Cour d'appel de Montpellier, 18 septembre 2019, n° 17/00654

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Montpellier, 18 sept. 2019, n° 17/00654
Juridiction : Cour d'appel de Montpellier
Numéro(s) : 17/00654
Décision précédente : Tribunal de grande instance de Narbonne, 16 janvier 2017, N° 12/00867

Texte intégral

Grosse + copie délivrées le

સે

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre B

ARRET DU 18 SEPTEMBRE 2019

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 17/00654 N° Portalis DBVK-V-B7B-NALR

-

Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 JANVIER 2017 TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE NARBONNE

N° RG 12/00867

APPELANTE :

CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL

DU LANGUEDOC inscrite au Registre du Commerce et des Sociétés de

MONTPELLIER sous le n° 492826417 agissant par son représentant légal en exercice domicilié ès qualité audit siège […] Représentée et assistée de Me Claude CALVET de la SCP

GOUIRY/MARY/CALVET/BENET, avocat au barreau de

NARBONNE avocat postulant et plaidant

INTIMES:

Monsieur A-B X né le […] à […]

[…]

Représenté et assisté de Me Karine JAULIN-BARTOLINI de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL HAZMI, avocats au barreau de NARBONNE, avocat postulant substitué par Me Léa CHAPELAT de la SCP PECH DE LACLAUSE-JAULIN-EL

HAZMI, avocat au barreau de NARBONNE, avocat plaidant

SA CNP ASSURANCES immatriculée au RCS de PARIS sous le

n° 341737062 représentée par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au dit siège

[…]

Représentée et assistée de Me Catherine GUILLEMAIN de la SCP DORIA AVOCATS, avocat au barreau de MONTPELLIER, avocat postulant et plaidant



Page 2

ORDONNANCE DE CLOTURE DU 04 Juin 2019

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 JUIN 2019, en audience publique, madame Chantal RODIER, conseiller ayant fait le rapport prescrit par l’article 785 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre
Madame Chantal RODIER, Conseiller
M. Christian COMBES, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier, lors des débats: Madame Marie-Lys MAUNIER

ARRET:

- contradictoire prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de

procédure civile;

- signé par Monsieur Georges TORREGROSA, Président de chambre, et par Mme Henriane MILOT, Greffier.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a consenti à Monsieur A-B X plusieurs prêts : un prêt n°496125016PR de 15 244,90 € le 23 décembre 1999, un prêt n°113549011PR de 13 650 € le 18 mars 2002, un prêt n° 125305016 PR de 87 000 € le 11 juillet 2003, un prêt n° 009BP6015PR de 92 000 € le12 juillet 2007.

Monsieur A-B X avait souscrit – pour chacun des prêts à l’assurance-groupe auprès de la SA CNP Assurances afin de couvrir les risques de décès et incapacité temporaire totale

de travail, ainsi que :

- le risque d’invalidité absolue et définitive pour le premier prêt;

- le risque perte totale et irréversible d’autonomie pour les trois

autres prêts.



Page 3

Le 14 avril 2009, Monsieur A-B X a été victime

d’un accident de travail provoquant des hernies discales avec lombo-sciatalgie droite.

Il déclarait le sinistre à la compagnie d’assurance par l’intermédiaire de sa banque, en produisant une attestation médicale d’incapacité et invalidité le 18 décembre 2009.

Le 14 juin 2010, le Crédit Agricole du Languedoc l’informait du refus de prise en charge par la CNP. Les démarches amiables n’aboutissaient pas, l’assureur maintenait sa position au motif que cette affection était exclue de la garantie.

Par actes d’huissier en dates des 6 et 8 juin 2012, Monsieur A-B X faisait délivrer assignation à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc et la SA CNP Assurances devant le tribunal de grande instance de Narbonne, aux fins d’obtenir : la condamnation de l’assureur à prendre en charge des mensualités des prêts litigieux au titre de sa garantie et,

- subsidiairement, des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité contractuelle de la banque pour manquement devoir de mise en garde et octroi de crédits excessifs.

Par jugement contradictoire en date du 17 janvier 2017, le tribunal de grande instance de Narbonne a :

- débouté Monsieur A-B X de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA CNP Assurances au titre des prêts n°113549011PR, n°125305016PR et n° 009BP6015PR, dit non valide et inopposable à Monsieur A-B X la clause d’exclusion de garantie portée sur la demande d’adhésion à l’assurance groupe portant sur le contrat de prêt n°496125016PR en date du 23 décembre 1999 d’un montant de

15 244,90 €, en ce qu’elle vise les incapacités et invalidités (qu’elles soient temporaires, permanentes, définitives et/ou absolues) qui résultent de lombalgie, de sciatalgie, dorsalgie, cervicalgie et autre « mal au dos », pour ne pas répondre aux exigences de l’article L. 113-1 du code des assurances,

- avant dire droit sur les conditions de mise en jeu de la garantie

ITT au titre de ce prêt, ordonné une mesure d’expertise médicale et désigné pour y procéder le docteur Y Z, neurochirurgien, selon mission précisée au dispositif,

- renvoyé la cause à l’audience du juge de la mise en état du 17 mai

2017, dit que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du

-

Languedoc a manqué à son obligation de mise en garde à l’égard de Monsieur A-B X dans le cadre de l’adhésion

à l’assurance groupe concernant les prêts n°113549011PR,

n°125305016 PR et n° 009BP6015PR,



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condamné en conséquence la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à payer à Monsieur A-B X la somme de 90 000 € en indemnisation

de ses préjudices à ce titre,

- débouté Monsieur A-B X de sa demande indemnitaire au même titre à l’encontre de la SA CNP Assurances, condamné en conséquence la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à payer à Monsieur A-B X la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, dit n’y avoir lieu à exécution provisoire,

- réservé les dépens fins de cause.

APPEL

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a relevé appel de ce jugement par déclaration en date du 3 février

2017.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 4 juin 2019.

Vu les dernières conclusions de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc en date du 27 mai 2019, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif ;

*****

Vu les dernières conclusions de Monsieur A-B

X en date du 20 mai 2019, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif ;

*****

Vu les dernières conclusions de la SA CNP Assurances en date du

3 mai 2017, auxquelles il est expressément référé pour complet exposé des motifs et du dispositif;

SUR CE

En réponse à l’appel de la banque, Monsieur X reprend ses demandes initiales, de sorte qu’il convient d’examiner en premier celles qui sont dirigées à titre principal à l’encontre de l’assureur, lequel lui oppose un refus total de prise en charge pour l’ensemble des prêts assurés et fait appel incident sur la clause d’exclusion

jugée non valide.



Page 5

Sur le refus de prise en charge par l’assureur et les clauses

d’exclusions:

* Pour débouter Monsieur A-B X de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA CNP Assurances au titre des prêts n°113549011PR, n°125305016PR et n° 009BP6015PR, le premier juge a fait une juste analyse de la clause d’exclusion, en ce qu’elle est parfaitement valide et s’applique bien à la pathologie de Monsieur A-B X qui déclarait un sinistre pour hernies discales avec lombo-sciatalgie droite.

En effet, cette clause, claire et précise stipule :

< ne donnent pas lieu à prise en charge les incapacités et invalidités, qu’elles soient temporaires, permanentes, définitives et/ou irréversibles qui résultent d’atteinte discales, vertébrales, conséquences para-vertébrales, intravertébrales et leurs neuromusculaires ».

Le jugement sera donc confirmé sur ce point.

* Pour faire droit dans son principe à la demande Monsieur A-B X au titre de l’assurance du prêt n°496125016PR en date du 23 décembre 1999 d’un montant de

15 244,90 €, le premier juge a:

< Dit non valide et inopposable à Monsieur A-B X la clause d’exclusion de garantie portée sur la demande d’adhésion à l’assurance groupe portant sur le contrat de prêt n° 496125016PR en date du 23 décembre 1999 d’un montant de

15 244,90 €, en ce qu’elle vise les incapacités et invalidités (qu’elles soient temporaires, permanentes, définitives et/ou absolues) qui résultent de lombalgie, de sciatalgie, dorsalgie, cervicalgie et autre « mal au dos », pour ne pas répondre aux exigences de l’article L. 113-1 du code des assurances, »

Or, dans cette clause d’exclusion, seule l’expression < et autre

< mal au dos » ne répond pas aux exigences de l’article L. 113-1 du code des assurances en ce qu’il ne s’agit pas d’une exclusion formelle et limitée. Cette expression encourt donc l’inopposabilité

à l’assuré.

En revanche, une fois expurgée de cette expression maladroite et imprécise inopposable à l’assuré, la clause redevient parfaitement claire, formelle et limitée, pour le restant en excluant les incapacités et invalidités (qu’elles soient temporaires, permanentes, définitives et/ou absolues) qui résultent de lombalgie, de sciatalgie, dorsalgie, cervicalgie.

Dès lors que Monsieur A-B X qui déclarait un sinistre avec lombo-sciatalgie droite, cette pathologie – qui n’est autre que la combinaison d’une lombalgie et d’une sciatalgie entre nécessairement dans le champ contractuel de la clause excluant à la fois les lombalgies et les sciatalgies.



Page 6

La compagnie d’assurance était donc bien fondée à dénier sa garantie également au titre de ce prêt,

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Sur la responsabilité de la banque :

À titre principal, la banque appelante oppose, au visa de l’article 2224 du code civil, la prescription quinquennale de l’action en responsabilité contractuelle.

Cependant, il est constant que le délai de prescription d’une action en responsabilité court à compter de la réalisation du dommage.

Or, ainsi que Monsieur X le fait justement valoir, la réalisation du dommage est constituée en l’espèce par la notification du refus de garantie par la compagnie d’assurances le 14 juin 2010, date qui doit donc être retenue comme point de départ de la prescription, de sorte que l’action introduite par assignations des 6 et 8 juin 2012 n’est pas prescrite.

Subsidiairement, la banque conclut au débouté des demandes au fond en ce que l’emprunteur a manifesté son consentement aux garanties proposées comme aux clauses d’exclusion.

La Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc fait notamment grief au jugement s’agissant de son devoir de mise en garde, d’avoir opéré un distinguo entre les prêts alors que pour chacun d’eux la demande d’adhésion portait une exclusion dont l’emprunteur était parfaitement informé pour avoir dûment signé et paraphé chacune de ces demandes d’adhésion.

Il ne peut donc être utilement reproché au prêteur ne pas l’avoir informé de ces clauses d’exclusions.

En outre, dans la mesure où il avait répondu « non » aux questions dans le questionnaire de santé concernant les lumbagos et les sciatiques, la banque ne pouvait prévoir qu’il pourrait être dans l’avenir atteint d’une pathologie vertébrale des lombaires.

De façon très hasardeuse, le premier juge a considéré sur ce point, qu’au regard de sa profession d’agriculteur l’exposant particulièrement à ce type de pathologie en raison des tâches physiques, l’emprunteur aurait dû être particulièrement alerté sur cette exclusion de garantie.

Or, Monsieur X est pourtant mieux placé que son banquier pour connaître les pathologies auxquelles sa profession

l’exposerait particulièrement.

Ainsi que le fait observer la banque, s’il s’estimait particulièrement exposé à un risque de lombalgies et sciatalgies, il a néanmoins signé – à 4 reprises – les différentes demandes



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d’adhésion, sans même s’enquérir de la possibilité d’assurer les prêts avec une meilleure couverture des risques mais avec la contre-partie de primes d’assurances plus élevées.

En effet, si les contrats d’assurance-groupe des prêts établis par la CNP sont restrictifs quant à la couverture des incapacités et invalidités – notamment s’agissant de l’exclusion des pathologies vertébrales, telles que les lombalgies et sciatalgies dont la fréquence est importante dans l’ensemble de la population générale – la contre-partie de ces exclusions contractuelles est un coût d’assurance qui se veut particulièrement concurrentiel.

Lorsque un emprunteur contracte un crédit, il recherche prioritairement un coût total de crédit avantageux.

L’emprunteur ne démontre pas qu’il aurait accepté de régler une assurance nécessairement plus coûteuse ce qui aurait augmenté le coût total de crédit – si la banque l’avait davantage mis en garde sur les exclusions figurant aux contrats d’assurance-groupe peu onéreux qu’elle lui proposait.

Monsieur X ne démontre donc, en toute hypothèse, aucun préjudice de perte de chance de ne pas contracter.

Le jugement sera donc infirmé en ce qu’il a : Dit que la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc a manqué à son obligation de mise en garde à l’égard 1

de Monsieur A-B X dans le cadre de l’adhésion

à l’assurance groupe concernant les prêts n°113549011PR, n°

125305016 PR et n° 009BP6015PR, Condamné en conséquence la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à payer à Monsieur A-B X la somme de 90 000 € en indemnisation de ses préjudices à ce titre,
Monsieur X sera donc débouté de sa demande de

dommages et intérêts.

Sur les autres demandes :

En définitive, Monsieur X sera débouté de toutes ses demandes, aussi bien à l’encontre de son assureur que de sa banque.

Le jugement sera en conséquence également infirmé en ce qu’il a condamné la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc à payer à Monsieur A-B X la somme de 2 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il n’y a pas lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ni en première instance, ni en cause d’appel.



Page 8
Monsieur X, qui succombe en définitive en toutes ses demandes, supportera les entiers dépens de première instance et

d’appel.

PAR CES MOTIFS

Vu les dispositions des articles 1134, 1147 anciens et de l’article

2224 du code civil, de l’article L. 113-1 du code des assurances,

Vu les pièces produites,

LA COUR, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition au greffe,

Juge non prescrite l’action en responsabilité dirigée contre la banque,

CONFIRME le jugement en ce qu’il a :

Débouté Monsieur A-B X de sa demande de garantie formée à l’encontre de la SA CNP Assurances au titre des prêts n°113549011PR, n°125305016PR et n° 009BP6015PR,

L’INFIRME pour le surplus,

Et statuant à nouveau de ces chefs infirmés :

Déboute Monsieur A-B X de l’ensemble de ses demandes, tant à l’encontre de la SA CNP Assurances que de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Languedoc,

Dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Dit que Monsieur A-B X supportera les entiers dépens de première instance et d’appel.

LE PRESIDENTPRESID LE GREFFIER

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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1° Chambre B

N° RG 17/00654 – N° Portalis DBVK-V-B7B-NALR

Date: 18 Septembre 2019

AFFAIRE:

Société CAISSE REGIONALE DE CREDIT AGRICOLE MUTUEL DU LANG UEDOC

C/

X, SA CNP ASSURANCES

EN CONSÉQUENCE

LA RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

Mande et Ordonne

- à tous huissiers de justice sur ce requis de mettre ce présent arrêt à exécution

- aux Procureurs Généraux et aux Procureurs de la République près les Tribunaux de Grande Instance d’y tenir la main

- à tous Commandants et Officiers de la force publique de prêter main forte lorsqu’ils en seront légalement requis :

En foi de quoi la présente décision a été signée sur la minute par le Président et par le Greffier.

POUR EXPÉDITION CERTIFIÉE CONFORME

Montpellier le 18 Septembre 2019

P/ LE GREFFIER EN CHEF,

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