Cour de cassation, Chambre sociale, 10 septembre 2025, 24-12.595, Publié au bulletin
CPH Paris 17 mai 2021
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CA Paris
Infirmation partielle 21 novembre 2023
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CASS
Cassation 10 septembre 2025

Arguments

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  • Accepté
    Sanction de la liberté d'expression

    La cour a estimé que le licenciement était nul car il était fondé sur des éléments liés à l'exercice de la liberté d'expression de la salariée, et que l'employeur n'a pas prouvé que la décision était justifiée par des éléments étrangers à cette volonté de sanction.

  • Rejeté
    Comportement fautif de l'employeur

    La cour a rejeté cette demande, considérant qu'il n'y avait pas de comportement fautif de l'employeur ayant causé un préjudice distinct de celui résultant du licenciement.

  • Accepté
    Indemnités de chômage

    La cour a ordonné le remboursement des indemnités de chômage versées à la salariée, considérant que le licenciement étant nul, l'employeur devait récupérer ces sommes.

Résumé par Doctrine IA

La société Les Armateurs conteste la décision de la cour d'appel qui a jugé le licenciement de Mme [M] nul, invoquant une violation de sa liberté d'expression (articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail). La Cour de cassation casse partiellement l'arrêt, considérant que la cour d'appel n'a pas établi que le licenciement, motivé par une insuffisance professionnelle, était lié à la lettre de l'avocat de la salariée. De plus, la cour d'appel a erronément accordé des dommages-intérêts pour licenciement vexatoire sans prouver un comportement fautif de l'employeur (article 1231-1 du code civil). L'affaire est renvoyée devant la cour d'appel de Versailles.

Le contenu a été généré à l’aide de l’intelligence artificielle. Pensez à vérifier son exactitude.

Résumé de la juridiction

Le seul fait que l’avocat du salarié, dans le cadre d’une proposition de rupture conventionnelle, adresse une lettre à l’employeur pour refuser cette proposition ne relève pas de l’exercice par le salarié de sa liberté d’expression dans l’entreprise ou en dehors de celle-ci

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Sur la décision

Référence :
Cass. soc., 10 sept. 2025, n° 24-12.595, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 24-12595
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Cour d'appel de Paris, 20 novembre 2023, N° 21/06671
Textes appliqués :
Article L. 1121-1 du code du travail.
Dispositif : Cassation partielle
Date de dernière mise à jour : 5 novembre 2025
Identifiant Légifrance : JURITEXT000052267308
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2025:SO00772
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Sur les parties

Texte intégral

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION

______________________

Arrêt du 10 septembre 2025

Cassation partielle

M. HUGLO, conseiller doyen

faisant fonction de président

Arrêt n° 772 FS-B

Pourvoi n° M 24-12.595

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 10 SEPTEMBRE 2025

La société Les Armateurs, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° M 24-12.595 contre l’arrêt rendu le 21 novembre 2023 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 11), dans le litige l’opposant :

1°/ à Mme [E] [M], domiciliée [Adresse 3],

2°/ à France travail, dont le siège est [Adresse 1],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Maitral, conseillère référendaire, les observations de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société Les Armateurs, de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [M], et l’avis de M. Gambert, avocat général, après débats en l’audience publique du 17 juin 2025 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Maitral, conseillère référendaire rapporteure, Mme Mariette, conseillère doyenne, MM. Barincou, Seguy, Mmes Douxami, Panetta, Brinet, conseillers, Mme Prieur, MM. Carillon, Redon, conseillers référendaires, M. Gambert, avocat général, et Mme Jouanneau, greffière de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 21 novembre 2023), Mme [M] a été engagée le 21 avril 2008, en qualité de chargée de développement, par la société Les Armateurs (la société), qui exerce une activité de production de longs-métrages, de courts-métrages et de séries d’animation. Elle a été promue directrice du développement en janvier 2011.

2. Le 11 avril 2019, au cours d’un entretien, la directrice générale déléguée lui a indiqué que la société envisageait de se séparer d’elle. Le 17 avril 2019, il lui a été proposé une rupture conventionnelle du contrat de travail, qu’elle a refusée par lettre de son avocat du 23 avril suivant.

3. Après avoir été convoquée, le 29 avril 2019, à un entretien préalable, elle a été licenciée par lettre du 13 mai 2019 pour insuffisance professionnelle.

Examen des moyens

Sur le premier moyen, pris en ses première et deuxième branches

Enoncé du moyen

4. L’employeur fait grief à l’arrêt de juger le licenciement nul, de le condamner à verser à la salariée certaines sommes à titre d’indemnité pour licenciement nul et de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire et de lui ordonner le remboursement à Pôle emploi, désormais dénommé France travail, des indemnités de chômage versées à la salariée à hauteur de six mois, alors :

« 1°/ que l’avocat du salarié qui écrit à l’employeur pour lui faire part des manquements que le salarié reproche à ce dernier ne fait pas usage de la liberté d’expression individuelle du salarié ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que « les éléments ainsi apportés par la salariée et leur chronologie laissent supposer que le licenciement de la salariée a été prononcé en raison du courrier adressé par son conseil se plaignant du comportement de la direction, au mépris de sa liberté d’expression » et qu’ « il appartient donc à l’employeur d’établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner la liberté d’expression de la salariée, fut-ce par l’intermédiaire de son conseil » ; qu’elle a ensuite jugé que "l’insuffisance professionnelle de Mme [M] n’est pas établie et qu’en conséquence, la société Les Armateurs ne démontre pas que sa décision de licencier la salariée était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner la liberté d’expression de celle-ci« , de sorte que »le licenciement de Mme [M] est nul" ; qu’en statuant ainsi quand en répondant à l’employeur pour refuser la proposition de rupture conventionnelle que ce dernier avait faite à Mme [M] et énoncer divers griefs que cette dernière imputait à l’employeur, l’avocat de la salariée n’avait pas fait usage de la liberté d’expression de la salariée, de sorte que le licenciement ne pouvait être jugé nul comme ayant voulu sanctionner la liberté d’expression de la salariée en l’absence de tout propos tenu ou écrit personnellement par cette dernière, la cour d’appel a violé les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble les articles 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

2°/ qu’il incombe à celui qui prétend que la cause du congédiement serait autre que celle invoquée dans la lettre de licenciement d’en rapporter la preuve ; qu’en l’espèce, pour dire le licenciement nul, la cour d’appel a retenu que « les éléments ainsi apportés par la salariée et leur chronologie laissent supposer que le licenciement de la salariée a été prononcé en raison du courrier adressé par son conseil se plaignant du comportement de la direction, au mépris de sa liberté d’expression » et qu’ « il appartient donc à l’employeur d’établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner la liberté d’expression de la salariée, fût-ce par l’intermédiaire de son conseil » ; qu’elle a ainsi considéré que "l’insuffisance professionnelle de Mme [M] n’est pas établie et qu’en conséquence, la société Les armateurs ne démontre pas que sa décision de licencier la salariée était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner la liberté d’expression de celle-ci« , de sorte que »le licenciement de Mme [M] est nul" ; qu’en statuant ainsi quand, dès lors que la lettre de licenciement ne visait pas le courrier de l’avocat de la salariée, elle ne pouvait juger que le licenciement prononcé pour insuffisance professionnelle était présumé trouver sa cause dans le courrier de l’avocat de la salariée, la cour d’appel a violé l’article 1353 du code civil, les articles L. 1121-1 et L. 1232-1 du code du travail, ensemble les articles 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et 10 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 1121-1 du code du travail :

5. Pour dire le licenciement nul, l’arrêt retient que les éléments apportés par la salariée et leur chronologie laissent supposer que le licenciement a été prononcé en raison de la lettre adressée par son conseil se plaignant du comportement de la direction, au mépris de sa liberté d’expression, et qu’il appartient donc à l’employeur d’établir que sa décision était justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner la liberté d’expression de la salariée, fut-ce par l’intermédiaire de son conseil.

6. En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la lettre de licenciement motivée par une insuffisance professionnelle ne contenait aucun grief tiré de l’exercice par la salariée de sa liberté d’expression et que le seul fait que l’avocat de la salariée, dans le cadre d’une proposition de rupture conventionnelle, eût adressé une lettre à l’employeur pour refuser cette proposition ne relevait pas de l’exercice par la salariée de sa liberté d’expression dans l’entreprise et en dehors de celle-ci, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

Et sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. L’employeur fait grief à l’arrêt de le condamner à verser à la salariée une certaine somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement vexatoire, alors « que le salarié dont le licenciement est nul ou sans cause réelle et sérieuse ne peut prétendre à des dommages-intérêts distincts de l’indemnité pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse qu’en cas de comportement fautif de l’employeur dans les circonstances de la rupture ; qu’en l’espèce, pour condamner l’employeur à payer une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, la cour d’appel a retenu "que le licenciement de Mme [M] est nul comme portant atteinte à sa liberté d’expression, l’insuffisance professionnelle qui lui est reprochée dans la lettre de licenciement n’étant pas établie, et son licenciement ayant été prononcé après le courrier de son avocat et sans que l’employeur n’établisse l’existence du moindre reproche pendant les onze ans de leur relation contractuelle. L’attestation de M. [S], président de la société Les Armateurs, qui a signé la lettre de licenciement, ne saurait emporter la conviction de la cour sur l’existence de reproches adressés à la salariée avant son licenciement, sans élément objectif« et que »le licenciement, eu égard à la chronologie des événements et à la longue litanie de reproches formulés dans la lettre de licenciement, est vexatoire" ; qu’en statuant ainsi sans caractériser un comportement fautif de l’employeur ayant causé au salarié un préjudice distinct de celui résultant du licenciement, la cour d’appel a violé l’article 1231-1 du code civil dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016. »

Réponse de la Cour

Vu l’article 1231-1 du code civil, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

8. Il résulte de ce texte que le salarié dont le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse peut prétendre à des dommages-intérêts distincts de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse en cas de comportement fautif de l’employeur dans les circonstances de la rupture.

9. Pour condamner l’employeur au paiement de dommages-intérêts pour licenciement brutal et vexatoire, l’arrêt retient que le licenciement est nul comme portant atteinte à la liberté d’expression de la salariée, l’insuffisance professionnelle qui lui est reprochée dans la lettre de licenciement n’étant pas établie et son licenciement ayant été prononcé après le courrier de son avocat et sans que l’employeur n’établisse l’existence du moindre reproche pendant les onze ans de leur relation contractuelle. Il ajoute que l’attestation du président de la société, qui a signé la lettre de licenciement, ne saurait emporter la conviction de la cour d’appel sur l’existence de reproches adressés à la salariée avant son licenciement, sans élément objectif. Il en déduit que le licenciement, eu égard à la chronologie des événements et à la longue litanie de reproches formulés dans la lettre de licenciement, est vexatoire.

10. En statuant ainsi, sans caractériser un comportement fautif de l’employeur ayant causé à la salariée un préjudice distinct de celui résultant du licenciement, la cour d’appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déboute Mme [M] de sa demande de dommages-intérêts au titre de la perte de chance de percevoir l’intégralité de sa retraite, l’arrêt rendu le 21 novembre 2023, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sauf sur ce point, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles ;

Condamne Mme [M] aux dépens ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé publiquement le dix septembre deux mille vingt-cinq par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

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Cour de cassation, Chambre sociale, 10 septembre 2025, 24-12.595, Publié au bulletin