Cour d'appel de Reims, Chambre premier président, 14 juin 2017, n° 17/00017

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

ORDONNANCE N° 19

DOSSIER N° : 17/00017-16

XXX

c/

SAS SOCIETE ANIZIENNE DE CONSTRUCTION-SAC

Expédition certifiée conforme revêtue de la formule exécutoire

délivrée le

à

la SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD

Me C GUILLAUME

L’AN DEUX MIL DIX-SEPT,

Et le quatorze juin,

A l’audience des référés de la cour d’appel de REIMS, où était présente et siégeait Mme Agnès LAFAY, présidente de chambre faisant fonction de premier président en remplacement de M. Jean SEITHER, régulièrement empêché, désignée par ordonnance en date du 12 décembre 2016, assistée de Mme Jocelyne DRAPIER, greffier,

Vu l’assignation donnée par la société civile professionnelle Y Z et A B, huissiers de justice associés à la résidence de X (XXX, en date du 16 mai 2017,

A la requête de :

la XXX, société civile immobilière au capital de 1 500 euros, ayant son siège social 36, XXX, à XXX, inscrite au registre du commerce et des sociétés de REIMS sous le numéro 490.797.560, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés de droit audit siège,

DEMANDERESSE,

représentée par Me Mélanie CAULIER-RICHARD, avocat au barreau de REIMS (SCP DELVINCOURT-CAULIER RICHARD),

à

la SOCIETE ANIZIENNE DE CONSTRUCTION, exerçant sous l’enseigne SAC, société par actions simplifiée au capital de 300 000 euros, ayant son siège social 13, XXX à ANIZY-LE-CHATEAU (02320), inscrite au registre du commerce et des sociétés de SAINT-QUENTIN sous le numéro 711.680.140, prise en la personne de son représentant légal, domicilié de droit audit siège,

DEFENDERESSE, représentée par Me C GUILLAUME, avocat au barreau de REIMS, postulant, et par Me Dominique ROUSSEL, avocat au barreau de REIMS, plaidant,

d’avoir à comparaître le mercredi 24 mai 2017, devant le premier président statuant en matière de référé.

L’affaire a fait l’objet d’un renvoi à l’audience du mercredi 31 mai 2017,

A ladite audience, Mme LAFAY, présidente de chambre, a entendu les conseils des parties en leurs conclusions et explications, assistée de Mme Jocelyne DRAPIER, greffier, puis l’affaire a été mise en délibéré au mercredi 14 juin 2017.

Et ce jour, 14 juin 2017, a été rendue l’ordonnance suivante par mise à disposition au greffe du service des référés, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile :

La XXX a confié à la Société Anizienne de Construction – SAC (dite SAC ) le lot gros 'uvre de la première tranche du programme dénommé CITY 1 portant sur la construction de 100 logements et d’un supermarché, laquelle s’est achevée courant 2010.

Le lot gros 'uvre de la seconde tranche du programme dénommé CITY 2 portant sur la construction de 169 logements, 5 commerces et 13 parkings situés XXX et XXX, à XXX, a été confié à la SAC selon ordre de service n°1 approuvé le 30 novembre 2015 pour la somme «globale nette et forfaitaire de» 4.280.000 € HT.

Le 10 janvier 2017, la XXX a déposé une requête aux fins d’être autorisée à faire assigner à jour fixe la SAC pour voir constater la résiliation du contrat de gros 'uvre aux torts de la Société SAC et de saisir le tribunal des demandes suivantes :

— prononcer la résiliation du contrat de gros 'uvre aux torts de la société SAC,

— autoriser à procéder au remplacement de la société SAC,

— donner acte de ce qu’elle se réserve le droit d’agir à l’encontre de la société SAC afin de solliciter la réparation des dommages résultant de l’abandon de chantier,

— condamner la société SAC au paiement de la somme de 5.000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

— ordonner l’exécution provisoire du jugement à intervenir.

La XXX a fait assigner à jour fixe la SAC pour l’audience du tribunal de grande instance de REIMS du 28 février 2017.

Par jugement du 28 avril 2017, le tribunal de grande instance de Reims a notamment :

— jugé que la résiliation unilatérale du marché de travaux du 30 novembre 2015 par la XXX est fautive et constitutive d’un abus,

— débouté la XXX de l’intégralité de ses prétentions,

— jugé que les pénalités de retard ont été abusivement appliquées par la XXX à la SAC,

— condamné la XXX à payer à la SAC la somme de 641.218,60 € au titre des travaux effectivement réalisés et non contestés par la XXX,

— condamné la XXX à payer à la SAC la somme de 242.749,30 € en réparation du préjudice économique né de la rupture unilatérale et abusive du marché de travaux par le maître de l’ouvrage,

— condamné la XXX à payer à la SAC la somme de 42.153,41 € au titre du compte prorata,

— condamné la XXX à payer à la SAC la somme de 150.000 € en réparation du préjudice né du comportement de la XXX,

— ordonné une expertise destinée à faire les comptes entre la XXX et la SAC confiée à Monsieur E F, avec mission notamment d’établir un compte entre les parties au vu notamment des travaux effectivement réalisés et non payés, du matériel effectivement revendiqué par le maître de l’ouvrage en application de l’article 5 CCAP et du matériel commandé pour le chantier et non utilisé du fait de la résiliation du marché gros-'uvre,

— fixé à la somme de 1.000 € le montant de la consignation à valoir sur les honoraires de l’expert que devra verser la SAC avant le 29 mai 2017,

— dit que l’affaire est renvoyée à l’audience de mise en état après dépôt du rapport d’expertise,

— condamné dès à présent la XXX à payer à la SAC la somme de 500.000 € à titre de provision au titre des travaux effectivement réalisés et contestés par la XXX,

— débouté la SAC de ses prétentions au titre de la garantie en paiement Société Générale fournie par la XXX,

— débouté la SAC de ses prétentions au titre de la restitution de l’acte de cautionnement solidaire de la BCMNE,

— condamné la XXX à payer à la SAC la somme de 15.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamné la XXX aux dépens,

— ordonne l’exécution provisoire de la présente décision.

La XXX a saisi le premier président d’une demande de suspension partielle de l’exécution provisoire et demande de :

' Vu l’article 524 du code de procédure civile,

Vu les pièces communiquées selon bordereau annexé,

Vu l’appel interjeté le 10 mai 2017 contre le jugement en date du 28 avril 2017 rendu par le tribunal de grande instance de REIMS,

Vu le paiement effectué par chèque CARPA du 30 mai 2017,

Déclarer la XXX recevable et bien fondée en sa demande de suspension partielle de l’exécution provisoire du jugement dont appel,

Ordonner la suspension de l’exécution provisoire du jugement rendu le 28 avril 2017 par le tribunal de grande instance de REIMS, en ses condamnations pécuniaires prononcées contre la XXX au profit de la SAC, à hauteur de 949.902,71 €, déduction faite de la somme de 641.218,60 € au titre des travaux effectué et non contestés,

Débouter la SAC de toutes ses autres demandes, fins ou conclusions plus amples ou contraires.'

Elle fait valoir que le paiement immédiat de la somme de 1.591.121,31 €, mise à sa charge par le tribunal aux termes du jugement dont appel, va entraîner des conséquences manifestement excessives au sens de l’article 524-2 du code de procédure civile si elle doit les payer à la SAC qui a d’ores et déjà fait signifier ledit jugement pour le rendre exécutoire, car ces condamnations, si elles devaient être payées immédiatement, mettront en péril sa situation financière car elle se retrouvera en état de cessation de paiement immédiat, laquelle ne dispose pas en effet des fonds pour faire face à ces sommes en sus du règlement des travaux restant à réaliser pour terminer le chantier et le livrer dans les délais.

Elle indique que les seuls fonds dont elle dispose à ce jour sont ceux issus des ventes des appartements à venir et réceptionnés au fur et à mesure de la signature des contrats de réservation signés dans le cadre de VEFA qui répondent à un régime juridique et financier bien particulier.

Elle précise que, selon les comptes annuels de l’exercice clos au 31 décembre 2016 et le prévisionnel de trésorerie établis par l’expert- comptable, M. C D, pour la période du 29 avril au 31 juillet 2017 :

« la mise en paiement immédiate par la XXX de la somme de 1.592.121 € qu’elle a été condamnée à verser à la SAC par jugement du 28 avril 2017 aurait pour effet d’obérer très gravement sa situation financière, puisque, après paiement de ces condamnations, la trésorerie de la XXX présenterait alors au 31 mai 2017 un solde négatif de ' 221.947 €. Ce qui aurait pour effet qu’elle ne pourrait plus faire face à ses dettes exigibles les 30 juin 2017 pour un montant de 1.622.373 euros, et 31 juillet 2017 pour un montant de 1.474.441 euros. La situation financière de la XXX serait alors totalement obérée (impossibilité de faire face à son passif exigible avec l’actif disponible) mettant ainsi irrémédiablement en péril la poursuite du chantier. Avec pour conséquence de ne pas pouvoir livrer les immeubles conformément aux obligations contractuelles auxquelles est tenue la XXX à l’égard des acquéreurs ».

Elle estime qu’il est évident que si elle devait régler les condamnations immédiatement nonobstant l’appel et décision définitive après expertise destinée à faire les comptes entre les parties, elle ne serait plus en mesure de régler les entreprises et situations de paiement mensuelles et le chantier se trouverait purement et simplement arrêté faute de disposer des fonds suffisants dans la mesure où les fonds disponibles sur la période de mai à fin juin 2017 sont de 3.300.753 € alors que les dettes exigibles seront de 3.182.951,86 € à cette date, soit un solde positif de 117.801,14 € au 1er juillet 2017 et qu’il est donc radicalement impossible de régler en sus, en mai 2017 la somme de 1.591.121,31 € au titre du jugement dont appel assorti de l’exécution provisoire.

Elle ajoute qu’elle ne dispose pas de la propriété et jouissance de ces fonds affectés exclusivement au compte SOCIÉTÉ GÉNÉRALE pour cette promotion immobilière et que c’est la raison pour laquelle elle a saisi parallèlement le juge de l’exécution de REIMS d’une contestation de la saisie-attribution pratiquée sur son compte SOCIÉTÉ GÉNÉRALE dédiée à cette seule opération immobilière, le 19 mai 2016 et dénoncée le 22 mai 2016.

Selon elle, le contrat de promotion immobilière visé à l’acte d’ouverture de crédit à hauteur de 1.500.000 €, à elle consenti par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, prévoit une centralisation financière sur un compte bancaire unique dédié à ladite opération. Ce compte est donc exclusivement affecté aux opérations liées à la réalisation du projet immobilier et les seuls fonds dont elle dispose sont ceux issus de l’ouverture de crédit consentie par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE, d’une part, et ceux issus des ventes immobilières qui sont actuellement réalisées par la XXX en VEFA, lesquels fonds ont pour point commun de ne pas lui appartenir et qui ne peuvent donc être utilisés pour d’autres fins que le paiement des travaux.

La centralisation de l’ensemble des fonds nécessaires à cette promotion immobilière et leur affectation exclusive au paiement des travaux, est la condition également de la garantie d’achèvement consenti par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE.

Elle précise qu’elle n’a vocation à réaliser un bénéfice et percevoir des fonds pour elle personnellement qu’à l’issue du projet de promotion immobilière lorsqu’elle réalisera les dernières ventes des lots commercialisés, qu’au 3 mai 2017, il restait à vendre 75 appartements mis en vente pour une somme totale de 17.445.870 €, que sa santé financière à long terme est assurée de sorte que la SAC ne peut pas craindre une impossibilité de payer toutes condamnations définitives qui seraient prononcées in fine à son profit et notamment après l’expertise ordonnée et décision de la cour sur le fond, mais qu’elle est dans l’impossibilité matérielle de régler immédiatement toutes les condamnations prononcées par le jugement dont appel en vertu d’une exécution provisoire qui n’est pas compatible avec la nature de cette affaire.

Elle estime que l’expert-comptable de la SAC avance dans son courrier des éléments parfaitement erronés, que la SAC croit pouvoir reprendre à son compte, que certes elle est une filiale de la SAS JM INVEST qui en détient 99 % des parts mais que, cependant, il s’agit bien de deux personnes différentes et la seule tenue aux condamnations est la XXX pour laquelle la holding ne peut faire l’avance en ses lieu et place de plus de 1.500.000 € sans risquer de mettre en péril l’intégralité du groupe qui gère plusieurs opérations immobilières simultanées. Le fait que cette holding dispose de 4.000.000 € de capital ne lui permet aucunement l’avance d’une trésorerie de 1.500.000 € pour une seule de ses filiales.

Elle soutient que son chiffre d’affaires n’est que de 13.561.968 €, que celui restant à réaliser par la vente des 75 derniers appartements sera de 17.445.870 €, soit un montant global de 31 millions d’euros, et non 33 millions d’euros, et ce lorsque le dernier appartement sera vendu et que ce dont il faut tenir compte n’est pas le chiffre d’affaires prévisionnel, mais la marge réelle qui sera de 9 millions environ lorsque tous les appartements seront vendus, soit des rentrées d’argent prévisibles pour garantir le paiement des condamnations qui seront définitivement tranchées par les juges à l’issue de la procédure d’appel en cours et expertise ordonnée et qu’à ce stade, ce chiffre d’affaires réalisé est intégralement absorbé par le paiement des travaux en cours.

Elle estime qu’il est faux de prétendre qu’elle privilégie le paiement de ses autres fournisseurs au détriment de la SAC, qui est pourtant le 1er à intervenir puisque titulaire du lot gros 'uvre, alors que les fonds qu’elle détient à la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE sont dédiés uniquement au paiement des travaux liés à cette opération immobilière et ne peut servir à payer des condamnations judiciaires non encore définitives, des provisions à valoir sur d’éventuelles sommes objet d’une expertise, et encore des préjudices, mais sont dédiés au paiement des entreprises ayant réalisé des travaux non contestés et objet de situations de paiement validées et retournées acceptées par elle pour déblocage des fonds.

Elle ajoute que la garantie de paiement et ligne de crédit de 1.500.000 € donnée par la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE est constituée de fonds lui permettant de faire l’avance des travaux réalisés en cas de retard pris dans la commercialisation des appartements dont 75 restent à ce jour à vendre et ce avant de réaliser son chiffre d’affaire prévisionnel, cette ligne de crédit étant une garantie d’achèvement qui ne peut être utilisée que sur la base des conditions contractuelles strictement consenties par la banque, à savoir le paiement des travaux réalisés et validés et non pour d’éventuelles condamnations prononcées par des décisions de justice non encore définitives et sans lien avec des travaux proprement dits et particulièrement pour régler des préjudices ou des provisions sur des travaux contestés et objet du présent litige.

Elle indique que certes elle procède à des appels de fonds réguliers et que son expert-comptable les a d’ailleurs comptabilisés à hauteur de 400.000 € en mai et à 330.000 € en juin 2017, mais qu’il reste 75 appartements à vendre et que la commercialisation actuelle n’est donc qu’à hauteur de 13.561.968 € de chiffre d’affaires et non de 33.365.000 €, soit des appels de fonds qui se font proportionnellement au nombre de lots vendus, que les appels de fonds ne peuvent se faire qu’en fonction de l’état d’avancement du chantier et les prochains seront de 5 % + 20 % ce qui nécessite pour cela que les bâtiments soient hors d’eau et hors d’air, ce qui n’est pas encore le cas aujourd’hui compte tenu du retard de 4 mois accumulé par la SAC. Seul un bâtiment sur 4 est hors d’eau et hors d’air, de sorte que cela l’empêche de procéder aux appels de fonds qui représentent pour les appartements vendus à ce jour un montant de 3.390.000 €.

Elle précise que les rentrées d’argent de 4.061.181 € au 31/12/2016 correspondent aux appels de fonds réalisés à cette date et partie intégrante du chiffre d’affaires, laquelle rentrée est neutralisée par les travaux comptabilisés en compte de charges à la même date. Les ventes faites et appels de fonds sont tous bien comptabilisés et intégrés au prévisionnel précédemment dressé pour les sommes à régler aux mois de mai à juillet 2017.

Elle ajoute qu’elle fonde aussi sa demande de suspension de l’exécution provisoire sur le risque de non restitution de la somme de 1.591.121,31 € par la SAC si elle devait la lui régler nonobstant l’appel contre le jugement en cas de réformation totale ou partielle par la cour.

La SAC réplique qu’elle a exécuté des travaux pour un montant de 1.703.104,61 € alors que la XXX ne réglait plus rien et que c’est en raison de travaux exécutés et non réglés et d’une rupture du contrat que la XXX a été condamnée.

Elle fait valoir que la XXX est une société qui se porte bien, sans salarié et qui dispose de liquidés importantes, qu’elle est détenue à 99 % par la SARL JM INVEST SM, laquelle est détenue à 100 % par la SAS FJM HOLDING au capital de 4.000.000 d’euros.

Elle indique que la XXX verse elle-même une garantie d’achèvement des travaux donnée par la société générale (pièce 115) et que l’expert comptable de la XXX mentionne, dans un état du 11 mai 2017, qu’il reste à régler à la société SAC la somme de 1.800.000 €, qu’elle a bloqué les règlements sur des prétendues pénalités de retard pour les situations non contestées et sur des prétendues non réalisations pour les travaux non contestés, que la situation de la XXX est bonne puisqu’elle dispose d’une trésorerie au 30 avril de 2.530.753 €, mais qu’elle ne consent pas à les débloquer pour conserver des liquidités en vue des échéances prochaines, que le crédit octroyé par la société générale de 1.500.000 € pour l’opération serait suffisant pour désintéresser la SAC et n’est pas pris en compte par le comptable de la XXX, que l’attitude cette dernière est 'dévastatrice 'vis à vis d’une entreprise qui emploie des centaines de salariés.

Elle précise que, comme l’atteste son expert comptable, elle présente une situation financière saine et est en mesure de rembourser les sommes pouvant être versées par la XXX en cas d’infirmation du jugement.

Elle fait valoir que la XXX a volontairement trompé le tribunal en produisant une garantie de la SOCIÉTÉ GÉNÉRALE alors que cette dernière lui a fait savoir que le cautionnement était caduc du fait de la résiliation du marché et qu’ainsi la SAC ne dispose plus d’aucune garantie pour le paiement de ce qui lui est dû.

Elle ajoute que si un compte est dédié à une opération immobilière, il est affecté au paiement des sommes dues aux entreprises intervenant sur le programme considéré.

Elle conclut au débouté de la demande et sollicite paiement de la somme de 6.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Sur ce,

L’article 524 du code de procédure civile dispose que lorsque l’exécution provisoire est ordonnée, elle ne peut être arrêtée en cas d’appel que par le premier président statuant en référé, et ce notamment lorsque l’exécution provisoire risque d’entraîner des conséquences manifestement excessives.

Le caractère manifestement excessif des conséquences de l’exécution provisoire ordonnée ne doit être apprécié qu’au regard de la situation du débiteur compte tenu de ses facultés et des facultés de remboursement de la partie adverse et non au regard de la régularité ou du bien fondé du jugement frappé d’appel et il appartient à la XXX d’établir que les conditions légales pour la suspension de l’exécution provisoire sont remplies.

Il résulte de la pièce n° 112, produite par la XXX et visée par son expert comptable le 11 mai 2017, qu’au 30 avril 2017 le solde positif en banque était de 2.530.753 € avec une rentrée prévisionnelle sur les ventes de 770.000 € (pour les mois de mai et juin) les sommes payables pour les travaux étant de 1.370.174,12 € fin mai et de 117.801,14 € fin juin, de sorte qu’il ne restera qu’un solde positif de 117.801,14 € au 1er juillet 2017.

La XXX en déduit que si elle doit payer les sommes mises à sa charge par le tribunal, elle ne pourra faire face à ses échéances et ne pourra mener à bien l’opération immobilière.

La SOCIÉTÉ GÉNÉRALE atteste cependant le 22 mai 2017 qu’elle soutient toujours la XXX dans son opération immobilière et étudie à ce jour la mise en place d’une garantie équivalente à la garantie de paiement qui ne peut plus, selon elle, être donnée pour un contrat de marché résilié, garantie qui viserait non plus à garantir le paiement de travaux liés à une opération immobilière dans le cadre d’une VEFA, mais à garantir le paiement de condamnations prononcées judiciairement.

D’autre part la saisie attribution effectuée le 19 mai 2017 démontre qu’à cette date le compte était créditeur de la somme de 3.200.037 €, soit d’une somme bien supérieure à celle mentionnée dans la pièce 112 et permettant de faire face aux prévisions de paiement pour les mois de mai et juin à hauteur de 1.487.975,26 €.

La XXX ajoute que surtout à ce jour elle n’est pas propriétaire de ces fonds et n’en a pas la libre disposition le compte dédié étant uniquement destiné à payer ' les travaux réalisés et non contestés’ce qui l’a d’ailleurs conduite à saisir le juge de l’exécution en contestation de la saisie attribution.

Si effectivement le compte ouvert est dédié au paiement des travaux, il en résulte que le raisonnement tenu par la XXX peut éventuellement s’appliquer au montant des dommages et intérêts accordés par le tribunal mais non à la somme de 500.000 € allouée à titre de provision sur les travaux exécutés.

S’agissant des garanties de remboursement en cas de réformation de la décision du tribunal de grande instance, l’expert-comptable de la SAC atteste, le 10 mai 2017, que l’entreprise est en excellente position de rentabilité et d’équilibre financier, son chiffre d’affaire étant en 2016 de 56.304.675 €, son résultat net après IS étant de 755.456 €, ses fonds propres de 7.987.931 € et son disponible en banque de 5.071.449 €.

Compte tenu de ces éléments, il convient d’arrêter l’exécution provisoire uniquement sur la somme de 392.749,30 € allouée à titre de dommages et intérêts en l’absence de preuve du caractère manifestement excessif des conséquences de l’exécution provisoire pour le surplus.

PAR CES MOTIFS :

Suspendons, à hauteur de 392.749,30 €, l’exécution provisoire de la décision du 18 avril 2017 du tribunal de grande instance de Reims en ses condamnations pécuniaires prononcée contre la XXX au profit de la Société Anizienne de Construction – SAC.

Déboutons la XXX du surplus de ses demandes.

Condamnons la XXX à payer à la Société Anizienne de Construction – SAC la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Condamnons la XXX aux dépens.

Le greffier, La présidente de chambre,

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