Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 2, 18 novembre 2010, n° 08/03519

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Versailles, 12e ch. sect. 2, 18 nov. 2010, n° 08/03519
Juridiction : Cour d'appel de Versailles
Numéro(s) : 08/03519
Décision précédente : Tribunal de commerce de Nanterre, 26 novembre 2007, N° 2004F05542
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

12e chambre section 2

XXX

ARRET N° Code nac : 55B

contradictoire

DU 18 NOVEMBRE 2010

R.G. N° 08/03519

AFFAIRE :

Société E AJ AT NV

C/

Société D SERVICES, Anciennement X M SERVICES SA, S.A., intimée et appelante incidente

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 27 Novembre 2007 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE

N° Chambre : 3

N° Section :

N° RG : 2004F05542

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

SCP JUPIN & ALGRIN

SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER,

Me Farid SEBA,

SCP BOMMART MINAULT

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DIX HUIT NOVEMBRE DEUX MILLE DIX,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Société E AJ AT NV ayant son siège De Gerlachelkaai 20, XXX, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

représentée par la SCP JUPIN & ALGRIN, avoués – N° du dossier 0024542

Rep/assistant : Me Patrick SIMON, avocat au barreau de PARIS.

APPELANTE

****************

Société D SERVICES, Anciennement X M SERVICES SA, S.A., intimée et appelante incidente ayant son siège XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance T U CORPORATE & SPECIALTY (FRANCE) Anciennement C – T O AZ, S.A., intimée et appelante incidente ayant son siège Tour OPUS – XXX, la Défense 9 XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance XXX, S.A., intimée et appelante incidente ayant son siège XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance AA AB S.A.D.C.S., venant aux droits de la compagnie d’assurance LES MUTUELLES DU MANS ASSURANCES IARD suite à l’opération de transfert de portefeuille à compter du 1er janvier 2005, intimée et appelante incidente ayant son siège XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurances G FRANCE ASSURANCES, S.A., et intimée par provocation dans (08/6571) ayant son siège XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

représentées par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués – N° du dossier 20080673

Rep/assistant : Me Franck GUENOUX, avocat au barreau de ROUEN.

Compagnie d’assurance G IARD, S.A.A., venant aux droits de la compagnie d’assurance LE CONTINENT suite à l’opération de fusion intervenue le 23 décembre 2004, intimée et appelante incidente, ayant son siège XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance F AH, S.A., Compagnie apéritrice, intimée et appelante incidente, ayant son siège social XXX et un établissement secondaire XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance A, Société de droit étranger, venant aux droits de la compagnie BRITISH AND FOREIGN O INSEURANCE Co. Ltd. suite au transfert de portefeuille à compter du 1er juin 2004, intimée et appelante incidente ayant son siège social 40 Dufourstrasse – SAINT GALL – SUISSE et ayant son principal établissement en France XXX, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

Compagnie d’assurance SOCIETE ITALIANA ASSICURAZIONI ET RIASSICURAZIONI (Y), Société de droit étranger, intimée et appelante incidente ayant son siège social Via V Dicembre 3, XXX, ayant un établissement 132 rue du Faubourg Saint-Denis 75010 PARIS, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

représentées par la SCP JULLIEN, LECHARNY, ROL ET FERTIER, avoués – N° du dossier 20080673

Rep/assistant : Me Franck GUENOUX, avocat au barreau de ROUEN.

Société J K Q, ayant son siège XXX, 8, XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Intimé dans 08/XXX, Appelant dans 09/XXX

représentée par Me Farid SEBA, avoué – N° du dossier 0012181

Rep/assistant : Me LEMARIE substituant Me Béatrice WITVOET, avocat au barreau de PARIS.

S.A.S. AK R INTERNATIONAL RCS NANTERRE 552 088 536 ayant son siège XXX, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

Autre(s) qualité(s) : Appelant dans 08/XXX, Intimé dans 09/XXX

représentée par la SCP BOMMART MINAULT, avoués – N° du dossier 00036125

Rep/assistant : Me Renaud CLEMENT, avocat au barreau de PARIS (E.0963).

INTIMEES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 28 Septembre 2010 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marion BRYLINSKI, conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur Albert MARON, Président,

Madame Marion BRYLINSKI, conseiller, (rédacteur)

Madame Anne BEAUVOIS, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Marie-Thérèse GENISSEL,

FAITS ET PROCEDURE

Suivant facture n°5023LT-3006 du 11 février 2003, la société X M SERVICES (92) a acquis de la société Z Ltd (Angleterre), une grue pour un montant de 825.000,00 US $ ; suivant facture n°STX00369 du 24 septembre 2003, elle a revendu cette même grue pour le même prix, à la société AC AD AW COMPANY (République d’Angola).

La société X M SERVICES, agissant pour le compte du destinataire/propriétaire de la marchandise litigieuse a confié à la société AK R INTERNATIONAL (AK AL) l’organisation du AH de celle-ci depuis Yarmouth (Angleterre) jusqu’à destination à Lobito (République d’Angola).

La grue démontée a été répartie en 9 colis et un conteneur ouvert ; le conteneur a fait l’objet d’un connaissement ANTZ53901.

A l’issue du pré-acheminement sur camion depuis Yarmouth jusqu’à Anvers, la société E AJ AT est intervenue en qualité de transporteur maritime, depuis le port de chargement d’Anvers jusqu’au port de déchargement de Lobito, sous couvert d’un connaissement n°ANTZ54236 daté du 15 octobre 2003, pour les neuf colis.

Les opérations de chargement, sur le navire 'Aeolian Sun', des 9 colis ont été confiées par E à J K Q, et exécutées le 14 octobre 2004.

Le même jour, après les opérations de chargement, le capitaine du navire a établi un rapport, destiné à J K Q, portant sur les dommages occasionnés à la marchandise lors des opérations de chargement, et porté des réserves sur le rapport d’embarquement. La société H I, agent de AK AL à Anvers, a répercuté les réserves ainsi émises à l’encontre de J-K Q, auprès de E ; AK AL par un courrier du 16 octobre 2003 a informé la société X M SERVICES SA des dommages ; cette dernière par télécopie du 24 octobre 2003 a confirmé ses réserves à l’encontre de J K Q auprès de AK AL.

A l’arrivée au port de Lobito en Angola, le 3 novembre 2003, la marchandise a fait l’objet d’un premier examen le 5 novembre 2003 alors qu’elle se trouvait encore chargée sur le navire, par le cabinet ASB O SERVICES UK requis par le destinataire AC AD AW ; un deuxième rapport a été établi le 2 janvier 2004 par le Cabinet B requis par le commissionnaire de AH AK AL, et un troisième le 31 décembre 2004 par le cabinet AE AF mandaté par X, qui a estimé le montant des dommages à la somme de 195.769,79 USD.

La société X M SERVICES SA, par acte en date du 4 octobre 2004, a assigné les sociétés AK R S et E AJ AT NV en paiement de la somme de 249.279 USD en principal correspondant au préjudice qu’elle prétendait subir au titre des dommages à la marchandise et des frais d’ingénierie, de R, AH et autres.

AK R INTERNATIONAL a assigné en garantie les sociétés E AJ AT NV et J K Q le 12 novembre 2004 ; E a également appelé en garantie J K Q le XXX.

En cours de procédure, les compagnies d’assurance F AH et autres, assureurs marchandise suivant police n°61922, ont indemnisé la société X M SERVICES SA à hauteur de la somme de 154.754,29 USD, et sont intervenues volontairement à l’instance le 5 novembre 2005.

***

Le tribunal de commerce de Nanterre, par jugement rendu le 27 novembre 2007, a notamment :

— débouté E AJ AT et J K Q de leur exception d’incompétence et s’est déclaré compétent ;

— dit recevable l’action entreprise par X M SERVICES devenue D France et les compagnies d’assurances représentées par F;

— condamné AK R INTERNATIONAL à payer aux compagnies d’assurances F & autres la somme de 154.754,29 USD en principal avec intérêts au taux légal à compter du 15 novembre 2005 ;

— condamné AK R INTERNATIONAL à payer à X M SERVICES devenue D France la somme de 42.248 USD en principal avec intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2004 ;

— condamné E AJ AT à garantir AK R INTERNATIONAL des condamnations précitées à hauteur de 75% ;

— condamné J K Q à garantir E du montant des condamnations prononcées à son encontre à hauteur de 50% ;

— condamné solidairement E AJ AT et J K Q à payer à X M SERVICES devenue D France, F & autres la somme de 10.000 USD au titre de l’article 700 du Nouveau Code de Procédure civile ;

— condamné solidairement E AJ AT et J K Q aux dépens.

***

La société E AJ AT NV a interjeté appel et, aux termes de ses dernières écritures en date du 11 juin 2009, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens développés, demande à la Cour d’infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau, de :

— sous le visa des articles 2 et 23 du Règlement communautaire 44/2001 et de la clause 26 du connaissement 2NTZ 54236, se déclarer incompétent au profit des tribunaux belges, et renvoyer les parties à mieux se pourvoir ;

— subsidiairement, sous le visa des articles 31 et 32 du code de procédure civile, constater que ni X ni F n’établissent avoir qualité à agir et que AK AL n’a pas qualité à agir, et en conséquence les déclarer irrecevables ;

— plus subsidiairement, sous le visa des articles 3(6) de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, et 1315 du Code Civil, constater que les demandeurs ne rapportent pas la preuve que les avaries se sont produites pendant le AH maritime, ni de leur préjudice, et les déclarer mal fondés en leur action ;

— plus subsidiairement encore, sous le visa de l’article 4(5) de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924,dire que la responsabilité de E doit être limitée à 100 GBP or par colis soit la contre-valeur en euros de 823,96 DTS par colis ou subsidiairement à la contre valeur en euros de 7.415,64 DTS ;

— condamner la société J K Q à la garantir de toutes condamnations en principal intérêts et frais ;

— en tout état de cause condamner X, F et les 8 autres compagnies d’assurance et AK AL chacune ou l’une à défaut de l’autre au paiement de la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens d’appel.

***

La SAS AK R S (AK AL) a également interjeté appel et, aux termes de ses dernières écritures en date du 21 août 2009, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens développés, demande à la Cour, sous le visa des articles 31, 32, 42, 100 et 122 du code de procédure civile, 1315, 1382 et 1384 alinéa 1 du code civil, de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924, de l’article 6 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, du Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000, de :

— infirmer le jugement entrepris en ce que celui-ci a déclaré recevable et bien fondée l’action entreprise par les sociétés X M SERVICES (D France), F W, AA AB, Y, XXX, A, C et G et a condamné la société AK AL au paiement des sommes en principal de 154.754,29 USD au bénéfice des sociétés F et autres et 42.248 USD, au bénéfice de la société X (D France), et, statuant à nouveau ;

— dire irrecevable l’action entreprise par les sociétés X M SERVICES (D France), F W, AA AB, Y, XXX, A, C et G et ce, pour défaut d’intérêt et/ou de qualité pour agir et/ou pour cause de prescription ;

— à titre subsidiaire, débouter les sociétés demanderesses de l’intégralité de leurs prétentions ;

— plus subsidiairement, faire application des limitations de responsabilité à hauteur de 848 €, voire 7.415, 61€ et condamner les sociétés E et J-K Q à relever et garantir la société AK AL de toute condamnation qui interviendrait à son encontre ;

— condamner tout contestant au paiement d’une indemnité de 4.000 € en application des dispositions prescrites par l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

***

La société J K Q, a également interjeté appel et, aux termes de ses dernières écritures en date du 18 mars 2009, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens développés, demande à la Cour, infirmant le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de :

— déclarer la société J-K Q recevable et bien fondée en son exception d’incompétence sur le fondement de l’article 15 de ses conditions générales à l’égard de AK AL et de l’article 21 du contrat de terminal du 1er janvier 2004 à l’égard de E, en conséquence se déclarer incompétent, sur le fondement de l’article 23 du Règlement CE 44/2001 du 31 décembre 2000 et renvoyer les parties à se mieux pourvoir auprès du Tribunal d’Anvers et ce, conformément aux dispositions des articles 74 et suivants du code de procédure civile ;

— à titre subsidiaire, déclarer la société AK AL irrecevable en son action en garantie à l’encontre de la société J-K Q sur le fondement de la loi belge, applicable en vertu de l’article 57 de la loi du 18 juin 1966, et l’en débouter en conséquence ;

— dire la société E mal fondée en son action en garantie à l’encontre de la société J-K Q, aux termes de l’article 19 du contrat de terminal et l’en débouter ;

— à titre très subsidiaire, dire la société J-K Q bien fondée à bénéficier de la limitation d’indemnité à hauteur de la somme de 7.415,64 DTS ou sa contre-valeur en euros au jour du paiement ;

— condamner les sociétés AK R INTERNATIONAL et/ou

E AJ AT au paiement de la somme de 7.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

***

La SAS D SERVICES, les sociétés F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et SOCIETA ITALIANA ASSICURAZIONI ET RIASSICURAZIONI (Y), ont formé appel incident et, aux termes de leurs dernières écritures en date du 21 janvier 2010, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens développés, demandent à la Cour de :

— débouter les sociétés E et AK R S de leurs appels et statuer ce que de droit sur l’appel de la société J NORD Q ;

— donner acte à la société D SERVICES de ce qu’elle vient aux droits de la société X M SERVICES SA par changement de dénomination sociale ;

— faisant droit à l’appel incident des sociétés D SERVICES, F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y, sous le visa des articles L. 132-4 et suivants du Code de commerce, de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 et des articles 1134 et suivants du Code Civil, confirmer le jugement entrepris en ce que le tribunal s’est déclaré compétent pour connaître de l’action principale, et le réformant pour le surplus,

— condamner solidairement les sociétés AK R S et E AJ AT NV, ou l’une à défaut de l’autre, à payer aux sociétés F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y la somme de 154.754,29 USD en principal avec intérêts de droit à compter de l’assignation ;

— condamner solidairement les sociétés AK R S et E AJ AT NV, ou l’une à défaut de l’autre, à payer à la société D SERVICES la somme de 92.481,71 USD en principal avec intérêts de droit à compter de l’assignation ;

— y ajoutant, les condamner in solidum au paiement, aux sociétés D SERVICES, F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y, de la somme de 25.000 € pour l’appel, s’ajoutant à la somme de 10 000 € allouée en première instance, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens de première instance et d’appel.

DISCUSSION

sur la compétence

E oppose à D et ses assureurs, et à AK AL une exception d’incompétence au profit des juridictions belges. Elle soutient en premier lieu que cette exception est recevable comme ayant été opposée avant toute défense au fond, que l’assignation en garantie qu’elle a fait délivrer à l’encontre de J K Q, avait pour objet de créer un lien d’instance distinct et ne contenait aucun élément pouvant constituer un moyen de défense au fond dans l’instance principale en cours entre D et ses assureurs et E.

Elle fait valoir que le contrat de AH matérialisé par le connaissement contient une clause attributive de compétence au profit des juridictions de son siège social ; et que X était partie au contrat de AH quand bien même il a été conclu par l’intermédiaire du commissionnaire ; que cette clause, imprimée suivant la typographie habituelle au dos du connaissement fait partie de l’économie du contrat et s’impose au chargeur expéditeur réel, sans qu’il soit besoin d’une quelconque acceptation de sa part, d’autant plus qu’en qualité de professionnel du AH maritime elle ne peut ignorer l’existence des clauses figurant sur les connaissements attribuant compétence aux juridictions du siège du transporteur.

Elle soutient qu’en tout état de cause, E étant un armateur ayant son siège à Anvers, seules les juridictions belges sont compétentes pour connaître de l’action engagée à son encontre en application de l’article 2 du règlement communautaire 44/2001, peu important la localisation du siège de AK AL co- défendeur, les actions engagées par D et ses assureurs n’étant pas indivisibles.

Elle prétend que AK AL étant son partenaire habituel lui ayant déjà confié près de deux W par jours, a nécessairement parfaite connaissance de la clause attributive de compétence.

Elle fait valoir que si le tribunal de commerce doit être déclaré compétent pour connaître des actions exercées à son encontre, il doit en être de même pour les actions à l’encontre de J K Q, conformément à l’article 6-2 du règlement communautaire 44/2001 ; que le lien d’instance, créé entre toutes les parties par l’appel en garantie de J K Q formé par AK AL, justifie la compétence du tribunal de commerce de Nanterre à l’encontre du manutentionnaire ; que la clause attributive de compétence figurant dans les conditions générales de J K Q ne peut lui être opposée dès lors qu’elle n’en a pas eu connaissance et de l’a pas acceptée.

***

J K Q oppose une exception d’incompétence au profit des juridictions d’Anvers, sur le fondement de la clause attributive de compétence figurant dans ses conditions générales annoncées au recto et imprimées au verso de tous ses documents commerciaux et notamment de ses factures, ainsi que dans le contrat de terminal la liant à E ; que cette attribution de compétence est conforme à l’article 23 du règlement CE 44/2001.

***

D et ses assureurs font valoir que E en appelant ses substitués en garantie devant le tribunal de commerce de Nanterre a renoncé au bénéfice de cette clause et que son exception doit être déclarée irrecevable, rappelant la motivation du premier juge par référence à l’article 74 du code de procédure civile.

Ils soutiennent que X n’avait de lien contractuel qu’avec AK AL, qu’en conséquence E ne peut lui opposer la clause attributive de compétence au profit des tribunaux belges, telle que figurant en caractères indéchiffrables au dos de ce document qu’elle n’a pas signé, dont il n’est pas établi qu’elle aurait eu parfaite connaissance et qu’elle l’aurait acceptée ; que n’ayant à aucun moment participé à l’établissement du connaissement, elle ne peut se voir priver de ses droits et notamment ceux résultant de l’article 6 du Règlement des Communautés Européennes n°44/2001 du 22 décembre 2000 ainsi que de l’article 42 du code de procédure civile qui prévoient qu’en cas de pluralité de défendeurs, le demandeur saisit à son choix le tribunal du domicile de l’un d’eux, soit en l’occurrence le tribunal de commerce de Nanterre en raison du siège de AK AL.

***

AK AL considère qu’en l’état de l’indivisibilité du litige et au visa d’une bonne administration de la justice, c’est à bon droit que l’exception d’incompétence invoquée par le transporteur maritime a été écartée par les premiers juges ; qu’aucune acceptation expresse de quelque clause que ce soit par la société AK AL n’est établie, et que l’exception a été soulevée tardivement car postérieurement à l’assignation régularisée par la société E à l’encontre du manutentionnaire anversois, qui constitue une défense au fond.

Elle prétend que le lien de connexité manifeste justifie que l’ensemble des instances soit instruit et jugé ensemble, au sens des dispositions prescrites par les articles 42 alinéa 2 et 100 du code de procédure civile et de l’article 6 de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968 tout comme encore au visa des dispositions prescrites par le Règlement CE 44/2001 du 22 décembre 2000, les conditions générales J-K NATTE lui étant par ailleurs inopposables.

***

La recevabilité de l’exception opposée par J K Q n’est pas contestée.

Les pièces de procédure de première instance démontrent que E a opposé une exception d’incompétence au profit de la juridiction de son siège, en tête de ses premières conclusions du 3 octobre 2006, et il n’est pas discuté que celle-ci a été plaidée en premier lors de l’audience devant le tribunal de commerce.

Antérieurement, le XXX, E avait appelé J K Q en garantie. Cette assignation a eu pour effet de créer une nouvelle instance opposant E à J K Q, totalement distincte de l’instance principale ; E se bornait à solliciter la garantie de J K Q, sous réserve de soulever touts moyens d’incompétence et d’irrecevabilité sur la demande principale, et au cas où par impossible une quelconque condamnation viendrait à être prononcée à son encontre.

Compte tenu de son objet et des énonciations de l’acte, cet appel en garantie ne peut être considéré comme une défense au fond dans les instances opposant alors X d’une part et AK AL d’autres part à E, de nature à faire obstacle à la recevabilité de l’exception d’incompétence opposée par cette dernière en application des dispositions de l’article 74 du code de procédure civile.

L’exception d’incompétence opposée par E doit en conséquence être déclarée recevable, et le jugement entrepris réformé en ce sens.

Le litige oppose des sociétés de droit français et belge, domiciliées en France et en Belgique.

La compétence doit en conséquence être appréciée en application des dispositions du règlement CE n° 44/2001, qui prévoit notamment :

Article 2 : Sous réserve des dispositions du présent règlement, les personnes domiciliées sur le territoire d’un État membre sont attraites, quelle que soit leur nationalité, devant les juridictions de cet État membre (…)

Article 6 : Cette même personne peut aussi être attraite:

1) s’il y a plusieurs défendeurs, devant le tribunal du domicile de l’un d’eux, à condition que les demandes soient liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément;

2) s’il s’agit d’une demande en garantie ou d’une demande en intervention, devant le tribunal saisi de la demande originaire, à moins qu’elle n’ait été formée que pour traduire hors de son tribunal celui qui a été appelé ;

Article 23 : Si les parties, dont l’une au moins a son domicile sur le territoire d’un État membre, sont convenues d’un tribunal ou de tribunaux d’un État membre pour connaître des différends nés ou à naître à l’occasion d’un rapport de droit déterminé, ce tribunal ou les tribunaux de cet État membre sont compétents. Cette compétence est exclusive, sauf convention contraire des parties. Cette convention attributive de juridiction est conclue:

a) par écrit ou verbalement avec confirmation écrite, ou,

b) sous une forme qui soit conforme aux habitudes que les parties ont établies entre elles, ou,

c) dans le commerce international, sous une forme qui soit conforme à un usage dont les parties avaient connaissance ou étaient censées avoir connaissance et qui est largement connu et régulièrement observé dans ce type de commerce par les parties à des contrats du même type dans la branche commerciale considérée.

Le juge naturel de E et de J K Q est le tribunal d’Anvers, dans le ressort duquel se trouve leur siège social ; les clauses dont celles-ci revendiquent l’application ne font que reprendre cette compétence, et il n’est nullement discuté qu’elles sont conformes aux usages de la profession.

La clause attributive de compétence revendiquée par E figure au dos de ses connaissements, suivant les modalités habituelles en la matière.

Il est démontré par les pièces produites aux débats par E, et d’ailleurs non contesté par AK AL, que ces deux sociétés la première transporteur maritime et la seconde commissionnaire de AH, sont en relations d’affaires suivies ; dans ces conditions AK AL doit être réputée connaître et avoir accepté la clause attributive de compétence dont E revendique le bénéfice, qui lui sera déclarée opposable.

La clause attributive de compétence revendiquée par J K Q figure dans ses conditions générales ; elle est d’un usage courant que E ne pouvait ignorer, dès lors qu’elle opérait également au port d’Anvers et qu’il est établi et non contesté que J était son manutentionnaire habituel.

Dans ces conditions E doit être réputée connaître et avoir accepté la clause attributive de compétence dont J K Q revendique le bénéfice, qui lui sera déclarée opposable.

En application des dispositions de l’article 23 du règlement 44/2001, qui priment celles de son article 6, les appels en garantie exercés par AK AL à l’encontre de E et de cette dernière à l’encontre de J K Q relèvent de la compétence exclusive de la juridiction d’Anvers.

E a également été assignée directement par X devenue D. X est désignée en qualité de chargeur sur le connaissement, mais les pièces produites se rapportant à l’organisation du AH démontrent que celui-ci a été intégralement confié à AK AL, commissionnaire ; tous les documents se rapportant au chargement du navire et à la constatation du dommage à l’occasion de celui-ci sont adressés à H I, agent de AK AL à Anvers, et non directement à X. E produit des documents qui selon elle établiraient que X est un professionnel du AH maritime, mais ceux-ci mentionnent diverses sociétés X M situées en Norvège, aux Etats Unis et au Brésil, mais pas la SA X M SERVICES ayant son siège à Nanterre. Cette société a certes habituellement recours à E mais la liste fournie par cette dernière démontre l’intermédiation systématique d’un commissionnaire de AH.

Dans ces conditions E ne rapporte pas la preuve de ce que AK AL aurait pu/du avoir connaissance de la clause dont elle revendique le bénéfice.

Aucun élément n’est produit aux débats permettant de retenir que AK AL commissionnaire de AH en France, aurait du/pu avoir connaissance de la clause dont J K Q revendique le bénéfice, alors que ce manutentionnaire n’intervient que pour le compte de E, et non directement en relation avec un commissionnaire de AH.

Si en application de l’article 6 du règlement CE 404/2000 E et J K Q peuvent être attraites devant le tribunal de commerce de Nanterre compétent pour connaître de l’action également dirigée contre AK AL, c’est à condition que cette soustraction à leur juge naturel soit justifiée par la nécessité de réunir les demandes liées entre elles par un rapport si étroit qu’il y a intérêt à les instruire et à les juger en même temps afin d’éviter des solutions qui pourraient être inconciliables si les causes étaient jugées séparément.

L’action engagée par D et les assureurs à l’encontre de AK AL d’une part et de E d’autre part repose sur deux fondements juridiques totalement distincts, et il n’existe aucune indivisibilité entre les actions exercées par le commettant contre le commissionnaire et contre ses substitués, et encore moins entre l’action principale contre le commissionnaire et les actions en garantie de ce dernier contre ses substitués.

Dès lors il n’existe pas de nécessité particulière à juger ensemble l’action de D contre AK AL et les autres actions principale ou en garantie contre E et J K Q ; en revanche il apparaît nécessaire de regrouper devant le même juge d’Anvers, exclusivement compétent pour connaître des appels en garantie de AK AL contre E et de E contre J K Q, l’action engagée par D et ses assureus contre E et par AK AL contre J K Q.

Pour l’ensemble de ces raisons il sera fait droit aux exceptions d’incompétence opposées par E et J K Q au profit des juridictions d’Anvers, les parties étant renvoyées à mieux se pourvoir à leur encontre.

Sur la qualité à agir de D et de F et autres

AK AL, qui considère que la grue a été acquise par Z qui s’est vu transférer les risques par l’effet de la vente sous incoterm EXWork, puis revendue par cette dernière à AC AD AW COMPANY qui en a reçu livraison en exécution du connaissement à personne dénommée, prétend que X n’a pas qualité et intérêt à agir.

Elle fait valoir que la police produite aux débats n’est pas signée et est établie au profit d’une société ETPM dont il n’est pas établi qu’elle serait devenue X puis D, et que les co-assureurs qui y seraient mentionnés ne correspond pas à celle des compagnies demanderesses.

Elle soutient que ces compagnies ne peuvent revendiquer le bénéfice d’une subrogation qu’en établissant la preuve du paiement de l’indemnité d’assurance, mais également un paiement conforme aux termes de la police produite ; que les 3 dispaches versées au débat ne permettent pas d’établir la réalité des paiements revendiqués et que leurs dates d’émission ne satisfont pas aux exigences de concomitance prescrites par l’article 1250 du Code Civil au titre de la subrogation conventionnelle.

***

D et les assureurs font valoir que ni le commissionnaire de AH, ni le transporteur maritime, ne peuvent se prévaloir des dispositions du contrat de vente pour venir invoquer un prétendu défaut d’intérêt de X M SERVICES SA, le contrat de vente étant indépendant des contrats de commission de AH et de AH ; que c’est bien X, qui avait acquis la grue auprès de la société Z pour la revendre à AC AD AW, qui a contracté avec AK AL pour l’organisation du AH et qui est en possession de l’original du connaissement, et qu’elle a bien seule subi le préjudice résultant des avaries causées à la grue dès lors que c’est elle qui a organisé, supervisé et supporté les opérations de remplacement, de réparations et de mise en service des matériels.

F et autres soutiennent qu’elles sont intervenues en qualité d’assureur de la marchandise transportée, telles qu’elles figurent en cette qualité dans la police, rappelant les opérations de fusion intervenues entre certaines d’entre elles et les changements de dénomination ; elles détaillent les pièces produites qui selon elles établissent leur subrogation légale à raison et à hauteur du paiement effectué dans les conditions de la police.

***

L’action de D anciennement X et de ses assureurs subrogés à l’encontre de AK AL, à raison du dommage causé à la marchandise pendant son AH, est fondée exclusivement sur le contrat de commission de AH, en exécution duquel AK AL, par application des articles L 132-4 et suivants du code de commerce, est tenue envers son co-contractant X, par une obligation de résultat, de la bonne exécution par elle-même et ses substitués, de la totalité du AH dont l’organisation lui a été confiée.

Dès lors D anciennement X en sa qualité de co-contractante a bien qualité à agir à l’encontre de AK AL.

Elle a également intérêt à agir dès lors qu’elle justifie, par la production aux débats des factures acquittées par ses soins, avoir effectivement supporté les conséquences financières des dommages causés à la marchandise pendant le AH.

Elle doit en conséquence être déclarée recevable à agir à l’encontre de AK AL.

D et les assureurs produisent aux débats une police d’abonnement maritime n° 61922.

Cette police datée du 21 mai 1990 est établie au nom de l’assuré ETPM, XXX ; sont produits aux débats deux avenants à l’entête du courtier d’assurance le premier daté du 9 mars 2000 prenant acte qu’à la suite d’un changement de raison sociale de l’assuré le bénéfice de la police par ETPM est transféré à X M 32 avenue Paplo Picasso à Nanterre, et le second daté du 1er février 2006 prenant acte du changement de dénomination sociale de l’assuré, désormais D France SA.

La circonstance que ces documents produits en copie aux débats ne sont pas signés est indifférente ; ils sont complétés et confirmés notamment par le certificat d’assurance au porteur, délivré à X par N O agent d’assurances, le 15 octobre 2003, spécialement pour le AH maritime, sur le navire 'Aeolian Sun', d’Anvers à Lobito, de la grue Z.

Les assureurs en 2003 étaient F AH (société apéritrice) BRITISH AND FOREIGN, LE CONTINENT, Y, MMA, G FRANCE, C T O AZ, et XXX.

Il est justifié par les pièces produites aux débats que A vient aux droits de BRITISH AND FOREIGN à la suite d’un transfert de portefeuille à effet au 1er juin 2004 ; G FRANCE ASSURANCES vient aux droits de LE CONTINENT à la suite d’une fusion réalisée le 23 décembre 2004 ; AA AB vient aux droits de MMA après transfert de portefeuille à effet au 1er janvier 2005 ; C T O AZ est devenue T U CORPORATE & XXX.

F AH, A, G FRANCE ASSURANCES, Y, AA AB, G FRANCE, T U CORPORATE & XXX, XXX justifient ainsi de leur qualité d’assureurs de X devenue D, au titre de la police d’abonnement maritime n° 61922.

Les assureurs ont procédé entre les mains de X à trois règlements à hauteur de la somme totale de 154 754,29 USD correspondant au montant total accepté par les assureurs au titre du sinistre (164 754,29 USD), après déduction de la franchise ; il n’est nullement contesté que ces règlements ont été effectués en conformité aux clauses de cette police n° 61922 à laquelle ils font référence.

Ces règlements ont donné lieu à l’émission par F société apéritrice, de trois dispaches des 21 avril, 18 mai et 2 novembre 2005 précisant la répartition entre tous les assureurs ; il est justifié de leur caractère effectif par la production aux débats des relevés d’opérations bancaires correspondants.

La circonstance que ces paiements sont antérieurs à la quittance subrogative délivrée par X est totalement indifférente, les assureurs se prévalant non pas d’une subrogation conventionnelle régie par l’article 1250 alinéa 1 du code civil, mais de la subrogation légale prévue par l’article L 121-12 du code des assurances, qui s’opère de plein droit au jour du paiement.

Au regard de l’ensemble de ces éléments les assureurs justifient être régulièrement subrogés à D à hauteur de la somme de 154 754,29 USD, et être ainsi recevables à agir.

***

AK IL, qui laisse subsister dans le dispositif de ses dernières écritures une fin de non recevoir de l’action d’D et de ses assureurs '(…) et/ou pour prescription', ne développe aucun moyen de prescription dans ces mêmes écritures.

Sur le préjudice

E observe que près de la moitié du préjudice allégué correspond au coût de l’organisation des réparations, que X ne s’est pas préoccupée de limiter, alors que les réparations elles-mêmes s’élèvent à la somme de 195 769,79 USD ; que X produit des factures qui n’ont jamais été soumises à débat contradictoire, et dont il n’est pas justifié qu’elles auraient été payées.

***

AK AL, critiquant les divers rapports d’expertise qui selon elle ne permettent pas de chiffrer et étayer le quantum de la réclamation, considère que le listing établi par la société AE, est unilatéral et non justifié ; elle fait grief au premier juge d’avoir fait droit aux prétentions de D et des assureurs sur la seule base des factures versées pêle-mêle alors que les parties ne sauraient se faire établir de preuves à elles-mêmes, et ce en « éludant complètement les obligations qui pesaient sur les intérêts-cargaison quant à la préservation de leurs droits et la stigmatisation des dommages, au sens notamment de la Convention de Bruxelles originelle».

Elle fait valoir, que les sociétés D et autres n’ont rien fait pour limiter leur préjudice, à tout le moins de façon contradictoire et ce, au titre notamment de l’organisation des réparations.

***

D et ses assureurs détaillent les divers chefs de préjudice justifiés et retenus par le commissaire d’avaries, et la part de celui-ci restée à charge de X.

***

Le rapport d’avarie établi à bord après les opérations de chargement des éléments de la grue adressé au manutentionnaire fait état de dommages causés à la marchandise pendant le chargement, et plus particulièrement sur le corps de la grue Z, décrits comme suit :

'le matériel a été chargé en état d’avaries telles que : la moitié du moteur du corps comporte de nombreuses rayures et entailles sur le dessus, 2 tubulures hydrauliques sont sectionnées, goulotte de câble endommagés sur la partie supérieure, 2 trous sur la plaque supérieure, cadre supérieur déformé et plié, éclairage interne cassé, collecteur voilé et partiellement cassé, ensemble du corps comportant de nombreuses rayures sur toute la surface.'

ASB O SERVICES UK, expert sollicité par AC AD AW, a procédé le 5 novembre 2003, à l’arrivée à Lobito, à l’inspection de la grue encore chargée sur le navire ; le cabinet B expert requis par AK AL fait état dans son rapport préliminaire rédigé le 2 janvier 2004, d’un premier examen également effectué avant déchargement ; ces deux rapports, bien qu’utilisant des termes légèrement différents font état des mêmes dommages, qui se sont bien produits pendant l’exécution des opérations de AH, de l’Angleterre à l’Angola, confiées à AK AL commissionnaire de AH.

AE, commissaire d’avaries, a procédé à sa mission en présence d’un représentant de X, de E et de AK AL ; il fait référence dans son rapport définitif daté du 31 décembre 2004 à une expertise approfondie sur site effectuée le 11 décembre 2003 ayant permis de relever les mêmes dommages autrement décrits, comme : 'barre d’acier plate endommagée ; collecteur d’échappement endommagé ; plaques structurelles de passerelle endommagée ; chemin de câble endommagé ; carter moteur endommagé ; retouche peinture du carter moteur ; rotor du turbocompresseur grippé ; flexibles hydrauliques cassés'.

Il détaille les réparations effectuées au chantier de Lobito et achevées en M et, considérant la nature des dommages constatés, les factures et documents reçus par X de la société Z relatifs aux coûts de réparation de la grue, et l’étendue des réparations effectuées et réglées par X, a établi un tableau détaillé du coût des réparations, distinguant les divers chefs de dépense, pour un coût total de 195 769,79 USD.

Ces divers chefs de préjudice ont été retenus, comme étant en relation directe et justifiée avec les réparations et mise en service de la grue, au cours d’opérations d’expertise contradictoires, et n’ont alors fait l’objet d’aucune contestation.

Les chefs de préjudice détaillés par D, au-delà de la simple différence entre cette somme de 195 769,79 USD et la somme de 164 754,29 USD acceptée par ses assureurs, correspondent à des frais de personnel et de déplacement des ingénieurs Z, qui n’ont pas été retenus par l’expert, sans explication détaillée de sa part ; mais cette exclusion est justifiée dès lors qu’en tout état de cause la grue étant transportée démontée, cette part des frais aurait du être exposée pour le montage et la mise en service dans des conditions normales.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, le préjudice en relation stricte avec les dommages doit être fixé à la somme totale de 195 769,79 USD, dont celle de 41 015,50 USD restée à la charge définitive de D.

Sur l’étendue de la garantie de AK AL.

AK AL fait valoir qu’en sa qualité de commissionnaire de AH, la société AK AL profite de tous les moyens dont bénéficient ses substitués et des limitations de responsabilité invoquées à juste titre par E, à hauteur de la contre-valeur en euros de 823, 96 DTS par colis, soit 848 €, voire 7.415, 64€ et, sous couvert de la Convention de Bruxelles originelle.

***

E considère que l’Angola pays de destination de la marchandise n’ayant pas ratifié les protocoles de 1968 et 1979, seule la convention de Bruxelles du 25 août 1924 ratifiée par la Belgique et l’Angola a vocation à s’appliquer.

Elle en déduit qu’un seul colis ayant été endommagé, l’indemnisation doit être limitée à 823,96 DTS, soutenant qu’Il n’est pas démontré que les dommages sur ce seul colis auraient pu avoir une incidence sur les neuf autres, la répartition de la grue en 9 colis et un conteneur suffisant à démontrer l’absence d’indivisibilité ; elle fait valoir qu’en admettant une indemnisation calculée en fonction de la totalité de la marchandise chargée, celle-ci s’établirait à 7 415,64 DTS.

***

D et ses assureurs considèrent que le connaissement ayant été émis à Anvers, pour un AH maritime au départ de ce port, la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée, dont l’Etat belge est signataire, doit recevoir application, le fait que l’Angola pays de destination n’a signé que la convention d’origine étant indifférent ; qu’en tout état de cause le connaissement prévoit un plafond de responsabilité à hauteur de 2 DTS par kilo de poids brut de marchandise perdues ou endommagées, reprenant ainsi purement et simplement l’article 5 de la Convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée ; que dans ces conditions E ne peut prétendre bénéficier d’un autre plafond de responsabilité et notamment un plafond prévu par la Convention de Bruxelles d’origine qui ne serait calculé qu’en fonction uniquement du nombre de colis.

Elles prétendent que le poids total de la grue tel que mentionné au connaissement est de 75.385 kg et que chacun des éléments contenus dans chacun des 9 colis en constitue une partie indissociable ; que sans les éléments indispensables se trouvant dans le colis n°1/10 la grue ne pouvait pas être construite ni évidemment fonctionner ; que dans ces conditions E ne peut prétendre limiter l’indemnisation par référence au poids, de 26.320 kg, du seul colis n°1/10 endommagé.

***

En sa qualité de commissionnaire de AH, et en l’absence de toute circonstance constitutive d’un cas de force majeure, AK AL, en application des articles L 132-4 et suivants du code de commerce, est responsable de tout dommage survenu pendant le AH dont l’organisation lui a été confiée, sous réserve de ses recours contre ses substitués.

Mais dès lors qu’aucune faute personnelle ne lui est reprochée, elle est fondée à se prévaloir envers son commettant X aujourd’hui D et ses assureurs subrogés, de toutes les exceptions et limitations de garantie dont bénéficient ses substitués.

Les dommages dont il est demandé réparation ont été constatés à bord, à l’issue des opérations de chargement du navire par le manutentionnaire requis par E ; ils n’avaient fait l’objet d’aucun constat identique antérieurement, et sont sans commune mesure avec les simples réserves qu’avait pu formuler le manutentionnaire lors du déchargement des colis des camions qui les avaient acheminés jusqu’au port d’Anvers, portées sur la lettre de voiture et faisant simplement état de 'traces de manutention'.

Ils doivent en conséquence être retenus comme ayant été causés pendant les opérations de chargement par le manutentionnaire requis par le transporteur maritime, incluses dans le AH maritime lui-même.

Le litige a pour cause des dommages survenus en Belgique, au cours d’une opération de AH maritime au départ de ce pays, ayant donné lieu à l’établissement d’un connaissement émis en Belgique ; le préjudice qui en est résulté a été subi exclusivement par X société de droit français, sans aucune répercussion pour le destinataire final de la grue ; la circonstance que le destinataire final de la marchandise, non concerné par le litige, se situe en Angola, est totalement indifférente.

La convention de Bruxelles amendée par les protocoles de 1968 et 1979 prévoit en son article 10 qu’elle trouve à s’appliquer à tout connaissement relatif à un AH de marchandises entre ports relevant de deux états différents, notamment quand le connaissement est émis dans un état contractant ou quand le AH a lieu au départ d’un port d’un état contractant .

Elle doit donc recevoir application, dès lors que le AH litigieux a eu lieu au départ du port d’Anvers suivant connaissement établi dans cette ville de l’Etat belge signataire de la convention et de ses protocoles.

En application de l’article 4 (5) de la convention telle qu’amendée par le protocole de 1979, l’indemnisation doit être calculée sur la base, la plus favorable, de 2 DTS par kilo de poids brut de marchandise endommagée.

Il est constant entre les parties que la partie endommagée de la grue, correspond au colis n° 1/10, d’un poids de 26.320 kg.

Il n’est pas discuté que sans les éléments endommagés la grue ne peut être construite ni évidemment fonctionner ; mais le fait que tous les éléments constitutifs de la grue soient indispensables pour le montage et le fonctionnement de celle-ci n’implique pas qu’il sont indissociables. La grue a été démontée, pour être répartie en 9 colis et un conteneur ; le rapport AE a bien défini les dommages et les réparations en relation avec ceux-ci, se limitant à la seule partie endommagée ; D et ses assureurs, au vu de ce rapport d’expertise, demandent indemnisation des préjudices correspondant non pas au coût de remplacement de la grue entière, mais aux coût et frais liés à la réparation des seuls éléments endommagés correspondant au colis n°1, la grue retrouvant sa parfaite fonctionnalité et sa valeur après réparation de ces seuls éléments.

Il en résulte que l’indemnisation telle que limitée par la convention de Bruxelles amendée doit être calculée par référence au poids du seul colis n° 1 de 26 320 kg.

L’indemnisation doit en conséquence être limitée à la contre valeur de 52 640 DTS, calculée en euros à la date du présent arrêt.

AK AL sera condamnée au paiement de cette somme à D et ses assureurs, avec intérêts au taux légal à compter de l’acte introductif d’instance du 4 octobre 2004, en tant que de besoin à titre de dommages et intérêts complémentaires.

Le jugement entrepris sera réformé en ce sens.

Sur les frais et dépens

AK AL supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, et devra verser à D et ses assureurs, au titre de la procédure de première instance et d’appel, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 25 000 €.

Il n’y a pas lieu de prévoir l’allocation d’indemnités de procédure au profit de E et J K Q.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et, y ajoutant,

Déclare la société E AJ AT NV recevable en son exception d’incompétence ;

Déclare le tribunal de commerce de Nanterre incompétent pour connaître des actions engagées à l’encontre de la société E AJ AT NV et de la société J K Q au profit des juridictions d’Anvers, et renvoie les parties à mieux se pourvoir ;

Déclare la SAS D SERVICES anciennement X M SERVICES, les sociétés F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y recevables en leur action ;

Fixe le préjudice en relation avec le dommage à la somme totale de 195 769,79 USD, dont celle de 41 015,50 USD restée à la charge définitive de la SAS D SERVICES ;

Condamne la SAS AK R S à payer à la SAS D SERVICES anciennement X M SERVICES, et aux sociétés F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y, dans les limites fixées par la convention de Bruxelles du 25 août 1924 amendée, la contre valeur en euros, à la date du présent arrêt, de 52 640 DTS, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 2004 ;

Dit n’y avoir lieu à allocation d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au profit de la société E AJ AT NV et de la société J K Q ;

Condamne la SAS AK R S à payer à la SAS D SERVICES anciennement X M SERVICES, et aux sociétés F AH, T U CORPORATE & XXX, XXX, AA AB, G FRANCE ASSURANCES, G IARD, A et Y la somme de 25 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre de l’ensemble de la procédure de première instance et d’appel ;

Condamne la SAS AK R S aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont recouvrement direct conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

— signé par Monsieur Albert MARON, Président et par Madame GENISSEL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER, Le PRESIDENT,

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Cour d'appel de Versailles, 12ème chambre section 2, 18 novembre 2010, n° 08/03519