Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 3 mars 2022, n° 19/04067

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 11e ch., 3 mars 2022, n° 19/04067
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 19/04067
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Boulogne-Billancourt, 18 septembre 2019, N° F17/01546
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

11e chambre

ARRET N°


CONTRADICTOIRE


DU 03 MARS 2022


N° RG 19/04067 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TRXB


AFFAIRE :

M X


C/

SARL CISCO SYSTEMS FRANCE


Décision déférée à la cour : Décision rendu le 19 Septembre 2019 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE-BILLANCOURT


N° Section : E


N° RG : F 17/01546


Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me France VALAY – VAN LAMBAART

Me Sébastien DUCAMP de l’AARPI SESAME AVOCATS

Expédition numérique délivrée à : PÔLE EMPLOI

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS


LE TROIS MARS DEUX MILLE VINGT DEUX,


La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame M X

née le […] à […]

de nationalité Française […]

[…]


Représentant : Me France VALAY – VAN LAMBAART, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 199 – Représentant : Me Anne LE FUR, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R013

APPELANTE

****************

SARL CISCO SYSTEMS FRANCE


N° SIRET : 349 166 561

[…]

[…]


Représentant : Me Sébastien DUCAMP de l’AARPI SESAME AVOCATS, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : R052, substitué par Me Heloïse DE LA CHESNAIS, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE

****************

Composition de la cour :


En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 21 Janvier 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bérangère MEURANT, Conseiller chargé du rapport.


Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Hélène PRUDHOMME, Président,

Monsieur Eric LEGRIS, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,


Greffier lors des débats : Monsieur Achille TAMPREAU,


Le 24 juin 2013, Mme M X était embauchée par la SARL Cisco Systems France en qualité

d’ingénieur commercial sédentaire junior, par contrat à durée indéterminée. Au dernier état de sa collaboration, Mme M X occupait les fonctions d’ingénieur consultant réseaux.


Le contrat de travail était régi par la convention collective des bureaux d’études techniques, cabinet

d’ingénieurs conseils, sociétés de conseils.


Du 20 septembre au 7 novembre 2016, Mme X faisait l’objet d’un arrêt pour cause de maladie.
Le 23 septembre 2016, l’employeur la convoquait à un entretien préalable en vue de son licenciement. L’entretien était prévu le 6 octobre 2016. Mme M X étant en arrêt maladie, elle ne s’y présentait pas. Le 25 octobre 2016, l’employeur lui notifiait son licenciement pour insuffisance professionnelle.


Le 29 novembre 2017, Mme X saisissait le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt afin de contester son licenciement, invoquant une situation de harcèlement moral et sexuel.

Vu le jugement du 19 septembre 2019 rendu en formation paritaire par le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt qui a':


- dit le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme M X repose sur une cause réelle et sérieuse,


- dit, en conséquence, que 1'ensemble des demandes de Mme M X sont dans leur intégralité irrecevables, et l’en déboute,


- Reçu la SARL Cisco Systems France en sa demande reconventionnelle au titre de l’article 700 du code de procédure civile et l’en déboute,


- Condamné Mme M X aux entiers dépens.


Vu l’appel interjeté par Mme M X le 08 novembre 2019.

Vu les conclusions de l’appelante, Mme M X, notifiées le 26 mai 2021 et soutenues à

l’audience par son avocat auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de :


Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a :


- dit que le licenciement pour insuffisance professionnelle de Mme M X repose sur une cause réelle et sérieuse ;


- dit en conséquence que l’intégralité des demandes de Mme M X sont, dans leur intégralité, irrecevables, et l’en déboute ;


- condamné Mme X aux entiers dépens.


Statuant à nouveau :


A titre principal,


- dire le licenciement nul ;
A titre subsidiaire


- dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse ;


En tout état de cause,


- dire que la convention de forfait en jours qui est appliquée à Mme M X est nulle sur le fondement de l’article L. 3121-46 du code du travail ;


- dire que Cisco a manqué à son obligation de sécurité de résultat ;


- constater que le licenciement a été notifié avant l’entrée en vigueur des ordonnances Macron et


Pénicaud du 23 Septembre 2017 ;


En conséquence,


- fixer le salaire moyen de la salariée à 10 796,63 euros ;


- condamner Cisco à verser à la salariée les sommes suivantes :


- Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse (6 mois de salaire) art. L1235-3 code du travail : 64 780 euros,


- Indemnité spécifique en raison du harcèlement sexuel et moral subi par la salariée pendant 18 mois

(10 mois de salaire) : 107 968 euros,


- Dommages intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité ( 6 mois de salaire) : 64 780 euros,


- Dommages intérêts pour exécution déloyale de la convention de forfait en jours (6 mois de salaire)

: 64 780 euros,


- Dommages intérêts pour travail dissimulé (6 mois de salaire) : 64 780 euros,


- Dommages intérêts pour remise tardive des documents sociaux (un mois de salaire) 10 796,83 euros,


- Dommages intérêts pour défaut de formation (1 mois de salaire) : 10 796,83 euros,


- Rappel d’heures supplémentaires : 131 679,60 euros,


- Congés payés afférents : 13 167,96 euros,


- Indemnité compensatrice au titre de la compensation obligatoire en repos : 56 374,56 euros,
- Article 700 du code de procédure civile 5 000,00 euros.

Vu les écritures de l’intimée, la société Cisco Systems France SARL, notifiées le 22 avril 2020 et développées à l’audience par son avocat auxquelles il est aussi renvoyé pour plus ample exposé, et par lesquelles il est demandé à la cour d’appel de':


A titre principal :


- Confirmer le jugement attaqué en toutes ses dispositions, et par conséquent :


- Constater, dire et juger que le licenciement de Mme M X repose bien sur une cause réelle et sérieuse ;


- Constater, dire et juger, que la société n’a pas manqué à son obligation de sécurité de résultat ;


- Constater, dire et juger, que Mme M X n’a fait l’objet d’aucun harcèlement ;


- Constater, dire et juger, que la convention de forfait annuel en jours de Mme M X n’encourt pas la nullité, n’a pas été exécutée de façon déloyale par la société qui n’est en rien coupable du délit de travail dissimulé ;


- Constater, dire et juger, que la société n’a pas manqué à son obligation de formation ;


- Constater, dire et juger, que la société n’a pas remis tardivement à Mme M X ses documents de rupture.


- En conséquence, débouter Mme M X de l’ensemble de ses demandes.


A titre subsidiaire :


- Ramener les demandes indemnitaires formulées par Mme M X à de plus justes proportions.


A titre reconventionnel :


- Condamner Mme M X à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.


En tout état de cause :


- Ramener l’ensemble des demandes indemnitaires formulées par Mme M X à de plus justes proportions ;


- Débouter Mme M X de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de l’exécution provisoire de la décision à venir.


Vu l’ordonnance de clôture du 31 mai 2021.

SUR CE,

Sur l’exécution du contrat de travail':


Sur le harcèlement moral

Mme X soutient avoir subi un harcèlement moral de la part de ses managers successifs, résultant

:


- de la part de M. Y, du ton agressif, du traitement discriminatoire puis du refus de ce dernier de communiquer avec elle ;


- de la part de M. Z, des menaces, critiques sans fondement, de multiples entretiens sans motif, du refus d’adapter ses conditions de travail (télétravail à temps partiel) et surtout du mépris assumé de ce dernier quant aux nombreuses alertes données concernant le harcèlement sexuel et le harcèlement moral dont elle a été victime et son épuisement depuis le mois de janvier 2016.


Elle reproche à l’employeur de n’avoir fait diligenter aucune enquête.


La SARL Cisco Systems France répond que Mme X n’apporte aucune preuve d’agissements susceptibles de laisser supposer l’existence de faits de harcèlement moral tandis qu’elle-même justifie

d’échanges courtois entre la salariée et ses managers et de la mise en place des mesures préventives du harcèlement moral au sein de l’entreprise.


Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.


Il ressort des articles L1152-1 et L1154-1 du code du travail, que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge

d’apprécier si ces éléments, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ; dans l’affirmative, il appartient à l’employeur de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


Au soutien de ses dires, Mme X se prévaut des pièces suivantes :


- un échange de courriels intervenu le 26 novembre 2015 entre elle et M. A : dans son message, Mme X s’étonne auprès de son supérieur qu’il ait organisé une réunion avec une collègue pour obtenir des informations sur un sujet qu’elle indique bien connaître : «'Je te cache pas que je sois surprise que tu ne m’aies pas posé la question alors que je suis dans ton équipe et que c’est quelque chose que je connais très bien pour le coup …'», ce à quoi M. A a répondu : «'Je ne manquerai pas de te solliciter qd je le souhaiterai effectivement. Merci de ta réponse'». Ces propos ne permettent pas de caractériser la réponse « sèche et incontestablement ironique'» invoquée par la salariée.'


- en pièce n°92, un courriel non daté de Mme X demandant à M. A de lui permettre d’accéder

à une réunion prévue à 15 heures, précisant qu’elle est en home office en raison d’une contrainte personnelle de dernière minute, ainsi qu’un second courriel de la salariée du 20 novembre 2015 à

14h56, renouvelant sa demande, ainsi que la réponse de M. A à 15h05 indiquant : «'Yes, but not now, je te rappelle plus tard pour ton Forecast'» ; la cour constate que M. A a immédiatement répondu à la demande de la salariée, qui apparaît très tardive au regard de l’horaire de la réunion, de sorte que le fait n’est pas établi.


- un échange de courriels entre Mme X et M. A au cours des mois de juin et juillet 2016 concernant l’attribution d’un compte Nouveausoft à une autre équipe et donc à un autre collègue, M.


B ; par courriel du 11 juillet 2016, Mme X précise qu’avec l’attribution précédente d’un compte ISV à un autre collègue en début d’année, elle a subi un manque à gagner non négligeable de

340 k€ sur son chiffre annuel, soit 6,7% de son année ; cependant, il ressort de la lecture de

l’ensemble des courriels échangés, que M. B a demandé à Mme X de lui restituer ce compte en raison de sa localisation dans le Sud Ouest ; si Mme X s’en est étonnée auprès de M. A, en indiquant qu’il avait validé cette attribution, M. A a précisé qu’il avait effectivement donné son accord de principe, sans savoir que le compte n’était pas basé en Île de France mais dans le Sud


Ouest, secteur géographique dépendant d’une autre équipe que celle de la salariée : «'Hello M, (') si je t’ai donné un go de principe sur le fait de pouvoir déclarer des comptes en GNE (ce qui est le process standard), je ne suis pas allé vérifier la localisation de ces comptes, te faisant confiance pour être alignée avec les guidances géographiques. Pour le cas de Nouveausoft, je découvre donc le fait qu’il ne soit pas basé en IDF, mais dans le SO. Je te laisse donc voir avec Yann [B] la légitimité de ton action sur ce compte et reste à ta dispo si besoin'…» ; Mme X ayant demandé un arbitrage du manager, M. A a répondu «'Hello M, Ce compte étant en SO, et à ma connaissance, les discussions préalables avec Yann [B], conformément au process GNE, n’ayant pas eu lieu, je te confirme que tu peux le rebasculer en SO'» ; Mme X ayant à nouveau relancé son supérieur, ce dernier lui répondait : «'Cela fait déjà plusieurs fois que je te donne l’explication.

Tu comprendras que je ne peux pas passer mon temps à te re-expliquer les éléments que, visiblement, tu ne souhaites pas entendre. Par ailleurs, et pour ton information, je n’ai pas le pouvoir

d’attribuer les bookings à telle ou telle équipe, comme tu sembles l’insinuer. En revanche, je te confirme que je mets tout en 'uvre pour respecter les process, tels que ceux que j’ai eus à plusieurs reprises l’occasion de t’indiquer. J’espère que cela répondra définitivement à tes interrogations et je reste à ta dispo si besoin'» ; il ressort de l’ensemble de ces échanges que la répartition des comptes au sein de l’entreprise relève de process qui, manifestement, justifiaient l’attribution du compte


Nouveausoft à une autre équipe que celle de Mme X, en raison de sa localisation géographique et de l’absence d’accord dérogatoire accordé par l’équipe gérant les comptes basés dans le Sud Ouest, ce qui a été clairement expliqué à la salariée ; dans ces conditions, le fait invoqué relatif au retrait unilatéral de compte n’est pas établi.


- un courriel de M. A du dimanche 3 juillet 2016 indiquant : «'Bonsoir M, Une fois encore la soumission de ton forecast n’a pas été faite, alors que nous sommes dimanche soir ! Donc soit

Shimon à qui tu as délégué ton back up s’en charge, soit tu le fais, mais je souhaite que cela soit fait asap. Merci'», ce à quoi Mme X a répondu le 5 juillet 2016 d’une part, qu’elle était en congé la semaine précédente et d’autre part, qu’elle avait bien soumis son forecast ; le fait est établi.


- un courriel de M. A du 12 septembre 2016, indiquant «'Bonjour M, Tu reviens de congés ce jour, si je ne me trompe pas. Aussi, pourrais-tu soumettre ton forecast dans SFDC dès ce matin afin que je finalise l’ensemble du forecast. Merci'» ; cependant, la salariée ne démontre pas que cette demande impliquait un travail impossible à réaliser dans le délai comme elle le soutient ; le fait n’est pas établi.


- des courriels de M. A des 14 et 16 septembre 2016 reprochant à Mme X ses absences au bureau et en réunion, ainsi que le défaut de transmission de son forecast ; cependant, la salariée ne démontre pas qu’elle était présente, ni qu’elle avait prévenu son supérieur hiérarchique de son absence, ni encore qu’elle avait transmis son prévisionnel.

Mme X évoque par ailleurs le refus de l’employeur d’autoriser son télétravail ; cependant, la salariée ne communique aucun élément de preuve permettant d’établir qu’elle a formulé cette demande.


S’il ressort du compte rendu informel d’entretien réalisé par M. Z auprès de Mme C, responsable des ressources humaines, le 5 août 2016, que Mme X s’est effectivement déclarée

«'extrêmement fatiguée et sous pression'», il n’est pas établi qu’elle a fait référence à un harcèlement moral durant cet entretien ; Mme X ne justifie pas des «'nombreuses alertes'» qu’elle aurait adressées à M. Z concernant le harcèlement moral que M. A lui aurait fait subir. Il en va de même concernant le service des ressources humaines que Mme X n’établit pas avoir informé. Si elle a effectivement demandé à Mme C un entretien le 12 septembre 2016 afin d’échanger à propos de ses relations avec ses managers, elle n’a évoqué aucune situation de harcèlement moral.

Mme C lui a fixé un rendez-vous au 16 septembre 2016, expliquant que la période de retour était très chargée et lui a conseillé, dans l’attente, d’adopter une attitude professionnelle et respectueuse de sa hiérarchie en répondant au mieux à leurs attentes. Dans ces conditions, les propos de Mme C

n’apparaissent pas inadaptés et il ne peut être reproché à l’employeur de ne pas avoir fait diligenter

l’enquête prévue par la «'Politique relative au harcèlement sur le lieu de travail'».

Mme X soutient que M. Z «'s’est rangé du côté de M. A et n’a eu de cesse de [la] rabaisser (') et de lui faire perdre confiance en elle'» ; cependant, la cour constate que l’appelante ne communique aucune pièce permettant de corroborer ses affirmations.
La salariée se prévaut encore d’un message de M. Z du 12 juillet 2016 lui conseillant selon elle’expressément de trouver un nouvel emploi après que M. A lui ait annoncé mi-juin 2016, son intention de rompre le contrat de travail ; cependant, les propos attribués à M. A ne sont justifiés par aucun élément de preuve ; par ailleurs, la teneur du courriel de M. Z est la suivante : « Au regard de la situation, il est à mon sens important que tu étudies toutes les pistes ouvertes sur lesquelles tu peux te positionner si tu ne souhaites pas rester un an de plus dans ta mission actuelle »

; il apparaît donc que la suggestion du supérieur hiérarchique ne vise que le cas où Mme X ne souhaiterait pas poursuivre sa mission actuelle ; ce message ne permet donc pas de corroborer les dires de la salariée.

Mme X invoque l’absence de suite donnée à sa demande de formation concernant la gestion de son stress. Si M. Z, dans le cadre du compte rendu informel d’entretien réalisé auprès de Mme


C le 5 août 2016, évoqué supra, indique effectivement que Mme X a demandé une formation sur la gestion de son stress, elle ne justifie d’aucune démarche en ce sens, étant au surplus observé que la salariée a été placée en arrêt de travail à compter du 20 septembre 2016 et qu’elle a été licenciée le 25 octobre suivant. Dans ces conditions, le fait n’est pas établi.


La salariée argue d’une politique de l’entreprise de ne pas prendre en compte les plaintes des salariés, de leur conseiller de ne rien faire qui pourrait froisser leurs managers et de mettre en place des plans

d’accompagnement ; au soutien de ses dires, Mme X produit les attestations de Mmes D et


Dandjouma qui critiquent la politique de gestion des ressources humaines au sein de l’entreprise ; cependant ces témoignages ne font aucune référence à la situation de l’appelante.


Elle invoque l’attestation de Mme E expliquant avoir écouté un enregistrement réalisé par Mme


X d’une conversation qu’elle aurait eue avec M. Z le 11 juillet 2016 et avoir entendu ce dernier confirmer que les managers de Mme X voulaient «'lui tirer une balle dans la tête'» ; cependant, il ne peut être tenu compte de ce témoignage qui se rapporte à un enregistrement, dont il

n’est pas démontré qu’il a été effectué avec l’accord de l’intéressé et dans des conditions non précisées.


La surcharge de travail, les critiques incessantes, la remise en question systématique, la communication très agressive, le traitement discriminatoire, dont le motif n’est pas précisé, les invectives devant les collègues et l’isolement de la salariée ne sont corroborées par aucun élément de preuve.

Mme X communique les mails et SMS échangés avec Mme F, son mentor au sein de

l’entreprise au cours du mois de juillet 2016 ; s’il en ressort que la salariée a évoqué des conditions de travail insupportables, les messages de M. F n’évoquent pas les relations entre Mme X et ses supérieurs hiérarchiques, mais se limitent aux possibilités de changement de poste et à la stratégie à adopter pour y parvenir.


Enfin, les pièces médicales confirment l’existence chez la salariée d’un état dépressif. Elles ne permettent toutefois pas de démontrer l’existence d’un lien entre l’état de santé constaté et l’activité professionnelle de l’appelante.


Il ressort de l’ensemble de ces éléments que seul le fait relatif à la demande injustifiée de M. A de prévisionnel le 3 juillet 2016 est établi. Il est insuffisant à laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral, qui suppose des «'agissements répétés'» en application des dispositions de

l’article L.1152-1 précitées. En conséquence, le jugement déféré doit être confirmé en ce qu’il a débouté Mme X de ses demandes relatives au harcèlement moral.


Sur le harcèlement sexuel

Mme X soutient avoir subi un harcèlement sexuel de la part de son ancien manager M. G tout au long de l’année 2015. Elle explique que son supérieur hiérarchique a multiplié à son égard les allusions à connotation sexuelle, se permettait de l’enlacer devant des collègues, laissait entendre aux membres de leur équipe qu’ils étaient amants, lui demandait régulièrement de l’embrasser, organisait de faux déjeuners clients pour pouvoir se retrouver en tête à tête avec elle ou lui faisait des propositions indécentes à peine voilées. Elle soutient lui avoir demandé à plusieurs reprises de la laisser tranquille en vain, M. G lui indiquant que si elle ne cédait pas à ses avances, il pourrait lui nuire professionnellement.


La SARL Cisco Systems France répond que Mme X n’apporte aucune preuve d’agissements susceptibles de laisser supposer l’existence de faits de harcèlement sexuel, dès lors que les témoins

n’ont pas assisté aux faits de harcèlement sexuel invoqués, lesquels reposent exclusivement sur les affirmations de la salariée. L’employeur souligne que préalablement à la saisine du conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt, ni la direction des ressources humaines, ni la médecine du travail, ni les représentants du personnels, ni les délégués syndicaux, ni la hiérarchie de Mme X

n’avaient reçu la moindre plainte quant à un l’existence de faits de harcèlement sexuel.


Aux termes de l’article L.1153-1 du code du travail, les agissements de harcèlement de toute personne dans le but d’obtenir des faveurs de nature sexuelle à son profit ou au profit d’un tiers sont interdits.


L’article L.1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié ou le candidat concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.


Au soutien de ses dires, Mme X invoque :


- un échange de SMS non daté entre M. G et Mme X, à l’occasion manifestement d’un déplacement professionnel. M. G lui demande : «'Bah alors, tu nous rejoins pas ''», elle répond «'Je suis tombé sur qq amis que je n’avais pas encore vu ! Pas vu passer les minutes ' Je ne suis toujours pas changé !!!'» ; plus tard, M. G lui indique «'On vient de rentrer chacun dans nos chambres ' Dommage ! Enjoy ur last night then'», Mme X se désole «'Ah mince sorry'», M. G O «'Bon ben after ds ta chambre alors !!!'», le message étant illustré de deux emojis représentant pour l’un, un chapeau de fête et des cotillons et pour le second un pouce en l’air. Mme


X répond «'Je suis toute seule ds ma chambre ' Tu as déjà vu des after party à 2''!!'», ce à quoi

M. G O : «'Heu oui mais t’as raison, pas vraiment des «'after'»'» avec un emoji qui rit, puis il conclut «'Buenas noche'». Il ressort de cet échange que si M. G, face à la déception de la salariée de ne pas avoir pu les rejoindre, évoque un «'after'» dans la chambre de Mme X, son message est accompagné d’émojis évoquant la fête et lorsque la salariée indique, en termes très directs, qu’elle est seule dans sa chambre et qu’ils ne vont pas faire la fête à deux, le manager le reconnaît et lui souhaite une bonne nuit. Ces messages ne permettent donc pas de caractériser un fait de harcèlement sexuel.


- un échange de SMS de Mme X avec une amie Mme H le 23 décembre 2015 dans lequel la salariée écrit : «'' il m’a gentiment mis la pression en m’expliquant qu’il me ferait un feedback dans 4 semaines au moment où il quittera son poste… Et le connaissant et vu ce qu’il m’a dit hier je pense qu’il va réitérer pour la 3ième fois sa demande '. Donc faut que je sache comment dire non clairement sans blesser son ego pour pas qu’il me porte préjudice après : toi qui est forte en termes de comm qu’est ce que je peux lui dire ''''» ; la cour constate que ce message ne comporte ni le nom de M. G, ni la teneur de la «'demande'» évoquée, de sorte qu’aucun élément intéressant le litige ne peut être tiré de ce message.


- un échange de SMS avec une collègue Mme E datant du mois de mai 2016 à l’occasion duquel elle indique que M. G «'NW'» l’appelait «'princesse'» : Mme E lui écrit «'Fais pas ta princesse'» et Mme X répond «'' m’appelle pas comme ça stp, c’est le taré de NW qui m’appelait comme ça dans mon dos'», elle ajoute «'et qui m’appelait comme ça en fin d’année'» «'L’horreur'» ; cependant, ce fait procède des seules affirmations de Mme X.


- un échange de SMS avec Mme E au mois d’août 2016 à l’occasion duquel elle écrit : «'Punaise

c’est trop bizarre y avait G à l’aéroport dans la queue pour prendre l’avion’ Gros pic de stress'» et ajoute « J’espère qu’il va pas à Vegas'» ; cependant, aucun fait à connotation sexuelle imputable à M. G n’est rapporté dans ces messages.


- des attestations de ses collègues, Mmes I et E, ainsi que celle d’une amie, Mme J ; cependant les dires des témoins procèdent exclusivement de propos rapportés par la salariée («'M

m’a dit'», «'Elle m’a alors expliqué'», «'elle a fini par m’avouer'»), hormis la prise de poids de Mme


X qui est insuffisante à établir l’existence d’un fait laissant supposer un harcèlement sexuel ; la cour relève que Mme E précise avoir collaboré directement avec Mme X à partir du mois

d’août 2015, sans toutefois être en mesure de rapporter le moindre fait précis auquel elle aurait assisté.


- l’attestation de Mme K ; cependant, cette attestation n’évoque pas les relations entre Mme X et M. G, mais des difficultés qu’elle aurait rencontrées avec l’employeur en raison de son refus de signer un plan de commissionnement qui aurait modifié sa rémunération variable.
- la plainte déposée contre M. G en février 2018 pour harcèlement sexuel ; cependant, à nouveau, les éléments de fait détaillés dans cette plainte procèdent des seules affirmations de Mme


X.


- l’attestation de son compagnon, M. L faisant état du harcèlement sexuel de Mme X par

M. G ; toutefois, le témoin se limite à relater le ressenti de sa compagne, en imputant à son supérieur hiérarchique des faits auxquels il n’a pu assister dès lors qu’il ne travaille pas au sein de

l’entreprise.


En l’état des explications et des pièces fournies, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants laissant supposer l’existence d’un harcèlement sexuel n’est pas démontrée. Les demandes relatives au harcèlement doivent par conséquent être rejetées. Le jugement entrepris est confirmé sur ce point.


Sur le manquement à l’obligation de sécurité

Mme X sollicite l’allocation d’une somme de 64 780 euros au titre du manquement de

l’employeur à son obligation de sécurité. Si elle soutient que la SARL Cisco Systems France n’a pas fait procéder à une enquête interne malgré sa dénonciation de faits de harcèlement moral ; or, la cour rappelle qu’il n’est pas démontré que Mme X ait informé l’employeur de la situation de harcèlement moral qu’elle prétend avoir subie. Dans ces conditions, le manquement à l’obligation de sécurité n’est pas établi et la demande indemnitaire ne peut prospérer. Le jugement déféré est confirmé sur ce point.


Sur la nullité de la convention de forfait en jours et les demandes subséquentes

Mme X fait valoir que sa convention individuelle de forfait annuel en jours conclue sur le seul fondement de l’accord de branche du 22 juin 1999 est nulle. Elle ajoute qu’elle ne jouissait ni d’une « large autonomie d’initiative », ni d’une « grande latitude dans leur organisation du travail et la gestion de leur temps'», de sorte qu’elle ne pouvait être soumise à une convention de forfait. Enfin, elle indique que l’employeur n’a jamais organisé le suivi de ses jours de travail et de sa charge de travail, qu’aucun entretien bi-annuel de suivi de sa charge de travail n’a jamais été organisé et qu’aucune consultation annuelle des représentants du personnel n’a été organisée par l’employeur.


Elle soutient qu’elle a travaillé régulièrement plus de 45 heures par semaine, dès lors qu’il était matériellement impossible en 7 heures de travail quotidien, d’effectuer les tâches qui lui étaient confiées. Elle sollicite un rappel d’heures supplémentaires et la condamnation de l’employeur au titre du travail dissimulé, du dépassement du contingent annuel d’heures supplémentaires et de l’exécution déloyale de la convention de forfait


L’employeur répond que compte tenu de son statut de cadre, coefficient 130, obtenu le 23 juillet

2014 et confirmé par un avenant à son contrat de travail, Mme X entrait dans le champ

d’application de la convention de forfait jours défini par la branche et ce dès son embauche. Il ajoute que les conditions protectrices de la santé du salarié issues de l’avenant du 1er avril 2014 ayant complété l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail ont été assurées dès lors la question de la charge de travail pouvait être évoquée à l’occasion des deux entretiens de performance dont bénéficiait Madame X chaque année, et a été discutée à l’occasion des entretiens intervenus lors du plan d’amélioration de la performance. Subsidiairement, il fait valoir que le chiffrage des heures supplémentaires qui auraient été effectuées par Mme X ne résulte que de suppositions non étayées de la salariée.


Les dispositions de l’article 4 de l’accord du 22 juin 1999 relatif à la durée du travail, pris en application de la convention collective nationale Syntec, ne sont pas de nature à garantir que

l’amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l’intéressé, et donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié.


La convention de forfait en jours à laquelle Mme X a été soumise à compter du 24 juin 2013 est donc nulle.


Elle est, en outre et en tout état de cause, inopposable à la salariée, dès lors que l’article 4.8.2 de

l’avenant du 1er avril 2014 ayant complété l’accord du 22 juin 1999 mentionne que l’employeur doit organiser deux entretiens individuels annuels obligatoires permettant un véritable suivi de la charge de travail du salarié respectant l’équilibre vie privée et vie professionnelle. Or, la SARL Cisco


Systems France n’en justifie pas.


Selon l’article L.3171-4 du code du travail, «'En cas de litige relatif à l’existence ou au nombre

d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système

d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable'».


Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à

l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul,

l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.


Au soutien de sa demande, Mme X communique :


- trois courriels qu’elle a envoyés le 26 novembre 2015 à 20h23, le dimanche 1er novembre 2015 à

19h05 et le mardi 14 juin 2016 à 18h55,
- la copie de son agenda,


- la liste de ses clients.


La salariée présente ainsi des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’elle prétend avoir accomplies permettant à l’employeur d’y répondre utilement.


Si l’employeur ne communique aucun élément concernant les horaires de Mme X, la cour constate que les 3 seuls courriels produits ne correspondent pas à un travail effectif, dès lors que deux d’entre eux concernent la réclamation formulée par Mme X concernant l’attribution du compte Nouveausoft et le troisième est une réponse de la salariée à un courriel de son supérieur hiérarchique du vendredi 30 octobre 2015 à 17h25 qui n’exigeait pas de réponse immédiate. Par ailleurs, la liste des clients gérés par Mme X ne permet pas de fournir le moindre élément probant concernant l’accomplissement d’heures supplémentaires. Enfin, l’examen de l’agenda de la salariée ne permet pas d’établir qu’elle avait travaillé au-delà de 35 heures par semaine. En effet, la majeure partie des rendez-vous sont fixés à des horaires compris dans l’amplitude d’une journée normale de travail ; concernant les quelques rendez-vous fixés à un horaire tardif (moins de 10),

l’employeur ne fournit aucune explication.


Ainsi, il résulte de l’ensemble de ces éléments que la cour dispose des éléments suffisants pour évaluer le rappel de salaire dû à Mme X au titre des heures supplémentaires à la somme de 1'000 euros, outre les congés payés afférents, soit 100 euros. La SARL Cisco Systems France sera condamnée au paiement de ces sommes. Le jugement est infirmé sur ce point.


Concernant le travail dissimulé, l’article L.8221-1 du code du travail prohibe le travail totalement ou partiellement dissimulé défini par l’article L.8221-3 du même code relatif à la dissimulation d’activité ou exercé dans les conditions de l’article L.8221-5 du même code relatif à la dissimulation d’emploi salarié.


Aux termes de l’article L.8223-1 du code du travail, le salarié auquel l’employeur a recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 du même code relatifs au travail dissimulé a droit, en cas de rupture de la relation de travail, à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.


Par ailleurs, s’agissant du repos compensateur, l’article D.3121-14-1 alinéa du code du travail, dans sa version applicable en l’espèce, dispose que le contingent annuel d’heures supplémentaires prévu à

l’article L.3121-11 est fixé à deux cent vingt heures par salarié.


Si l’appelante sollicite la condamnation de l’employeur au titre du travail dissimulé et de la compensation obligatoire en repos, il apparaît qu’au regard du volume peu significatif d’heures supplémentaires retenu, le caractère intentionnel de la dissimulation d’emploi et le dépassement du contingent de 220 heures supplémentaires fixé par l’article D.3121-14-1 alinéa 1 précité ne sont pas établis.
Enfin, les manquements de l’employeur aux obligations prescrites par l’avenant du 1er avril 2014 ayant complété l’accord du 22 juin 1999 susvisés, destinées au contrôle de la charge de travail du salarié ne suffit pas à caractériser sa déloyauté, de sorte que la demande indemnitaire de Mme X

à ce titre ne peut prospérer.


Sur le manquement à l’obligation de formation

Mme X soutient que l’employeur a manqué à son obligation de formation en lui refusant le bénéfice d’une action de formation portant sur la gestion du stress. Elle souligne que M. Z a reconnu dans un courriel du 5 août 2016 qu’elle avait demandé cette formation.


L’employeur répond que la salariée n’apporte aucune preuve d’une telle demande.


Pour les motifs précités, le manquement n’est pas établi. Le jugement déféré est confirmé en ce qu’il

a débouté Mme X de sa demande indemnitaire à ce titre.

Sur la rupture du contrat de travail':

Mme X invoque la nullité de son licenciement en raison du harcèlement subi. Subsidiairement, elle soutient que les manquements reprochés par l’employeur aux termes de la lettre de licenciement sont constitutifs de fautes disciplinaires, au demeurant prescrites et déjà sanctionnées par

l’avertissement constitué par le plan d’amélioration de la performance, et ne relèvent pas de

l’insuffisance professionnelle. Elle ajoute qu’en tout état de cause l’insuffisance professionnelle reprochée n’est pas démontrée s’agissant de difficultés passagères, alors qu’elle avait toujours donné entière satisfaction. Elle souligne qu’elle n’a jamais accepté le plan d’amélioration de la performance proposé par l’employeur.


L’employeur fait valoir que Mme X a été alertée des insuffisances qui lui étaient reprochées et des attentes à son égard à l’occasion de deux entretiens individuels les 21 juin et 11 juillet 2016 avec

M. Z et qu’elle a bénéficié d’un plan d’amélioration de performance très précis à compter du mois

d’août 2016. Il soutient que c’est le refus de Mme X de donner suite aux recommandations et directives décrites dans ce plan qu’elle n’a contesté qu’une fois son licenciement notifié, qui a conduit

à son licenciement.


L’insuffisance professionnelle résulte de l’incapacité du salarié à accomplir les missions pour lesquels il est employé.


Pour les motifs précités, les harcèlements moral et sexuel invoqués par la salariée ne sont pas démontrés, de sorte que sa demande tendant à voir déclarer son licenciement nul ne peut prospérer.

Mme X a été licenciée en raison de relations et comportements inadaptés au sein de l’entreprise, nuisant à l’accomplissement de ses missions et au bon fonctionnement de l’entreprise.
Ces manquements relèvent de l’insuffisance professionnelle et ne sont donc pas soumis à la prescription de deux mois de l’article L.1332-4 du code du travail.


Néanmoins, il ressort des pièces produites que le 5 août 2016, Mme X a signé un plan

d’amélioration de performance d’une durée de 3 mois, devant débuter «'à votre retour de congés'». Il

y était prévu que la salariée bénéficie de réunions hebdomadaires avec MM. Z et A pour suivre et évaluer sa progression durant le plan.


Le courriel de M. A du 12 septembre 2016 établit que Mme X est rentrée de congés à cette date : «'Bonjour M, Tu reviens de congés ce jour, si je ne me trompe pas. Aussi, pourrais-tu soumettre ton forecast dans SFDC dès ce matin afin que je finalise l’ensemble du forecast. Merci'».


Par ailleurs, les avis d’arrêt de travail de la salariée (pièces n°15 et 16 du dossier de l’appelante) établissent qu’elle a été en arrêt maladie du 20 septembre au 3 octobre 2016, cet arrêt ayant été prolongé jusqu’au 7 novembre 2016.


Or, Mme X a été licenciée le 25 octobre 2016, l’employeur précisant avoir dû «'interrompre le plan d’amélioration de performance'» en raison du refus de la salariée de coopérer et d’opérer le moindre changement dans sa manière de travailler.


Il apparaît pourtant que la salariée n’a été soumise au plan d’amélioration de performance que pendant une semaine, du lundi 12 au lundi 19 septembre 2016, semaine au cours de laquelle il n’est pas justifié qu’elle ait pu bénéficier de la réunion hebdomadaire susvisée avec ses supérieurs hiérarchiques. Ce temps laissé à la salariée est non conforme aux stipulations du plan et, d’évidence, insuffisant à permettre à cette dernière d’atteindre le niveau de performance attendu par l’employeur, alors qu’il ne démontre pas le refus invoqué de coopérer et d’opérer le moindre changement sans sa manière de travailler.


En conséquence, le licenciement de Mme X doit être déclaré sans cause réelle et sérieuse. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point.


Lors de la rupture du contrat de travail, Mme X bénéficiait d’une ancienneté au moins égale à 2 ans et la SARL Cisco Systems France employait de manière habituelle plus de 10 salariés.


En application de l’article L1235-3 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance

n°2017-1387 du 22 septembre 2017, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.


A la date du licenciement, Mme X percevait une rémunération mensuelle moyenne de 10'796,66 euros. Elle était âgée de 29 ans et bénéficiait d’une ancienneté d’un peu plus de trois ans. Elle ne fournit pas d’élément concernant sa situation professionnelle et personnelle à la suite du licenciement. Dans ces conditions, il convient de lui allouer une indemnité de 64'780 euros au titre de l’article L.1235-3 du contrat de travail.

Sur la remise tardive des documents sociaux et solde de tout compte


Si Mme X formule une demande de 10 796,83 euros au titre de la remise tardive des documents sociaux et solde de tout compte, la cour constate qu’aucun moyen n’est développé au soutien de cette demande en méconnaissance des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile.


En l’absence de tout explication concernant ce manquement prétendu et de tout élément probant concernant le préjudice dont l’indemnisation est sollicitée, la demande indemnitaire ne peut prospérer.

Sur le remboursement par l’employeur à l’organisme des indemnités de chômage


En application de l’article L.1235-4 du code du travail, il convient d’ordonner d’office le remboursement par l’employeur à l’organisme concerné, du montant des indemnités de chômage éventuellement servies au salarié du jour de son licenciement au jour du prononcé de l’arrêt dans la limite de six mois d’indemnités.

Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens


Compte tenu de la solution du litige, la décision entreprise sera infirmée de ces deux chefs et par application de l’article 696 du code de procédure civile, les dépens de première instance et d’appel seront mis à la charge de la SARL Cisco Systems France.


La demande formée par Mme X au titre des frais irrépétibles en cause d’appel sera accueillie, à hauteur de 4 000 euros.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

statuant publiquement et contradictoirement


Confirme le jugement entrepris, sauf en celles de ses dispositions relatives au licenciement sans cause réelle et sérieuse, à l’indemnité au titre de l’article L.1235-3 du contrat de travail, au rappel de salaire au titre des heures supplémentaires, aux frais irrépétibles et aux dépens ';


Statuant à nouveau des chefs infirmés,


Dit le licenciement de Mme M X dépourvu de cause réelle et sérieuse ;


Condamne la SARL Cisco Systems France à payer à Mme M X les sommes suivantes :
- 1 000 euros de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires,


- 100 euros au titre des congés payés afférents,


- 64 780 euros de dommages et intérêts au titre de l’article L.1235-3 du contrat de travail ;


Ordonne le remboursement par la SARL Cisco Systems France, aux organismes concernés, des indemnités de chômage versées à Mme M X dans la limite de 6 mois d’indemnités en application des dispositions de l’article L. 1235-4 du code du travail';


Condamne la SARL Cisco Systems France aux dépens de première instance et d’appel';


Condamne la SARL Cisco Systems France à payer à Mme M X la somme de 4 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.


Arrêt prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,


Signé par Mme Hélène PRUDHOMME, président, et Mme’Sophie RIVIÈRE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.


Le GREFFIER Le PRÉSIDENT
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Cour d'appel de Versailles, 11e chambre, 3 mars 2022, n° 19/04067