Tribunal de grande instance de Paris, 5e chambre 2e section, 4 juin 2015, n° 13/11361

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
TGI Paris, 5e ch. 2e sect., 4 juin 2015, n° 13/11361
Juridiction : Tribunal de grande instance de Paris
Numéro(s) : 13/11361

Sur les parties

Texte intégral

T R I B U N A L

D E GRANDE

I N S T A N C E

D E P A R I S(footnote: 1)

5e chambre 2e section

N° RG :

13/11361

N° MINUTE :

Assignation du :

14 Juin 2013

JUGEMENT

rendu le 04 Juin 2015

DEMANDEURS

Madame D X

[…]

[…]

représentée par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

Madame E Y épouse X

[…]

[…]

représentée par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

Madame F X

[…]

[…]

représentée par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

Monsieur G X

[…]

[…]

représenté par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON , avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

Monsieur Q-R X

domicilié : chez […]

[…]

[…]

POLYNESIE FRANCAISE

représenté par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON , avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

Madame H X

[…]

[…]

représentée par Me Sarra JOUGLA YGOUF du cabinet UPSYLON, avocat au barreau de PARIS, avocat postulant, vestiaire #C0875 et la SCP BLANQUER GIRARD CROIZIER CHARPY avocat au barreau de NARBONNE avocat plaidant

DÉFENDEURS

S.A.R.L. VELAUX IMMOBILIER

Centre commercial Intermarché

Avenue O Pagnol

[…]

représentée par Maître Manuel RAISON de la SELARL RAISON-CARNEL, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #C2444 et la SCP MAGNAN avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE, avocat plaidant

Maître I J es qualité de mandataire judiciaire de la SARL VELAUX IMMOBILIER

[…]

[…]

[…]

S.A.S. LLYODS DE LONDRES

[…]

[…]

représentée par Maître Manuel RAISON de la SELARL RAISON-CARNEL, avocats au barreau de PARIS, avocats postulant, vestiaire #C2444 et la SCP MAGNAN avocat au barreau D’AIX EN PROVENCE, avocat plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

V W, Vice Président

K L, Juge

M N, Juge

assisté de T U, greffière

DÉBATS

A l’audience du 17 Avril 2015 tenue en audience publique devant M N, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 786 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition

Réputé contradictoire

en premier ressort

[…]

FAITS ET PROCEDURE

Madame E X née Y et son mari, O X, étaient propriétaires d’une maison à usage d'[…].

A la suite du décès de O X le 9 décembre 1998, Madame E X est devenue usufruitière de la maison, la nue-propriété étant partagée entre elle et ses enfants.

Madame X, a loué cette maison par l’intermédiaire de l’Agence VELAUX IMMOBILIER à Mademoiselle Z et Monsieur A, suivant bail en date du 14 Mai 1999.

Par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, envoyée le 29 novembre 2004 par la SARL VELAUX IMMOBILIER à chacun des locataires, il a été donné congé aux locataires pour le 31 Mai 2005, le bien devant être vendu.

Il a été proposé aux locataires de procéder à l’acquisition du bien loué moyennant la somme de 397.000,00 €, les négociations n’ayant pu aboutir, ils ont quitté les lieux le 14 juin 2005.

Une partie du bien a été vendu aux époux B suivant acte du 24 août 2007.

Les consorts Z-A considérant que le congé qui leur avait été délivré était nul au motif qu’il n’avait été délivré qu’au seul nom de l’usufruitière, Madame E X, ils ont saisi le Tribunal d’instance d’AIX EN PROVENCE par assignation en date du 19 novembre 2007.

Le Tribunal d’Instance d’AIX EN PROVENCE s’est déclaré incompétent et a renvoyé l’affaire devant le Tribunal d’Instance de SALON DE PROVENCE qui, suivant jugement en date du 6 juin 2008, a prononcé la nullité du congé et condamné les demandeurs au paiement d’une somme de 25.000 € à titre de dommages et intérêts, 1.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

La Cour d’appel d’AIX EN PROVENCE, par arrêt en date du 21 mai 2010 a confirmé la nullité du congé, et a réduit le montant des sommes mises à la charge des demandeurs et les a condamnés à verser à Madame Z et Monsieur A une somme de 4.000 € à titre de dommages et intérêts, et 2.000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Le pourvoi formé par les consorts Z-A devant la Cour de Cassation a été rejeté par arrêt du 9 novembre 2011.

Par acte en date du 16 juin 2013, Mme X D, Mme Y E épouse X, Mme X F, M. X G, M. X Q-R, Mme X H (ci-après les Consorts X) ont assigné devant le Tribunal de céans l’agence VELAUX IMMOBILIER et la S.A.S LLOYDS aux fins de se voir indemnisés du préjudice ainsi subi en raison de la nullité du congé.

Dans leurs dernières écritures en date du 24 octobre 2014, les Consorts X sollicitent du tribunal au visa des articles 1147 et 1992 du Code Civil, L.622-1 et suivants du Code de Commerce de:

— Déclarer l’action en condamnation et en paiement de dommages et intérêts engagée par les Consorts X à l’encontre de la société VELAUX IMMOBILIER recevable;

— Condamner la société VELAUX IMMOBILIER et son assureur, les SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S, à verser aux Consorts X la somme de 15.386,13 € au titre du préjudice subi par eux du fait du manquement de l’agence immobilière.

SUBSIDIAIREMENT, au visa de l’article L.124-3 du Code des Assurances:

— Déclarer l’action en établissement de responsabilité engagée par les Consorts X à l’encontre de la société VELAUX IMMOBILIER recevable;

— Déclarer l’action directe engagée par les Consorts X à l’encontre des SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S recevable.

— CONDAMNER les SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S à verser aux Consorts X la somme de 15.386,13 € au titre du préjudice subi par eux du fait du manquement de la société VELAUX IMMOBILIER engageant sa responsabilité civile professionnelle.

EN TOUT ETAT DE CAUSE, au visa des articles 1116 du Code Civil, 515, 700 et 689 du Code de Procédure Civile de:

— Débouter la société VELAUX IMMOBILIER et son assureur, les SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S, de leur demande reconventionnelle;

— Condamner la société VELAUX IMMOBILIER et les SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S au paiement de la somme de 3.500 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux entiers dépens;

— Ordonner l’exécution provisoire de la décision à intervenir;

Au soutien de leurs prétentions ils exposent que:

— La créance est née au jour de leur condamnation définitive au versement de dommages et intérêts au profit de leurs locataires par la Cour de cassation, selon arrêt du 9 novembre 2011, soit postérieurement au plan de redressement. En conséquence, ils sont bien en droit de réclamer leur créance née postérieurement au plan de redressement;

— ils ont eu à subir cette procédure engagée par leurs locataires, et à faire face au paiement de dommages et intérêts, et de frais de procédure importants en raison de la faute de la Société VELAUX IMMOBILIER, qui n’a pas vérifié la qualité exacte du mandant, et la capacité de ce dernier à s’engager, notamment en cas d’indivision. Que dès lors, celle-ci a engagé sa responsabilité;

— Il appartenait à l’agence VELAUX IMMOBILIER de rédiger un congé valable, non susceptible d’être annulé;

— si le congé n’avait pas été annulé, les concluants n’auraient pas eu à faire face au paiement de dommages et intérêts, ni article 700, ni dépens et frais de procédure;

— il en va de même pour les frais qu’ils ont été amenés à exposer pour assurer leur défense dans le cadre des procédures qu’ils ont subi;

— ils ont du verser à leurs anciens locataires et supporter dans le cadre de la défense de leurs intérêts, la somme totale de 15.386,13 € (7.273,26 € + 1.284,26 € + 5.143,88 € + 1.684,83 €);

— l’action en établissement du principe de la responsabilité échappe à la règle de la suspension des poursuites. La Cour de Cassation a clairement fait la distinction entre la reconnaissance du principe d’une créance de dommages et intérêts et la mise en œuvre du droit reconnu à la victime. Il a été retenu que l’action tendant à faire établir la responsabilité et à déterminer le montant du préjudice sans condamnation échappe à l’arrêt des poursuites individuelles;

— en vertu de l’article L.124-3 du Code des Assurances, « le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable ». La naissance du droit à réparation de la victime déclenche la naissance de son droit à indemnité d’assurance;

— les Consorts X ont bien la qualité de tiers lésés, c’est à dire victimes personnelles du dommages, et peuvent bénéficier d’une action directe contre l’assureur;

— la Cour de Cassation admet en effet que la victime d’un dommage a un droit exclusif sur l’indemnité due par l’assureur de l’auteur responsable du dommage et n’est pas tenue, dès lors, de se soumettre à la procédure de vérification de sa créance pour faire reconnaître dans son principe et dans son étendue la responsabilité de l’assuré en redressement judiciaire et demander paiement à l’assureur par voie d’action directe. En conséquence, l’action directe des Consorts X contre les SOUSCRIPTEURS DU LLYOD’S, assureur de la société VELAUX IMMOBILIER, doit être déclarée recevable;

— l’assureur devra être condamné à indemniser les concluants à hauteur de leur préjudice causé par le manquement de la société VELAUX IMMOBILIER, à savoir à la somme de 15.386,13 €;

— la réticence dolosive ne peut nullement être retenue, pas plus que la négligence, la société VELAUX IMMOBILIER se servant de l’ignorance de Madame X pour échapper à ses obligations professionnelles,

La S.A.S LLOYD’S FRANCE et l’agence VELAUX IMMOBILIER sollicitent du tribunal dans leurs dernières écritures en date du au visa des articles L 622-7-I, L 622-21, L 622-24, L 622-26 et R 622-24 du Code de commerce ; 1116, 1134, 1147, 1382 et 1989 et suivants du Code civil ; 699 et 700 du CPC de:

[…] :

— Dire l’action des consorts X irrecevable ;

— Rejeter l’ensemble des demandes formulées contre la société VELAUX IMMOBILIER et les Souscripteurs du LLOYD’S ;

— Minorer les condamnations pouvant être mises à la charge des Souscripteurs du LLOYD’S de la franchises restant due par l’assuré, soit 10 % des condamnations dans les limites de 1.000 € minimum et 4.500 € maximum ;

A TITRE RECONVENTIONNEL :

— Condamner Madame E X à relever et garantir la société VELAUX IMMOBILIER et les Souscripteurs du LLOYD’S de toutes condamnations qui pourraient être formulées à leur encontre;

EN TOUTE HYPOTHESE :

— Condamner solidairement les consorts X à verser à la société VELAUX IMMOBILIER et aux Souscripteurs du LLOYD’S la somme de 3.000 € chacun au titre de l’article 700 du CPC, ainsi qu’aux entiers dépens, conformément à l’article 699 du CPC, dont distraction au profit de la SELARL RAISON CARNEL.

Au soutien de leurs prétentions, elles exposent que:

— la société VELAUX IMMOBILIER a fait l’objet d’une procédure de redressement judiciaire par jugement du Tribunal de Commerce de SALON DE PROVENCE du 6 juillet 2009. En conséquence, l’action en responsabilité engagée le 14 juin 2013 par les consorts X à l’encontre de la société VELAUX IMMOBILIER se heurte au principe de l’arrêt des poursuites individuelles, et leur action doit être déclarée irrecevable à son encontre ;

— les demandes formulées par les consorts X trouvent leur origine dans un manquement prétendu de la société VELAUX IMMOBILIER dans la délivrance du congé pour vente aux locataires le 29 novembre 2004. S’agissant d’une créance antérieure au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire dont a fait l’objet la société VELAUX IMMOBILIER le 6 juillet 2009, leurs demandes se heurtent au principe de l’interdiction de payer les créances antérieures, et sont en tout état de cause, forcloses et inopposables à la société VELAUX IMMOBILIER et à la procédure collective dont elle a fait l’objet;

— ni Madame E X, ni ses enfants n’ont informé l’agence immobilière que le bien était en indivision, de sorte que le congé pour vente devait être rédigé en conséquence ;

— l’agence immobilière pouvait donc légitimement ignorer cette situation d’indivision, laquelle doit être qualifiée de «vice caché», exonératoire de responsabilité et en déduire l’absence de faute de l’agence immobilière ;

— les consorts X sont à l’origine du préjudice qu’ils allèguent avoir subi ;

— il n’existe aucun lien de causalité entre la mission de l’agence immobilière et le préjudice allégué ;

— il n’existe aucun préjudice indemnisable opposable à l’agence immobilière dont la responsabilité ne peut être engagée en l’espèce ;

— les consorts X n’ont pas qualité de victime du dommage mais de responsable, voire co-responsable, leur action directe engagée contre les Souscripteurs du LLOYD’S doit donc être déclarée irrecevable;

— Les consorts X ont été condamnés pour ne pas avoir respecté le droit de préemption des locataires, et non en raison du caractère nul du congé;

— le préjudice allégué est excessif, il convient de le minorer, il ne peut par ailleurs correspondre qu’à une simple perte de chance;

— la franchise doit en tout état de cause s’appliquer en déduction des sommes demandées;

Pour plus ample exposé des moyens et prétentions des parties il convient de se référer à leurs dernières écritures régulièrement signifiées, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 janvier 2015.

MOTIFS

1. Sur la recevabilité de l’action à l’encontre de l’agence VELAUX IMMOBILIER

Vu les articles L 622-7 L., L 622-17, 622-21 L.622-24, L.622-25, L.624-1 à L.624-4, R.622-21 à R.622-26 et R.624-1 à R.624-11 du Code de commerce.

Dans le cadre de l’ouverture d’une procédure collective, l’obligation de déclarer sa créance est générale, même si cette dernière fait l’objet d’un litige non encore tranché, qu’elle soit conditionnelle, éventuelle, certaine ou contestée, liquide ou non, exigible ou à terme.

Le jugement d’ouverture de la procédure judiciaire interrompt et interdit toute action en justice tendant, soit à la condamnation du débiteur au paiement d’une somme d’argent, soit à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement d’une somme d’argent.

En l’espèce, il n’est pas contesté que par jugement en date du 6 juillet 2009, le Tribunal de commerce de SALON DE PROVENCE a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de l’agence VELAUX IMMOBILIER.

Par lettre recommandée avec avis de réception, en date du 29 novembre 2004, l’agence VELAUX IMMOBILIER a donné congé aux locataires.

Par jugement en date du 6 juin 2008, le Tribunal d’instance de SALON DE PROVENCE a prononcé la nullité du congé délivré aux consorts Z-A ce dernier ayant été délivré au seul nom de Mme P X, et a condamné les consorts X au paiement d’une somme de 25.000 euros à titre de dommages et intérêts et 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Dès lors, il ressort de ce qui précède, qu’à la date du jugement du Tribunal d’instance de Salon de Provence soit le 6 juin 2008, la créance des Consorts X à l’égard de l’agence VELAUX IMMOBILIER était née. En conséquence la créance des consorts X est bien antérieure au jugement d’ouverture de la procédure de redressement judiciaire, en date du 6 juillet 2009. Le moyen selon lequel ce jugement ayant fait l’objet d’un appel et d’une Cassation, la créance n’est donc née qu’à la date de l’arrêt de la Cour de Cassation, devant être rejeté, l’antériorité s’appréciant au regard du fait générateur de la créance et non de son exigibilité.

En conséquence, bien que l’agence VELAUX IMMOBILIER soit de nouveau in bonis suite à l’adoption d’un plan de continuation, tant que ledit plan est en cours jusqu’à l’apurement du passif, l’action des consorts X est irrecevable à l’encontre de cette dernière, faute d’avoir déclaré leur créance née antérieurement à la procédure de redressement judiciaire, conformément aux dispositions de l’article L. 622-7 du code de commerce.

2. Sur l’action directe à l’encontre de la S.A.S LLOYD’S en sa qualité d’assureur de l’agence VELAUX IMMOBILIER

A titre liminaire, il convient de constater que l’action directe des X est recevable à l’encontre de l’assureur de l’agence VELAUX IMMOBILIER , car conformément aux dispositions de l’article L. 124-3 du code des assurances: “Le tiers lésé dispose d’un droit d’action directe à l’encontre de l’assureur garantissant la responsabilité civile de la personne responsable.

L’assureur ne peut payer à un autre que le tiers lésé tout ou partie de la somme due par lui, tant que ce tiers n’a pas été désintéressé, jusqu’à concurrence de ladite somme, des conséquences pécuniaires du fait dommageable ayant entraîné la responsabilité de l’assuré”.

Ainsi, l’action des consorts X à faire établir la responsabilité de l’agence VELAUX IMMOBILIER et à déterminer le montant de leur préjudice sans que cette dernière ne soit condamnée, échappe à l’arrêt des poursuites individuelles.

Il convient également de préciser, que si les créances non déclarées au cours de la procédure de redressement judiciaire ne peuvent plus faire l’objet de poursuites individuelles car elles deviennent inopposables à la procédure collective, ces créances ne sont toutefois pas éteintes et peuvent être recouvrées entre les mains d’un tiers, comme par exemple en l’espèce l’assureur.

2.1. Sur la faute de l’agent immobilier

Aux termes de l’article 1992 du code civil: “Le mandataire répond non seulement du dol, mais encore des fautes qu’il commet dans sa gestion”.

Ainsi l’agent immobilier en sa qualité de négociateur et de rédacteur d’un acte, est tenu de s’assurer que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l’efficacité juridique de la convention. Il est ainsi tenu de vérifier la qualité exacte du mandant qu’il engage par un acte juridique.

En l’espèce, il ne ressort d’aucune des pièces produites au dossier que l’agence ait vérifié la qualité exacte de Mme X , ni ne lui ait demandé si elle était propriétaire tant de l’usufruit que de la nue propriété du bien mis en vente. Faute de lui avoir posé cette question, il ne peut être reproché à Mme X d’avoir sans plus de précision renseigné être propriétaire de l’immeuble en question. En effet, contrairement à ce que soutiennent les défendeurs, il n’incombait pas à Mme E X de renseigner spontanément l’agence immobilière de l’existence d’une indivision, mais il appartenait en revanche à cette dernière, en sa qualité de professionnel de vérifier la qualité exacte du mandant, et de lui demander si l’immeuble était ou non en indivision, afin que se trouvent réunies toutes les conditions nécessaires à l’efficacité juridique du congé.

En s’abstenant de procéder à cette vérification dont la charge lui incombait, l’agence VELAUX IMMOBILIER a commis une faute dans son mandat de gestion.

Contrairement à ce que soutient l’agence immobilière, c’est bien en raison de cette faute et non d’un non respect du droit de préemption, que les locataires de Mme X , les consorts Z-A l’ont assignée en justice en nullité du congé, et ont obtenu gain de cause.

En effet, par jugement en date du 6 juin 2008, le Tribunal d’instance de SALON DE PROVENCE, confirmé par la Cour d’appel d’Aix en Provence par arrêt du 21 mai 2010, a prononcé la nullité du congé délivré aux consorts Z-A, au motif que seul le nom de l’usufruitière Mme P X était mentionné et non celui également des nus propriétaires: “Mme. C et M. A ont été dans l’obligation de quitter les lieux où ils avaient vécu pendant 6 ans, à la suite d’un congé pour vendre qui était nul; qu’ils ont dû engager des frais pour déménager, et se reloger; qu’ainsi il convient de les indemniser des conséquence de ce congé irrégulier et qu’il y a lieu de leur allouer en réparation la somme de 4.000 euros à titre de dommages et intérêts au paiement desquels sera seule condamnée Mme X qui a délivré le congé”.

Dès lors, il ressort de ce qui précède que l’agence VELAUX IMMOBILIER en ne vérifiant pas la qualité de son mandant avant de donner congé aux locataires, a fait délivrer un congé nul. En raison de cette faute, Mme X a du s’acquitter des sommes suivantes, dont elle justifie:

— En appel: 4.000 euros de dommages et intérêts; 2.000 euros d’article 700 du code de procédure civile, 1273,26 euros au titre des frais d’avoué de la partie adverse, concernant l’appel; 1.284,26 + 657,80 euros pour leur propre avoué;

— Frais d’Avocat: 5.143,88 euros au total;

— Frais d’Avocat devant la Cour de Cassation: 3.946,80 euros desquels il faut déduire la somme de 2.261,97 euros versée par les locataires au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Il apparaît donc que la faute de l’agence X a causé un préjudice aux consorts X, s’élevant au montant des sommes mises à leur charge au cours des différentes procédures judiciaires susvisées, et qui ne peut s’apparenter en la perte d’une chance, car si le congé avait été donné en bonne et due forme, ce dernier aurait été déclaré valable et aucune condamnation, n’aurait été mise à la charge des consorts X .

En conséquence, le comportement fautif de l’agence VELAUX IMMOBILIER qui a fait délivrer un congé nul, est à l’origine du préjudice subi par les consorts X , d’un montant de 15.386,13 euros.

En conséquence, il convient de condamner la S.A.S SOUSCRIPTEURS DU LLOYD’S , à payer aux consorts X la somme de 15.386,13 euros en sa qualité d’assureur de l’agence VELAUX IMMOBILIER, aucune franchise ne pouvant être déduite, faute pour cette dernière de produire les conditions particulières du contrat d’assurance, et de débouter l’agence VELAUX IMMOBILIER et la S.A.S SOUSCRIPTEURS du LLOYD’S de leur demande reconventionnelle à l’encontre de Mme X, cette dernière n’ayant commis aucune faute ou réticence dolosive.

Sur les demandes accessoires:

Il convient d’ordonner l’exécution provisoire conformément aux dispositions de l’article 515 du code de procédure civile.

La S.A.S SOUSCRIPTEURS LLOYD’S succombant supporteront les dépens, et il parait équitable d’allouer aux consorts X la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS:

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort ;

— Dit irrecevable l’action des consorts X à l’encontre de l’agence VELAUX IMMOBILIER ;

— Dit recevable l’action à l’encontre de la S.A.S SOUSCRIPTEURS LLOYD’S;

— Condamne la S.A.S SOUSCRIPTEURS LLOYD’S à payer à Mme X D, Mme Y E épouse X, Mme X F, M. X G, M. X Q-R, Mme X H (les Consorts X) la somme de 15.386,13 euros à titre de dommages et intérêts;

— Déboute les parties de l’ensemble de leurs demandes plus amples ou contraires;

— Condamne la S.A.S SOUSCRIPTEURS LLOYD’S à payer à Mme X D, Mme Y E épouse X, Mme X F, M. X G, M. X Q-R, Mme X H (les Consorts X) la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile;

— Condamne la S.A.S SOUSCRIPTEURS LLOYD’S aux dépens et dit qu’ils seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile;

— Ordonne l’exécution provisoire de la présente décision;

Fait et jugé à Paris le 04 Juin 2015

Le Greffier Le Président

T U V W

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1:

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exécutoires

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