Cour d'appel de Paris, Pôle 4 chambre 9 a, 8 septembre 2022, n° 19/22734

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 4 ch. 9 a, 8 sept. 2022, n° 19/22734
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 19/22734
Importance : Inédit
Décision précédente : Tribunal d'instance de Villejuif, 9 septembre 2019, N° 11-19-000819
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Date de dernière mise à jour : 14 septembre 2022
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Sur les parties

Texte intégral

Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 08 SEPTEMBRE 2022

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/22734 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CBE5S

Décision déférée à la Cour : Jugement du 10 septembre 2019 – Tribunal d’Instance de VILLEJUIF – RG n° 11-19-000819

APPELANTE

La société COFIDIS, société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège

N° SIRET : 325 307 106 00097

[Adresse 6]

[Adresse 6]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HAUSSMANN-KAINIC-HASCOET-HELAI, avocat au barreau de l’ESSONNE

INTIMÉE

Madame [L] [U]

née le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 5] (94)

[Adresse 1]

[Localité 4]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 21 juin 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

M. Christophe BACONNIER, Président de chambre

Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

— DÉFAUT

— par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Mme Fabienne TROUILLER, Conseillère pour le Président empêché et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre émise le 17 décembre 2014 et acceptée le 18 décembre 2014, la société Cofidis a consenti à Mme [L] [U] un prêt personnel d’un montant de 31 500 euros dans le cadre d’un regroupement de crédits remboursable en 120 mensualités de 392 euros chacune moyennant un taux débiteur annuel fixe de 8,64 %.

En raison d’impayés, la société Cofidis s’est prévalue de la déchéance du terme du contrat par courrier recommandé du 22 janvier 2019.

Saisi le 28 mars 2019 par la société Cofidis d’une demande tendant principalement à la condamnation de Mme [U] au paiement du solde restant dû au titre du contrat et à la résolution du contrat, le tribunal d’instance de Villejuif par un jugement réputé contradictoire rendu le 10 septembre 2019 auquel il convient de se reporter, a :

— reçu la société Cofidis en son action,

— déchu la société Cofidis de son droit aux intérêts conventionnels,

— condamné Mme [U] à lui payer la somme de 20 099,32 euros avec intérêts au taux légal à compter du 24 janvier 2019,

— débouté la société Cofidis de sa demande au titre de l’indemnité légale, de sa demande au titre de la capitalisation des intérêts et de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le tribunal, après avoir contrôlé la recevabilité de l’action, a retenu que la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP) avait eu lieu le 29 décembre 2014, soit postérieurement au délai de 7 jours prévu par l’article L. 312-24 du code de la consommation, de sorte que cette consultation était tardive et justifiait le prononcé de la déchéance totale du droit aux intérêts contractuels.

Suivant déclaration remise le 7 décembre 2019, la société Cofidis a relevé appel de cette décision.

Aux termes de conclusions remises le 31 janvier 2020, l’appelante demande à la cour :

— de la voir déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions d’appel,

— y faire droit et de voir infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a prononcé la déchéance du droit aux intérêts, a rejeté la demande de capitalisation des intérêts, d’indemnité légale de 8 % et d’article 700 du code de procédure civile,

— de voir condamner Mme [U] à lui payer la somme de 31 283,35 euros avec intérêts au taux contractuel de 8,64 % l’an à compter de la mise en demeure du 22 janvier 2019,

— de voir ordonner la capitalisation annuelle des intérêts par application de l’article 1343-2 du code civil,

— à titre subsidiaire, de dire et juger que la déchéance du droit aux intérêts ne doit être que partielle et ne vaut que pour l’avenir,

— de condamner en conséquence Mme [U] à lui payer la somme de 31 283,35 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 22 janvier 2019, outre la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle indique avoir consulté le FICP le 29 décembre 2014 avant de débloquer les fonds le 30 décembre 2014 et rappelle que par application des articles L. 312-16 et L. 312-24 du code de la consommation, la mise à disposition des fonds au-delà du délai de 7 jours mentionnée à l’article L. 312-25 vaut agrément de l’emprunteur par le prêteur, date à laquelle le contrat devient parfait, à défaut de rétractation de l’emprunteur. Elle estime donc qu’elle avait jusqu’au 30 décembre 2014 pour consulter le fichier, ce qu’elle a fait le 29 décembre 2014 de sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est pas encourue.

Régulièrement signifié par acte d’huissier délivré le 4 février 2020 à un tiers présent à domicile, l’intimée n’a pas constitué avocat.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 5 avril 2022 et l’affaire a été appelée à l’audience le 15 juin 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il résulte du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Au regard de sa date de conclusion, il convient de faire application des dispositions du code de la consommation dans leur rédaction postérieure à l’entrée en vigueur de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 et antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 fixée au 1er juillet 2016.

La recevabilité de l’action au regard du délai biennal de forclusion, examinée par le premier juge, ne fait pas l’objet de contestation de sorte que le jugement doit être confirmé de ce chef.

Sur la déchéance du droit aux intérêts conventionnels

Il résulte de l’article L. 311-9 du code de la consommation en sa version applicable au contrat qu’avant de conclure le contrat de crédit, le prêteur doit vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Il consulte le fichier des incidents de remboursements des crédits aux particuliers.

Le non-respect de ces dispositions est sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts conventionnels en totalité ou dans la proportion fixée par le juge aux termes de l’article L. 311-48 du même code.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations.

En l’espèce, le premier juge a considéré que la consultation effectuée le 29 décembre 2014 était tardive puisque l’offre avait été acceptée par l’emprunteur le 18 décembre 2014.

Les dispositions de l’article L. 311-9 précitée renvoient aux dispositions de l’arrêté du 26 octobre 2010 relatif au fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers dont l’article 2 précise que les établissements doivent obligatoirement consulter le fichier avant toute décision effective d’octroyer un crédit tel que mentionné à l’article L. 311-2 du code de la consommation à l’exception des opérations mentionnées à l’article L. 311-3 du même code et avant tout octroi d’une autorisation de découvert remboursable dans un délai supérieur à un mois. Sans préjudice de consultations antérieures dans le cadre de la procédure d’octroi de crédit, cette consultation obligatoire, qui a pour objet d’éclairer la décision finale du prêteur avec les données les plus à jour, doit être réalisée lorsque le prêteur décide notamment d’agréer la personne de l’emprunteur en application de l’article L. 311-13 du code de la consommation pour les crédits mentionnés à l’article L. 311-2 du même code, de consentir un crédit en application du II de l’article L. 311-43 du même code.

Selon les dispositions de l’article L. 311-13 du code de la consommation, le contrat accepté par l’emprunteur ne devient parfait qu’à la double condition que ledit emprunteur n’ait pas usé de sa faculté de rétractation et que le prêteur ait fait connaître à l’emprunteur sa décision d’accorder le crédit, dans un délai de sept jours. L’agrément de la personne de l’emprunteur est réputé refusé si, à l’expiration de ce délai, la décision d’accorder le crédit n’a pas été portée à la connaissance de l’intéressé. L’agrément de la personne de l’emprunteur parvenu à sa connaissance après l’expiration de ce délai reste néanmoins valable si celui-ci entend toujours bénéficier du crédit. La mise à disposition des fonds au-delà du délai de sept jours mentionné à l’article L. 311-14 vaut agrément de l’emprunteur par le prêteur.

En l’espèce, il n’est pas contesté que la société Cofidis n’a pas fait connaître sa décision d’agréer Mme [U] dans le délai de sept jours susvisé mais a procédé au déblocage des fonds le 30 décembre 2014 selon l’historique de compte versé aux débats. C’est donc à cette date que l’agrément du prêteur doit être considéré comme acquis et le contrat définitivement formé, l’emprunteur ayant manifesté la volonté de bénéficier du crédit.

Le prêteur disposait donc jusqu’à cette date pour procéder à la consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits, de sorte qu’une consultation au 29 décembre 2014 doit être considérée comme régulière.

C’est donc à tort que le premier juge a prononcé la déchéance totale du droit aux intérêts de la banque sur ce fondement. Le jugement doit donc être infirmé de ce chef.

Sur le bien-fondé de la demande

L’appelante produit à l’appui de sa demande :

— l’offre de crédit acceptée le 18 décembre 2014,

— le document d’information propre aux regroupements de crédits,

— la fiche de dialogue (revenus et charges),

— la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées (FIPEN),

— le justificatif de consultation du fichier des incidents de paiement (FICP),

— les éléments d’identité et de solvabilité,

— le tableau d’amortissement,

— l’historique de prêt,

— un décompte de créance.

Pour fonder sa demande en paiement, la société Cofidis justifie de l’envoi à l’emprunteuse le 10 janvier 2019 d’un courrier recommandé de mise en demeure exigeant le règlement sous onze jours des mensualités impayées à hauteur de 2 179,56 euros sous peine de voir prononcer la déchéance du terme du contrat. La société Cofidis a pris acte de la déchéance du terme du contrat par courrier recommandé du 22 janvier 2019 mettant en demeure Mme [U] de payer la somme de 31 051,57 euros.

C’est donc de manière légitime que la société Cofidis se prévaut de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.

En application de l’article L. 311-24 du code de la consommation dans sa version applicable au litige eu égard à la date de conclusion du contrat, en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur pourra exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur pourra demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application des articles 1152 devenu 1231-5 et 1231 du code civil, sera fixée suivant un barème déterminé par décret.

Au vu des pièces justificatives produites, la créance de l’appelante s’établit de la façon suivante :

— échéances impayées : 4 820,76 euros

— capital restant dû à la date de déchéance du terme du contrat : 23 905,14 euros

— intérêts de retard arrêtés au 22 janvier 2019 : 37,33 euros

soit la somme totale de 28 763,23 euros.

Mme [U] est en conséquence condamnée au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,64 % l’an à compter du 22 janvier 2019 sur la somme de 28 725,90 euros et des intérêts au taux légal pour le surplus.

L’appelante sollicite en outre la somme de 2 288,34 euros au titre de l’indemnité de résiliation.

Selon l’article D. 311-6 du code de la consommation, lorsque que le prêteur exige le remboursement immédiat du capital restant dû en application de l’article L. 311-24, il peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de la défaillance.

Il s’infère de cette disposition que la notion de capital restant dû fait référence au capital rendu exigible par l’effet de la déchéance du terme.

Or, la somme demandée par la société Cofidis est supérieure à 8 % de 23 905,14 euros et elle s’ajoute à l’indemnité de même nature d’ores et déjà prise en compte lors du regroupement des crédits.

En conséquence, il est fait droit à la demande dans la seule limite de 200 euros.

Mme [U] est condamnée au paiement de cette somme augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2019.

Sur la capitalisation des intérêts

La capitalisation des intérêts, dit encore anatocisme, est prohibée concernant les crédits à la consommation, matière dans laquelle les sommes qui peuvent être réclamées sont strictement et limitativement énumérées. En effet, l’article L. 311-23 du code de la consommation applicable au contrat rapelle qu’aucune indemnité ni aucuns frais autres que ceux mentionnés aux articles L. 311-24 et L. 311-25 devenus L. 312-39 et L. 312-40 ne peuvent être mis à la charge de l’emprunteur dans les cas de défaillance prévus par ces articles.

Le jugement déféré est donc confirmé en ce qu’il a débouté la société Cofidis de sa demande de capitalisation des intérêts.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a déclaré la société Cofidis recevable en son action et a rejeté la demande de capitalisation des intérêts ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Condamne Mme [L] [U] à payer à la société Cofidis la somme de 28 763,23 euros augmentée des intérêts au taux contractuel de 8,64 % l’an à compter du 22 janvier 2019 sur la somme de 28 725,90 euros outre la somme de 200 euros augmentée des intérêts au taux légal à compter du 22 janvier 2019 ;

Déboute la société Cofidis du surplus de ses demandes ;

Condamne Mme [L] [U] aux dépens de première instance et d’appel ;

Condamne Mme [L] [U] à payer à la société Cofidis la somme de 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La greffièrePour le président empêché

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