Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 14 septembre 2021, n° 19/01524

  • Congé·
  • Logement·
  • Consorts·
  • Bailleur·
  • Loyer·
  • Indemnité d 'occupation·
  • Demande·
  • Location·
  • Nullité·
  • Habitation

Chronologie de l’affaire

Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 4

ARRET DU 14 SEPTEMBRE 2021

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/01524 – N° Portalis 35L7-V-B7D-B7EXK

Décision déférée à la Cour :

— Jugement du 25 septembre 2013 du Tribunal d’Instance de Paris 5e – RG 11-13-00003

— Arrêt du 09 Juin 2016 de la Cour d’Appel de Paris – Pôle 4 Chambre 3 – RG n° 13/20966

— Arrêt du 11 octobre 2018 de la Cour de cassation – arrêt n°900F-D

DEMANDEUR A LA SAISINE

Monsieur D B

Né le […] à […]

[…]

[…]

représenté par Me Frédérique ROUSSEL STHAL, avocat au barreau de PARIS, toque : D1414

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2018/051457 du 16/01/2019 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de PARIS)

D''FENDEURS A LA SAISINE

Madame F A épouse X

[…]

[…]

Madame H A épouse Y

[…]

[…]

Madame I A

[…]

[…]

Monsieur J A

[…]

[…]

Monsieur K A

[…]

[…]

représentés par Me Stephen CHAUVET, avocat postulant au barreau de PARIS, toque : D1235

ayant pour avocat plaidant Me Antoine CHRISTIN de la SELARL SALMON ET CHRISTIN ASSOCIES, avocat au barreau de HAUTS-DE-SEINE

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 22 Juin 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

M. Michel Z, Président de chambre

Mme Marie MONGIN, Conseillère

Mme Alexandra PELIER-TETREAU, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Z dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Cynthia GESTY

ARRÊT : contradictoire

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par M. Michel Z, Président de chambre et par Mme Cynthia GESTY, Greffière présente lors du prononcé.

******

EXPOSE DU LITIGE

Par lettre du 21 juillet 1985, M. L A a donné à bail à M. D B une chambre située au 6e étage du […].

Par lettre recommandée du 5 janvier 2012 reçue le 10 janvier suivant, les héritiers du bailleur (ci-après les consorts A) ont fait délivrer au preneur un congé à effet du 31 juillet 2012 au motif que le local ne correspondait plus aux normes légales de location.

Par acte d’huissier du 4 janvier 2013, les bailleurs ont fait assigner le preneur devant le tribunal

d’instance de Paris 5e afin de voir valider le congé et faire expulser les occupants du logement.

Par jugement du 25 septembre 2013, le tribunal a :

— validé le congé à effet du 1er août 2012,

— ordonné l’expulsion des occupants du logement,

— fixé l’indemnité d’occupation due par M. B depuis le 1er août 2012 au montant du loyer et des charges,

— débouté les demandeurs du surplus de leurs demandes,

— ordonné l’exécution provisoire du jugement,

— condamné M. B aux dépens.

M. B a interjeté appel de cette décision.

Par arrêt du 2 avril 2015, la cour, après avoir dit dans les motifs de sa décision que le bail ne relevait pas des dispositions de la loi du 1er septembre 1948 et rappelé que le décret du 30 janvier 2002 était applicable à tous types de location, a, avant dire droit sur le fond, désigné un constatant afin de mesurer la superficie et le volume de la chambre louée en considération de l’article 187 de la loi SRU du 13 décembre 2000 portant sur les caractéristiques du logement décent.

Le constatant a déposé son rapport le 29 octobre 2015 et, par arrêt du 9 juin 2016, la cour de Paris a :

— confirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions,

— y ajoutant, condamné les consorts A à rembourser à M. B les loyers qu’il a acquittés dans la limite de la prescription quinquennale, soit à compter du 11 février 2011, et ce jusqu’au 31 juillet 2012, date de prise d’effet du congé,

— débouté les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné M. B aux dépens de première instance et d’appel.

Par arrêt du 11 octobre 2018, la Cour de cassation a cassé cet arrêt en toutes ses dispositions et renvoyé les parties devant la cour de Paris autrement composée au motif que la cour avait violé les articles 4 du décret du 30 janvier 2002 et R.111-2 du code de la construction et de l’habitation en ne prenant en considération, pour calculer le volume de la chambre, que les parties de la pièce ayant une hauteur sous plafond supérieure à 2,20 mètres.

Par arrêt du 9 juin 2020, la cour de renvoi, statuant avant dire droit sur le fond, a désigné un nouveau constatant afin de mesurer la surface et le volume du local selon les critères de l’article R.111-2 du code de la construction et de l’habitation.

M. C a déposé son rapport de constatation le 12 octobre 2020.

Par dernières conclusions notifiées le 20 mai 2021, M. B demande à la cour de :

— infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

— déclarer irrecevables les consorts A en leur fin de non-recevoir soulevée pour la

première fois par conclusions du 20 mai 2021,

— à titre principal, constater la nullité du congé pour défaut de qualité,

— à titre subsidiaire, constater que la location est soumise à la loi du 1er septembre 1948 et qu’en conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité du congé,

— dire et juger, en toute hypothèse, que l’indécence ne saurait constituer un juste motif pour donner congé au locataire d’un local à usage d’habitation,

— à titre infiniment subsidiaire, si la cour devait valider le congé, condamner solidairement les consorts A à lui rembourser les loyers indûment perçus depuis le 1er février 2011 et fixer l’indemnité d’occupation 'à compter de cette même date’ à la somme mensuelle de 400 euros et ordonner la compensation judiciaire entre ces sommes,

— en tout état de cause, condamner les intimés au paiement de la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 20 mai 2021, les consorts A demandent à la cour de :

— confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

— déclarer irrecevable la prétention de M. B tendant à obtenir la nullité du congé pour défaut de qualité,

— débouter l’appelant de toutes ses demandes,

— condamner l’appelant au paiement d’une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens d’appel comprenant les frais des deux expertises judiciaires.

Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d’autre pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 25 mai 2021.

MOTIFS

L’appelant conteste la validité du congé au motif que celui-ci aurait été délivré au nom de 'l’indivision A', laquelle n’a pas la personnalité morale ; cette demande, certes nouvelle puisqu’elle n’avait pas été formée devant le premier juge, ni devant la cour d’appel précédemment saisie, ni devant la Cour de cassation, mais qui vise à faire écarter les prétentions adverses quant à la validation du congé, est recevable sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile.

Sur le fond, il est vrai que le congé qui ne mentionne pas le nom de chacun des coindivisaires est entaché d’irrégularité puisqu’une indivision ne dispose pas de la personnalité morale ; mais cette irrégularité a été couverte par l’intervention ultérieure de tous les indivisaires nommément désignés dans l’assignation en validation de congé du 4 janvier 2013 et les actes qui ont suivi ; ce moyen de nullité doit donc être écarté.

L’appelant conteste ensuite la validité du congé au motif que celui-ci visait la loi du 6 juillet 1989 alors que le bail était soumis à la loi du 1er septembre 1948 ; mais, pour invoquer l’application de cette loi, M. B se contente d’indiquer que le local loué ne comporte ni toilettes, ni point d’eau et

que le bail prévoit un délai de préavis de trois mois et le paiement du loyer par trimestre ; or ces seuls éléments ne suffisent pas à démontrer que le contrat était soumis aux dispositions de la loi de 1948, le bail, qui consiste en une simple lettre, ne faisant pas référence au texte applicable et ne mentionnant pas la catégorie à laquelle se rattache la chambre ; la cour considère donc que le bail litigieux ne relevait pas des dispositions de la loi de 1948, étant rappelé que, en toute hypothèse, le décret du 30 janvier 2002 relatif aux critères de décence est applicable à tous les types de location.

M. B reproche par ailleurs aux bailleurs d’avoir invoqué l’absence de décence du logement alors qu’un tel motif ne peut justifier la délivrance d’un congé au preneur ; mais le fait que le logement soit devenu 'indécent’ en termes de surface ou de volume du fait de l’introduction d’un texte nouveau depuis la conclusion du bail constitue un motif légitime et sérieux de délivrance d’un congé par le bailleur, lequel n’est plus en mesure de délivrer un logement décent à son locataire et est donc contraint de mettre un terme au bail.

Le rapport du constatant M. C, établi conformément aux dispositions de l’article R.111-2 du code de la construction et de l’habitation, indique clairement que la superficie habitable de la chambre louée est de 7,30m² pour la partie du local présentant une hauteur sous plafond supérieure à 1,80 mètres, et que son volume habitable est de 19m3 ; sa superficie comme son volume habitables sont donc tous deux inférieurs aux minima de 9 m² et 20 m3 visés à l’article 4 du décret n°2002-120 du 30 janvier 2002.

Le logement ne répondant pas aux critères de décence définis par ce texte, c’est à bon droit que le tribunal a validé le congé à effet du 1er août 2012 et ordonné l’expulsion des occupants du logement.

Compte tenu du caractère indécent du logement, M. B est en droit d’être remboursé des loyers qu’il a indûment versés aux bailleurs jusqu’à la date d’effet du congé, dans la limite de la prescription quinquennale qui était alors applicable, à savoir depuis le 11 février 2011, sa première demande de restitution des loyers ayant été formulée devant la cour par conclusions du 11 février 2016, et ce jusqu’au 31 juillet 2012, date de prise d’effet du congé.

A compter du 1er août 2012, il doit être condamné au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 400 euros, montant qui figure dans la demande subsidiaire formée par l’appelant dans ses conclusions d’appel et qui correspond à la valeur locative du logement.

L’appelant, qui succombe en ses demandes, doit être condamné aux dépens de la procédure d’appel et débouté de sa demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile ; les dépens comprendront le coût des deux mesures de constatation ordonnées par la cour, ces actes n’ayant fait que confirmer le caractère indécent du logement qui était invoqué par les bailleurs depuis la délivrance du congé.

L’équité commande de débouter les intimés de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Déclare la demande de nullité du congé pour défaut de qualité recevable devant la cour, mais la dit mal fondée et la rejette,

Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions, sauf en ce qui concerne le montant de l’indemnité d’occupation due par M. B,

Statuant à nouveau sur ce point :

Condamne M. B à payer aux consorts A la somme mensuelle de 400 euros à titre d’indemnité d’occupation à compter du 1er août 2012,

Y ajoutant :

Condamne les consort A à rembourser à M. B les loyers qu’il a acquittés entre le 11 février 2011 et le 31 juillet 2012,

Déboute M. B de ses demandes plus amples ou contraires,

Déboute les consorts A de leur demande fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne M. B aux dépens d’appel, lesquels comprendront le coût des deux mesures de constatation et seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.

Le greffier, Le Président,

Chercher les extraits similaires
highlight
Chercher les extraits similaires
Extraits les plus copiés
Chercher les extraits similaires
Collez ici un lien vers une page Doctrine
Inscrivez-vous gratuitement pour imprimer votre décision
Cour d'appel de Paris, Pôle 4 - chambre 4, 14 septembre 2021, n° 19/01524