Cour d'appel de Besançon, Chambre sociale, 10 novembre 2017, n° 16/02338

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N° 17/

CD/GB

COUR D’APPEL DE BESANCON

— […]

ARRET DU 10 NOVEMBRE 2017

CHAMBRE SOCIALE

Contradictoire

Audience publique

du 22 Septembre 2017

N° de rôle : 16/02338

S/appel d’une décision

du TRIBUNAL DES AFFAIRES DE SECURITE SOCIALE DE LONS LE SAUNIER

en date du 18 octobre 2016

code affaire :

88A

Demande d’annulation d’une décision d’un organisme

Madame F X, demeurant […]

APPELANTE

représentée par Me Marie-laure LE GOFF, avocat au barreau du JURA

CAISSE D’ALLOCATIONS FAMILIALES DU JURA 62, route de Lyon – 39207 SAINT-CLAUDE CEDEX

INTIMEE

représentée par Madame G H, munie d’un pouvoir délivré par M. Q R-S, Directeur de la Caisse

COMPOSITION DE LA COUR :

lors des débats 22 Septembre 2017 :

CONSEILLER RAPPORTEUR : Mme Christine K-DORSCH, Présidente de la Chambre Sociale, conformément aux dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, en l’absence d’opposition des parties

GREFFIER : Mme L M et ZELLAGUI Anaïs, Greffier stagiaire lors du délibéré :

Mme Christine K-DORSCH, Présidente de la Chambre Sociale, a rendu compte conformément à l’article 945-1 du code de procédure civile à M. Jérôme COTTERET, Conseiller et Monsieur Patrice BOURQUIN, Conseiller.

Les parties ont été avisées de ce que l’arrêt sera rendu le 03 Novembre 2017 par mise à disposition au greffe, prorogé au 10 novembre 2017.

**************

FAITS ET PROCÉDURE

Madame F X mère de deux enfants reconnus par elle seule a, dans une attestation de situation du 17 juillet 2008, déclaré vivre maritalement depuis le 26 mai 2008 avec Monsieur I Y. Elle a le 6 avril 2009 informé la CAF de la séparation du couple le 30 janvier 2009.

La CAF a par conséquent ouvert un droit à l’allocation de soutien familial (ASF), et à l’allocation logement familiale (ALF). Le 15 juillet 2009 Madame X a adressé à la CAF une déclaration de grossesse. L’enfant est né le […], et a été reconnu par son père Monsieur I Y.

Les services de police ont le 3 décembre 2013 informé la CAF dans le cadre d’une procédure pour trafic de stupéfiants à l’encontre de Monsieur Y que la surveillance effectuée a établi que la vie commune n’a jamais cessé entre Madame X et Monsieur Y.

La commission administrative des fraudes de la CAF du Jura à le 22 avril 2014 retenu la notion de fraude pour fausses déclarations relatives à la situation familiale, et a décidé d’engager des poursuites à l’encontre des intéressés.

Le 3 février 2015 la CAF a notifié à Madame X une demande de répétition d’un indu évalué à 36.449,36 i pour la période du 1er février 2010 au 31 décembre 2014, soit 25'497,75 i au titre de l’ALF, et 10'951,61 i au titre de l=ASF.

La commission de recours amiable de la CAF, saisie par l=assurée qui réfutait la vie maritale, a par décision du 23 avril 2015, notifiée le 4 mai 2015 rejeté la demande de nouvel examen de son dossier.

Le 3 février 2015 Madame F X a saisi le Tribunal de la Sécurité Sociale de Lons-le-Saunier afin d’obtenir l’annulation de la décision de la commission de recours amiable, et la décharge corrélative de l’indu qui lui est imputé.

La CAF du Jura concluait au débouté de ses demandes, à la confirmation de la décision de la commission de recours amiable, dont elle sollicitait la confirmation à hauteur de 32.901,44i.

Par jugement du 18 octobre 2016 le tribunal des affaires de sécurité sociale du Jura a débouté Madame F X de sa contestation, a confirmé en toutes ses dispositions la décision de la commission de recours amiable, et a condamné l=assurée à payer à la CAF du Jura 32.901,44 i au titre de l’indu de l’ALF, et de l=ASF.

Par courrier recommandé expédié le 22 novembre 2016 Madame F X a interjeté appel de cette décision.

Selon conclusions visées le 27 mars 2017, Madame F X demande à la cour :

— d=infirmer le jugement déféré,

— de dire qu=il n=y a pas de vie commune entre Madame X et Monsieur Y entre le 30 janvier 2009 et le 31 mars 2013,

— débouter la CAF de sa demande de remboursement pour cette période,

— dire qu=elle devra justifier des versements pour la période d=avril 2013 à décembre 2014 période pendant laquelle Madame X reconnaît la vie commune,

— subsidiairement si la vie maritale entre le 1er février 2010 et mars 2013 était démontrée, dire que la CAF devra justifier de son calcul notamment des versements effectués à Madame X,

— condamner la CAF à verser à Madame X 1.500 i au titre de l=article 700 du CPC.

Selon conclusions visées le 26 juin 2017 la CAF du Jura demande à la cour de confirmer le jugement, de débouter Madame X de l=ensemble de ces chefs de demande, et de la condamner au remboursement de la somme de 31'781,50 euros restant dû à ce jour au titre des indus allocations logement familiale et allocation de soutien familial.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu'=il est pour plus ample exposé des faits, moyens, et prétentions des parties, en application de l’ article 455 du code de procédure civile, renvoyé aux conclusions visées ci-dessus et développées lors de l’audience de plaidoirie du 22 septembre 2017;

1- Sur l’administration de la preuve

Attendu que les parties sont opposées quant à la charge de la preuve qui selon l’appelante pèse sur la CAF, et selon cette dernière pèse sur l’assurée ;

Attendu que les allocations perçues par Madame X reposent sur un système déclaratif, de sorte qu’en cas de contestation par la CAF des droits avant leur ouverture il appartenait à l’assurée d’établir qu’elle se trouvait dans les conditions nécessaires au versement des allocations ;

Attendu en revanche qu’une fois les allocations versées, et lorsque la CAF estime avoir indûment payé celle-ci, il s’agit d’une procédure en répétition de l’indu, dans le cadre de laquelle il incombe au demandeur en restitution des sommes de prouver le caractère indu du payement ;

Attendu par conséquent que la charge de la preuve pèse en l’espèce sur la CAF, à laquelle il appartient de prouver que Madame X contrairement à ses déclarations vivait lors de la période litigieuse en concubinage avec Monsieur Y ;

2- Sur la vie commune

Attendu qu'=à l’appui de sa condamnation au remboursement de l’indu le tribunal retient la naissance d’un enfant issu du couple, reconnu par les deux parents, et dont la conception a eu lieu postérieurement à la rupture déclarée, le rapport d’enquête pénale établissant que Monsieur Y vivait au domicile de Madame X, la présence d’un enfant de Monsieur Y au domicile de Madame X, le maintien des contacts entre les deux intéressés et notamment l’usage continu du véhicule automobile de sa compagne, et l’absence de toute action alimentaire intentée contre le père ;

Que le tribunal relève par ailleurs que l’absence de cohabitation de Monsieur Y durant une période de formation n’est pas un obstacle au concubinage, et que les attestations produites par l=assurée émanent de proches et sont quelquefois discordantes est fluctuantes quant à la date de séparation ;

Attendu qu'=à l’appui de son recours Madame X fait valoir que sa grossesse n’est pas une preuve de la vie commune, que Monsieur Y vivait chez sa mère en janvier 2009, qu’elle assumait seule la charge des deux enfants et de l’ensemble des factures, que lors du stage de formation à Mulhouse Monsieur Y vivait sur place et fréquentait une autre femme, qu’elle-même occupait un emploi d’aide-soignante de nuit et a trouvé un arrangement avec l’ex compagne de Monsieur Y pour la garde des enfants, qu’elle produit de nombreuses attestations y compris du bailleur, démontrant l’absence notoire de vie commune et qu’enfin le courrier de l’enquêteur de police n’a aucune force probante dès lors qu'=il n’est pas confirmé par la procédure pénale qu=elle verse aux débats et qui ne mentionne pas les dates de filature ou les témoignages des voisins ;

Attendu que la CAF réplique que le courrier du commandant O P du 3 décembre 2013 constitue un élément bien plus probant que les attestations des amis du couple, que cette lettre indique clairement qu’il résulte des surveillances effectuées que le couple bien que séparés depuis janvier 2009 vit en concubinage, que les attestations des proches confirmant que Madame X était seule à son domicile ne sont que la confirmation de l’absence de I Y en formation à Mulhouse pendant cette période, qu’en revanche ce dernier était présent le week-end et utilisait le véhicule de sa compagne, que les factures de l’opérateur Free au nom de Mademoiselle B ne sont pas probantes notamment en ce qu’elles mentionnent l’adresse de la mère Monsieur Y, qu’aucune démarche administrative n=a été faite tant pour la rupture, que pour la reprise de la vie commune, que l’oubli allégué de la déclaration de reprise de la vie maritale est peu probant dès lors qu’un travailleur social avait rappelé les conditions de versement de l’allocation ;

***

Attendu que l’article 515-8 du Code civil disposent que le concubinage est une union de fait caractérisée par une vie commune présentant un caractère de stabilité et de continuité, entre deux personnes qui vivent en couple ;

Attendu que les deux parties conviennent que Madame X et Monsieur Y vivaient en concubinage au moins jusqu’au 30 janvier 2009, puis à nouveau à partir de mars 2013 ;

Attendu que pour établir le maintien du lien de concubinage durant cette période intermédiaire la CAF produit un courrier du commandant de police Monsieur N O P en date du 3 décembre 2013 ;

Qu’il résulte de ce courrier que les services de police ont été informés que Monsieur I Y procédait à la culture de cannabis dans le jardin et le sous-sol de la maison de sa compagne Madame F J, que Monsieur C a été interpellé alors qu’il tentait de quitter les lieux avec le véhicule de sa compagne, que le couple a eu trois enfants dont seul le dernier a été officiellement reconnu par le père, que D, un enfant propre à Monsieur Y vit également à cette adresse, que de nombreux voisins confirment que Madame X et Monsieur Y ont toujours été vu ensemble depuis qu’il loue cette maison, qu’à ce jour le couple cohabite toujours, que lors des surveillances il a été remarqué que Monsieur Y utilisait régulièrement le véhicule de Madame X notamment pour se rendre à la pêche;

Attendu que ce courrier provenant d’un officier de police assermenté constitue nécessairement une preuve quant aux éléments qui y sont relatés ;

Que contrairement aux affirmations de l’appelante la procédure pénale qu’elle verse aux débats n’infirme pas les éléments retranscrits dans ce courrier ;

Que d’ailleurs lors de leurs auditions Madame X affirme que le couple s’est « remis ensemble » depuis février 2013, et que Monsieur C explique qu’il s’est remis en ménage depuis décembre 2012-janvier 2013 de sorte que cet aveu réduit dores et déjà le délai de reprise de la vie commune fixée dans les conclusions à mars 2013 ;

Attendu que les attestations de membres de la famille, ou d’amis du couple ne sont pas davantage de nature à combattre le courrier précité ;

Qu’il convient de relever qu’aucune de ces attestations n’est conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure, puisque aucune d’entre elles ne comporte de copie de la pièce d’identité de son rédacteur, ni ne mentionne que celui-ci est informé de la production en justice de son témoignage, ce qui en amoindrit considérablement la force probante ;

Que sur le fond l’absence rapportée de Monsieur Y durant la semaine, est à mettre en parallèle avec les deux attestations du centre de réadaptation de Mulhouse établissant que l’intéressé y a effectué un stage de formation du 12 octobre 2009 au 25 février 2011 ;

Que le concubinage n’implique pas une cohabitation quotidienne et que la participation à une formation avec hébergement dans un autre département n’est pas de nature à mettre fin au dit concubinage ;

Attendu qu’outre ce courrier, la CAF établit la stabilité et la continuité du couple de par l’organisation familiale mise en place ;

Qu’en effet à ce domicile vivent les deux premiers enfants du couple, mais également l’enfant D, qui est un enfant propre de Monsieur Y que celui-ci a reconnu et pour lequel un arrangement quant à la garde a été mis en place avec la mère de l’enfant, l’ensemble des enfants fréquentant la même école de Lons-le-Saunier ;

Que par ailleurs il résulte du dossier que Madame X est tombée enceinte début avril 2009 pour donner naissance à Gaël le […], enfant reconnu par Monsieur Y ;

Que la liaison que ce dernier a pu entretenir avec une autre jeune femme n’est pas de nature à anéantir le lien de concubinage ;

Attendu que ces éléments sont confirmés par l’absence de toute démarche administrative quand à un déménagement de Monsieur C, qui ne justifie d’ailleurs pas de la conclusion d’un bail, ni davantage de démarches lors de la reprise de la vie commune ;

Qu’il résulte également de la procédure que Madame X n’a pas souhaité mettre en 'uvre une procédure de participation aux frais d’entretien des enfants et qu’elle ne s’explique nullement sur cette attitude ;

Attendu enfin que les factures de mars à décembre 2012 de l’opérateur Free sont établies au nom de Monsieur Y, avec l’adresse de sa mère, et la précision que l’abonnée est K B habitant à E (39), avec laquelle il reconnaît par ailleurs avoir eu une liaison ;

Que ces factures ne sont pas de nature à contredire l’existence d’un lien de concubinage avec Madame X ;

Attendu qu’il résulte de l’ensemble de ce qui précède que la CAF établit que le concubinage entre Madame X, et Monsieur Y s’est poursuivi durant la période litigieuse de sorte qu’elle satisfait à l’obligation de preuve mise à sa charge dans le cadre de son action en répétition de l’indu ;

3 – Sur le montant de l’indu

Attendu que le jugement a fait droit à la demande de la CAF en condamnant l’assurée à lui payer la somme de 32 901,44 € au titre de l’indu d’ASF et d’ALF ;

Attendu que l’appelante à titre subsidiaire demande que la CAF justifie de son calcul des versements effectués en relevant l’existence d’un décompte de 22 373,04 € et non de 32 901,44 € tel qu’alloué par les premiers juges ;

Attendu que le décompte à hauteur de 22 373,05 € résulte d’une première estimation effectuée le 7 mai 2014 en vue de la saisine de la commission administrative des fraudes, mais qu’il ne s’agit que d’une estimation ;

Que la notification du 3 février 2015 porte sur la somme de 36 449,36 € au titre du trop-perçu, que le montant inférieur de 32 901,44 € retenu par le tribunal tient compte des versements effectués ;

Que dans ses conclusions enregistrées le 26 juin 2007 la CAF réduit le montant à 31 781,50 € au titre des indus d’allocation logement familiale, et d’allocation de soutien familiale en précisant que le recouvrement est suspendu dans le cadre de la procédure d’appel ;

Attendu qu’hormis cette contestation sur les apparentes différences entre les montants, l’appelante n’expose pas d’autre contestation ;

Attendu dans ces conditions qu’il n’y a pas lieu à ordonner la réouverture des débats pour produire de nouveaux justificatifs ;

Attendu par conséquent qu’il y a lieu de confirmer le jugement, sauf en ce qu’il condamne à payer la somme de 32 901,44 €, qui est ramenée au montant précité ;

4 – Sur les dépens

Attendu qu’il est rappelé que la procédure devant les juridictions de sécurité sociale est gratuite et sans frais ;

Que la que l’appelante succombe, et que l’équité ne commande pas de faire application à son profit des dispositions de l’article 700 du CODE DE PROCEDURE CIVILE ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, Chambre sociale, statuant par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe, après débats en audience publique et après en avoir délibéré

CONFIRME le jugement entrepris, sauf en ce qu’il condamne Madame F X à payer à la CAF du Jura la somme de 32 901,44 € à titre d’indu d’ASF et d’ALF ;

CONDAMNE Madame F X à payer à la CAF du Jura la somme de 31.781,50 € à titre d’indu d’ASF et d’ALF ;

DEBOUTE Madame F X de toutes ses autres demandes ;

RAPPELLE que la procédure et sans frais.

LEDIT ARRÊT a été rendu par mise à disposition au greffe le dix novembre deux mille dix sept et signé par Mme Christine K-DORSCH, Présidente de la Chambre Sociale, et Mme L M,

Greffier.

LE GREFFIER, LE PRESIDENT DE CHAMBRE,

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