Cour de cassation, Chambre sociale, 16 décembre 2020, 19-17.637 19-17.638 19-17.639 19-17.640 19-17.641 19-17.642 19-17.643 19-17.644 19-17.645 19-17.646 19-17.647 19-17.648 19-17.649 19-17.650 19-17.651 19-17.652 19-17.653 19-17.654 19-17.655 19-1

  • Caractère indispensable à l'exercice du droit à la preuve·
  • Preuve d'une discrimination à l'égard de salariés·
  • Sauvegarde de la preuve avant tout procès·
  • Mesure d'instruction in futurum·
  • Discrimination entre salariés·
  • Preuve d'une discrimination·
  • Mesures d'instruction·
  • Mesure admissible·
  • Moyens de preuve·
  • Règles générales

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Il résulte de l’article 145 du code de procédure civile que s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Il résulte par ailleurs des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

Viole ces dispositions la cour d’appel qui, après avoir constaté que les salariés justifiaient d’un motif légitime à établir avant tout procès la preuve des faits de discrimination dont ils s’estimaient victimes, les déboute de leur demande de production et communication de pièces sous astreinte, au motif que la mesure demandée excède par sa généralité les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile, sans vérifier quelles mesures étaient indispensables à la protection de leur droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production de pièces sollicitée

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 16 déc. 2020, n° 19-17.637, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-17637 19-17638 19-17639 19-17640 19-17641 19-17642 19-17643 19-17644 19-17645 19-17646 19-17647 19-17648 19-17649 19-17650 19-17651 19-17652 19-17653 19-17654 19-17655 19-17656 19-17657 19-17658 19-17659 19-17660 19-17661 19-17662 19-17663 19-17664 19-17665 19-17666 19-17667
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel de Lyon, 10 avril 2019, N° 18/08639
Textes appliqués :
articles 9 et 145 du code de procédure civile ; article 9 du code civil ; articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042746594
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:SO01219
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

LG

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 16 décembre 2020

Cassation

M. HUGLO, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 1219 F-P+B

Pourvois n°

P 19-17.637

à W 19-17.667

JONCTION

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 16 DÉCEMBRE 2020

1°/ M. T… F…, domicilié […] ,

2°/ M. Y… E…, domicilié […] ,

3°/ M. YX… S…, domicilié […] ,

4°/ M. I… B…, domicilié […] ,

5°/ M. J… H…, domicilié […] ,

6°/ Mme D… N…, domiciliée […] ,

7°/ Mme R… IM…, domiciliée […] ,

8°/ M. P… A…, domicilié […] ,

9°/ Mme D… M…, domiciliée […] ,

10°/ Mme C… VQ…, domiciliée […] ,

11°/ M. Q… K…, domicilié […] ,

12°/ Mme W… NV…, domiciliée […] ,

13°/ M. U… L…, domicilié […] ,

14°/ M. YX… O…, domicilié […] ,

15°/ M. Q… G…, domicilié […] ,

16°/ M. V… X…, domicilié […] ,

17°/ M. EW… YK…, domicilié […] ,

18°/ M. RM… OH…, domicilié […] ,

19°/ M. JJ… FZ…, domicilié […] ,

20°/ M. GY… PE…, domicilié […] ,

21°/ M. FI… UG…, domicilié […] ,

22°/ M. NI… FG…, domicilié […] ,

23°/ M. I… UR…, domicilié […] ,

24°/ Mme TF… OU…, domiciliée […] ,

25°/ M. KB… EX…, domicilié […] ,

26°/ M. RM… GJ…, domicilié […] ,

27°/ M. JV… AY…, domicilié […] ,

28°/ Mme NO… DV…, domiciliée […] ,

29°/ Mme DR… JI…, domiciliée […] ,

30°/ M. EE… FD…, domicilié […] ,

31°/ Mme AI… NA…, domiciliée […] ,

ont formé respectivement les pourvois n° P 19-17.637, Q 19-17.638, R 19-17.639, S 19-17.640, T 19-17.641, U 19-17.642, V 19-17.643, W 19-17.644, X 19-17.645, Y 19-17.646, Z 19-17.647, A 19-17.648, B 19-17.649, C 19-17.650, D 19-17.651, E 19-17.652, F 19-17.653, H 19-17.654, G 19-17.655, J 19-17.656, K 19-17.657, M 19-17.658, N 19-17.659, P 19-17.660, Q 19-17.661, R 19-17.662, S 19-17.663, T 19-17.664, U 19-17.665, V 19-17.666 et W 19-17.667 contre trente-et-un arrêts rendus le 11 avril 2019 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale C), dans les litiges les opposant à la société Renault Trucks, société par actions simplifiée, dont le siège est […] , défenderesse à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l’appui de leurs pourvois, le moyen unique de cassation commun annexé au présent arrêt.

Les dossiers ont été communiqués au procureur général.

Sur le rapport de Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. F… et des trente autres salariés, de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Renault Trucks, après débats en l’audience publique du 4 novembre 2020 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Chamley-Coulet, conseiller référendaire rapporteur, M. Rinuy, conseiller, et Mme Piquot, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Jonction

1. En raison de leur connexité, les pourvois n° P 19-17.637 à W 19-17.667 sont joints.

Faits et procédure

2. Selon les arrêts attaqués (Lyon, 11 avril 2019), statuant en référé, M. F… et trente autres salariés de la société Renault Trucks, exerçant des mandats de représentants du personnel sous l’étiquette CGT et soutenant faire l’objet d’une discrimination en raison de leurs activités syndicales, ont, le 29 janvier 2018, saisi la formation de référé de la juridiction prud’homale pour obtenir les informations permettant l’évaluation utile de leur situation au regard de celle des autres salariés placés dans une situation comparable.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa septième branche

Enoncé du moyen

3. Les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leur demande de communication de pièces sous astreinte formée contre la société, alors « que dans leurs écritures, les exposants avaient eu soin de faire valoir qu’ils étaient titulaires d’un mandat syndical et que leur carrière comme leur rémunération n’avaient quasiment pas évolué en comparaison des salariés ne disposant pas d’un mandat, que dans ces conditions ils avaient sollicité à plusieurs reprises que leur employeur leur communique les éléments leur permettant de comparer l’évolution de leur carrière et de leur rémunération avec les salariés embauchés à la même époque et sur le même site et qu’alors que ces éléments étaient indispensables pour pouvoir établir l’étendue de la discrimination syndicale et du préjudice subis, la société Renault Trucks avait toujours refusé de transmettre ces informations alors qu’elle était la seule à disposer des pièces de nature à pouvoir procéder à une comparaison utile ; qu’en se bornant, pour débouter les salariés de leurs demandes, à affirmer, après avoir constaté que la mesure demandée était légitime, que celle-ci s’analysait en une mesure générale d’investigation excédant par sa généralité les précisions de l’article 145 du code de procédure civile, sans rechercher si les mesures demandées n’étaient pas nécessaires à l’exercice du droit à la preuve des exposants et en particulier, si la communication des documents demandés, dont seul l’employeur disposait et qu’il refusait de communiquer, n’était pas nécessaire à la protection de leurs droits, la cour d’appel, qui a méconnu ses pouvoirs, a violé l’article 145 du code de procédure civile, ensemble l’article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 145 du code de procédure civile, les articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile :

4. Selon le premier des textes susvisés, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. Il résulte par ailleurs des articles 6 et 8 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, 9 du code civil et 9 du code de procédure civile, que le droit à la preuve peut justifier la production d’éléments portant atteinte à la vie personnelle à la condition que cette production soit indispensable à l’exercice de ce droit et que l’atteinte soit proportionnée au but poursuivi.

5. Pour débouter les salariés de leur demande de production et communication de pièces sous astreinte, les arrêts énoncent que si le demandeur à la mesure d’instruction n’est pas tenu, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, de caractériser le motif légitime qu’il allègue au regard des différents fondements juridiques qu’il envisage pour son action future, il doit néanmoins apporter au juge les éléments permettant de constater l’existence d’un tel motif au regard de ces fondements. Ils constatent que les salariés caractérisent ce motif légitime en produisant un tableau issu de la négociation annuelle obligatoire, dressant la moyenne des rémunérations des salariés classés dans leur catégorie et dont il résulte que, malgré leur ancienneté, leur rémunération annuelle se trouve tout juste dans la moyenne, différence de traitement qu’ils mettent en lien avec l’activité syndicale. Les arrêts en déduisent qu’il existe un litige potentiel susceptible d’opposer le salarié et l’employeur, lequel détient effectivement les éléments de fait pouvant servir de base au procès lié à une discrimination syndicale. Ils constatent néanmoins que les salariés, qui ne se comparent pas avec des salariés nommément visés, demandent communication de l’ensemble des éléments concernant les salariés embauchés sur le même site qu’eux, la même année ou dans les deux années précédentes et suivantes, dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient ainsi que de tous les éléments de rémunération, de diplômes, de formation en lien avec l’évolution de carrière, de sorte que cette demande s’analyse en une mesure générale d’investigation, portant sur plusieurs milliers de documents. Les arrêts déduisent de ces constatations que la mesure demandée excède par sa généralité les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile et doit être rejetée.

6. En se déterminant ainsi, alors qu’il lui appartenait, après avoir estimé que les salariés justifiaient d’un motif légitime, de vérifier quelles mesures étaient indispensables à la protection de leur droit à la preuve et proportionnées au but poursuivi, au besoin en cantonnant le périmètre de la production de pièces sollicitée, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts rendus le 11 avril 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ces arrêts et les renvoie devant la cour d’appel de Chambéry ;

Condamne la société Renault Trucks aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par société Renault Trucks et la condamne à payer aux trente-et-un salariés, demandeurs aux pourvois, la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts cassés ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre deux mille vingt.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen commun produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. F… et les trente autres salariés, demandeurs aux pourvois n° P 19-17.637 à W 19-17.667

Il est fait grief aux arrêts infirmatifs attaqué, d’AVOIR débouté les exposants de leur demande tendant à ce qu’il soit ordonné à la Société RENAULT TRUCKS de communiquer dans un délai de 8 jours, les noms et prénoms, le sexe, date de naissance, âge et la date d’entrée de chacune des personnes embauchées sur le même site, la même année ou dans les deux années précédentes ou suivantes (de N-2 à N+2), dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient que le salarié ainsi que pour chacun de ces salariés de ce panel, leurs diplômes à l’embauche, les bulletins de paie de décembre de chaque année depuis leur embauche et le dernier bulletin de salaire, leur lieu de travail actuel, les dates de changement de qualification/classification et coefficient et leur périodicité, ainsi que les bulletins de salaire et avenants correspondants, les dates de changement éventuels de catégorie professionnelle ainsi que les bulletins de salaire et avenants correspondants, les dates et montant des augmentations de salaire depuis l’embauche et leur périodicité ainsi que les bulletins de salaire et avenants correspondants, leurs qualifications/classifications et coefficients actuels, leurs entretiens individuels d’évaluation depuis l’embauche, le salaire net imposable et brut actuel et des les AVOIR déboutés de leur demande tendant à ce qu’il soit ordonné à la Société RENAULT TRUCKS d’établir, pour chaque salarié du panel de comparants, un tableau récapitulant l’ensemble des informations ci-dessus, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document, à compter de l’expiration d’un délai de 8 jours suivant la notification de la présente ordonnance à intervenir ;

AUX MOTIFS QUE: « Conformément à l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé sur requête ou en référé. Si le demandeur à la mesure d’instruction n’est pas tenu, sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, de caractériser le motif légitime qu’il allègue au regard des différents fondements juridiques qu’il envisage pour son action future, il doit néanmoins apporter au juge les éléments permettant de constater l’existence d’un tel motif au regard de ces fondements. En l’espèce, le salarié caractérise ce motif légitime en produisant un tableau issu de la négociation annuelle obligatoire, dressant la moyenne des rémunérations des salariés classés dans sa catégorie et dont il résulte que, malgré son ancienneté, sa rémunération annuelle se trouve tout juste dans la moyenne, différence de traitement qu’il met en lien avec l’activité syndicale. Il existe donc un litige potentiel susceptible d’opposer le salarié et l’employeur, lequel détient effectivement les éléments de fait pouvant servir de base au procès lié à une discrimination syndicale. Néanmoins, le salarié, qui ne se compare pas avec des salariés nommément visés, demande communication de l’ensemble des éléments concernant les salariés embauchés sur le même site que lui, la même année ou dans les deux années précédentes et suivantes, dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient ainsi que de tous les éléments de rémunération, de diplômes, de formation en lien avec l’évolution de carrière, de sorte que cette demande s’analyse en une mesure générale d’investigation, portant sur 10585 salariés et 120478 documents. Dans ces conditions, la mesure demandée excède par sa généralité les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile et doit être rejetée. Il convient en conséquence d’infirmer la décision déférée. Il serait inéquitable de laisser à la charge de la société RENAULT TRUCKS ses frais non recouvrables».

1) ALORS QUE, en retenant, pour débouter les salariés de leurs demandes, que la mesure demandée s’analyse en une mesure générale d’investigation excédant par sa généralité les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile, cependant qu’il ne résultait ni des énonciations de l’arrêt, ni des écritures de l’employeur que celui-ci avait soutenu que l’étendue des pièces sollicitées par les salariés excédait les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile ou encore que les mesures demandées constituaient des mesures générales d’investigation, la cour d’appel, qui a méconnu les termes du litige, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

2) ALORS A TOUT LE MOINS QUE le juge doit en toutes circonstances faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction; qu’en retenant, pour statuer comme elle l’a fait, et sans provoquer préalablement les observations des parties à cet égard, que la mesure demandée s’analysait en une mesure générale d’investigation qui excédait les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile, cependant qu’il ne résultait ni des énonciations de l’arrêt, ni des écritures de l’employeur que celui-ci RENAULT TRUCKS avait soutenu que la mesure d’instruction sollicitée excédait les prévisions de l’article 145 du code de procédure civile en ce qu’elle constituait une mesure générale d’investigation, la cour d’appel, qui a soulevé ce moyen d’office, sans avoir préalablement recueilli les observations des parties à cet égard, a violé l’article 16 du code de procédure civile ;

3) ALORS AU SURPLUS QUE, en application de l’article 145 du code de procédure civile, toute mesure d’instruction légalement admissible peut être ordonnée à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige; que constitue une mesure d’instruction légalement admissible la demande de communication de preuves qui, bien qu’étendue, est circonscrite aux faits litigieux; qu’en affirmant que la mesure demandée par les exposants s’analyse en une mesure générale d’investigation excédant par sa généralité les précisions de l’article 145 du code de procédure civile, après avoir relevé que les salariés demandaient la communication des éléments concernant les salariés embauchés sur le même site, la même année ou dans les deux années précédentes et suivantes, dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient ainsi que les éléments de rémunération, de diplômes, de formation en lien avec l’évolution de carrière, la cour d’appel qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations dont il résultait que la demande de communication était circonscrite aux faits litigieux, violé le texte susvisé ;

4) ALORS EN OUTRE QUE, en affirmant, pour dire que la mesure demandée par les exposants s’analyse en une mesure générale d’investigation excédant par sa généralité les précisions de l’article 145 du code de procédure civile, que cette mesure portait sur 10585 salariés et 120478 documents, sans préciser les éléments sur lesquels elle se fondait et alors que le seul élément produit en ce sens par l’employeur était constitué par le mail de Mme CN…, responsable des paies, laquelle s’était bornée à procéder par voie de pure affirmation, sans aucun élément objectif à l’appui et alors que les exposants avaient établi, pièce à l’appui, que ces chiffres étaient totalement fantaisistes au regard du nombre de salariés dans l’entreprise, la cour d’appel, qui n’a pas motivé sa décision, a violé l’article 455 du code de procédure civile;

5) ALORS QUE, en relevant pour se déterminer comme elle l’a fait, que le salarié ne se comparait pas avec des salariés nommément visés, après avoir constaté que seul l’employeur disposait des éléments de fait pouvant servir de base à un procès lié à une discrimination syndicale, la cour d’appel, qui a statué par un motif inopérant, a derechef violé l’article 145 du code de procédure civile, ensemble les articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail, dans leur rédaction alors en vigueur ;

6) ALORS ENCORE QUE, en affirmant que les salariés demandaient la communication de l’ensemble des éléments concernant les salariés embauchés sur le même site, la même année ou dans les deux années précédentes et suivantes, dans la même catégorie professionnelle, au même niveau ou à un niveau très proche de qualification/classification et de coefficient ainsi que tous les éléments de rémunération, de diplômes, de formation en lien avec l’évolution de carrière, cependant que les salariés sollicitaient seulement les noms prénoms, sexe, date de naissance, l’âge et la date d’entrée de ces personnes ainsi que leurs diplômes à l’embauche, les bulletins de paie de décembre de chaque année et le dernier bulletin de salaire, leur lieu de travail actuel, de sorte que la demande des salariés ne portaient pas sur l’ensemble des éléments concernant les salariés, la cour d’appel, qui a dénaturé les écritures des salariés, a violé l’article 4 du code de procédure civile, ensemble le principe selon lequel il est interdit au juge de dénaturer l’écrit ;

7) ALORS EN TOUTE HYPOTHESE QUE, dans leurs écritures, les exposants avaient eu soin de faire valoir qu’ils étaient titulaires d’un mandat syndical et que leur carrière comme leur rémunération n’avaient quasiment pas évolué en comparaison des salariés ne disposant pas d’un mandat, que dans ces conditions ils avaient sollicité à plusieurs reprises que leur employeur leur communique les éléments leur permettant de comparer l’évolution de leur carrière et de leur rémunération avec les salariés embauchés à la même époque et sur le même site et qu’alors que ces éléments étaient indispensables pour pouvoir établir l’étendue de la discrimination syndicale et du préjudice subis, la Société RENAULT TRUCKS avait toujours refusé de transmettre ces informations alors qu’elle était la seule à disposer des pièces de nature à pouvoir procéder à une comparaison utile; qu’en se bornant, pour débouter les salariés de leurs demandes, à affirmer, après avoir constaté que la mesure demandée était légitime, que celle-ci s’analysait en une mesure générale d’investigation excédant par sa généralité les précisions de l’article 145 du code de procédure civile, sans rechercher si les mesures demandées n’étaient pas nécessaires à l’exercice du droit à la preuve des exposants et en particulier, si la communication des documents demandés, dont seul l’employeur disposait et qu’il refusait de communiquer, n’était pas nécessaire à la protection de leurs droits, la cour d’appel, qui a méconnu ses pouvoirs, a violé l’article 145 du code de procédure civile, ensemble l’article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

8) ALORS EN OUTRE QUE en déboutant les salariés de leur demande tendant à obtenir la communication des éléments nécessaires pour établir l’étendue de la discrimination syndicale subie et du préjudice subséquent après avoir constaté que seul l’employeur les détenait et refusait de les communiquer, la cour d’appel, qui a privé les exposants d’une protection judiciaire effective contre les discriminations syndicales a violé les articles 11 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

9) ALORS ENFIN QUE, en application des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 1245-1 du code du travail dans leur rédaction alors en vigueur, la réparation intégrale d’un dommage né d’une discrimination oblige à placer celui qui l’a subi dans la situation où il se serait trouvé si le comportement dommageable n’avait pas eu lieu ; qu’en déboutant les salariés de leur demande tendant à obtenir la communication des éléments nécessaires pour établir l’étendue du préjudice résultant de la discrimination syndicale et que seul l’employeur détenait et qu’il se refusait à communiquer, la cour d’appel, qui a privé les salariés de la possibilité de pouvoir obtenir la réparation intégrale du préjudice résultant de la discrimination syndicale subie, a violé les textes susvisés.

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