Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 26 janvier 2022, n° 20/02038

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Paris, pôle 6 - ch. 6, 26 janv. 2022, n° 20/02038
Juridiction : Cour d'appel de Paris
Numéro(s) : 20/02038
Décision précédente : Conseil de prud'hommes de Créteil, 29 janvier 2020, N° F18/00157
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

REPUBLIQUE FRANCAISE


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 6

ARRÊT DU 26 JANVIER 2022

(n° 2022/ , 15 H)


Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/02038 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBSOE


Décision déférée à la Cour : Jugement du 30 Janvier 2020 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CRETEIL – RG n° F 18/00157

APPELANTE

Madame B-C X

[…]

41200 VILLEFRANCHE-SUR-CHER

Représentée par Me François TEYTAUD, avocat au barreau de PARIS, toque : J125

INTIMEES

Me A Z ès-qualités de mandataire liquidateur de S.A.S. MIM

[…]

[…]

Représenté par Me Nathalie CHEVALIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE,

toque : PC143

SELARL JSA ès-qualités de mandataire liquidateur de S.A.S. MIM

[…]

[…]

Représenté par Me Nathalie CHEVALIER, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE,

toque : PC143

Association UNEDIC DÉLÉGATION AGS CGEA ILE DE FRANCE EST

[…] Représentée par Me Jean-charles GANCIA, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :


L’affaire a été débattue le 23 Novembre 2021, en audience publique, devant la Cour composée de :

Madame B BERARD, Présidente de chambre

Madame Nadège BOSSARD, Conseillère

Monsieur Stéphane THERME, Conseiller

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame B BERARD Présidente de chambre, dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier : Madame Marylène BOGAERS, lors des débats

ARRÊT :


- contradictoire,


- par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,


- signé par Madame B BERARD, Présidente de chambre et par Madame Julie CORFMAT, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE :


La société Mim est une société de commerce de détail d’habillement en magasin spécialisé. Elle exploitait plus de 250 points de vente en France et employait plus de 10 salariés.

Mme B-C X a signé avec celle-ci un contrat de commission affiliation via une société créée à cet effet.


Par jugement en date du 30 novembre 2016, le tribunal de commerce de Bobigny a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Mim.


Par jugement en date du 28 mars 2017, il a arrêté le plan de cession de la SAS Mim.


Par jugement en date du 26 avril 2017, le tribunal de commerce de Bobigny a converti la procédure de redressement judiciaire de la société Mim en procédure de liquidation judiciaire.


Maître A et la Selarl Gauthier-Sohm devenue Selarl JSA ont été désignés en qualité de mandataires liquidateurs de la société Mim.


Revendiquant le statut de gérant de succursale et la requalification de la rupture de la relation en licenciement sans cause réelle et sérieuse, Mme X et 11 autres commissionnaires ont saisi le conseil de prud’hommes de Créteil le 6 février 2018.


Par jugement du 30 janvier 2020, le conseil de prud’hommes de Créteil :


- s’est déclaré compétent pour juger ces affaires
- a prononcé la jonction des procédures,


- a requalifié les 12 commissionnaires affiliés Mim en gérant de succursales, en application de l’article L. 7321-1 du code du travail


- a fixé leur salaire de référence à 2.219 euros


- a, s’agissant de Mme X fixé au passif de la société Mim, représentée par ses mandataires liquidateurs la Selarl Gauthier-Sohm devenue Selarl JSA et de Me Z A, mandataires liquidateurs la somme de :


- 13.400 euros à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,


- 4.438 euros au titre du préavis,


- 1642 euros au titre de l’indemnité de licenciement


- a ordonné la remise d’un certificat de travail et de l’attestation Pôle Emploi conformes au présent jugement,


- a débouté Mme X du surplus de ses demandes


- a laissé les dépens à la charge de la Selarl Gauthier-Sohm devenue Selarl JSA et de Me Z A


- a dit que le jugement est opposable aux AGS CGEA Ile de France Est.

Mme X a interjeté appel du jugement par déclaration du 28 février 2020.


La SELARL JSA et Me Z A, ès-qualités, ont interjeté appel du jugement à l’encontre de Mme X par déclaration du 3 mars 2020.


L’Unedic Délégation AGS CGEA IDF EST a interjeté appel du jugement à l’encontre de Mme X par déclaration d’appel du 4 mars 2020.


Dans ses conclusions, remises et déposées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 septembre 2021, auxquels il est expressement fait référence, Mme X demande à la cour de :


- Ordonner la jonction des dossiers référencés sous les numéros de RG suivants : n° 20/02038, n° 20/01886, n° 20/02036, n° 20/02037, n° 20/02051, n° 20/02060, n° 20/02062, n° 20/02065, n° 20/02069, n° 20/02071, n° 20/02073, […]


- confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré le conseil de prud’hommes de Créteil compétent pour connaître des litiges initiés par douze demandeurs à l’encontre de la société Mim ; en ce qu’il a requalifié les douze commissionnaires affiliés Mim en gérant de succursales en application de l’article L. 7321-1 du code du travail ; et en ce qu’il a admis au passif de la société Mim, représentée par ses mandataires liquidateurs, la somme de 4.438 euros à titre d’indemnité de préavis pour chacun des douze demandeurs ainsi que diverses sommes à titre d’indemnité de licenciement et à titre de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.


- l’infirmer pour le surplus, et notamment en ce qu’il a :

o débouté Mme X de sa demande au titre du rappel de salaire o limité le montant des dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail à la somme de 13.400 euros pour Mme X

o débouté Mme X de sa demande au titre des congés payés afférents à la demande de préavis

o débouté Mme X de sa demande au titre du rappel des heures supplémentaires

o débouté Mme X de sa demande tendant à voir le CGEA les garantir, dans la limite des plafonds, au titre des rappels de salaires, des rappels d’heures supplémentaires, du préavis et congés payés sur préavis et des indemnités de licenciement, ainsi que pour le paiement par l’employeur de la différence des cotisations sociales


En conséquence, et statuant de nouveau des chefs de disposition infirmés :


- Juger que l’existence d’une société commerciale et la signature d’un contrat commercial (commission affiliation) ne peuvent priver Mme X, personne physique, des droits qu’elle tient à titre individuel des dispositions de l’article L.7321-2 du code du travail,


- juger qu’au-delà de l’existence des sociétés d’exploitation, l’activité était en fait exercée personnellement par Mme X,


- juger que Mme X réunit toutes les conditions posées par les articles L.7321-2 et L.7321-3 du code du travail,


- juger que les conditions d’exploitation commerciales étaient telles dans les magasins Mim, qu’elles induisaient nécessairement un contrôle des conditions de travail,


- juger que la rupture des contrats de commission affiliation est intervenue à la suite du prononcé de la liquidation judiciaire de Mim le 26 avril 2017.


En conséquence :


- Se déclarer compétent,


- juger que Mme X bénéficie des dispositions du code du travail,


- juger que la rupture des relations contractuelles est imputable à la société Mim,


- requalifier la rupture des relations contractuelles en un licenciement sans cause réelle et sérieuse,


- fixer la rémunération de référence à 2.219 €


- ordonner l’opposabilité de l’arrêt à intervenir au CGEA,


- ordonner à la SELARL JSA et Me Z A, ès-qualités de co-liquidateurs de la procédure de liquidation judiciaire de la SAS Mim de faire valoir les droits des 12 concluants auprès du CGEA


- enjoindre à la SELARL JSA et Me Z A de remettre au CGEA un bordereau pour chacun des douze concluants reprenant l’état des créances, la date de début de contrat correspondant à la date de signature du contrat de commission affiliation, et la date de rupture du contrat correspondant à la date de la liquidation judiciaire de la SAS Mim fixée au 26 avril 2017


- ordonner au CGEA de garantir, dans la limite des plafonds, au bénéfice de Mme X les sommes de :
- 58.456,92 euros à titre de rappel de salaire,


- 6.657 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 665 euros au titre des congés payés afférents,


- 2.053 euros à titre d’indemnité de licenciement,


- 30.660 euros à titre de dommages et intérêts,


- ordonner la remise à Mme X des bulletins de paie correspondant à la période contractuelle, un certificat de travail et l’attestation Pôle emploi,


- débouter la SELARL JSA et Me Z A, ès-qualités et l’Unedic délégation AGS CGEA IDF Est de leurs demandes, moyens, fins et conclusions, en ce compris l’appel incident formé par la SELARL JSA et Me A, ès-qualités,


Dans leurs conclusions remises et déposées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 9 septembre 2020, auxquelles il est expressément fait référence, la SELARL JSA et Me A, en leur qualité de liquidateurs de la société Mim demandent à la cour de :


- constater, dire et juger la SELARL JSA et Me A, ès qualité de liquidateurs de la société Mim recevables et bien fondées en l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions


- constater, dire et juger Mme X tant irrecevable que mal fondé en ses demandes, fins et conclusions


En conséquence :


- Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Créteil du 30 janvier 2020


Et statuant à nouveau :


- dire et juger que le conseil de prud’hommes de Créteil est matériellement incompétent au profit du tribunal de commerce de Créteil


A titre subsidiaire : sur le fond


- dire et juger que les demandes antérieures au 5 février 2015 sont irrecevables car prescrites,


- dire et juger mal fondées l’ensemble des demandes de Mme X


- débouter Mme X de l’intégralité de ses demandes


- condamner Mme X aux dépens


Dans ses conclusions remises et déposées au greffe par le réseau privé virtuel des avocats le 20 août 2020, auxquelles il est expressément fait référence, l’Unedic Délégation AGS CGEA Ile de France Est, demande à la cour de :

Sur la jonction des dossiers :


- dire et juger que les instances impliquent les mêmes parties et sont relatives à la même relation contractuelle et par conséquent :
- prononcer la jonction des dossiers référencés sous les numéros RG suivants:


Appel interjeté par l’AGS (RG 20/02056)• Appel interjeté par les demandeurs (RG 20/02036, RG 20/02037, RG 20/02038,•


RG 20/02051, RG 20/02057, RG 20/02060, RG 20/02062, RG 20/02065, RG

20/02069, RG 20/02071, RG 20/02073 et RG 20/02032)


Appel interjeté par Me A et la SELARL JSA ès qualité de Mandataires•

liquidateurs de la société Mim (RG 20/01886)

Sur la compétence du conseil des prud’hommes de Créteil :


A titre principal :


- dire et juger que les requérants étaient liés à la société Mim par un contrat commercial


- dire et juger que les dispositions afférentes aux gérants de succursales sont inapplicables et par conséquent :


- réformer le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de Créteil le 30 janvier 2020 en ce qu’il s’est déclaré matériellement compétent pour juger ces affaires


A titre subsidiaire :


- dire et juger que le conseil des prud’hommes aurait dû se déclarer territorialement incompétent au profit des conseils de prud’hommes du ressort du lieu de travail de Mme X et par conséquent:


- réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Créteil le 30 janvier 2020 en ce qu’il est déclaré territorialement compétent pour juger ces affaires,

Sur la rémunération de référence :


- dire et juger que ni le principe ni le quantum fixé à 2219 euros ne sont justifiés,


Par conséquent :


- réformer le jugement rendu par le conseil des prud’hommes de Créteil en ce qu’il a fait droit à la demande de requalification du commissionnaire en gérant de succursale et fait droit à la fixation de la rémunération de référence à 2219 euros, cadre catégorie B

Sur les rappels de salaire :


- dire et juger que la demande de rappel est prescrite et par conséquent :


- confirmer le jugement rendu en ce qu’il a refusé de faire droit à la demande de rappel de salaire,

Sur le licenciement sans cause réelle et sérieuse et les conséquences indemnitaires :


- dire et juger que la rupture ne saurait être requalifiée en licenciement sans cause réelle et sérieuse et par conséquent :
- réformer le jugement en ce qu’il a fait droit à Mme X de sa demande au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail, de l’indemnité de licenciement et du préavis


- confirmer le jugement en ce qu’il a refusé de faire droit aux demandes de congés payés sur préavis dans la mesure où elles n’étaient pas chiffrées.

Sur les heures supplémentaires :


- dire et juger que la demande est irrecevable car prescrite,


- dire et juger que la preuve de l’existence d’heures supplémentaires n’est pas rapportée et par conséquent :


- confirmer le jugement en ce qu’il a jugé que la preuve de l’existence d’heures supplémentaires n’était pas rapportée,

Sur la garantie de l’AGS :


- dire et juger que la garantie de l’AGS n’est pas due en ce que Mme X n’a pas la qualité de gérant de succursale salarié


A titre subsidiaire :


- dire et juger que s’il y a lieu à fixation, celle-ci ne pourra intervenir que dans les limites de la garantie légale,


- dire et juger qu’en application de l’article L3253-8 5°, la garantie de l’AGS ne couvre les créances de nature salariale éventuellement dues au cours de la période d’observation que dans la limite d’un montant maximal correspondant à un mois et demi de travail,


- dire et juger que les sommes éventuellement dues au cours de cette période seront plafonnées dans les conditions prévues à l’article D3253-2 du code du travail,


En conséquence :


- dire et juger que toute fixation au passif de la procédure collective de créances de nature salariale au delà de cette double limite sera 'opposable’ à l’AGS,


- dire et juger qu’en application de l’article L3253-8 2° la garantie de l’AGS ne couvre les créances résultant de la rupture des contrats de travail que dans l’hypothèse où cette rupture est intervenue dans les quinze jours de la liquidation judiciaire ou dans le mois du jugement arrêtant le plan de cession,


- dire et juger que la rupture du contrat de travail n’est pas intervenue dans les limites ci-dessus rappelées,


En conséquence :


- dire et juger inopposable à l’AGS toute fixation au passif d’indemnité de rupture reconnues aux requérants,


- dire et juger qu’en tout état de cause, la garantie prévue aux dispositions de l’article L3253-6 du code du travail ne peut concerner que les seules sommes dues en exécution du contrat de travail au sens dudit article L3253-8 du code du travail, les astreintes, dommages et intérêts mettant en oeuvre la responsabilité de droit commun de l’employeur ou article 700 du code de procédure civile étant ainsi exclus de la garantie,


- dire et juger qu’en tout état de cause, la garantie de l’AGS ne pourra excéder, toutes créances avancées confondues, l’un des trois plafonds des cotisations maximum du régime d’assurance chômage, en vertu des dispositions des articles L3253-17 et D3253-5 du code du travail,


- statuer ce que de droit quant aux frais d’instance, sans qu’ils puissent être mis à la charge de l’AGS.


La clôture a été prononcée par ordonnance en date du 12 octobre 2021.

MOTIFS


Il a été procédé par mention au dossier à la jonction des procédures d’appel de Mme X, et des appels des liquidateurs de la société Mim et de l’AGS dirigés contre Mme X.

Sur la compétence

Sur la compétence matérielle


Selon l’article L1411-1 du code du travail, le conseil de prud’hommes est compétent pour tous les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail entre les employeurs ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient.


Si les liquidateurs et l’AGS font valoir que le contrat unissant Mme X à la société Mim était un contrat de commission affiliation passé entre deux sociétés ayant une activité commerciale relevant de la compétence exclusive du tribunal de commerce, Mme X revendique le statut de gérant de succursale et donc le bénéfice des dispositions de l’article L7321-1 du code du travail dans sa relation le liant à la société Mim, outre la garantie subséquente de l’AGS.


Le conseil de prud’hommes est donc matériellement compétent pour connaître des demandes de Mme X.


Il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef.

Sur la compétence territoriale


L’article R1412-1 du code du travail dispose que 'L’employeur et le salarié portent les différends et les litiges devant le conseil de prud’hommes territorialement compétent.

Ce conseil est :

1° Soit celui dans le ressort duquel est situé l’établissement où est accompli le travail ;

2° Soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié. Le salarié peut également saisir les conseils de prud’hommes du lieu où l’engagement a été contracté ou celui du lieu où l’employeur est établi'


En l’espèce, le siège social de la société Mim se trouve à […], […], […], ressort du conseil de prud’hommes de Créteil.


Le conseil de prud’hommes de Créteil était donc territorialement compétent pour statuer sur les demandes de Mme X.
Il y a lieu de confirmer le jugement de ce chef.

Sur la qualité de gérant de succursale

Mme X revendique le statut de gérant de succursale tel que défini à l’article L7321-2 du code du travail.


L’article L7321-2 du code du travail dispose qu’ 'est gérant de succursale toute personne […] dont la profession consiste essentiellement […] à vendre des marchandises de toute nature qui leur sont fournies exclusivement ou presque exclusivement par une seule entreprise, lorsque ces personnes exercent leur profession dans un local fourni ou agréé par cette entreprise et aux conditions et prix imposés par cette entreprise'.


L’existence d’une société commerciale d’exploitation et la signature d’un contrat commercial ne sont pas de nature à priver Mme Y des droits qu’elle tient à titre individuel de ces dispositions.


Le statut de gérant de succursale doit s’apprécier à l’aune des conditions dans lesquelles s’est effectivement exécutée l’activité confiée, en considération des seules conditions cumulatives posées par l’article L7321-2 du code du travail.

Sur la nature et les conditions d’exercice de la profession


Il résulte du contrat de commission-affiliation, signé par les deux parties, en son article 7-5 que 'le commissionnaire s’engage formellement à ne vendre dans son magasin que les produits qui lui seront livrés par le commettant. En cas de non-respect de cette clause, le présent contrat sera résilié de plein droit sans qu’aucune mise en demeure ne soit nécessaire, tel que prévu à l’article 14".


Il résulte du procès-verbal d’huissier produit que Mme X vendait exclusivement des produits de prêt-à-porter de la société Mim.


En conséquence Mme X établit l’exercice, à titre de profession essentielle, de la vente de marchandises exclusivement fournies par la société Mim.

Sur le lieu d’exercice de l’activité


Il résulte de l’article 2 du titre I des conditions générales du contrat de commission-affiliation signé par les deux parties que 'Le présent contrat autorise l’exploitation de l’activité Mim uniquement dans le cadre de ce seul point de vente. Il ne pourra déplacer son point de vente sans l’autorisation expresse du commettant'.


La société Mim a livré tout au long du contrat les marchandises dans le local, ainsi que le matériel publicitaire. Elle a contrôlé et audité le local à travers les visites de ses responsables régionaux.


L’article 1 du titre II relatif aux conditions particulières indique que 'Le commissionnaire exploitera son point de vente à l’adresse suivante: … '.


Il résulte de ces dispositions que Mme X exerçait sa profession dans un local agréé par la société Mim.

Sur les conditions d’exploitation et les prix


Les liquidateurs de la société Mim font valoir que les conditions d’exploitation n’étaient pas imposées mais seulement conseillées.
Si le contrat fait état dans son article 6 d’une assistance permanente, au travers de conseils réguliers sur toutes les procédures d’exploitation du concept et notamment pour la création de vitrines et la présentation de marchandises en rayon, en précisant que cette assistance n’aura rien de contraignant, il fait aussi mention de visites donnant lieu à rapport dont les conclusions s’imposent et devant conduire, en cas de manquements au concept Mim à ce qu’il y soit remédié dans les plus brefs délais.


De la même façon, le contrat de commission-affiliation imposait un mobilier suivant des plans très stricts fournis par la société Mim et imposait aussi le respect d’un manuel compilant les règles de fonctionnement du magasin et la nécessité d’adapter l’exploitation du magasin aux actualisations.


Ainsi Mme X n’organisait pas librement son espace de vente mais devait se référer, d’une part à 'la charte visuel Merchandising dans laquelle vous trouvez: […] les points essentiels à respecter en matière de Visuel Merchandising […] et d’autre part au 'book d’implantation où figurent toutes les consignes précises à respecter à chaque changement d’implantation ou de vitrine. Le book d’implantation est régulièrement mis à jour, toutes les trois semaines environ'.


Par ailleurs, la documentation régulièrement adressée par la société Mim qu’il s’agisse de ses envois papier ou courriels caractérise l’envoi régulier, non de conseils, mais bien de directives précises à Mme X, ainsi qu’il résulte de messages tels que 'Vous trouverez sur intranet sous CLV/TEMPORAIRE les PLV de l’opération à compléter et à positionner en magasin et en vitrine’ ou encore 'L’opération le 2ème article à 1€ continue jusqu’au jeudi 6 avril au soir'.


De la même façon, si les liquidateurs soutiennent que les prix n’étaient pas imposés mais seulement conseillés, il résulte du procès-verbal d’huissier versé aux débats par Mme X que la société Mim adressait des articles déjà étiquetés, ces prix étant les mêmes que ceux identifiés sur le site internet www.mim.fr géré par la société Mim.


Il résulte du livret CLV fourni par la société Mim qu’elle définissait les prix, par le biais d’envois réguliers contenant les étiquettes à afficher en magasin.


Par ailleurs, seule la société Mim pouvait programmer de manière informatique un prix, lequel s’affichait automatiquement sur la caisse lorsque la vendeuse scannait le code barre de l’article, conformément aux prescriptions du book de formation fourni par la société Mim.


Dans ce contexte, le fait que Mme X puisse rectifier manuellement un prix n’est pas de nature à contredire l’existence de prix, non pas conseillés, mais bien déterminés par la société Mim.


Il est enfin établi que les cartes de fidélité des clients de la boutique mises à disposition par la société Mim devaient être activées sur le site internet sans que Mme X ne puisse y faire de modification. L’adhésion à ce programme de fidélité était prévue par l’article 7-6 des conditions générales du contrat de commission-affiliation qui indique que 'Le commissionnaire s’engage à adhérer en toutes ses modalités au programme de fidélisation instituée par le Commettant, dont les conditions générales de fonctionnement sont communiquées sur le site www.mim.fr ou www.mim.com, rubrique carte de fidélité'.


En conséquence, Mme X établit qu’elle exerçait son activité selon les conditions et prix imposés par la société Mim.


Les conditions visées à l’article L7321-2 alinéa 2 du code du travail étant ainsi réunies, Mme X est bien fondée à se prévaloir à titre personnel du statut de gérant de succursale.

Sur la rupture de la relation de travail


Il résulte de l’article L7321-1 du code du travail que les règles du droit commun relatives à la rupture du contrat de travail s’appliquent au contrat de gérance de succursale.


Les liquidateurs de la société Mim et l’AGS sont fondés à soutenir que l’ouverture d’une liquidation judiciaire n’a pas en elle-même pour effet de mettre fin à un contrat de travail.


Le contrat de gérant de succursale n’a par ailleurs été formellement rompu ni par Mme X, ni par la société Mim.


Néanmoins, même en l’absence de rupture écrite, celle-ci peut se déduire d’actes positifs de l’employeur tel que le retrait des moyens matériels permettant au gérant de succursale d’exécuter le contrat.


En l’espèce, la société Mim a manifesté son intention de rompre la relation contractuelle qu’elle avait nouée avec Mme X en sa qualité de gérant de succursale en arrêtant sa propre activité et avec elle la fourniture des prestations objet de la convention conclue, ne lui permettant plus de disposer de la marchandise de la marque Mim.


Dès lors, l’arrêt de l’activité de la société Mim au 26 avril 2017 constitue un acte positif caractérisant son intention de rupture de sa relation contractuelle avec Mme X.


La rupture de cette relation contractuelle imputable à la société Mim produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.


Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes relatives à l’exécution du contrat de gérance de succursale

Sur la classification de référence


Pour déterminer la classification d’un salarié, il convient de rechercher les fonctions réellement exercées par celui-ci au regard de la grille de classification fixée par la convention collective.


L’article L2261-2 du code du travail dispose que la convention collective applicable est celle dont relève l’activité principale exercée par l’employeur.


En l’espèce, s’il n’est pas contesté par les parties que l’activité principale de la société Mim est le commerce de détail d’habillement en magasin spécialisé, Mme X soutient que la convention collective applicable est celle du commerce de détail de l’habillement et des articles textiles du 25 novembre 1987 au motif que le code Naf de la société commissionnaire de Mme X renvoie à cette convention.


Toutefois, outre que la convention collective applicable doit être déterminée au regard de l’activité de l’employeur et non de la société commissionnaire, cette convention précise, en son article 1er, que 'n’entrent pas dans le champ d’application les entreprises à succursales, c’est-à-dire les entreprises ou groupes d’établissements commerciaux placés sous une direction centrale commune qui exploitent, suivant les mêmes méthodes de gestion commerciales et comptables, au moins cinq fonds de commerce de vente au détail de l’habillement situés dans les lieux divers'.


Les représentants de la société Mim et l’AGS CGEA Ile de France Est se réfèrent à la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d’habillement du 30 juin 1972 qui indique en son article 1er :

'La présente convention règle sur l’ensemble du territoire national, les rapports entre employeurs et salariés des maisons de vente et des sièges des entreprises à succursales dont l’activité principale est le commerce de détail d’habillement et d’articles textiles, rubriques 64-11 et 64-14 de la nomenclature des activités et produits du 9 novembre 1973 (à l’exclusion des entreprises de commerce de détail des tapis et moquettes).

Par entreprise à succursales de vente au détail d’habillement, il convient d’entendre l’entreprise ou le groupe d’établissements commerciaux placés sous une direction centrale commune qui exploite, suivant les mêmes méthodes de gestion commerciales et compatbles, au moins 5 fonds de commerce de vente au détail d’habillement et d’articles textiles situés dans des lieux divers'


La relation de travail de Mme X ayant été requalifiée en gérance de succursale, la convention collective applicable est bien la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d’habillement du 30 juin 1972.


Au temps de la relation de travail, cette convention ne comportait pas de grille de classification mais distinguait les catégories 'employés’ et 'cadres'.


L’avenant cadres figurant en annexe I de la convention collective applicable dispose que relève de la catégorie A (position I ou II) le :

'Cadre d’exécution ou cadre débutant, diplômé d’enseignement supérieur ou issu de la maîtrise, pouvant avoir un commandement, le cas échéant, sur un ou plusieurs employés et sous les ordres d’un cadre de catégorie supérieure, notamment :

- analyste-programmeur ;

- sous-directeur de magasin ;

- directeur débutant de magasin ;

- directeur de magasin à structure simple ;

- chef du secrétariat de direction générale'.


Ce même avenant précise que 'les positions I et II constituent des critères d’appréciation et de promotion dans chaque catégorie'.


En l’espèce, il résulte des termes du contrat de commission-affiliation que Mme X était en charge de la gestion de ses équipes et de son magasin selon les règles de merchandising prescrites et aux prix déterminés par la société Mim, mais qui lui laissait toute latitude en matière de recrutement et de gestion de son personnel.

Mme X disposait donc d’une certaine liberté d’initiative et d’un pouvoir dans la gestion de sa structure.


Il s’en déduit, compte tenu des responsabilités qui étaient les siennes, que les fonctions effectives de Mme X était celles de directeur de magasin à structure simple et que son emploi correspond à un emploi de cadre catégorie A position II.

Sur les demandes de rappels de salaire

Sur la prescription


Il résulte de l’article L3245-1 du code du travail, dans sa version applicable depuis le 17 juin 2013, que l’action en paiement ou en répétition de salaire se prescrit à l’expiration du délai de trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture.


Il est constant que cette règle se transpose au contrat de gérance de succursale.


En l’espèce, la prescription triennale s’applique aux demandes de Mme X portant sur le rappel de salaire au titre de la classification et des heures supplémentaires. Le point

de départ de la prescription est le jour de la rupture du contrat de gérance fixé en l’espèce au 26 avril 2017.


Il en résulte que les demandes relatives aux rappels de salaire au titre de la classification et des heures supplémentaires ne sont pas prescrites.


Le jugement entrepris sera donc confirmé de ce chef.

Sur les demandes de rappels de salaire au titre de la classification


Les parties se bornant chacune à revendiquer l’application des minimaux conventionnels et en l’absence d’élément de comparaison produit par elles pour fixer le salaire de référence d’un gérant de succursale niveau cadre, telle que la rémunération de directeurs de magasin de la société Mim, il sera donc fait application des dispositions conventionnelles pour fixer la rémunération de Mme X.


Les liquidateurs de la société Mim produisent aux débats le tableau de rémunération des cadres issu de l’accord du 26 avril 2012 relatif aux salaires minimaux et aux primes au 1er juillet 2012 auquel ils se réfèrent expressément, et dont ils déduisent la rémunération de référence de Mme X.


En considération de ces dispositions le salaire de référence d’un cadre, catégorie A II est de 1830 euros.


L’article 11 de l’avenant cadres du 30 juin 1972, auquel l’accord du 26 avril 2012 fait expressément référence, prévoit également qu’une prime d’ancienneté est incluse forfaitairement dans la rémunération de base du salarié à compter de sa troisième année d’ancienneté.


En l’espèce, Mme X a eu trois ans d’ancienneté à compter du 24 juillet 2016 au sein de la société Mim.


Dès lors, compte tenu de la prime d’ancienneté à laquelle Mme X a droit depuis le 24 juillet 2016, il convient de fixer son salaire de référence à la somme de 1 868,77 euros bruts à compter de cette date, et à la somme de 1830 euros bruts pour la période antérieure au 24 juillet 2016.


Déduction faite de la rémunération brute perçue en cours de contrat, calculée en considération de la position de cadre de Mme X en appliquant à la rémunération nette un coefficient de 25% et non de 23%, il lui est dû un rappel de salaire de 36.233,93 €, outre 3.623,39 € au titre des congés payés afférents.


Le jugement entrepris sera infirmé de ce chef.

Sur les demandes de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires


Il résulte de l’article L7321-3 du code du travail en son alinéa 1er que les dispositions du code du travail relatives aux heures supplémentaires et aux congés payés ne sont applicables aux gérants de succursale que s’ils établissent que les conditions de travail, d’hygiène et de sécurité dans l’établissement sont fixés par l’entreprise qui fournit les marchandises ou si elles sont soumises à son accord.


Le contrat liant les parties stipule en son article 7 que Mme X assurera seule la gestion de son personnel et que celle-ci restera entièrement libre, durant toute la durée du contrat, des heures d’ouverture de son point de vente. De plus, aucune disposition du contrat n’est relative à la santé et à la sécurité au sein du magasin.


Il résulte de l’examen de ce contrat qu’aucune disposition n’imposait à Mme X les conditions de travail, de santé et de sécurité dans le magasin.


Contrairement à ce que soutient Mme X, il n’est pas démontré que la société Mim imposait la charge et le rythme du travail de ses salariés, les instructions données par celle-ci imposant seulement les conditions d’exploitation du magasin et les prix de vente des marchandises.


Or, en définissant librement les conditions de travail de ses salariés, Mme X pouvait organiser tout aussi librement ses propres conditions de travail et déterminer ses heures de présence au sein du magasin, dans la limite des conditions d’exploitation qui lui étaient imposées.


Par ailleurs, il n’est pas davantage établi que la société Mim procédait à un contrôle des conditions de travail de Mme X, les comptes-rendu de visite magasin produits aux débats portant uniquement sur la propreté du magasin, l’organisation des points de vente, la qualité de l’accueil clientèle et les résultats du magasin.


Dès lors, à défaut de tout autre élément, Mme X ne justifie pas que les conditions posées par l’article L7321-3 du code du travail étaient remplies pour bénéficier de l’application des dispositions relatives aux heures supplémentaires.

Mme X sera donc déboutée de sa demande de rappel de salaire relative aux heures supplémentaires.


Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.

Sur les demandes relatives à la rupture du contrat de travail

Sur l’indemnité de préavis


Selon l’article L1234-1 du code du travail, lorsque le licenciement n’est pas motivé par une faute grave, le salarié a droit s’il justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus d’au moins deux ans, à un préavis de deux mois.


Toutefois, les dispositions des 2° et 3° ne sont applicables que si la loi, la convention ou l’accord collectif de travail, le contrat de travail ou les usages ne prévoient pas un préavis ou une condition d’ancienneté de services plus favorable pour le salarié.


L’article L1234-5 dispose que lorsque le salarié n’exécute pas le préavis, il a droit, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice.


En application de l’article 13 de l’avenant cadres de la convention collective applicable Mme X a droit à un préavis de 3 mois sans considération d’ancienneté.

Mme X a droit, eu égard à son salaire mensuel brut de 1.868,77 €, à une indemnité compensatrice de 5.606,30 € et à 560,63 € au titre des congés payés afférents dont le conseil de prud’hommes a jugé à mauvais escient qu’ils n’étaient pas chiffrés alors qu’ils représentent nécessairement 10% du rappel de salaire.


Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur l’indemnité de licenciement


Selon l’article L1234-9 du code du travail, le salarié titulaire d’un contrat de travail à durée indéterminée, licencié alors qu’il compte une année d’ancienneté ininterrompue au service du même employeur, a droit, sauf en cas de faute grave, à une indemnité de licenciement.


Les modalités de calcul de cette indemnité sont fonction de la rémunération brute dont le salarié bénéficiait antérieurement à la rupture du contrat de travail. Ce taux et ces modalités sont déterminés par voie réglementaire.


L’article R1234-2 du code du travail dans sa rédaction applicable au présent litige, prévoit que l’indemnité de licenciement ne peut être inférieure à un cinquième de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoutent deux quinzièmes de mois par année au-delà de dix ans d’ancienneté.


Aux termes de l’article R1234-4 du code du travail 'Le salaire à prendre en considération pour le calcul de l’indemnité de licenciement est, selon la formule la plus avantageuse pour le salarié:

1° Soit le douzième de la rémunération des douze derniers mois précédant le licenciement ;

2° Soit le tiers des trois derniers mois. Dans ce cas, toute prime ou gratification de caractère annuel ou exceptionnel, versée au salarié pendant cette période, n’est prise en compte que dans la limite d’un montant calculé à due proportion'.


Les dispositions de l’article 16 de l’avenant cadres de la convention collective applicable ne sont pas plus favorables.


En considération de sa rémunération des trois derniers mois, plus favorable, et en considération de son ancienneté au terme de son préavis, l’indemnité due à Mme X s’élève à la somme de 1.495,01 €.


Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur les dommages et intérêts


Selon l’article L1235-3 du code du travail, si le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise, avec maintien de ses avantages acquis.


Si l’une ou l’autre des parties refuse, le juge octroie une indemnité au salarié. Cette indemnité, à la charge de l’employeur, ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice, le cas échéant, de l’indemnité de licenciement prévue à l’article L. 1234-9.


C’est vainement que Mme X souligne son investissement moral et financier tout en soulignant un manque de rentabilité pour caractériser la mesure de son préjudice, dès lors que ces éléments ne caractérisent pas le préjudice résultant de la rupture de la relation de travail.


En l’espèce, eu égard à l’ancienneté de Mme X, à son salaire mensuel brut et à ses perspectives de retrouver un emploi, son préjudice consécutif à son licenciement sans cause réelle et sérieuse sera réparé par l’allocation de la somme de 11.212,62 €.
Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur le remboursement à Pôle-emploi


Aux termes de l’article L1235-4 du code du travail, 'dans les cas prévus aux articles L. 1235-3 et L. 1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé.

Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées'.


Ce remboursement sera ordonné à hauteur d’un mois.


Il sera ajouté au jugement entrepris.

Sur la remise des bulletins de paie


La remise d’un bulletin de paie récapitulatif conforme, d’une attestation Pôle emploi et d’un certificat de travail rectifiés sera ordonnée à la diligence des mandataires liquidateurs dans le délai d’un mois suivant la signification de la décision.

Sur la garantie de l’AGS


En application des dispositions de l’article L3253-8 du code du travail, l’assurance mentionnée à l’article L3253-6 du code du travail couvre la créance de Mme X, tant au titre des rappels de salaire dus à la date du jugement de liquidation judiciaire que des créances résultant de la rupture du contrat de gérant de succursale intervenue dans les 15 jours de la liquidation judiciaire.


Il y a ainsi lieu de déclarer le présent arrêt opposable à l’AGS CGEA Ile de France Est qui sera tenue à garantie dans les termes et conditions des articles L3253-6 et suivants du code du travail, et les plafonds prévus aux articles L3253-17 et D3253-5 du code du travail.


Le Centre de Gestion et d’Etude AGS (CGEA) d’Ile de France Est ne devra faire l’avance de la somme représentant les créances garanties, et à l’exception de l’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile, que sur présentation d’un relevé du mandataire judiciaire et justification par celui-ci de l’absence de fonds disponibles entre ses mains pour procéder à son paiement.


Le jugement sera confirmé de ce chef.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

INFIRME le jugement en ce qu’il a débouté Mme X de ses demandes de rappel de salaire au titre de sa classification et au titre des congés payés afférents à l’indemnité compensatrice de préavis, et quant aux montants accordés au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, de l’indemnité de licenciement et des dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail,

LE CONFIRME pour le surplus,

Et statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

FIXE la créance de Mme X au passif de la liquidation judiciaire de la société Mim, représentée par ses liquidateurs Maître A et la SELARL JSA, aux sommes suivantes:


- 36.233,93 € à titre de rappel de salaire outre 3.623,39 € au titre des congés payés afférents,


- 5.606,30 € à titre d’indemnité compensatrice de préavis outre 560,63 € au titre des congés payés afférents,


- 1.495,01 € à titre d’indemnité de licenciement,


- 11.212,62 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

ORDONNE à Maître A et la SELARL JSA, es qualités de rembourser au Pôle Emploi les indemnités de chômage versées à Mme X, du jour de son licenciement au jour du prononcé du jugement dans la limite de un mois des indemnités versées;

ORDONNE la remise par Maître A et la SELARL JSA, es qualités, d’un bulletin de paie récapitulatif conforme, d’une attestation destinée à pôle emploi et d’un certificat de travail rectifiés dans le délai d’un mois;

DIT que l’UNEDIC Délégation AGS Ile de France Est à qui le présent arrêt est opposable doit sa garantie dans les limites légales;

CONDAMNE Maître A et la SELARL JSA, es qualités aux dépens.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE 1. E F G H

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Cour d'appel de Paris, Pôle 6 - chambre 6, 26 janvier 2022, n° 20/02038