Cour d'appel de Bordeaux, 14 février 2013, n° 11/03044

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Bordeaux, 14 févr. 2013, n° 11/03044
Juridiction : Cour d'appel de Bordeaux
Numéro(s) : 11/03044
Décision précédente : Tribunal de grande instance, 26 janvier 2011, N° 09/749

Sur les parties

Texte intégral

COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIERE CHAMBRE CIVILE – SECTION B


ARRÊT DU 14 FEVRIER 2013

(Rédacteur : Monsieur Christian Lauqué, conseiller,)

N° de rôle : 11/03044

Monsieur A B

c/

LA S.A.S.U. CREDIT AGRICOLE AGENCE IMMOBILIERE

Nature de la décision : AU FOND

Grosse délivrée le :

aux avocats

Décision déférée à la cour : jugement rendu le 27 janvier 2011 (R.G. 09/749) par le Tribunal de Grande Instance de X suivant déclaration d’appel du 11 mai 2011,

APPELANT :

Monsieur A B, né le XXX à X (33), de nationalité française, demandeur d’emploi, demeurant 5, impasse Vandet 33500 X,

Représenté par Maître Bertrand LUX, membre de la S.C.P. KPDB, Avocats Associés au barreau de BORDEAUX,

INTIMÉE :

LA S.A.S.U. CREDIT AGRICOLE AQUITAINE AGENCE IMMOBILIERE (exploitant sous l’enseigne 'SQUARE HABITAT’ venant aux droits de l’E.U.R.L. DSI exploitant sous l’enseigne 'AVIS IMMOBILIER'), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social,

sis 41, rue Montesquieu 33500 X,

Représentée par Maître Luc BERARD, Avocat au barreau de X,

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 8 octobre 2012 en audience publique, devant la cour composée de :

Monsieur Louis-Marie CHEMINADE, Président,

Monsieur Patrick BOINOT, Conseiller,

Monsieur Christian LAUQUÉ, Conseiller,

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marceline LOISON

ARRÊT :

— contradictoire

— prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

FAITS, MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES

Monsieur A B a consenti le 29 avril 2008 à l’agence « AVIS IMMOBILIER »sise XXX à X, un mandat à durée déterminée non exclusif n° 2627 pour la vente de son immeuble dans la même localité, au prix convenu de 245 100 €, moyennant une rémunération de 15 100 € pour le mandataire.

Le 17 octobre 2008, l’agence « AVIS IMMOBILIER » faisait visiter le bien au prix d’annonce de 224.100 € à Madame Y Z qui intéressée, confiait à l’agence mission d’obtenir un devis pour les travaux d’électricté restant à entreprendre. Le vendeur était avisé de ce compte-rendu de visite et du prix de vente proposé par courrier de son mandataire le 20 octobre 2008.

Le 19 novembre 2008 l’agence immobilière « SQUARE HABITAT EURL » occupant à la place de l’ex-enseigne « AVIS IMMOBILIER » faisait souscrire à Monsieur C D et Madame Y Z un mandat de négociation exclusif n° 2809 pour la présentation d’une offre d’achat de ce même bien au prix de 180.000 € (frais d’agence inclus) moyennant une rémunération du mandataire selon un barême d’honoraires dégressifs. Cette offre d’achat, valable 15 jours, était déclinée par M. A B.

Le 07 février 2009, A B expédiait à l’agence « AVIS IMMOBILIER » un courrier recommandé par lequel il dénonçait le mandat confié.

L’agence SQUARE HABITAT apprenait quelque temps après que les parties avaient régularisé au mois de février 2009, un compromis de vente pour le bien en question par l’intermédiaire d’une agence concurrente (CIMM IMMOBILIER) et pour un prix sensiblement identique.

L’agence évincée adressait aux notaires respectifs des parties une lettre recommandée rappelant les termes des deux mandats qui lui avaient été confiées par chacune des parties et sollicitait le paiement de ses honoraires.

La vente était néanmoins passée en la forme authentique le 2 juin 2009 moyennant le prix de 182.000 € dont 6.000 € délivrés à titre de commission à l’agence CIMM IMMOBILIER qui en vertu d’un mandat de vente non exclusif obtenu le 3 novembre 2008, avait négocié et conclu l’affaire.

L’agence SQUARE HABITAT sur la base des mandats qui lui furent consentis, assignait en paiement de ses commissions le vendeur et l’acquéreur.

Le tribunal de grande instance de X par jugement du 27 janvier 2011 déboutait le demandeur de ses prétentions à l’encontre de l’acquéreur mais condamnait M. A B au paiement d’une somme de 15.100 € portant intérêts au taux légal à compter du 5 mai 2009, outre celle de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

****

Monsieur A B interjetait appel de ce jugement signifié le 26 avril 2011 par déclaration enregistrée au greffe de la cour, le 11 mai 2011.

Par conclusions récapitulatives régulièrement déposées et signifiées le 12/12/2011 l’appelant conclut en la réformation du jugement et au rejet de l’intégralité des prétentions formulées à son encontre par la Société SASU DSI exploitant sous l’enseigne « SQUARE HABITAT » anciennement dénommée « AVIS IMMOBILIER » et sollicite sa condamnation au paiement d’une somme de 3.000 € pour réparation du préjudice moral outre une somme de 4.238 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et sa condamnation aux entiers dépens de l’instance.

Il objecte que la société SQUARE HABITAT en se faisant consentir du vendeur et de l’acquéreur pour la même opération immobilière, deux mandats incompatibles dans leurs effets, aurait méconnu les dispositions de la loi 70-9 du 02 janvier 1970 et du décret du 20 juillet 1972 pris pour son application. Il en déduit que le conflit d’intérêt engendré par la coexistence de ces mandats doit inéluctablement déboucher sur la nullité du mandat de vente non exclusif souscrit par le vendeur.

L’appelant soutient enfin que, signataire d’un simple mandat de vente temporaire et non exclusif, il a naturellement confié son bien à d’autres agences dont « CIMM IMMOBILIER » par l’entremise de laquelle l’opération devait effectivement être conclue à des conditions d’ailleurs plus avantageuses pour lui; que le fait générateur du droit à la rémunération au vu de la nature du mandat confié, ne découle pas nécessairement de la simple présentation du bien, mais des diligences réellement accomplies permettant la conclusion effective de l’opération, le cas échéant par l’entremise d’une autre agence.

****

Par écritures récapitulatives régulièrement déposées et signifiées le 11 octobre 2011, la SASU CREDIT AGRICOLE AQUITAINE AGENCE IMMOBILIERE intimée, exploitant à l’enseigne « SQUARE HABITAT » conclut en la confirmation intégrale du jugement déféré.

Elle fait valoir que l’appelant n’a pas hésité au mépris de ses engagements contractuels à traiter directement avec un acquéreur lui ayant été présenté par l’agence « AVIS IMMOBILIER » laquelle s’était également entremise pour la négociation et la transmission d’une offre d’achat.

Elle se prévaut des stipulations expresse du mandat signé le 29 avril 2008, délivré en double exemplaire, reproduisant en caractères très apparents les dispositions d’une clause particulière mettant à la charge du mandant le paiement de la commission, même dans l’éventualité d’une opération conclue sans les soins de l’intermédiaire.

Elle objecte enfin que A B lui-même salarié de l’ agence immobilière au bénéfice de laquelle l’opération allait être conclue, ne pouvait ignorer que la société SQUARE HABITAT s’était substituée aux engagements souscrits par l’ancienne société exploitant sous l’enseigne AVIS IMMOBILIER et développait son activité à la même adresse; que cette transformation juridique est sans incidence sur la validité du mandat délivré; que A B n’est pas davantage fondé à tirer profit du prononcé par le premier juge de la nullité du mandat exclusif de négociation consenti par les acquéreurs, pour se soustraire à ses propres engagements contractuels, distincts dans leur nature et leurs conséquences.

A la faveur de son appel incident , l’intimée sollicite la condamnation de A B au paiement outre des dépens de l’instance, de la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts outre celle de 2000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

En cet état l’ordonnance de clôture était prise le 08 octobre 2012.

MOTIVATION LA DECISION

Sur l’opposabilité du mandat :

Attendu que l’appelant ne peut valablement prétendre n’avoir jamais consenti mandat de vente à la société SASU D.S.I « SQUARE HABITAT » alors qu’il est précisément établi par les pièces versées au débat, que cette nouvelle enseigne commerciale ne découle que de la modification de la forme juridique de l’ancienne société EURL D.S.I « AVIS IMMOBILIER » avec laquelle A B avait effectivement souscrit mandat ;

Que la société SASU D.S.I « SQUARE HABITAT » venant ainsi à la procédure aux droits d’AVIS IMMOBILIER le moyen soulevé par l’appelant sera donc écarté ;

Sur la nullité du mandat :

Attendu que l’appelant ne peut invoquer davantage les dispositions en l’espèce non critiquées du jugement déféré, ayant prononcé de la nullité du mandat exclusif de négociation consenti par cette même agence en faveur des acquéreurs, jugé incompatible avec les dispositions de son propre mandat ;

Qu’en effet il sera rappelé qu’aucune disposition tirée des articles 1er et suivants de la loi du 2 janvier 1970 et 72 et suivants du décret du 20 juillet 1972 pris pour son application, ne fait obstacle à ce qu’un agent immobilier détienne un mandat d’un vendeur et un mandat d’un acquéreur, pour une même opération; qu’il en résulte que le droit à commission existe pour chacun des mandats dès lors que sont satisfaites les exigences prescrites par les articles 6 de la loi et 73 du décret ;

Que ce second moyen sera donc écarté ;

Sur le droit à rémunération:

Attendu que, lorsqu’une personne a donné à plusieurs agents immobiliers un mandat non exclusif de vendre le même bien, elle n’est tenue de payer une rémunération ou commission qu’à celui par l’entremise duquel l’opération a été conclue au sens de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970 et cela même si l’acquéreur lui avait été précédemment présenté par un autre agent immobilier, sauf à ce dernier à prétendre à l’attribution de dommages et intérêts en prouvant une faute du vendeur qui par un abus de sa part et compte tenu des diligences accomplies, l’aurait privé de la réalisation de la vente ;

Attendu que le A B a donné le 29 avril 2008 à la société AVIS IMMOBILIER pour une durée de trois mois renouvelable un an par tacite reconduction, mandat non exclusif de vendre son bien immobilier au prix de 245 100 €, la rémunération du mandataire étant fixée à 15.100 sur le prix de vente; que le 17 octobre 2008 la société « AVIS IMMOBILIER » a fait visiter le bien à Madame Y Z qui s’en est finalement portée acquéreur le 28 novembre 2008 par l’intermédiaire de la société « CIMM IMMOBILIER » à laquelle M. A B avait également confié le 03 novembre 2008, un mandat non exclusif de vente du même bien au prix de 215.000 € ;

Attendu qu’en vertu des stipulations contractuelles le liant à l’agence « AVIS IMMOBILIER », A B s’interdisait pendant la période irrévocable du mandat et dans les douze mois suivants sa reconduction de traiter directement avec un acquéreur lui ayant été présenté par le mandataire ou ayant visité les lieux avec lui; que le mandant conservait toutefois pendant cette durée, la faculté de procéder lui-même à la recherche d’un acquéreur et à la vente de son bien, le cas échéant par l’entremise d’un autre cabinet, sous la seule réserve d’en informer immédiatement le mandataire en lui notifiant par lettre recommandée avec accusé réception les nom et adresse de l’acquéreur, du notaire chargé de l’acte authentique et du cabinet éventuellement intervenu; cette notification ayant vocation à mettre fin au mandat et à éviter l’engagement par le mandataire d’une vente avec un autre acquéreur dans des conditions pouvant entraîner une action en responsabilité;

Attendu que A B justifie, ce qu’il n’avait pu faire en première instance, avoir consenti plusieurs mandat de vente non exclusifs à d’autres agences immobilières dont l’agence CIMM IMMOBILIER (mandat n° du ) ;

Que A B justifie avoir décliné une première offre d’achat, jugée insuffisante au regard du prix fixé au mandat; offre transmise de façon informelle par la société « AVIS IMMOBILIER » au mois de novembre 2008, sans que cette dernière ne justifie d’ailleurs avoir avisé le mandant de l’identité de la personne à l’origine de l’offre ;

Que A B était ensuite conduit à accepter le 28 novembre 2008, une offre plus satisfactoire émanant de M. C D et Mme Y Z, présentée par la société « CIMM IMMOBILIER » qu’il avait mandatée dans les mêmes conditions ;

Attendu que le simple fait pour A B d’avoir réalisé une vente à des conditions de prix plus avantageuses, non pas directement mais par l’entremise d’une autre agence immobilière dûment mandatée et distincte de la société AVIS IMOBILIER ayant initialement présenté le bien à l’acquéreur et transmis en son nom une offre jugée insuffisante, ne permet pas de caractériser un manquement ou un abus du vendeur aux droits du mandataire non exclusif ;

Qu’en effet la société « SQUARE HABITAT » venant aux droits d’AVIS IMMOBILIER ne justifie pas postérieurement au rejet par le vendeur de l’offre issue de son entremise, avoir entrepris d’autres démarches ou interventions complémentaires en vue d’un rapprochement des parties, pour permettre la réalisation effective de la vente, lui ouvrant alors un droit à rémunération, au sens de l’article 6 de la loi du 2 janvier 1970;

Que la société « SQUARE HABITAT » ne justifie pas davantage avoir fait souscrire dans l’intervalle de cet acte concurrentiel, un quelconque engagement à un autre acquéreur dans des conditions pouvant générer un préjudice et la rendant de fait éventuellement légitime à solliciter le jeu de la clause pénale sanctionnant une dénonciation tardive du mandat par le vendeur ;

Qu’en conséquence, réformant le jugement déféré, il échet de débouter la SASU D.S.I exerçant à l’enseigne « SQUARE HABITAT » de l’intégralité de ses prétentions à l’encontre de M. A B ;

Sur la demande élevée par A B au titre du préjudice moral ;

Attendu que le préjudice moral s’entend strictement de toute atteinte portée aux sentiments d’honneur, d’affection ou de considération de la personne ;

Que le simple exercice d’une action en justice ne saurait engendrer un préjudice répondant à cette définition et ouvrir droit à réparation ;

Que A B sera en conséquence débouté de ce chef de prétention :

Sur les demandes élevées au titre des frais irrépétibles ;

Attendu qu’il paraît inéquitable de laisser à la charge de l’appelant, contraint d’ester en justice pour la satisfaction de son droit, la charges des frais exposés non compris dans les dépens ;

Qu’il convient à ce titre de lui allouer la somme de 3.000 € ;

Sur les dépens ;

Attendu que la SASU « D.S.I » dite SQUARE HABITAT" succombant en son appel incident supportera l’intégralité des dépens de ce recours ;

PAR CES MOTIFS,

LA COUR,

Après en avoir délibéré, statuant publiquement par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

REFORME le jugement déféré et statuant à nouveau :

DEBOUTE la SASU « D.S.I » exerçant au nom de « SQUARE HABITAT » venant aux droits de l’EURL D.S.I sous l’enseigne « AVIS IMMOBILIER », de l’intégralité de ses prétentions,

CONDAMNE la SASU « D.S.I » exerçant au nom de « SQUARE HABITAT » venant aux droits de l’EURL D.S.I sous l’enseigne « AVIS IMMOBILIER », à payer à M. A B, la somme de 3.000 €, au titre des frais irrépétibles,

DEBOUTE A B de ses prétentions indemnitaires au titre du préjudice moral,

CONDAMNE la SASU « D.S.I » exerçant au nom de « SQUARE HABITAT » venant aux droits de l’EURL D.S.I sous l’enseigne « AVIS IMMOBILIER », aux entiers dépens de l’instance d’appel qui pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur Louis-Marie Cheminade, président, et par Madame Marceline Loison, greffier, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

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