le mot : « Les » ; b) Après le II, il est inséré un alinéa II bis ainsi rédigé : « II bis.- Les dispositions des articles 7 à 21, des second, cinquième et sixième alinéas de l’article 22, des articles 23 à 29, de l’article 31, du 2° de l’article 32, et des articles 34, 41 et 42 s’appliquent aux appels formés à compter du 1er septembre 2017. Ces dispositions et celles de l’article 40 s’appliquent aux instances consécutives à un renvoi après cassation lorsque la juridiction de renvoi est saisie à compter du 1er septembre 2017. »

(') »


Certes, la salariée a interjeté appel du jugement le 9 mai 2016, c’est-à-dire à une époque où la procédure était orale, mais il ressort des textes susvisés que les dispositions de l’article 7 du décret n°2017-891 du 6 mai 2017 – et par conséquent de l’article 542 du code de procédure civile dans sa nouvelle rédaction – s’appliquent aux appels formés à compter du 1er septembre 2017 ainsi qu’aux instances consécutives à un renvoi après cassation lorsque la juridiction de renvoi est saisie à compter du 1er septembre 2017.


Or, au cas d’espèce, l’arrêt de cassation partielle date du 30 septembre 2020 et la présente juridiction de renvoi a été saisie le 27 novembre 2020 soit postérieurement au 1er septembre 2017.


Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement. Cette règle de procédure résulte de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’a été affirmée par la cour de cassation dans un arrêt publié que le 17 septembre 2020, date à partir de laquelle cette interprétation doit être retenue, sauf à priver l’appelant du droit à un procès équitable au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.


En l’espèce, dans le dispositif de ses conclusions postérieures au 17 septembre 2020 -, la salariée demande « d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions ». L’infirmation du jugement attaqué est donc bien demandée. Sur ce point précis, la société explique, au visa de l’article 562 du code de procédure civile dans sa rédaction issue du décret du 6 mai 2017, qu’il est interdit de solliciter dans sa déclaration d’appel l’infirmation de l’entier jugement ; qu’il est donc nécessaire de réitérer dans le dispositif des conclusions les chefs du jugement dont l’infirmation est critiquée.


Toutefois, cette règle issue de l’article 562 n’est applicable qu’à la déclaration d’appel et pas aux conclusions. En outre, le fait, pour la salariée, d’avoir demandé dans ses conclusions d’infirmer le jugement « entrepris en toutes ses dispositions » suffit à satisfaire les exigences de l’article 542, qui ne se combine pas avec l’article 562.


Par ailleurs, au dernier état de ses prétentions, la salariée fait plaider que l’effet dévolutif a déjà joué, que seul l’acte d’appel opère dévolution des chefs critiqués du jugement et que la déclaration de saisine de la juridiction de renvoi devant laquelle l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation ne constitue pas une nouvelle déclaration d’appel.


Effectivement, la déclaration de saisine au greffe de la juridiction de renvoi n’est pas une nouvelle déclaration d’appel.


Au cas d’espèce, la déclaration d’appel date du 9 mai 2016. Cette déclaration d’appel indiquait : « appel total ». Cette seule indication a depuis la réforme issue du décret du 6 mai 2017 (art. 562) pour effet de paralyser l’effet dévolutif. Mais à l’époque à laquelle la déclaration d’appel a été formalisée (9 mai 2016), cette règle n’était pas applicable.


De là il suit que sera rejetée la demande de la société tendant à la confirmation pure et simple du jugement motif pris de l’absence de mention, dans le dispositif des conclusions de l’appelante, des chefs du jugement dont la réformation est demandée.

Sur le champ de la cassation et les limites dans lesquelles la présente cour est saisie :


L’article 625 alinéa 1 du code de procédure civile prévoit que sur les points qu’elle atteint, la cassation replace les parties dans l’état où elles se trouvaient avant le jugement cassé.


L’article 631 énonce que devant la juridiction de renvoi, l’instruction est reprise en l’état de la procédure non atteinte par la cassation.


En l’espèce, la cour de cassation, dans son arrêt du 30 septembre 2020, a :

. cassé et annulé, sauf en ce qu’il déboute Mme X de ses demandes au titre du rappel de prime d’habillage et du rappel de prime de transport et de tickets restaurant ainsi que de sa demande en dommages-intérêts pour discrimination en raison de l’âge et en ce qu’il condamne la société Monoprix à payer à Mme X la somme de 8 000 euros en réparation du manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité, l’arrêt rendu le 17 janvier 2019 entre les parties, par la cour d’appel de Versailles,


- remis, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état ou’ elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyés devant la cour d’appel de Versailles, autrement composée.


Compte tenu de cette décision, la présente cour n’est pas tenue d’examiner les demandes suivantes, formées par la salariée :
« - condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 8 000,00 euros pour défaut du non-respect de l’obligation de sécurité de résultat,

- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 123 516,00 euros pour discrimination du fait de l’âge »


Ces demandes sont irrecevables et seront déclarées telles.

Sur le défaut de reclassement :


La salariée expose que l’employeur a manqué à son obligation de reclassement lors de son inaptitude de 2010, en s’abstenant de lui proposer un poste correspondant à son profil et à son aptitude physique alors que de tels postes existaient au sein de la société, ce qui est contesté par la société.


Les articles L. 1226-10 à L. 1226-12 du code du travail, dans leur version applicable au présent litige, prévoient que :

. Lorsque, à l’issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à un accident du travail ou à une maladie professionnelle, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte, après avis des délégués du personnel, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur l’aptitude du salarié à exercer l’une des tâches existant dans l’entreprise. Dans les entreprises d’au moins cinquante salariés, le médecin du travail formule également des indications sur l’aptitude du salarié à bénéficier d’une formation destinée à lui proposer un poste adapté. L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en 'uvre de mesures telles que mutations, transformations de postes ou aménagement du temps de travail.

. Lorsque, à l’issue d’un délai d’un mois à compter de l’examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n’est pas reclassé dans l’entreprise ou s’il n’est pas licencié, l’employeur lui verse, dès l’expiration de ce délai, le salaire correspondant à l’emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail.


Ces dispositions s’appliquent également en cas d’inaptitude à tout emploi dans l’entreprise constatée par le médecin du travail.

. Lorsque l’employeur est dans l’impossibilité de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent au reclassement.


L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-10, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions. Il peut également rompre le contrat de travail si l’avis du médecin du travail mentionne expressément que tout maintien du salarié dans l’entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé.


S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III.


En l’espèce, la salariée a été reconnue comme devant bénéficier du statut de travailleur handicapé le 29 mars 2010 (cf. pièce 72 S). Après un arrêt de travail, le premier examen médical de reprise en date du 4 novembre 2010 concluait que « une inaptitude au poste est à prévoir ». Le second examen du 18 novembre 2010 concluait ainsi : « A la suite du premier examen (') et de l’étude de poste réalisée le lundi 15 novembre, Mme X est inapte à son poste de pharmacienne. Elle pourrait être affectée à un poste ne nécessitant pas de mouvements répétitifs des épaules au-dessus de l’horizontale, pas de travail accroupi ni de port de charges ni station debout prolongée. Peut être reclassée à un poste de type administratif ») (cf. pièces 81 et 84 S).


Il n’est pas discuté que l’inaptitude de la salariée avait une origine professionnelle.


Par sa pièce 3, la société montre avoir, dans le courant du mois de novembre 2010, très largement diffusé aux établissements de la société du groupe une recherche visant au reclassement de la salariée.


Il n’est pas discuté qu’à l’issue de cette recherche, la société lui a proposé 3 postes (pièces 5 E et 94 S) les 7 et 9 février 2011 (le 7 oralement et le 9 par lettre recommandée avec demande d’avis de réception) :

. un poste de merchandiser alimentaire PGC niveau cadre,

. un poste d’assistante Directeurs Commerciaux Régionaux niveau agent de maîtrise ou employé,

. un poste d’employée de la comptabilité.


Ainsi qu’il résulte du courrier que la salariée a adressé à l’employeur le 18 avril 2011 (pièce 7 E), le poste de merchandiser lui convenait et la salariée avait manifesté son intérêt pour ce poste. Pour autant, par son courrier du 18 avril 2011, la salariée expliquait avoir repéré sur le site de Monoprix une annonce pour un poste de « moniteur en parapharmacie » qui ' disait-elle ' lui convenait mieux de sorte qu’elle expliquait renoncer au poste de merchandiser alimentaire au profit de celui qu’elle avait identifié sur le site de la société.


Il apparaît que lorsque les délégués du personnel ont été consultés les 5 et 6 mai 2011 sur le reclassement de la salariée (pièces 9 et 10 E), seuls les postes d’assistante Directeurs Commerciaux Régionaux et d’employée de la comptabilité étaient proposés au reclassement : le poste de merchandiser alimentaire PGC ne l’était plus. Il ressort du procès-verbal de consultation que « le poste de merchandiser produits frais n’est pas disponible. Il a été pourvu par un CDD dans l’attente du retour de congé maternité de la collaboratrice qui est à ce poste. Il ne s’agit pas d’un poste pérenne ». Toutefois, cette explication est douteuse car il est surprenant que ce poste ait – en toute connaissance de cause – été proposé à la salariée les 7 et 9 février et que subitement, les 5 et 6 mai 2011 – après que la salariée ait manifesté de l’intérêt pour le poste ' ce poste ne soit plus disponible au motif qu’il avait été pourvu par un CDD et qu’il n’était pas pérenne. D’ailleurs, indépendamment du seul procès-verbal de consultation visé ci-dessus, la société n’apporte aucun autre élément qui viendrait corroborer cette explication. Au surplus, même un CDD doit être proposé dans le cadre d’un reclassement.


Ce seul fait traduit, de la part de la société dès le mois de mai 2011, sa déloyauté en même temps que son manquement à l’obligation de rechercher, de bonne foi, le reclassement d’un salarié inapte.


Par ailleurs, il doit être observé que par suite d’un nouvel avis d’inaptitude du 17 janvier 2017, l’employeur a cherché à licencier la salariée pour inaptitude ; que pour ce faire, il a demandé l’autorisation de l’inspection du travail, laquelle a refusé de donner son autorisation, motif pris de ce que la société n’avait pas satisfait à son obligation de reclassement. Cette décision a été contestée devant le tribunal administratif de Paris qui par jugement du 9 mai 2019 a rejeté le recours de la société estimant que la société n’avait pas satisfait à son obligation de reclassement. Ce jugement du tribunal administratif de Paris a enfin été confirmé par arrêt du 3 novembre 2020 de la cour administrative d’appel de Paris.

Sur la discrimination syndicale et la discrimination en raison du handicap :
L’article L. 1132-1 du code du travail dispose qu’aucun (') salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière de rémunération, au sens de l’article L. 3221-3, de mesures d’intéressement ou de distribution d’actions, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de (') ses activités syndicales ou mutualistes (') ou en raison de son état de santé ou de son handicap.


Sur le terrain de la preuve, il n’appartient pas au salarié qui s’estime victime d’une discrimination d’en prouver l’existence. Suivant l’article L. 1134-1, il doit seulement présenter des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination. Au vu de ces éléments, il incombe à l’employeur de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.


En l’espèce, la salariée invoque et établit les faits suivants :

. le fait qu’alors qu’elle percevait une rémunération brute mensuelle de 3 431 euros en sa qualité d’acheteuse au siège, cette rémunération a baissé pour être fixée à 2 842 euros à compter du 1er janvier 2007 lorsqu’elle a été mutée en qualité de pharmacienne adjointe de l’espace parapharmacie de Beaugrenelle ;

. le fait qu’elle n’a plus bénéficié d’entretien annuel d’évaluation depuis l’année 2011,

. le fait que la société a notamment :

. écrit dans le courriel adressé par sa supérieure hiérarchique le 10 juin 2005 : « (') Suite à notre discussion de la semaine dernière concernant les incohérences entre le temps que vous m’indiquez consacrer à vos missions syndicales (50%) le temps que la DRH m’indique correspondre à vos délégations (30%) et du « préjudice » que cela engendre sur la réalisation de vos missions au sein de la DQS, je souhaite que vous puissiez rapidement prendre rendez-vous avec la DRH afin de faire le point et clarifier cette question qui, comme je vous l’ai indiqué, me pose problème dans le fonctionnement de la Direction Qualité Sécurité (') » (pièce 191 S) avec cette précision que le 13 juin 2005, la salariée écrivait à la DRH, faisant suite au courriel rappelé ci-avant, pour lui demander un rendez-vous « le plus rapidement possible » (toujours pièce 191 S) et qu’il n’est pas contesté qu’aucune suite n’a été réservée par la DRH à cette demande, qui avait pourtant été renouvelée par la salariée le 20 juin 2005 (cf. encore pièce 191 S) ;

. écrit dans ses conclusions rédigées dans le cadre du litige qui opposait les parties devant le TASS que « de plus, dans les faits, Mme X n’effectuait pas l’intégralité de son temps de travail puisqu’au regard de ses différents mandats et de ses heures de délégation, elle n’effectuait pas l’intégralité de son temps de travail » (pièce 267 S).

. le fait que l’employeur a initié à son encontre trois procédures de licenciement (2006, 2011, 2017),

. le fait que l’employeur a évité de la reclasser en lui faisant des propositions inadaptées en occultant un poste qui pouvait lui convenir (cf. supra) de sorte que depuis 2011, elle n’occupe plus aucun poste au sein de la société,

. le fait qu’alors qu’elle avait été conviée par courriel du 24 octobre 2011 à une réunion et que sa présence était jugée « indispensable » (pièce 132 S), elle a en définitive été évincée de ladite réunion du 8 novembre 2011 (pièce 133 S) au motif qu’elle était en « suspension de contrat ».
La salariée établit aussi qu’elle a fait l’objet :

. de nombreux arrêts de travail depuis février 2006,

. d’une reconnaissance, le 29 mars 2010 par la MDPH des Hauts-de-Seine d’un taux d’incapacité inférieur à 50 % (cf. pièce 72 S),

. et d’un avis d’inaptitude de la part du médecin du travail en 2011,

. avec cette précision que, s’agissant de la pathologie dont souffre la salariée aux épaules, la faute inexcusable de la société a été reconnue par le TASS dans sa décision définitive du 9 juin 2015.


Il n’est enfin pas contesté que la salariée était investie de mandats représentatifs depuis 2004.


Dans ce contexte, les faits présentés et établis par la salariée, qu’ils soient pris dans leur ensemble ou même isolément, font présumer une discrimination syndicale et une discrimination en raison de son état de santé ou de son handicap.


Il revient en conséquence à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.


Au rang des faits qui ont été retenus comme faisant présumer une discrimination tant syndicale qu’à raison de l’état de santé de la salariée, l’employeur justifie certaines de ses décisions par des éléments objectifs étranger à toute discrimination.


En revanche, certaines de ses décisions ne sont pas justifiées par des éléments étrangers à toute discrimination :

. le fait, pour l’employeur de réduire la rémunération de la salariée de 3 431 euros à 2 842 euros est expliqué par la société par le fait que la mutation de la salariée ne résulterait que de sa demande, exprimée le 25 mai 2006. Pour autant, il apparaît que la question de la rémunération de la salariée n’a pas été évoquée avant le 5 septembre 2006, date à laquelle par courrier, la société lui a fait savoir quelle serait sa rémunération à compter du 1er décembre 2006, mettant ainsi la salariée devant le fait accompli. Or, il ressort des nombreux courriers produits par la salariée qu’elle n’acceptait pas cette rémunération. Et cette nouvelle rémunération ne pouvait être imposée à la salariée s’agissant d’une modification de son contrat de travail ce dont il découle que l’employeur ne justifie pas par une raison objective étrangère à toute discrimination le fait d’avoir réduit la rémunération litigieuse, peu important la poursuite, par la salariée du contrat de travail dans les nouvelles conditions, cette circonstance ne permettant pas de caractériser de sa part une acceptation expresse et non équivoque ;

. le fait, pour la société, d’avoir engagé une procédure de licenciement en décembre 2005 (le 16 décembre 2005, la société sollicitait une autorisation de licencier la salariée) alors qu’elle n’ignorait en rien que la salariée avait candidaté au plan de départs volontaires afin de réaliser un projet personnel de naturopathe et que la demande de prise en charge du congé individuel de formation de la salariée avait été refusée par le FONGECIF, ce dont la société avait été avisée par courrier du 18 novembre 2005 et dont elle aurait dû déduire que la salariée ne souhaitait plus adhérer au plan de départs, raison pour laquelle, d’ailleurs, l’inspecteur a annulé son autorisation de licenciement ;

. le fait pour la société d’avoir engagé une procédure de licenciement pour inaptitude en avril 2017 alors que l’employeur n’avait pas satisfait à son obligation de reclassement, n’est pas justifié par une cause étrangère à toute discrimination ;

. le fait, pour la société, d’avoir retiré de la liste des postes ouverts au reclassement celui pour lequel la salariée avait initialement manifesté son intérêt (poste de merchandiser alimentaire PGC) n’est pas justifié par des éléments étrangers à toute discrimination. En effet, la société ne donne, au travers des seuls éléments contenus dans le procès-verbal de réunion des délégués du personnel du 6 mai 2011 (pièce 10 E), qu’une explication sujette à caution (« le poste de merchandiser produits frais n’est pas disponible. Il a été pourvu par un CDD dans l’attente du retour de congé maternité de la collaboratrice qui est à ce poste. Il ne s’agit pas d’un poste pérenne ») qui n’est démontrée par aucun élément. Il faut en déduire que ce poste aurait dû être proposé à la salariée ;

. le fait que la salariée n’a plus bénéficié d’aucun entretien annuel d’évaluation depuis l’année 2011 ne s’explique pas objectivement par le fait que la salariée est depuis novembre 2010 (date de son inaptitude) dispensée d’activité. En effet, l’employeur a manqué à son obligation de reclassement, manquement sans lequel la salariée aurait été placée en situation d’accepter un nouveau poste et donc, de bénéficier d’entretiens annuels. Il convient à cet égard de relever que les entretiens professionnels, comme le montrent les pièces 251, 252 et 253 de la salariée (documentation interne à la société), sont déterminants pour l’évolution de carrière des salariés ;

. le fait que la salariée ait été évincée de la réunion du 8 novembre 2011 n’est pas justifié par l’employeur par un élément étranger à toute discrimination dès lors que le motif allégué (la « suspension de contrat » en l’occurrence) est fallacieux : en effet, le contrat de travail n’était plus suspendu à cette date dès lors qu’en application de l’article L. 1226-11 le délai d’un mois à compter de l’examen médical de reprise déclarant la salariée inapte (examen datant du 18 novembre 2010) était déjà écoulé.


La discrimination syndicale et la discrimination en raison du handicap sont donc établies.


La salariée a subi au titre de la discrimination syndicale un préjudice d’évolution de carrière qui sera réparé par l’allocation d’une somme de 20 000 euros et au titre de la discrimination en raison de l’état de santé un préjudice qui sera réparé par l’allocation d’une somme de

12 000 euros.

Sur la demande de rappel de salaire :

Sur le principe du rappel de salaire :


La salariée expose que lors de sa mutation dans le magasin de Beaugrenelle, l’employeur lui a imposé un salaire réduit qu’elle n’avait pas accepté.


Au contraire, la société expose que la salariée avait elle-même demandé sa mutation et que la baisse de sa rémunération est due à ce changement de poste.


Le pouvoir de direction de l’employeur ne l’autorise pas à modifier unilatéralement le contrat qu’il a conclu avec le salarié. Si une modification se révèle nécessaire, alors elle ne peut être imposée au salarié dont l’accord express et non équivoque doit être recherché et obtenu à défaut de quoi l’employeur doit soit retirer sa proposition, soit prendre l’initiative de la rupture du contrat de travail.


En l’espèce, il apparaît qu’à sa demande, la salariée a été mutée au magasin de Beaugrenelle dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique (pièce 13 S – fiche de reprise du 4 septembre 2006). Sa mutation a été acceptée sur le poste d’adjointe Pharmacie dans le magasin de Beaugrenelle. Par courrier du 5 septembre 2006, l’employeur lui indiquait qu’à l’issue de son mi-temps thérapeutique, elle prendrait la responsabilité de l’espace pharmacie d’un magasin pour lequel elle serait rémunérée à hauteur de 2 842 euros bruts par mois pour un temps plein (pièce 16 S). La salariée s’est plaint de cette baisse de rémunération pour la première fois par courrier du 5 octobre 2006 (pièce 17 S). La salariée a encore manifesté son désaccord sur sa rémunération par la suite à de multiples reprises.
Il n’est au demeurant pas discuté que la mutation litigieuse s’est effectivement traduite par une baisse de la rémunération de la salariée, celle-ci passant d’une rémunération brute mensuelle de 3 431 euros en sa qualité d’acheteuse au siège, à celle 2 842 euros à compter du 1er janvier 2007 en sa nouvelle qualité de pharmacienne adjointe de l’espace parapharmacie de Beaugrenelle.


Cette baisse de rémunération ne pouvait être imposée à la salariée qui aurait dû l’accepter de façon expresse et non équivoque ce qui n’est de toute évidence pas le cas.


Il en résulte que la salariée aurait dû voir sa rémunération maintenue ce qui conduit à infirmer le jugement et à accorder à la salariée le rappel de salaire qui lui est dû.


Sur ce point, la société conclut à la prescription des demandes de la salariée qui portent sur la période de 2006 à 2011.


De fait, pour prétendre à un rappel de salaire de « 146 357,00 euros bruts outre les congés payés soit 14 635 euros bruts à fin 2021 », la salariée présente un tableau remontant à l’année 2007 (pièce 318 S).

Sur la prescription :


Les actions en paiement ou en répétition des salaires sont prescrites au bout de 3 ans par application de l’article L. 3245-1 du code du travail qui dispose : « L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. »


Ce texte est issu de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 (article 21 IV) qui, pour avoir été publiée au journal officiel de la République française le 16 juin 2013, s’applique à compter du 17 juin 2013.


Avant l’entrée en vigueur de cette loi, l’action portant sur le paiement ou la répétition du salaire était régie par la prescription quinquennale de l’ancien article L. 3245-1 du code du travail (renvoyant à l’article 2224 du code civil), tel qu’issu de la loi du 17 juin 2008.


Or, l’article 21-V de la loi du 14 juin 2013 dispose « Les dispositions du code du travail prévues aux III et IV du présent article s’appliquent aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loi, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure. »


Il s’ensuit que les dispositions de la loi nouvelle qui ont réduit le délai de prescription de 5 à 3 ans se sont appliquées à compter du 17 juin 2013 aux prescriptions en cours, pour le temps qu’il leur restait à courir, sans que celui-ci puisse excéder les limites fixées par la loi antérieure.


Le point de départ de la prescription est fixé à la date à laquelle le salarié a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son action.


Concernant le rappel de salaire, le délai de prescription court à compter de la date à laquelle la créance salariale est exigible ; pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré.


En l’espèce, la demande de rappel de salaires de la salariée porte sur une période commençant en janvier 2007 et s’achevant « fin 2021 » (p. 77 de ses conclusions) ce qu’il faut comprendre comme « décembre 2021 ». Une partie de cette demande de rappel de salaire était régie par la prescription antérieure (la demande portant sur les salaires entre janvier 2007 et le 17 juin 2013) et l’autre partie de cette demande est régie par la loi de prescription telle qu’issue de la loi du 14 juin 2013 (la demande portant sur les salaires postérieurs au 17 juin 2013).


La salariée a saisi le conseil de prud’hommes le 27 décembre 2011 ce qui lui permet de prétendre à un rappel de salaire remontant, comme elle le demande, à janvier 2007.


Dès lors, la fin de non-recevoir ne peut prospérer de sorte que la demande doit être étudiée au fond sur toute la période revendiquée.

Sur le salaire de référence et le rappel dû à la salariée :


La salariée expose que du fait de la discrimination qu’elle a subie, sa carrière a stagné et qu’il convient de fixer le salaire qu’elle aurait dû percevoir si elle n’avait pas subi cette discrimination. Elle se réfère à son tableau en pièce 318 dont il ressort qu’elle aurait dû percevoir un salaire mensuel théorique de 3 431 euros. Par différence avec le salaire perçu (2 842 euros par mois jusqu’en 2010 puis 2898 euros par mois à partir de 2010), elle en déduit un rappel annuel puis global.


La société n’apporte de réplique que sur le principe du rappel et non sur son quantum.


La méthode proposée par la salariée permet arithmétiquement d’apprécier le rappel qui lui est dû. Cette méthode sera retenue par la cour.


Dès lors, infirmant le jugement, il convient, dans les limites de la demande, de condamner la société à payer à la salariée la somme qu’elle réclame à savoir 146 357 euros bruts outre

14 635 euros au titre des congés payés afférents correspondant au rappel de salaire entre le janvier 2007 et décembre 2021.

Sur la demande tendant à déterminer l’évolution des salaires de la salariée depuis le 1er janvier 2007 jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir :


La salariée entend que le salaire qu’elle doit percevoir « aujourd’hui » doit être réévalué en raison de la discrimination dont elle a fait l’objet et qui a eu pour effet la stagnation de son salaire.


Elle offre pour ce faire trois méthodes d’évaluation laissant la cour libre d’adopter la méthode qui lui convient :

. la première visant à se comparer à un panel de plusieurs salariés pour lesquels elle ne dispose pas d’éléments chiffrés, avec cette précision que la salariée estime elle-même que cette méthode présente des difficultés en raison des réticences de la société,

. la seconde par laquelle elle se réfère au document préparatoire en vue des NAO de 2018,

. la troisième par laquelle elle détermine la progression de son salaire par rapport à l’inflation entre le 1er janvier 2008 et le 31 décembre 2021, ce qui lui permet de chiffrer sa demande précisément à 3 844,44 euros en 2021.


La société ne réplique pas spécifiquement sur cette demande.


L’objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties. La cour statuera dans les limites de la demande qui se borne à déterminer la fixation d’une méthode.


La salariée a subi une discrimination syndicale et en raison de son handicap depuis 2005. Ainsi qu’elle le relève à juste titre, il apparaît qu’entre le moment où elle a été engagée et aujourd’hui, c’est-à-dire 25 ans après, elle a connu une progression de salaire de 32 euros : lorsqu’elle a été engagée en 1996, il n’est pas discuté qu’elle percevait 2 866 euros par mois, que son salaire était d’un montant de 3 431 euros en janvier 2007 et que du fait de la discrimination son salaire n’a plus ensuite évolué.


Il en est résulté pour la salariée, indépendamment des préjudices déjà réparés, une stagnation de son évolution de carrière évidente en lien avec la discrimination qu’elle a subie.


La seule méthode présentée en l’état par la salariée qui permet d’obtenir une valorisation de sa rémunération consiste dans la méthode d’indexation de son revenu sur le taux annuel l’inflation, indice aisément mesurable.


Cette méthode sera appliquée à partir du mois de janvier 2007 sur la base d’un salaire alors d’un montant de 3 431 euros.

Sur la demande de dommages-intérêts pour défaut d’entretien annuel :


La salariée présente le défaut d’entretien annuel d’évaluation comme un fait participant de la discrimination dont elle a fait l’objet. Or, le préjudice qui résulte de la discrimination a été réparé et la salariée ne justifie pas d’un préjudice distinct de celui déjà réparé de ce chef.


Il convient donc, confirmant le jugement, de débouter la salariée de ce chef de demande.

Sur la demande tendant au remboursement de la somme de 500 euros de participation à la médiation que la société Monoprix a interrompue unilatéralement :


Le fait, pour la société, d’avoir interrompu – par définition unilatéralement – la médiation n’est pas fautif. Ajoutant au jugement, la demande sera rejetée.

Sur les intérêts :


Les condamnations au paiement de sommes ayant une vocation indemnitaire seront assorties des intérêts au taux légal à compter du présent arrêt.


Les condamnations au paiement des rappels de salaire produiront quant à elles intérêts au taux légal à compter de la réception, par l’employeur, de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes pour les rappels de salaire exigibles à cette date, et à compter de chaque échéance mensuelle impayée pour les rappels exigibles postérieurement à cette date.

Sur la demande tendant à la capitalisation des intérêts :


L’article 1343-2 du code civil (dans sa nouvelle rédaction) dispose que les intérêts échus, dus au moins pour une année entière, produisent intérêt si le contrat l’a prévu ou si une décision de justice le précise. La demande ayant été formée par la salariée et la loi n’imposant aucune condition pour l’accueillir, il y a lieu, en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil, d’ordonner la capitalisation des intérêts.


Celle-ci portera sur des intérêts dus au moins pour une année entière.

Sur la remise des documents :


Il conviendra de donner injonction à la société de remettre à la salariée un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la présente décision, sans qu’il soit nécessaire d’assortir cette mesure d’une astreinte.

Sur les dépens et les frais irrépétibles :


Succombant, la société sera condamnée aux dépens qui comprendront la somme de 35 euros de timbre fiscal payée par la salariée lors de la saisine du conseil de prud’hommes.


Il conviendra de condamner la société à payer à la salariée une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :


Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, dans les limites de la cassation, la cour :


REJETTE la demande de la société Monoprix Exploitation tendant à déclarer nul l’acte de saisine de cette cour en tant que cour d’appel de renvoi,


REJETTE la demande de la société Monoprix Exploitation tendant à la confirmation pure et simple du jugement motif pris de l’absence de mention, dans le dispositif des conclusions de l’appelante, des chefs du jugement dont la réformation est demandée,


DÉCLARE irrecevables les demandes suivantes, formées par la salariée :

« - condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 8 000,00 euros pour défaut du non-respect de l’obligation de sécurité de résultat,

- condamner la société Monoprix au paiement de la somme de 123 516,00 euros pour discrimination du fait de l’âge, »


INFIRME partiellement le jugement,


Statuant à nouveau,


CONDAMNE la société Monoprix Exploitation à payer à Mme X les sommes suivantes:

. 20 000 euros de dommages-intérêts au titre de la discrimination syndicale, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

. 12 000 euros au titre de la discrimination en raison de l’état de santé, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt,

. 146 357 euros bruts outre 14 635 euros au titre des congés payés afférents correspondant au rappel de salaire entre le janvier 2007 et décembre 2021, avec intérêts au taux légal à compter de la réception, par la société Monoprix, de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes pour la part des rappels de salaire exigibles à cette date, et à compter de chaque échéance mensuelle impayée pour les rappels exigibles postérieurement à cette date,


ORDONNE la capitalisation des intérêts dus pour une année entière,


DÉTERMINE l’évolution de ses salaires depuis le 1er janvier 2007 jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir comme suit : application du taux annuel d’inflation à partir du mois de janvier 2007 sur la base d’un salaire alors d’un montant de 3 431 euros,
DONNE injonction à la société Monoprix Exploitation de remettre à Mme X un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la présente décision,


REJETTE la demande d’astreinte,


CONFIRME le jugement pour le surplus,


Y ajoutant,


DÉBOUTE Mme X de sa demande tendant au remboursement de la somme de 500 euros de participation à la médiation que la société Monoprix a interrompue unilatéralement,


DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,


CONDAMNE la société Monoprix Exploitation à payer à Mme X la somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais de première instance et en cause d’appel,


CONDAMNE la société Monoprix Exploitation aux dépens, qui comprendront la somme de 35 euros de timbre fiscal payée par la salariée lors de la saisine du conseil de prud’hommes.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Clotilde MAUGENDRE, Présidente et par Madame Dorothée MARCINEK, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente
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Cour d'appel de Versailles, 17e chambre, 6 avril 2022, n° 20/02657