Cour d'appel de Metz, 1ère chambre, 10 octobre 2017, n° 16/02145

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Sur la décision

Référence :
CA Metz, 1re ch., 10 oct. 2017, n° 16/02145
Juridiction : Cour d'appel de Metz
Numéro(s) : 16/02145
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

RG N° 16/02145

Y

C/

A

ARRÊT N°17/00356

COUR D’APPEL DE METZ

1re Chambre

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2017

APPELANT :

Monsieur D Y

[…]

[…]

représenté par Me BETTENFELD Armelle, avocat à la Cour d’Appel de METZ

INTIME :

Monsieur E A

Exploitant en nom propre l’Entreprise A

[…]

[…]

représenté par Me ROULLEAUX, avocat à la Cour d’Appel de METZ

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ

PRÉSIDENT : Monsieur HITTINGER, Président de Chambre

ASSESSEURS : Madame STAECHELE, Conseiller

Madame BOU, Conseiller

GREFFIER PRÉSENT AUX DÉBATS : Madame X

DATE DES DÉBATS : En application des dispositions de l’article 786 et 907 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 29 juin 2017 en audience publique, les partie ne s’y étant pas opposées, devant Monsieur Guy HITTINGER, Président de Chambre chargé du rapport et Madame Florence STAECHELE, Conseiller.

Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour pour l’arrêt être rendu le 10 octobre 2017.

FAITS ET PROCÉDURE ANTÉRIEURE

Selon devis en date du 5 janvier 2012 accepté le 12 janvier 2012, M. D Y , a confié des travaux de pose de carrelage à M. E A pour un prix TTC de 41'362,46 euros en vue de l’aménagement d''une cellule commerciale.

Un acompte de 20'750,40 euros a été réglé par M. Y mais après réception des travaux en date du 2 février 2012 et deux mises en demeure, il n''a pas payé le solde du prix.

Le 22 septembre 2012, le juge des référés a ordonné la réalisation d''une expertise confiée à M Z qui a déposé son rapport le 18 mai 2013.

Puis par ordonnances des 20 juin 2014 et 13 mai 2015, ont été successivement rejetées par le président du tribunal de grande instance de Metz, les demandes de provision et de nouvelle expertise présentées respectivement par M. A et M. Y .

Par acte d’huissier de justice du 1er août 2013, M. A a assigné devant le tribunal de grande instance de Metz M. Y en paiement du solde des travaux , au visa des articles 1134 et suivants du code civil. Il entendait obtenir le paiement des sommes suivantes’avec le bénéfice de l’exécution provisoire:

-20 612,06 euros augmentée des intérêts légaux à compter de la mise en demeure du 11 février 2012';

-5 000 euros à titre de dommages et intérêts';

-3000 euros au titre de l''article 700 du code de procédure civile.

Invoquant la non-conformité des travaux, l''existence de désordres et contestant l''expertise judiciaire, M. Y demandait au tribunal':

— avant dire droit, d''ordonner une nouvelle expertise des travaux';

— de déclarer le demandeur irrecevable et mal fondé en sa demande';

— de le condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l''article 700 du code de procédure civile ainsi qu''à tous les frais et dépens

Par jugement du 15 juin 2016, le tribunal de grande instance de Metz a rejeté la demande de nouvelle expertise présentée par M. Y , et a condamné ce dernier à payer, avec exécution provisoire , à M. A :

— la somme de 20 612,06 euros avec intérêts au taux légal à compter du 5 mars 2012 ;

— la somme de 500 euros à titre de dommages et intérêts ;

— la somme de 2'000 euros sur le fondement de l''article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal a, en outre, condamné M. Y au paiement des entiers dépens en ce compris les frais d''expertise.

Pour statuer en ce sens, le tribunal, se fondant sur la rapport d''expertise judiciaire, a retenu qu''il n''avait pas été constaté de désordres, que les travaux avaient été exécutés dans le respect des règles de l''art et que bien que M. A n''ait pas appliqué de double encollage comme cela était prévu au devis, il avait utilisé un carreau de plus grande qualité ne nécessitant qu''un simple encollage à l''aide d''un produit plus dispendieux que celui convenu et qu''en conséquence cela excluait une plus-value.

Le tribunal en a déduit que M. Y était tenu de payer le solde du contrat avec intérêts au taux légal à compter de la réception de la seconde mise en demeure soit le 5 mars 2012, que ces intérêts moratoires ne suffisaient pas à compenser le préjudice financier subi par M. A dans la mesure où le solde des travaux était resté impayé depuis plus de 4 ans et a en conséquence alloué 500 euros de dommages et intérêts au constructeur.

Le tribunal a rejeté la demande d''expertise présentée par M. Y retenant que les pièces qu''il apportait pour faire valoir une aggravation des désordres n''étaient pas probantes. Il a ainsi considéré':

— que le rapport du cabinet d''expertise privé CETB produit reprenait à son compte les affirmations de M. Y sans neutralité, ne comprenait aucune analyse technique propre et motivée et se contentait de renvoyer aux observations de M. B ;

— les qualifications de M. B, auteur de la lettre dont se prévalait le défendeur, n''étaient pas précisées, qu''il n''était cependant pas expert, et consignait dans son écrit des affirmations dubitatives';

— qu''il n''était pas produit de constat d''huissier qui permette d''établir que certains carreaux ''sonnaient creux'' alors que cela n''avait pas été constaté par l''expert judiciaire.

Par déclaration d''appel enregistrée le 11 juillet 2016, M. Y a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Par dernières conclusions récapitulatives du 7 février 2017, M. Y demande à la cour de :

''Infirmer le jugement du 15 juin 2016,

Avant dire droit,

Ordonner une expertise judiciaire, avec mission pour l''expert de:

— se rendre sur place, en présence des parties ou celles-ci dûment convoquées, y faire toute constatation sur l''existence des désordres allégués par Monsieur Y,

— établir l''historique succinct des éléments du litige en indiquant notamment les intervenants à l''opération de construction concernée par ce ou ces désordres, en dressant l''inventaire des pièces contractuelles utiles à l''instruction du litige, notamment les polices d''assurance souscrites et en recherchant les dates de déclaration d''ouverture de chantier, d''achèvement des travaux et de réception.

— examiner les désordres, malfaçons ou non-façon alléguées par Monsieur Y , donner une description précise de chacun d''entre eux, en indiquant leur nature et en produisant dans toute la mesure du possible des photographies,

— dire pour chaque désordre s''il provient d''une non-conformité aux documents contractuels, aux règles de l''art ou aux prescriptions d''utilisation des matériaux ou élément d''ouvrage mis en oeuvre, d''une exécution défectueuse ou encore d''une négligence dans l''entretien ou d''exploitation des ouvrages.

— rechercher la date d''apparition de chaque désordre et préciser s''ils étaient apparents lors de la réception de l''ouvrage ou de la prise de possession, vérifier s''il en est fait mention au procès-verbal de réception ou s''ils ont fait l''objet de réclamations de réserves,

— indiquer si ces désordres sont de nature à nuire à la solidité de l''ouvrage ou le rendent impropre à sa destination,

— préconiser les remèdes à y apporter et les travaux nécessaires à la remise en bons états de l''immeuble, en chiffrer le coût et en évaluer la durée,

— plus généralement, de fournir tout élément technique ou de fait de nature à permettre le cas échéant à la juridiction compétente sur le fond du litige de déterminer les responsabilités éventuelles encourues et d''évaluer, s''il y a lieu, les préjudices subis.

En tout état de cause,

Déclarer M. E A irrecevable et subsidiairement mal fondé en l''ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Condamner M. E A aux entiers frais et dépens d''instance et d''appel, y compris les frais d''expertise,

Condamner M. E A à payer à M. D Y une somme de 2000 euros au titre de l''article 700 du CPC. ''

M. Y affirme que la réception est intervenue avec réserve.

Il fait grief au jugement d''avoir refusé sa demande tendant au prononcé d''une nouvelle expertise avant dire droit alors qu''il expose qu''est contestable le rapport déposé par M.'Z. M. Y reproche à l''expert d''avoir validé les travaux alors que par lettre du 18 mars 2013, il l''avait informé de l''aggravation des désordres, qu''il lui rappelait la réalisation d''un simple encollage contrairement au double prévu au devis, et la différence entre la surface facturée et celle réellement carrelée.

M. Y réitère donc sa demande de nouvelle expertise avant dire droit en appel, et invoque au soutien de cette prétention diverses pièces parmi lesquelles sont comptés :

— le rapport CEBT et la lettre émanant de l''entreprise B déjà soumis au débat de première instance et à propos desquels l''appelant soutient que l''absence de M. A aux constatations dont ils résultent est sans emport dans la mesure où ils ont été versés au débat et soumis à la contradiction ;

— le procès-verbal de l''étude C qui mentionne une inclination du carrelage, une différence de niveau, des carreaux « sonnant creux », des fissures et des joints manquants et concernant lequel l''appelant indique d''une part, qu''il fait foi dans la mesure où, il a été dressé par un huissier, et, que l''intimé ne rapporte pas la preuve de l''inexactitude de son contenu, et d''autre part que M. A était présent au début des constatations et que des désordres avaient déjà été relevés avant qu''il ne quitte les lieux.

M. Y affirme que l''ensemble des pièces fournies démontrent la réalité des désordres qu''il dénonce depuis l''introduction de la procédure, le non-respect des règles de l''art et la non-conformité des travaux ce qui justifie la tenue d''une nouvelle expertise qui permettra par la suite de faire les comptes entre les parties.

Subsidiairement, M. Y sollicite l''infirmation du jugement en ce qu''il l''a condamné au paiement du solde du prix des travaux et à des dommages et intérêts, soutenant, par les pièces produites, qu''est démontrée la non-conformité des travaux.

Enfin, M. Y demande à ce que soit déclarée irrecevable et subsidiairement mal-fondée, la demande de dommages et intérêts pour appel abusif présentée à son encontre par l''intimé aux motifs que ce dernier ne démontre pas en quoi M. Y aurait abusé du droit de se défendre, et qu''il ne précise pas le fondement juridique de sa demande.

*****

Suivant dernières écritures de son avocat datées du 3 avril 2017, M. A demande à la cour de :

''Rejeter l''appel de M. Y et le dire mal fondé.

Confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions.

Débouter M. Y de sa demande de nouvelle expertise.

Condamner M. Y en tous les frais et dépens ainsi qu''au paiement d''une somme de 5.000 euros en application des dispositions de l''article 700 du Code de Procédure Civile et d''une autre somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts pour appel abusif et dilatoire.''

M. A explique que si M. Y a effectivement stipulé que la réception intervenait « sous réserve de résistance du carrelage à la charge », il précise que le carrelage lui a été fourni par l''appelant et qu''il ne peut être retenu qu''un quelconque désordre ait été dénoncé à la réception.

Pour faire valoir la confirmation du jugement déféré, l''appelant fait sienne sa motivation et ajoute :

— que la seule pièce probante est le rapport d''expertise judiciaire qui ne constate aucun désordre et conclut au respect des travaux aux règles de l''art estimant sans emport la réalisation d''un simple encollage contrairement au double prévu au devis et considérant ce procédé comme le seul permettant le respect des délais imposés par le client ;

— que le mortier colle utilisé est conforme au CTP

— que la colle employée bénéficie de la certification CSTB et qu''elle ne nécessite pas de double encollage jusqu''à 3 600 cm2 ce qui correspond précisément à la surface des carreaux fournis par M. Y ;

— que les travaux ont fait l''objet d''une attestation spécifique de la part de la CAMBTP.

M. A s''oppose à la demande de nouvelle expertise formée par l''appelant estimant que c''est à juste titre que le tribunal a écarté les pièces présentées par M. Y en ce sens, ajoutant que le rapport CEBT et la lettre de l''entreprise B lui sont inopposables dans la mesure où il n''a pas assisté aux opérations ayant entraîné leur rédaction, ni même n''y a été convié.

En outre, il soutient que le procès-verbal de constat d''huissier dressé le 18 janvier 2016 par C ne justifie pas davantage la demande de nouvelle expertise de la partie adverse au motif que bien qu''il ait été rédigé en cours de procédure de 1re instance, il n''a pas été produit devant le premier juge et ne constitue pas en ce sens un élément nouveau.

Par ailleurs, il soutient que les désordres relevés dans ce constat ne sont pas significatifs, ne remettent pas en question la bonne tenue générale des travaux et procèdent de chocs mécaniques qui ne relèvent pas de sa responsabilité.

S''agissant précisément de la différence de niveau mentionnée par le procès-verbal, l''intimé fait valoir que ce désordre a été relevé non contradictoirement alors qu''il avait quitté les lieux avec le représentant de son assureur et que bien que ces désordres ne peuvent être réputés nouveaux en raison de leur nature ils n''ont jamais été invoqués avant l''appel, et n''ont été relevés ni par le cabinet CETB ni par M. B. L''intimé souligne également qu''il n''est ni établi ni allégué que cette différence de niveau compromet la destination de l''ouvrage.

Enfin, M. A qui affirme que le magasin carrelé est exploité depuis février 2012, déduit de l''absence de tout accident et de tout sinistre en cinq ans d''exploitation, la mauvaise foi de M. Y dans son insistance à s''opposer au paiement du solde des travaux et sollicite en conséquence des dommages et intérêts à titre d''appel abusif et dilatoire.

*****

L''ordonnance de clôture a été rendue le 09 mai 2017.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Le tribunal a rejeté les critiques élevées à l’encontre des conclusions du rapport d’expertise judiciaire par M. Y par des motifs pertinents et a fait justement droit à la demande de paiement de M. A.

Suite à un constat effectué le 18 janvier 2016 par huissier de justice réalisé près de quatre années après la réception des travaux intervenue par procès-verbal du 2 février 2012, M. Y appuie sa demande d’une nouvelle expertise sur les faits rapportés dans le procès-verbal de l’huissier de justice, à savoir : des carreaux « sonnant creux » à deux endroits, des morceaux de joint manquants entre des carreaux à trois endroits, la fissuration d’un carreau et la présence d’une fissure courant sur quatre carreaux avec une inclinaison du sol aux endroits où les carreaux sont fissurés.

Il ressort à l’évidence de ces constats que la fissuration des carreaux est due à un mouvement du sol intervenu après la pose du carrelage. La responsabilité contractuelle de M. A ne s’étend pas aux conséquences d’une mal façon du support sur lequel il a posé les carrelages et qu’il n’a pas façonné. Il ne saurait lui être fait grief de ne pas avoir vérifié le support dans la mesure où il n’est pas établi que celui-ci présentait un défaut apparent au moment de la pose du carrelage puisque le défaut de planéité de la surface carrelée, qui est apparent, n’a pas été signalé par le maître d’ouvrage lors de la réception des travaux . Quant aux carreaux « sonnant creux » et aux joints manquants, défectuosités circonscrites à quelques carreaux d’une surface carrelée de 1441m², il s’agit des effets d’une usure normale liés à un usage intensif de la surface carrelée d’un magasin de vente.

La demande d’organisation d’une nouvelle expertise n’est donc pas justifiée. La décision déférée, entièrement justifiée au regard des motivations qu’elle comporte répondant totalement à l’argumentation de M. Y non différente en cause d’appel, sera confirmée.

L’insuccès du recours de M. Y n’est pas de nature à le faire dégénérer en faute. La demande de dommages et intérêts pour appel abusif formée par l’intimé sera rejetée en l’absence de démonstration d’une faute entachant l’exercice de cette voie de recours par l’ appelant.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe,

— rejette la demande d’une nouvelle expertise,

— déboute M. E A de sa demande de dommages et intérêts pour appel abusif,

— confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions,

— condamne M. D Y à verser à M. A la somme de 2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— rejette la demande formée par M. Y au titre de ce texte,

— condamne M. Y aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été prononcé par sa mise à disposition publique le 10 Octobre 2017, par Monsieur HITTINGER, Président de Chambre, assisté de Madame X, Greffier, et signé par eux.

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