Cour d'appel de Lyon, n° 13/08333

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Sur la décision

Référence :
CA Lyon, n° 13/08333
Juridiction : Cour d'appel de Lyon
Numéro(s) : 13/08333

Sur les parties

Texte intégral

R.G : 13/08333

Décisions :

— du tribunal de grande instance de Bobigny

Au fond du 14 septembre 2010

Chambre 5/section 1

RG : 2009/08983

— de la Cour d’appel de Paris en date du 22 février 2012

Pôle 5/chambre 1

RG : 10/22262

— de la Cour de cassation en date du 2 octobre 2013

1re chambre civile

n° 1082 F-D

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE LYON

1re chambre civile A

ARRET DU 29 Septembre 2016

APPELANTE :

XXX

XXX

XXX

représentée par Maître Nathalie ROSE, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître Erick LANDON, avocat au barreau de PARIS

INTIMEE :

SARL Société d’exploitation UBU

XXX

XXX

représentée par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître Pierre GREFFE, avocat au barreau de PARIS

INTERVENANTE :

SELARL A-F-D, représentée par Maître C D, ès qualités d’administrateur judiciaire de la Société d’exploitation UBU, désigné par jugement du tribunal de commerce de Paris en date du 03 novembre 2015

XXX

XXX

représentée par la SCP TUDELA ET ASSOCIES, avocat au barreau de LYON

assistée de Maître Pierre GREFFE, avocat au barreau de PARIS

* * * * * *

Date de clôture de l’instruction : 08 Avril 2015

Date des plaidoiries tenues en audience publique : 30 Juin 2016

Date de mise à disposition : 29 Septembre 2016

Composition de la Cour lors des débats et du délibéré :

— A B, président

— Françoise CLEMENT, conseiller

— Vincent NICOLAS, conseiller

assistés pendant les débats de Joëlle POITOUX, greffier

A l’audience, A B a fait le rapport, conformément à l’article 785 du code de procédure civile.

Arrêt contradictoire rendu publiquement par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile,

Signé par A B, président, et par Joëlle POITOUX, greffier, auquel la minute a été remise par le magistrat signataire.

* * * *

Vu le jugement du 14 septembre 2010 rendu par le tribunal de grande instance de Bobigny qui condamne la société MS PRETTY à verser à la société UBU la somme de 50 000 € de dommages intérêts en réparation des préjudices résultant de la contrefaçon et de la concurrence déloyale commises et qui ordonne diverses mesures comme la destruction du stock de bijoux contrefaits et la publication de la décision ;

Vu l’arrêt de la Cour de Cassation en date du 02 octobre 2013 qui casse l’arrêt de la Cour d’appel de Paris en date du 22 février 2012 qui infirmait le jugement du 14 septembre 2010 en ce qu’il avait retenu que les produits commercialisées par la société MS PRETTY sous les références NK 63646.180 et NK 62321.180 étaient contrefaisants et qui avait confirmé pour le surplus la décision entreprise ;

Vu le motif de la cassation tenant à la production des originaux des procès verbaux d’ouverture des enveloppes Soleau ;

Vu la production devant cette Cour des originaux des procès verbaux d’ouverture des enveloppes Soleau ;

Vu les conclusions de la SARL MP PRETTY en date du 12 janvier 2015 qui conclut ainsi :

Par ces motifs et pieces communiquees au debat, faisant corps avec le dispositif qui suit :

Vu l’arrêt rendu par la 1re Chambre Civile de la Cour de Cassation le 2 octobre 2013

Vu l’appel de la société MS Pretty du 23 octobre 2013

Vu l’assignation délivrée à la requête de la société d’Exploitation Ubu le 25 juin 2008 Vu le jugement rendu le 14 septembre 2010 par ie TGI de Bobigny

— Dire et juger la société MS Pretty recevable et bien fondée en appel,

— Prononcer la nullité, à tout le moins infirmer en son entier le jugement prononcé le 14 septembre 2010 et statuant de nouveau

XXX,

Vu le considérant 9 et les articles 16 et 17 de la directive 98/71 du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 1998 sur la protection juridique des dessin ou modèle

Vu l’arrêt du 27 janvier 2011 et l’ordonnance du 9 septembre 2011 rendus par la CJUE sur demande préjudicielle

Vu le respect de la norme supérieure européenne

— Constater l’absence de justification d’un enregistrement de dessin ou modèle par la société Ubu

— Dire et juger la société Ubu irrecevable et mal fondée à agir en contrefaçon de droits d’auteur des 5 modèles opposés à la société MS Pretty, en conséquence la débouter

Vu les pièces communiquées par la société d’exploitation Ubu

Vu les articles 15, 132 et suivants, 753 et suivants du code de procédure civile et 1334 du code civil

— En conséquence, dire et juger irrecevables les pièces 2 à 5 de la société Ubu, les écarter des débats, dire et juger que la société n’oppose aucune autre prétendue création à date certaine, donc la débouter de ses demandes de contrefaçon de droits d’auteur.

Vu la Convention de Berne, Ie Traité OMPI et les ADPIC

Vu l’article 1382 du code civil

— Dire et juger que tout style ou genre de bijoux primitifs ne sont ni appropriables, ni opposables

— Dire et juger que l’absence de droits de propriété sur une forme de bijou primitif exclut d’utiIiser la concurrence déloyale comme moyen subsidiaire pour obtenir une quelconque protection

— Dire et juger que la société Ubu est irrecevable et mal fondée à invoquer comme acte de concurrence déloyale la reprise d’un genre, d’un style ou la copie d’un produit non protégé donc la débouter

— Dire et juger que la société d’exploitation Ubu ne démontre et ne justifie pas d’acte autonome imputable à la société MS Pretty susceptible d’être qualifié d’acte de concurrence déloyale

— En conséquence, débouter la société d’exploitation Ubu Vu l’exécution provisoire du jugement du 14 septembre 2010 Vu les mesures d’exécution forcée

Vu l’article 1382 du code civil

Vu l’article 32.1 du code civil

— Dire et juger que la société d’exploitation Ubu a abusé de son droit d’agir en Justice, qu’elle n’a pas eu de comportement loyal et qu’elle a causé un préjudice à Ia société MS Pretty

— Dire et juger que l’exécution provisoire est aux risques et périls de la société Ubu donc engage sa responsabilité civile et l’obiige à réparer le préjudice subi par la société MS Pretty

— En conséquence, condamner la société d’exploitation Ubu à verser à la société MS Pretty une indemnité de 100.000 euros

— Condamner la société d’exploitation Ubu à verser une amende civile de 2.000 euros

XXX

Vu les articles 6 et 7 de la Convention (CEDH)

Vu les artioies 9, 12, 15, 16, 31, 121 et suivants du code de procédure civile

Vu les articles L.111-1, L.111-2, L.111-3, L.131-2, L.131-3, L.131-4, L.131-7 du code de la propriété intellectuelle

— Dire et juger la société d’Exploitation Ubu irrecevable en son action en contrefaçon de droits d’auteur faute de justifier d’éIéments à date certaine permettant d’établir les créations et processus de création des références (reprendre les références Supra) par des auteurs identifiés et de soumettre ces pièces au débat contradictoire

— Dire et juger la société d’Exploitation Ubu irrecevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur faute de définir l’originalité, donc les contours exacts de l’empreinte personnelle du ou des auteurs à identifier susceptibles de qualifier chaque prétendue création d''uvre de |'esprit

— Dire et juger la société d’Exploitation Ubu irrecevable à agir en qualité d’ayant droit patrimonial faute de démontrer et de justifier l’origine de la création, l’identité du ou des auteurs, la première commercialisation de reproduction des 5 prétendues créations d''uvre de l’esprit et l’acquisition des droits d’exploitation

— En conséquence pour l’une et/ou |'autre de ces dires et juger, débouter la société d’Exploitation Ubu irrecevable et mal fondée en ses demandes de contrefaçon de droits d’auteur

— Dire et juger que la société d’exploitation Ubu ne démontre pas et ne justifie pas la reprise par chacun des bijoux argués de contrefaçon de droits d’auteur commercialisé par la société MS Pretty sous les références NK63646-180, Z, X- 180, Y, d’une empreinte personnelle d’une quelconque création dont elle serait l’ayant droit patrimonial d’auteur, en conséquence la débouter

Vu les ADPIC résultant de |'Annexe 1c des Accords du cycle de l’Uruguay signés à Marrakech le 19 avril 1994

Vu ie décret de promulgation du 26 novembre 1995

Vu la directive 2004/48 du Parlement européen et du Conseil du 29 avril 2004 relative au respect des droits de propriété intellectuelle

Vu l’arrêt rendu le 18 juillet 2013 par la CJUE (affaire Daïchi)

— Dire et juger que la société d’exploitation Ubu ne démontre pas et ne justifie pas que la société MS Pretty en qualité de revendeur ait pu agir en connaissance de cause

— Dire et juger que la société d’exploitation Ubu ne démontre pas et ne justifie pas, pour chacun des 5 produits argués de contrefaçon de droits d’auteur et pour chaque acte autonome de concurrence déloyale d’un quelconque préjudice individualisé et quantifié

— En conséquence, débouter la société d’exploitation Ubu de ses demandes indemnitaires globales comme étant irrecevable, infondée et injustifiée

— A titre infiniment subsidiaire, fixer les éventuelles indemnités à une somme qui ne saurait dépasser 1.000 euros compte tenu des stocks en cause et du comportement de la société Ubu.

XXX

Vu les articles 694 à 706 du code de procédure civile

— Condamner la société d’exploitation UBU à verser à la société MS PRETTY, une indemnité de 12 500 € en compensation des frais qu’elle a du exposer pour sa défense, en première instance et en appel, non comprise dans les dépens,

— Condamner la société d’exploitation UBU aux dépens d’appel, tant de première instance que ceux d’appel afférents à l’arrêt rendu par la Cour d’Appel de Paris le 22 février 2012, que ceux afférents à l’arrêt de la Cour de Cassation du 2 octobre 2013, ainsi que ceux de I’arrêt de la Cour de céans, ces derniers distraits au profit de Maître ROSE, Avocat, sur son affirmation de droit.

Vu les conclusions du 15 février 2016 de la société UBU et de son administrateur judiciaire désigné par le tribunal de commerce de Paris le 03 novembre 2015 qui intervient volontairement à l’instance et qui concluent à la confirmation du jugement attaqué et qui réclament 20 000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile, aux motifs, d’une part, que la société UBU est bien recevable et fondée à agir en contrefaçon de droit d’auteur pour les modèles revendiqués dont elle justifie être l’auteur au sens de l’article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle, et de l’exploitation non équivoque, d’autant qu’ils sont originaux ; et, d’autre part, que des actes de concurrence déloyale et de parasitisme ont bien été commis en plus de la contrefaçon par le fait de la copie servile de l’une des collections appartenant à la société UBU, de sorte que le consommateur moyen et d’attention moyenne était dans l’impossibilité de faire la distinction entre les collections de bijoux UBU et les gammes de bijoux MS PRETTY ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 8 avril 2015 ;

DECISION

1. La société UBU revendique des droits d’auteur sur cinq modèles de bijoux qui ont fait l’objet de dépôts d’enveloppes Soleau auprès de l’Institut national de la propriété intellectuelle et soutient que la société MS PRETTY a commercialisé des colliers qui reproduisent servilement les caractéristiques de ces modèles.

2. La société UBU fonde son action engagée par une assignation du25 juin 2008 devant le tribunal de grande instance de Bobigny sur les livres I et II du code de la propriété intellectuelle et sur la protection des droits d’auteur dont elle serait titulaire pour agir en contrefaçon.

3. La société UBU ne fonde pas son action en contrefaçon sur une marque ou modèle enregistrée ; dès lors le litige porte bien sur l’existence ou non d’un droit d’auteur au sens de l’article L.113-1 du code de la propriété intellectuelle qui dispose que 'la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée'.

4. Elle soutient qu’elle doit être présumée avoir la qualité d’auteur car elle justifie de l’exploitation des modèles de collier pour lesquels elle a déposé une enveloppe Soleau de l’article R.511-6 du code de la propriété intellectuelle qui permet pour chaque modèle de s’assurer de la date de priorité de la création de l’oeuvre, notamment des personnes visées à l’article R.511-2 du code de la propriété intellectuelle.

5. La société UBU soutient que les modèles sur lesquels elle revendique un droit d’auteur ont indiscutablement une configuration propre et reconnaissable qui témoignent d’un effort de création lui conférant un caractère d’originalité justifiant une protection, non pas comme modèle enregistré mais au titre du droit d’auteur qui se caractérise par l’empreinte de la personnalité de son auteur, notamment parce que l’objet traduit un parti pris esthétique qui leur donne une physionomie propre : la composition et l’assemblage d’éléments relevant des arts primitifs en ce qu’ils sont nouveaux donnent leur originalité aux bijoux et caractérisent l’empreinte de la personnalité.

6. La société MS PRETTY fait valoir, en revanche, d’une part, l’absence d’enregistrement des modèles, et d’autre part, l’irrecevabilité et le mal fondé de la société UBU, personne morale, à établir sur les modèles de bijoux qu’elle revendique un quelconque droit d’auteur caractérisé par l’empreinte de la personnalité ou quelconque droit dérivé dont elle serait titulaire, de sorte qu’elle ne peut pas agir en contrefaçon de droit d’auteur et qu’elle n’a aucun droit à se plaindre d’une concurrence déloyale fondée sur l’article 1382 puisque les bijoux dont elle s’inspire, sont des bijoux primitifs qui ne sont pas appropriables et qui ne sont pas opposables à autrui : l’absence de droits de propriété sur une forme de bijou primitif exclut,- soutient elle – toute concurrence déloyale.

7. Devant cette cour le moyen tiré de l’absence des originaux des procès verbaux d’ouverture des enveloppes Soleau n’a plus aucune pertinence dans la mesure où les originaux sont produits dans le débat.

8. Contrairement à ce que développe la société MS PRETTY, la société UBU est bien recevable à agir en protection d’un droit d’auteur dont elle revendique l’antériorité qui a date certaine avec le dépôt des enveloppes Soleau.

9. Et sur ce point de la recevabilité, la décision du premier juge doit être confirmée en ce que la société UBU apporte la preuve qu’elle a bien divulgué et commercialisé des modèles de bijoux sur lesquels elle exerce des droits d’auteur comme personne morale qui les exploite alors que l’on se trouve en l’absence d’une revendication par une personne physique.

10. Sur l’originalité et l’empreinte de la personnalité qui caractérisent le droit d’auteur et qui permet l’action en contrefaçon, la société MS PRETTY conteste l’originalité et l’existence d’un droit d’auteur sur les cinq bijoux, objets du litige, en ce sens que ceux ci s’inscrivent, dans le fonds commun des arts primitifs et en ce sens qu’ils ne révèlent aucun effort créatif d’une oeuvre, portant l’empreinte de la personnalité de leur auteur.

11. Et la Cour doit rechercher pour recevoir l’action en contrefaçon au fond si l’oeuvre est une oeuvre de l’esprit protégeable au sens de la loi.

12. La Cour observe et identifie les modèles en cause comme suit :

— modèle 92.552, déposé sous enveloppe Soleau le 7 février 2005 :

* Un pendentif en métal argenté de forme ronde sur lequel sont gravés divers motifs composés de lignes parallèles, de vaguelettes et de croisillons ornés de points,

* le centre du pendentif est orné d’une tige en métal argenté verticale disposée sur toute sa hauteur dont la partie supérieure, dépassant au dessus du pendentif, est percée pour recevoir un cordon de cuir noir, lequel est terminé par deux embouts cylindriques en métal argenté,

* à partir de sa partie supérieure, la tige s’amincit ;

— modèle 94.595, déposé sous enveloppe Soleau le 12 août 2005 :

* un pendentif en métal argenté de forme trapézoïdale sur lequel sont gravés divers motifs composés de lignes parallèles, de vaguelettes et de croisillons ornés de points,

* le pendentif est disposé entre deux tubes en métal argenté sur lesquels sont gravés des motifs similaires,

* le pendentif est maintenu autour du cou par un cordon de cuir noir dont chacune des extrémités est pourvue d’un embout cylindrique en métal argenté,

* l’attache se caractérise par un anneau dans lequel vient se loger une barrette,

* une pastille ornée d’une perle est suspendue à l’intérieur de l’anneau grâce à deux petits anneaux,

* la barrette est ornée de deux petits anneaux en son centre et de deux perles à chacune de ses extrémités ;

— modèle 94.599 (collier) et 85.564 (boucles d’oreilles), déposé sous enveloppe Soleau le 12 août 2005 :

* un pendentif en métal argenté de forme ronde sur lequel est gravé un motif composé de 5 lignes parallèles s’enroulant sur elles-mêmes,

* le pendentif du collier est diposé entre deux tubes en métal argenté sur lesquels sont gravés des motifs similaires,

* le pendentif est maintenu autour du cou par un cordon de cuir noir dont chacune des extrémités est pourvue d’un embout cylindrique en métal argenté,

* l’attache se caractérise par un anneau dans lequel vient se loger une barrette,

* une pastille est ornée de deux petits anneaux en son centre et deux perles à chacune de ses extrémités;

— modèles 99.757, déposé sous enveloppe Soleau le 5 février 2007 :

* un pendentif en métal argenté de forme ronde sur lequel est gravé un motif figurant une spirale ;

— modèle 92.457, déposé sous enveloppe Soleau le 1er septembre 2004 :

* un pendentif en métal argenté de forme ronde sur lequel est gravé un motif figurant une spirale,

* la spirale se caractérise par un trait fin et régulier,

* le pendentif est disposé entre deux tubes en métal argenté sur lesquels sont gravés divers motifs de lignes parallèles, de vaguelettes et de croisillons ornés de points,

* le pendentif est maintenu autour du cou par un cordon de cuir noir dont chacune des extrémités est pourvue d’un embout cylindrique en métal argenté,

* l’attache se caractérise par un anneau dans lequel vient se loger une barrette,

* une pastille ornée d’une perle est suspendue à l’intérieur de l’anneau grâce à deux petits anneaux,

* la barrette est ornée de deux petits anneaux en son centre et de deux perles à chacune de ses extrémités ;

13. Il ressort de ces éléments que la société UBU, qui ne dément pas que ses bijoux s’inscrivent dans la tendance des bijoux inspirés des arts primitifs, ne prétend pas pour autant s’approprier un genre, mais revendique, pour chaque modèle concerné, une combinaison particulière de caractéristiques, résultant des choix propres de son auteur, et conférant à ce modèle l’originalité requise pour accéder au statut d’oeuvre de l’esprit ;

14. Et il doit être relevé que les nombreuses pièces versées aux débats par la société MS PRETTY, montrant des bijoux aborigènes, nomades, touaregs, celtiques, permettent, certes, de retrouver l’une ou l’autre des caractéristiques revendiquées par la société UBU mais non pas de rencontrer un modèle qui allierait, dans la même combinaison, toutes les caractéristiques revendiquées par la société UBU pour un modèle donné et qui, partant, offrirait la même physionomie que ce modèle donné ; l’appréciation de l’originalité doit être effectuée de manière globale, en fonction de l’aspect d’ensemble produit par la combinaison des divers éléments caractérisant l’oeuvre et non par l’examen de chacun de ceux ci, pris individuellement.

15. De sorte que résulte de l’examen des modèles de bijoux en cause que, si certains des éléments qui les composent sont effectivement connus et appartiennent, regardés séparément, au fonds commun des bijoux dits 'primitifs', leur combinaison, en revanche, telle que revendiquée par la société UBU, confère à ces modèles, une physionomie propre, distincte de celle des différents modèles de comparaison, et traduisant un parti-pris esthétique empreint de la personnalité de leur auteur ;

16. La décision critiquée doit donc être confirmée en ce qu’elle retient la protection des modèles par le droit d’auteur.

17. Toutefois, vu l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle que le collier n° NK 63546-10 ne constitue pas une contrefaçon du modèles 92.552 de la société UBU, et qu’il en est de même pour le collier NK 62321-10 de la société MS PRETTY qui n’est pas une contrefaçon du modèle 99.757 de la société UBU.

18. En revanche, l’appréciation faite par le juge sur les autres modèles revendiqués doit être confirmée en ce que sa décision retient la contrefaçon.

19. En effet, le collier NK 63646-180 de la société MS PRETTY ne reproduit pas les caractéristiques qui confèrent au modèle UBU son originalité : le pendentif du collier en métal argenté de forme ronde et la tige en métal argentée disposée au centre du pendentif diffère du modèle UBU qui est aussi gravé sur toute sa surface de sorte que l’impression d’ensemble donne bien une physionomie distincte à l’objet qui n’est pas une contrefaçon.

20. En effet, il en est de même pour le pendentif NK 62321-180 de la société MS PRETTY qui n’est pas une contrefaçon des modèles 99.757 car les spirales gravés sur les bijoux sont très différentes de sorte que le bijou de la société MS PRETTY a une forme et une impression d’ensemble qui exclut toute contrefaçon.

21. En revanche, pour les autres modèles la décision du premier juge doit être confirmée en ce qu’elle retient la contrefaçon parce que l’impression d’ensemble des bijoux MS PRETTY est identique à celle des bijoux UBU de sorte que le consommateur d’attention moyenne qui n’aurait pas, sous les yeux simultanément les bijoux originaux et les bijoux imités, s’y méprendrait, à l’évidence.

22. Il y a donc bien contrefaçon pour trois modèles comme le suggère la société UBU.

23. Quant à la concurrence déloyale, il est certain que la société MS PRETTY a, en septembre 2007, fait acheter par l’une de ses filiales un exemplaire des bijoux UBU en vue de les faire reproduire en Chine et que le procès verbal de constat du 19 mai 2008 démontre que la société MS PRETTY commercialise au moins les trois modèles contrefaits qui sont de nature à introduire un risque de confusion sur l’origine des produits en constituant, par déloyauté, une atteinte à l’exercice paisible et loyale de la liberté du commerce et de la concurrence : la société MS PRETTY ne peut pas soutenir qu’elle n’avait pas l’intention délibérée de se mettre dans le sillage du commerce exercé par sa concurrente et qu’elle n’avait pas l’intention de parasiter son activité dans le domaine d’activité considéré : le commerce des bijoux de fantaisie à destination d’un public moyennement attentif.

24. Le comportement déloyal de la société MS PRETTY a bien créé un préjudice complémentaire en ce qu’elle a bénéficié des investissements et des efforts créatifs de la société UBU. Ce préjudice est distinct de celui né de la contrefaçon elle même qui vise les produits contrefaits et leur mise sur le marché.

25. La société UBU réclame en réparation du préjudice né de la contrefaçon que la Cour retient pour trois modèles et du préjudice en rapport avec la concurrence déloyale la somme de 50 000 € qui avait été retenue pas le premier juge.

26. La société MS PRETTY offre, à titre très subsidiaire, une somme de 1 000 € comme indemnité eu égard au stock des produits en cause.

27. Mais la Cour trouve dans les éléments de la cause la preuve que la contrefaçon retenue et la déloyauté dans la concurrence ont causé un préjudice certain à la société UBU qui s’est traduit par une baisse de son chiffre d’affaire et par une atteinte à sa notoriété auprès des professionnels du secteur dans la mesure où les produits contrefaits étaient de moins bonne qualité que les siens, alors que la confusion était possible, de sorte que le pouvoir attractif de ses bijoux fabriqués avec soin a subi une atteinte. Pour tous ces préjudices, la somme de 50 000 € est justifiée comme réparant le préjudice subi.

28. La société UBU est fondée à réclamer la publication de cette décision en application de l’article L 331-4 du code de procédure civile comme le premier juge l’avait ordonné, sauf à viser cet arrêt et non le jugement du 14 septembre 2010.

29. L’équité commande à la société UBU et à son administrateur judiciaire la somme de 20 000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile en appel.

30. La société MS PRETTY qui succombe principalement supporte tous les dépens.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

— infirme le jugement du 14 septembre 2010 en ce qu’il a retenu comme contrefaisants les produits commercialisés par la société MS PRETTY sous les références NK 63646-180 et NK 62321-180 ;

— le confirme, en revanche, en toutes ses autres dispositions, pour les autres produits argués de contrefaçons et pour la concurrence déloyale qu’il retient ;

— dit que la publication ordonnée fera mention de cet arrêt ;

— condamne la société MS PRETTY à verser à la société UBU, assistée de son mandataire judiciaire la SARL A-F-D représentée par Maître C D la somme de 20 000 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamne la société MS PRETTY aux entiers dépens ;

— autorise la SCP Tudela avocat à les recouvrer aux formes et conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

Joëlle POITOUX A B

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