Cour d'appel de Lyon, 3ème chambre a, 11 octobre 2018, n° 17/02369

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, 3e ch. a, 11 oct. 2018, n° 17/02369
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 17/02369
Décision précédente : Tribunal de commerce de Lyon, 20 février 2017, N° 2015j01693
Dispositif : Infirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l'égard de toutes les parties au recours

Sur les parties

Texte intégral

N° RG 17/02369

Décision du Tribunal de Commerce de LYON

Au fond

du 21 février 2017

RG : 2015j01693

EURL M. C D E A B

C/

SA SUEZ EAU FRANCE S EAUX FRANCE

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

3e chambre A

ARRÊT DU 11 Octobre 2018

APPELANTE :

EURL M. C D E A B

[…]

[…]

Représentée par Me Florence CECCON de la SELARL HORKOS AVOCATS, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

SA SUEZ EAU FRANCE, nouvelle dénomination sociale de la société LYONNAISE DES EAUX FRANCE

16, place de l’Iris

[…]

Représentée par Me Eric DE BERAIL de la SELARL KAIROS AVOCATS, avocat au barreau de LYON

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 14 Novembre 2017

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 13 Septembre 2018

Date de mise à disposition : 11 Octobre 2018

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— Anne-Marie ESPARBÈS, président

— Y Z, conseiller

— Pierre BARDOUX, conseiller

assistés pendant les débats de Jessica LICTEVOUT, greffier

A l’audience, Y Z a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt Contradictoire rendu par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par Anne-Marie ESPARBÈS, président, et par Jessica LICTEVOUT, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

EXPOSÉ DU LITIGE

Par ordonnance du 7 juillet 2015, le président du tribunal de commerce de Lyon, sur requête de la SA Lyonnaises des eaux, a enjoint à l’EURL MBED D E A B (MBED) de payer la somme principale de 18 659 € avec intérêts au taux légal à compter du 24 mai 2015, au titre d’une facture d’eau établie après une fuite et sur laquelle les parties étaient en litige, outre une indemnité de 150 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, la somme de 52,80 € pour les frais de la requête et 4,69 € pour les frais accessoires.

Par jugement du 21 février 2017, statuant sur opposition à l’ordonnance d’injonction de payer formée par la société MBED, le tribunal de commerce de Lyon a condamné cette dernière au paiement de la facture au motif qu’elle ne prouvait pas que la fuite était de la responsabilité de la Lyonnaise des eaux ainsi qu’au paiement de 309,89 € au titre de la clause pénale et 500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Par déclaration du 31 mars 2017, la société MBED a interjeté appel à l’encontre de cette décision.

Par conclusions déposées le 29 juin 2017, fondées sur les articles 1134 du code civil, 32-1 du code de procédure civile et L. 2224-12-4 III bis du code général de collectivités territoriales, la société MBED demande à la cour de :

— réformer le jugement entrepris en ce qu’il a :

• dit non fondée son opposition à ordonnance d’injonction de payer,

• l’a condamnée à payer à la Lyonnaise des eaux la somme de 18 659 € plus 309,89 € à titre de clause pénale et une indemnité de « 700 € » au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

et statuant à nouveau

— juger que la Lyonnaise des eaux ne démontre pas que la fuite dont elle se prévaut afin de justifier le paiement de la somme de 18 659 € serait située après le compteur d’eau,

— juger qu’au contraire le rapport d’intervention établi par la Lyonnaise des eaux démontre que la réparation du compteur a mis fin à la fuite,

— juger qu’elle ne peut être tenue pour responsable d’une quelconque fuite d’eau,

— constater que la Lyonnaise des eaux demande deux fois le paiement de la même pénalité,

en conséquence,

— dire fondée son opposition à l’ordonnance d’injonction de payer,

— débouter la Lyonnaise des eaux de l’ensemble de ses demandes,

— condamner la Lyonnaise des eaux au paiement de la somme de 1 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

— condamner la même au paiement de la somme de 1 500 € au titre de la procédure qu’elle a abusivement engagée à son encontre.

Par conclusions déposées le 28 août 2017, la société Suez eau France (anciennement dénommée Lyonnaise des eaux) demande à la cour de :

— confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

ajoutant,

— porter à 412,89 €, la somme due en vertu de la clause pénale après actualisation à la date de ses conclusions,

— condamner la société MBED au paiement de la somme de 1 200 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Il convient de préciser, à titre liminaire, que le juge saisi par opposition à une ordonnance d’injonction de payer , statue sur la demande en recouvrement et non sur le bien fondé, ou non, de l’opposition de sorte que les demandes de la société MBED sur ce point sont sans objet.

Les parties ne sont pas en litige sur la répartition des responsabilités prévue par le règlement du service de l’eau de la communauté urbaine de Lyon lequel met à la charge du distributeur d’eau, l’entretien et le renouvellement du branchement jusqu’au filetage aval du système de comptage ou du robinet d’arrêt général (en l’absence de compteur) ou de la limite de propriété (en l’absence de compteur ou de robinet d’arrêt général) et à la charge de l’usager l’entretien, le renouvellement et la mise en conformité des installations de distribution situées au-delà du filetage aval du système de comptage.

Elles s’opposent sur la fuite à l’origine d’une surconsommation ayant donné lieu à la facturation litigieuse pour la période de janvier à août 2013 et sur la prise en charge de celle-ci.

Le règlement précité précise qu’en aucun cas,une réduction de consommation en raison de fuites dans les installations intérieures ne pourra être demandée ; que cependant, en cas de fuite souterraine

non décelable, l’usager pourra bénéficier d’un dégrèvement assainissement et pollution ; que dès le constat de la fuite, et au plus tard dans le délai d’un mois, l’usager doit informer le distributeur d’eau et lui fournir une facture permettant de dater et localiser la réparation de la fuite, le distributeur pouvant exiger un constat sur place.

Les dispositions de l’article L. 2224-12 III bis du code général des collectivités territoriales en vigueur depuis le 17 mai 2011, invoquées par la société MBED, imposent au distributeur d’eau qui constate une augmentation anormale du volume d’eau consommée, dont il précise le mode de calcul, susceptible d’être causée par la fuite d’une canalisation, d’en informer sans délai l’abonné.

Ces mêmes dispositions prévoient que :

— l’abonné n’est pas tenu du paiement de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne s’il présente au service d’eau potable, dans le délai d’un mois à compter de l’information sur la possible fuite, une attestation d’une entreprise de plomberie indiquant qu’il a procédé à la réparation d’une fuite sur ses canalisations,

— l’abonné peut demander, dans le même délai d’un mois, au service d’eau potable de vérifier le bon fonctionnement du compteur. L’abonné n’est alors tenu au paiement que de la part de la consommation excédant le double de la consommation moyenne qu’à compter de la notification par le service d’eau potable, et après enquête, que cette augmentation n’est pas imputable à un défaut de fonctionnement du compteur.

La société Suez prétend avoir informé par lettre du 1er août 2012 puis par lettre du 14 mars 2013, la société MBED qu’elle avait constaté à l’occasion du relevé du compteur d’eau, une fuite située après le compteur.

La société MBED conteste avoir reçu le premier courrier et soutient que c’est elle qui a signalé au distributeur une fuite au mois de mars 2013.

Quoiqu’il en soit, il résulte des productions que la société MBED a sollicité une intervention de la Lyonnaise des eaux le 13 mars 2013 au motif que le compteur était défectueux et que selon le plombier qu’elle avait mandaté, cette défectuosité ne provenait pas du gel et ne relevait donc pas de sa responsabilité.

Les techniciens de la Lyonnaise des eaux sont intervenus le 15 mars 2013 puis le 20 mars suivant.

Les parties s’opposent sur le diagnostic posé le 15 mars et la nature de l’intervention du 20 mars.

La société MBED prétend que le 15 mars, le technicien a constaté une défectuosité du compteur et la nécessité de changer des pièces et que le 20 mars, les pièces du compteur ont été changées et la fuite a été réparée.

La société Suez soutient quant à elle, que le 15 mars, il a été confirmé que la fuite se situait en aval du compteur et préconisé le changement de la vanne avant compteur, ce qui a été fait le 20 mars, cette réparation s’inscrivant dans son obligation d’entretien des installations situées en amont du compteur étant indépendante de la fuite.

Le rapport des interventions produit par la société Suez mentionne :

— sur le déplacement du 15 mars qu’il a été improductif ; « fuite après compteur ne nous concerne pas, vanne avt cpt à changer mercredi 20/03 de 8h00 à 13h00 »,

— sur l’intervention du 20 mars, « compteur changer pièces, réparer fuite » puis :

* X Pierre ' 20/03/13 : changement du rag / forte hausse due à une fuite après cpt,

* Quantin Alain ' 20/03/13 : Change Rag DN 40 plus arrêt d’eau avec Pierre.

Dans le cadre suivant est noté :

— prévu : compteur, changer pièces, réparer fuite,

— réalisé ; compteur, changer pièces, réparer fuite.

La société Suez prétend que, contrairement à ce que soutient l’appelante, ces dernières mentions ne démontrent pas une intervention sur le compteur mais ont vocation à faire apparaître le motif du déplacement tel que demandé par le client et non le résultat de l’intervention, ni les opérations effectuées au cours de celle-ci ni les constatations opérées par le technicien.

Ce faisant, la société Suez n’explique pas pourquoi la demande du client figure non seulement comme ce qui qui a été prévu mais aussi comme ce qui a été réalisé.

D’autre part, au vu des autres mentions du rapport, il est certain que des pièces du compteur ont été changées le 20 mars 2013, le changement de la vanne préconisé le 15 mars précédent n’étant par contre, pas mentionné comme réalisé par l’un des deux techniciens.

Après la première intervention, la société MBED a écrit à la Lyonnaise des eaux que contrairement à ce qu’elle affirmait dans un courrier du 14 mars 2013 sur l’existence d’une fuite après le compteur, le technicien, M. X, avait constaté que la vanne et le compteur étaient défectueux et qu’il lui incombait donc de prendre en charge les réparations.

La Lyonnaise des eaux a répondu, le 28 mars 2013, en considérant qu’il s’agissait d’une demande de dégrèvement pour une surconsommation liée à une fuite sur les installations privées, et a indiqué qu’elle ne pourrait traiter la demande que lorsque la facture serait établie en août 2013, à condition que lui soit envoyée, dans le mois de la date de la facture, une attestation d’une entreprise de plomberie indiquant la réparation de la fuite, sa localisation précise et la date de réparation.

La société MBED a répondu à la Lyonnaise des eaux qu’elle ne pouvait produire les documents demandés car elle n’avait pas mandaté de plombier dès lors que l’intervention sur le compteur avait mis fin à la fuite.

Chaque partie a réitéré sa position dans les échanges postérieurs et par lettre du 27 novembre 2017, la Lyonnaise des eaux a indiqué que le dégrèvement ne portant que sur la redevance « collecte et traitement des eaux usées » et la société MBED n’étant pas assujettie à cette redevance, elle ne pouvait donner suite à la demande.

En application des dispositions précitées du code général des collectivités territoriales, la société MBED qui a demandé, dans le même délai d’un mois suivant l’avis de surconsommation susceptible de provenir de la fuite d’une canalisation, à la Lyonnaise des eaux de vérifier le bon fonctionnement du compteur, n’est tenue au paiement que de la part de la consommation excédant la double de la consommation moyenne (calculée selon les éléments définies par le même texte) qu’à compter de la notification par la Lyonnaise des eaux, soit à compter du 28 mars 2013, que cette augmentation n’est pas imputable à un défaut de fonctionnement du compteur.

La facture produite par la société Suez pour la période de janvier à août 2013 mentionnant une surconsommation est basée sur une estimation.

Aucun détail de la consommation antérieure et postérieure au 28 mars 2018 ou au 20 mars, date de

l’intervention, au cours de laquelle l’index à été relevé, n’est proposée.

L’index relevé le 20 mars 2013, indiqué sur le rapport d’intervention est de 41864 ; celui relevé le 24 janvier 2014 (indiqué sur la facture du 6 février 2014) est de 43206 soit une consommation de 1342 m3 pour neuf mois qui ne traduit pas une surconsommation (estimée à 10 105 m3 pour huit mois sur la facture litigieuse).

Les consommations facturées les 22 août 2014 et 19 janvier 2015 sont normales (1468 m3 et 1632 m3).

Dans ces conditions, la société Suez n’établit pas une surconsommation à compter du 28 mars 2013 à laquelle seule serait tenue, pour une partie, la société MBED ; il résulte au contraire des éléments ci-dessus exposés que l’intervention qu’elle a effectuée le 20 mars 2013, et dont elle ne conteste pas quelle était à sa charge, a mis fin à la fuite entraînant une consommation anormale.

En conséquence, elle n’est pas fondée dans sa demande. Il y a lieu, par infirmation du jugement entrepris, de l’en débouter.

Le droit d’agir en justice ne peut donner lieu à dommages-intérêts que s’il a dégénéré en abus ce qui n’est pas caractérisé en l’espèce.

En conséquence, la cour n’a pas à s’interroger sur l’application de l’article 32-1 du code de procédure civile qui relève de son initiative et non de celle des parties.

Succombant dans son action, la société Suez doit supporter les dépens de première instance et d’appel, garder à sa charge les frais irrépétibles quelle a exposés et verser à la société MBED une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement entrepris et statuant à nouveau,

Déboute la SAS Suez eau France de ses prétentions,

Condamne la SAS Suez eau France à payer à l’EURL MBED D E A B une l’indemnité de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute l’EURL MBED D E A B de sa demande fondée sur l’article 32-1 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Suez eau France aux dépens de première et d’appel.

Le Greffier, Le Président,

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