Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-18.835, Inédit

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 23 juin 2021, n° 19-18.835
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-18.835
Importance : Inédit
Décision précédente : Cour d'appel de Nancy, 5 février 2019, N° 17/01502
Textes appliqués :
Articles L. 3142-65 et L. 3142-66 du code du travail, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016,.

Article D. 3142-38 du même code, dans sa version antérieure au décret n° 2016-1555 du 18 novembre 2016.

Article 472 du code de procédure civile.

Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 6 mars 2024
Identifiant Légifrance : JURITEXT000043711178
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2021:SO00788
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

FB

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation

Mme LEPRIEUR, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 788 F-D

Pourvoi n° R 19-18.835

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [F] [W], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 19-18.835 contre l’arrêt rendu le 6 février 2019 par la cour d’appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. [X] [Z], domicilié [Adresse 2],

2°/ à Pôle emploi, dont le siège est [Adresse 3],

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Le Lay, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. [W], de la SCP Spinosi, avocat de M. [Z], après débats en l’audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents Mme Leprieur, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Le Lay, conseiller rapporteur, M. Barincou, conseiller, et Mme Pontonnier, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Nancy, 6 février 2019), M. [X] [Z] a été engagé en qualité d’employé d’assurances par son père, M. [C] [Z], gérant d’un cabinet d’assurances, le contrat de travail du salarié ayant été transféré à l’occasion de la cession du fonds à M. [W] le 1er juillet 2013.

2. Licencié pour faute grave le 11 juin 2014, il a saisi la juridiction prud’homale.

3. Les conclusions en cause d’appel de l’employeur, intimé, ont été déclarées irrecevables par le conseiller de la mise en état.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

4. L’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à payer au salarié une certaine somme au titre des commissions dues, outre les congés payés afférents, alors « qu’ en appel, si l’intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; qu’il appartient aux seconds juges d’examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’était déterminé ; qu’en condamnant M. [W] à verser à M. [Z] une somme de 11 163,46 euros au titre d’un « accord de participation » prévu par avenant à son contrat de travail en date du 1er février 2003 sans examiner la pertinence des motifs du jugement infirmé ayant jugé, au regard des incohérences de rédaction l’affectant, que cet avenant avait été établi pour les besoins du litige, la cour d’appel a violé l’article 472 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 472 du code de procédure civile :

5. En appel, si l’intimé ne conclut pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés.

6. Pour réformer le jugement et condamner l’employeur à payer un rappel de commissions au salarié, la cour d’appel, après avoir cité les dispositions de l’article L. 3323-8 du code du travail, a retenu qu’un avenant au contrat de travail conclu le 1er février 2003 prévoit la mise en place d’un « contrat de participation ». Elle a ajouté que, selon les premiers juges, le nouvel employeur n’avait pas mis en place un accord de participation et les dispositions contractuelles constituées par un avenant du 1er février 2003 ne trouvaient plus à s’appliquer. Elle a relevé néanmoins qu’il ne ressort pas des pièces du dossier que l’entreprise de M. [W] ne disposait pas d’un tel accord, ou qu’en l’absence de celui-ci il a engagé les négociations pour aboutir à un accord, ni même que la fusion des activités de M. [C] [Z] et de celles de M. [W], qui sont identiques, a rendu impossible l’application des dispositions bénéficiant au salarié.

7. En statuant ainsi, alors qu’elle devait examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence de l’ensemble des motifs par lesquels les premiers juges s’étaient déterminés, notamment ceux tirés de l’irrégularité de l’avenant du 1er février 2003, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Et sur le second moyen, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

8. L’employeur fait grief à l’arrêt de juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement du salarié, de le condamner à lui payer une indemnité compensatrice de préavis, les congés payés afférents, une indemnité conventionnelle de licenciement, des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, des frais irrépétibles et au remboursement à Pôle emploi des indemnités de privation d’emploi servies dans la limite de deux mois, alors « que le réserviste salarié souhaitant bénéficier d’une autorisation d’absence pour servir dans la réserve opérationnelle doit présenter sa demande à son employeur un mois au moins à l’avance par écrit précisant la date et la durée de l’absence envisagée ; que le refus de l’employeur dont l’autorisation est requise est motivé et notifié au salarié ainsi qu’à l’autorité militaire dans les quinze jours suivant la réception de cette demande ; qu’en se déterminant aux termes de motifs inopérants, pris de ce que M. [W] aurait "indiqué [lors de l’entretien préalable] avoir eu connaissance de la convocation de M. [Z] pour la période concernée plus d’un mois avant le début de celle-ci et n’avoir pas notifié son refus dans les quinze jours suivant la date à laquelle il a été prévenu", dont il ne résulte pas que M. [Z] aurait formulé par écrit une demande d’autorisation d’absence, ni la date de réception de celle-ci par l’employeur, la cour d’appel a violé les articles L. 3142-66, L. 3142-70 et D. 3142-38 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3142-65 et L. 3142-66 du code du travail, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et l’article D. 3142-38 du même code, dans sa version antérieure au décret n° 2016-1555 du 18 novembre 2016 :

9. Selon le premier de ces textes, tout salarié ayant souscrit un engagement à servir dans la réserve opérationnelle bénéficie d’une autorisation d’absence de cinq jours par année civile au titre de ses activités dans la réserve.

10. Selon le deuxième de ces textes, le réserviste salarié souhaitant bénéficier de l’autorisation d’absence au titre de la réserve opérationnelle présente sa demande par écrit à son employeur un mois au moins à l’avance, en indiquant la date et la durée de l’absence envisagée. Au-delà de cette durée, le réserviste requiert l’accord de son employeur avec un préavis d’un mois en précisant la date de son départ et la durée de la période qu’il souhaite accomplir, sous réserve de dispositions plus favorables résultant notamment de conventions conclues entre l’employeur et le ministre de la défense.

11. Selon le troisième de ces textes, le refus de l’employeur d’accorder l’autorisation de participer à une activité dans la réserve opérationnelle est motivé et notifié au salarié ainsi qu’à l’autorité militaire dans les quinze jours à compter de la réception de la demande.

12. Pour juger sans cause réelle et sérieuse le licenciement pour abandon de poste constitué par l’absence du salarié pour ses activités de réserve opérationnelle pendant quinze jours, la cour d’appel a retenu que l’employeur avait reconnu avoir été informé de la date et de la durée de l’absence envisagée, plus d’un mois à l’avance et qu’il avait signifié son refus d’accorder cette absence au motif d’un surcroît d’activité exceptionnelle de l’agence quatre jours avant le début de la mission, soit dans des conditions irrégulières au regard des textes.

13. En statuant ainsi, alors qu’elle n’avait pas constaté l’existence d’une demande écrite d’autorisation d’absence du salarié, laquelle fait courir le délai imparti à l’employeur, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 6 février 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Nancy ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Reims ;

Condamne M. [Z] aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un. MOYENS ANNEXES au présent arrêt

Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour M. [W].

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR condamné "M. [F] [W] à payer à M. [X] [Z] la somme de 11 163,46 ??au titre des commissions dues", outre les congés payés y afférents ;

AUX MOTIFS QUE " M. [X] [Z] a été embauché le 1er juillet 1992 par M. [C] [Z], agent général d’assurances sous l’enseigne AXA Assurances ; un avenant est signé le 1er juillet 2003 prévoyant en particulier la possibilité pour le salarié de s’absenter dans le cadre de la réserve opérationnelle de militaire.

Le 1er juillet 2013, l’activité de M. [C] [Z] a, à la suite du départ en retraite de celui-ci, fusionné avec celle de M. [F] [W], à qui le contrat de travail de M. [X] [Z] a été transféré.

Par lettre du 11 juin 2014, M. [F] [W] a notifié à M. [Z] un licenciement pour faute grave, au motif que le salarié avait abandonné son poste le 28 avril 2014 pour accomplir des activités de réserviste Vigipirate pendant 15 jours, cet acte matérialisant une insubordination et un abandon de poste.

Contestant le licenciement, M. [X] [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Verdun par requête du 23 septembre 2014 aux fins d’une part de se voir régler le montant de commissions et d’autre part de voir dire son licenciement sans cause réelle et sérieuse avec toutes conséquences indemnitaires.

Par jugement en date du 15 mai 2017, la juridiction a débouté M. [Z] de toutes ses demandes et l’a condamné à verser à M. [W] la somme de 150 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [X] [Z] a interjeté appel le 14 juin 2017.

Il a adressé ses conclusions via le RPVA le 5 septembre 2017 et les a notifiées le même jour à la partie adverse.

M. [W] a déposé ses conclusions via le RPVA le 1er décembre 2017.

Par requête déposée via le RPVA le 4 décembre 2017, M. [Z] a saisi le conseiller de la mise en état d’un incident tendant à faire constater l’irrecevabilité des conclusions de l’intimé au regard des dispositions de l’article 909 du code de procédure civile dans sa version applicable à l’espèce.

Par ordonnance du 21 décembre 2018, le conseiller de la mise en état a :

— déclaré irrecevables les conclusions déposées le 1er décembre 2017 à la cour par l’intimé,

— laissé les dépens à la charge de la partie intimée,

— renvoyé l’affaire à la mise en état du 18 avril 2018 pour clôture et fixation de la date de plaidoirie.

Suivant ses conclusions reçues au greffe le 23 mai 2018, M. [X] [Z] demande à la cour de constater le caractère recevable et justifié de ses demandes, et en conséquence, et statuant à nouveau, de:

— condamner M. [W] au paiement des sommes de:

—  15 761,70 euros brut à titre de commissions ;

—  1 576,17 euros brut à titre de congés payés y afférents ;

—  56 316, 96 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;

—  18 576,77 euros à titre d’indemnités de licenciement conventionnelles ;

—  4 693,08 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;

—  469,31 euros à titre de congés payés y afférents ;

—  4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— le condamner aux entiers dépens de la présente instance.

Au soutien de ses prétentions M. [X] [Z] expose, en substance, que :

— sur le rappel des commissions, un avenant au contrat de travail conclu le 1er février 2003 dispose qu’un accord de participation a été conclu qui prévoit le versement sur ce compte dédié d’un montant correspondant à 3% des commissions perçues par l’Agence au titre de l’année, et un commissionnement de 30 % pour le surplus de commissions comparées à l’année précédente ; qu’en tout état de cause, ces sommes sont dues même si l’accord de participation est devenu caduc du fait du transfert du contrat ;

— sur le licenciement pour faute grave, motif pris d’un abandon de poste et d’un refus d’obéissance, le motif de l’absence était contractuellement défini et il a bien respecté le préavis d’un mois prévu aux dispositions légales concernant son absence, ce qui ressort de l’attestation de Mme [Q] [R], défenseur syndical qui était présente lors de l’entretien préalable ; le licenciement est donc injustifié et a crée pour le salarié un préjudice qu’il convient d’indemniser.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 avril 2018" ;

ET AUX MOTIFS QUE " Sur la demande au titre des commissions :

Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’entreprise, par fusion, cession ou scission, rendant impossible l’application d’un accord de participation, cet accord cesse de produire effet entre le nouvel employeur et le personnel de l’entreprise ; en l’absence d’accord de participation applicable à la nouvelle entreprise, celle-ci engage, dans un délai de six mois à compter de la clôture de l’exercice au cours duquel est intervenue la modification, une négociation en vue de la conclusion d’un nouvel accord, selon l’un des modes prévus à l’article L. 3322-6.

Il ressort du dossier qu’un avenant au contrat de travail conclu le 1er février 2003 prévoit la « mise en place pour prendre effet au 1er avril 2003 d’un contrat de participation » Agent de maîtrise « le versement sur ce compte par l’Agence, sera de 3 % des commissions perçues dans l’année… ».

Pour rejeter la demande, les premiers juges ont dit que le nouvel employeur n’avait pas mis en place un accord de participation et que ces dispositions contractuelles ne trouvaient plus à s’appliquer.

Cependant, il ne ressort pas des pièces du dossier que l’entreprise de M. [F] [W] ne disposait pas d’un tel accord, ou qu’en l’absence de celui-ci il a engagé les négociations pour aboutir à un accord, ni même que la fusion des activités de M. [C] [Z] et de celles de M. [F] [W], qui sont identiques, a rendu impossible l’application des dispositions bénéficiant au salarié.

Il ressort des documents intitulés « Balance cumulative des compte »' pour les années 2013 et 2014 que, pour la période du 1er janvier 2013 au 30 mai 2014, le montant des commissions formant l’assiette des sommes dues à M. [X] [Z] est de 372 115,48 euros ; que sur cette base, il est dû à M. [X] [Z] la somme de 11 163,46 euros, outre la somme de 1 116,35 euros au titre des congés payés afférents.

Il sera fait droit à la demande à cette hauteur, et la décision entreprise sera infirmée sur ce point" ;

1°) ALORS QU’en appel, si l’intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; qu’il appartient aux seconds juges d’examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’était déterminé ; qu’en condamnant M. [W] à verser à M. [Z] une somme de 11 163,46 ? au titre d’un « accord de participation » prévu par avenant à son contrat de travail en date du 1er février 2003 sans examiner la pertinence des motifs du jugement infirmé ayant jugé, au regard des incohérences de rédaction l’affectant, que cet avenant avait été établi pour les besoins du litige, la cour d’appel a violé l’article 472 du code de procédure civile ;

2°) ALORS subsidiairement QU’en condamnant M. [W] à verser à M. [Z] une somme de 11 163,46 ? « au titre des commissions dues » en exécution d’un avenant au contrat de travail de ce salarié par lequel son ancien employeur s’était engagé à « la mise en place pour prendre effet au 1er avril 2003 d’un contrat de participation »agent de maîtrise« . Le versement sur ce compte par l’agence sera de 3 % des commissions perçues dans l’année », dont ne résultait ni un accord de participation applicable dans l’entreprise, ni un engagement ferme de l’employeur envers M. [Z] l’obligeant à lui payer un pourcentage des résultats de l’entreprise, mais uniquement l’engagement de conclure un « contrat de participation » destiné aux agents de maîtrise, dont les modalités restaient à définir, et de « verser sur un compte » ouvert à cette occasion un pourcentage de commissions, la cour d’appel a violé les articles 1134 devenu 1103 et 1104 du code civil, L.3322-6, L.3323-1,L.3323-2, L.3323-4,L.3323-8 et L.3324-1 du code du travail.

SECOND MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [Z] et condamné en conséquence M. [W] à payer à ce salarié les sommes de 4 693,08 ?, outre les congés payés y afférents, à titre d’indemnité compensatrice de préavis, 11 118,31 ? à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement, 30 000 ? à titre de dommages et intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, 1 500 ? au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à rembourser à Pôle emploi les indemnités de privation d’emploi servies à M. [Z] dans la limite de deux mois ;

AUX MOTIFS QUE " La faute grave est celle qui résulte d’un fait ou d’un ensemble de faits imputables au salarié qui constitue une violation des obligations résultant du contrat de travail ou des relations de travail d’une importance telle qu’elle rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise. C’est à l’employeur qui invoque la faute grave pour licencier d’en rapporter la preuve.

QUE par lettre du 11 juin 2014, M. [F] [W] a notifié à M. [X] [Z] son licenciement en ces termes :

« Suite à notre discussion sur la possibilité de partir en réserve Vigipirate et au vu de l’accroissement de travail causé par le départ soudain et inattendu de notre confrère AXA de Verdun et de trois de ses salariés, je vous ai refusé cette disponibilité notamment sur une durée d’une telle conséquence. Je vous ai demandé de réduire cette période de moitié afin que nous puissions faire face à cette accroissement de travail imprévu tous ensemble ; j’insiste sur le fait que l’ensemble des autres salariés de l’entreprise ont tous participé à cet effort collectif pour faire face à cette augmentation de travail et le doublement de notre portefeuille client.

Vous avez alors maintenu à de nombreuses reprises que vous ne changeriez rien à vos demandes d’autorisation d’absence expliquant que vous deviez partir vis à vis de la réserve et vous dispenseriez de mon aval pour prendre cette disponibilité relevant de vos activités purement personnelles de réserviste ( il s’agissait de votre cinquième départ en réserve depuis 10 mois) ; vous avez donc décidé de partir de nouveau.

Afin de rendre incontestable notre position, je vous ai fait signifier un courrier du 24 avril 2014 par voie d’huissier par lequel je refusais votre absence et exigeais votre maintien au poste au cours de la semaine du 28 avril.

Malgré cette position claire prise, vous avez abandonné votre poste le 28 avril pour accomplir vos activités de réserviste Vigipirate pendant quinze jours.

Votre décision marque un abandon de poste caractérisé mais également un acte d’insubordination prémédité et inadmissible vis à vis de l’entreprise et de l’ensemble de vos collègues de travail.

En effet comme il relève des motifs exposés à l’appui de mon refus, votre absence a désorganisé encore un peu plus l’entreprise au moment où cette dernière se trouvait en situation d’accroissement exceptionnel d’activité par la gestion tutélaire des trois autres agences AXA confiée à titre temporaire et exceptionnelle par nos mandants détenteurs de l’enseigne.

Vous avez souhaité imposer votre décision personnelle alors que l’entreprise se trouvait sur le fil en termes de gestion pour près de 7000 clients sur cinq points de vente distincts, imposant notamment à vos collègues la bagatelle de quinze jours d’indisponibilité.

Cette absence a été vécue comme un acte personnel et égoïste pour assouvir vos activités personnelles et extérieures alors que l’entreprise ne pouvait sans préavis raisonnable répondre à une activité exceptionnellement chargée.

Il m’est donc impossible de vous maintenir à votre poste même durant l’exécution d’un préavis et votre contrat prendra fin dès réception de la présente".

QUE les articles L.3142-51 à L.3142-57 et R.3142-38 du code du travail disposent que tout salarié ayant souscrit un engagement à servir dans la réserve opérationnelle bénéficie d’une autorisation d’absence de cinq jours par année civile au titre de ses activités dans la réserve ; que le réserviste salarié qui souhaite bénéficier d’une absence au titre de la réserve opérationnelle doit présenter sa demande par écrit à son employeur au moins un mois à l’avance en indiquant la date et la durée de l’absence envisagée, ou de la durée qu’il souhaite accomplir si celle-ci est supérieure à cinq jours ; que dans ce dernier cas, l’employeur peut s’opposer à la demande du salarié en lui notifiant ainsi qu’à l’autorité militaire un refus motivé dans les quinze jours à compter de la réception de la demande.

Il ressort du dossier que M. [X] [Z] a été affecté en qualité de militaire de réserve dans le cadre de la réserve opérationnelle avec le grade d’adjudant ; que cette activité a été prise en compte dans l’avenant au contrat de travail du 1er février 2003 qui précise que « Sur présentation de la convocation, le salarié dispose de son temps pour effectuer la période sous les drapeaux, les absences seront prises en congés payés ou compensées par des heures supplémentaires ou complémentaires et sur les RTT, le salaire étant donc versé normalement » ; qu’il a été requis par l’autorité militaire de se présenter le 28 avril 2014 pour effectuer une période de 18 jours ; que, par acte d’huissier du 24 avril 2014, soit quatre jours avant le début de la mission, M. [F] [W] a fait signifier au salarié son refus d’accorder cette absence au motif d’un surcroît d’activité exceptionnelle de l’agence ; que M. [X] [Z] s’est cependant absenté sur ladite période.

Il ressort d’une attestation, conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile, établie par Mme [Q] [R], défenseur du salarié ayant assisté M. [Z] lors de l’entretien préalable, que M. [W] a indiqué avoir eu connaissance de la convocation de M. [Z] pour la période concernée plus d’un mois avant le début de celle-ci et n’avoir pas notifié son refus dans les quinze jours suivant la date à laquelle il a été prévenu ; qu’il a par ailleurs reconnu qu’il avait été contacté par l’autorité militaire afin de permettre au salarié de s’absenter en raison de l’importance de la mission à laquelle participait M. [Z].

Il ressort donc de ce qui précède que M. [X] [Z] a informé M. [F] [W] de son absence plus d’un mois avant son départ et que l’employeur a opposé à la demande de son salarié un refus dans des conditions irrégulières au regard des textes rappelés plus haut ; qu’en conséquence les premiers juges ne pouvaient retenir que le salarié avait commis un acte d’insubordination et un abandon de poste.

Par ailleurs, il convient de relever de l’attestation de Mme [Q] [R] que M. [F] [W] refuse que les obligations citoyennes légitimes de ses salariés influent sur le fonctionnement de son entreprise et que « dorénavant, il refuserait toute demande d’absence pour les missions de réserve opérationnelle ».

Compte tenu de ce qui précède, il convient de dire que le grief formulé par M. [F] [W] à l’encontre de M. [X] [Z] n’est pas établi, de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse et en conséquence d’infirmer sur ce point la décision entreprise" ;

1°) ALORS QU’en appel, si l’intimé ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond et le juge ne fait droit aux prétentions et moyens de l’appelant que dans la mesure où il les estime réguliers, recevables et bien fondés ; qu’il appartient aux seconds juges d’examiner, au vu des moyens d’appel, la pertinence des motifs par lesquels le premier juge s’était déterminé ; qu’en retenant, pour juger dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement de M. [Z], " que M. [X] [Z] a été affecté en qualité de militaire de réserve dans le cadre de la réserve opérationnelle avec le grade d’adjudant ; que cette activité a été prise en compte dans l’avenant au contrat de travail du 1er février 2003 qui précise que « Sur présentation de la convocation, le salarié dispose de son temps pour effectuer la période sous les drapeaux, les absences seront prises en congés payés ou compensées par des heures supplémentaires ou complémentaires et sur les RTT, le salaire étant donc versé normalement » sans examiner la pertinence des motifs du jugement infirmé ayant jugé, au regard des incohérences de rédaction l’affectant, que cet avenant avait été établi pour les besoins du litige, la cour d’appel a violé l’article 472 du code de procédure civile ;

2°) ALORS QUE constitue une faute grave l’abandon, pendant quinze jours, de son poste de travail nonobstant une interdiction d’absence exprimée par l’employeur pour des motifs liés à l’intérêt légitime de l’entreprise, peu important que le motif de l’absence soit l’exécution, par le salarié de ses engagements de servir dans la réserve opérationnelle ; qu’en décidant le contraire la cour d’appel a violé les articles L.1234-1, L.1234-9 et L.1235-3 du code du travail ;

3°) ALORS QUE le réserviste salarié souhaitant bénéficier d’une autorisation d’absence pour servir dans la réserve opérationnelle doit présenter sa demande à son employeur un mois au moins à l’avance par écrit précisant la date et la durée de l’absence envisagée ; que le refus de l’employeur dont l’autorisation est requise est motivé et notifié au salarié ainsi qu’à l’autorité militaire dans les quinze jours suivant la réception de cette demande ; qu’en se déterminant aux termes de motifs inopérants, pris de ce que M. [W] aurait "indiqué [lors de l’entretien préalable] avoir eu connaissance de la convocation de M. [Z] pour la période concernée plus d’un mois avant le début de celle-ci et n’avoir pas notifié son refus dans les quinze jours suivant la date à laquelle il a été prévenu", dont il ne résulte pas que M. [Z] aurait formulé par écrit une demande d’autorisation d’absence, ni la date de réception de celle-ci par l’employeur, la cour d’appel a violé les articles L.3142-66, L.3142-70 et D.3142-38 du code du travail ;

4°) ALORS QUE les juges ne doivent pas dénaturer les écrits qui leur sont soumis ; qu’en l’espèce, il ressortait des termes clairs et précis du témoignage du conseiller du salarié qu’à la question : "Mme [R] demande si, par la suite, l’employeur refusera toute demande d’absence« , l’employeur avait répondu : »M. [W] dit n’être pas le seul décideur, que ce n’est pas l’absence en elle-même qui a amené la sanction mais plutôt le fait que le salarié soit resté sur sa position, qu’il n’avait pas d’autre choix par rapport aux collègues de M. [Z]" ; qu’en retenant à l’appui de sa décision qu’ " il convient de relever de l’attestation de Mme [Q] [R] que M. [F] [W] refuse que les obligations citoyennes légitimes de ses salariés influent sur le fonctionnement de son entreprise et que « dorénavant, il refuserait toute demande d’absence pour les missions de réserve opérationnelle » la cour d’appel a méconnu le principe susvisé ;

5°) ALORS en outre, QU’en retenant à l’appui de sa décision qu'"il convient de relever de l’attestation de Mme [Q] [R] que M. [F] [W] refuse que les obligations citoyennes légitimes de ses salariés influent sur le fonctionnement de son entreprise (?)« quand il ressortait des termes de la lettre de licenciement que la période pour laquelle l’autorisation avait été refusée représentait le »cinquième départ en réserve depuis dix mois" de M. [Z], ce dont il résultait que l’employeur ne mettait pas obstacle à l’accomplissement par ses salariés en général et M. [Z] en particulier de « leurs obligations citoyennes légitimes » et n’avait formulé l’interdiction enfreinte qu’en raison d’impérieuses exigences de fonctionnement de l’entreprise, la cour d’appel a violé l’article L.1232-6 du code du travail.

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Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 19-18.835, Inédit