Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 3 novembre 2020, n° 19/02352

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Poitiers, 2e ch., 3 nov. 2020, n° 19/02352
Juridiction : Cour d'appel de Poitiers
Numéro(s) : 19/02352
Décision précédente : Tribunal de commerce de La Rochelle, 5 mai 2019
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

ARRET N°391

N° RG 19/02352 – N° Portalis DBV5-V-B7D-FZKU

Ste Coopérative banque Pop. CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU -CHARENTES

C/

X

Y

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2e Chambre Civile

ARRÊT DU 03 NOVEMBRE 2020

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/02352 – N° Portalis DBV5-V-B7D-FZKU

Décision déférée à la Cour : jugement du 06 mai 2019 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de LA ROCHELLE.

APPELANTE :

CAISSE D’EPARGNE ET DE PREVOYANCE AQUITAINE POITOU-CHARENTES

[…]

[…]

Ayant pour avocat plaidant Me François GOMBAUD de la SCP GOMBAUD COMBEAU COUTAND, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.

INTIMES :

Monsieur C X

né le […] à PÉRIGUEUX

[…]

[…]

Madame E Y

née le […] à […]

[…]

[…]

Ayant tous les deux pour avocat plaidant Me Maïa MEUNIER, avocat au barreau de LA ROCHELLE-ROCHEFORT.

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des articles 907 et 786 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue le 15 Septembre 2020, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant :

Monsieur Emmanuel CHIRON, Conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président

Madame Sophie BRIEU, Conseiller

Monsieur Emmanuel CHIRON, Conseiller

GREFFIER, lors des débats : Madame G H,

ARRÊT :

—  CONTRADICTOIRE

— Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

— Signé par Monsieur Jean-Pierre FRANCO, Président, et par Madame G H,
Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

OBJET DU LITIGE

M. C X, qui exerce la profession de boulanger et Mme E Y sont liés par un pacte civil de solidarité enregistré le 29 novembre 2006 par le greffe du tribunal d’instance de La Rochelle.

Ils sont associés à parts égales et cogérants de la société à responsabilité limitée Couleurs des sables, constituée le 8 décembre 2009 exploitant un fonds de commerce de boulangerie pâtisserie situé […] ; M. X en est actuellement le seul gérant.

Le couple a constitué le 14 octobre 2011 une nouvelle société à responsabilité limitée dénommée Senteur d’épeautre, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 21 novembre 2011, dont ils étaient associés à parts égales et cogérants, aux fins d’acquisition d’un fonds artisanal de boulangerie ' pâtisserie situé […], cédé par acte du 31 janvier 2012 par la SARL Au Pain Rôti

La Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes a consenti divers prêts à cette société :

— le 25 janvier 2012, un prêt n°8987386 d’un montant de 417.492 € destiné à l’acquisition de ce fonds, remboursable après période de préfinancement de 24 mois en 120 échéances mensuelles de 4

558,94 euros assurance incluse, au taux de 4,200 %, soit un taux annuel effectif global de 6,43 %, et garanti, outre un cautionnement d’une société de caution à hauteur de 50 % et une subrogation dans le privilège du vendeur de fonds de commerce par le cautionnement personnel et solidaire de M. X et Mme Y à hauteur de 25 % chacun dans la limite de la somme de 135.684,90 € chacun, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, formalisé par acte séparé comportant la mention manuscrite du même jour (les échéances étant portées à 3 979,02 euros sur 117 mois par avenant du 14 novembre 2013) ;

— le 23 août 2012, un prêt n°9082981 de 40.000 € destiné à financer l’acquisition de matériel et la réalisation de travaux d’aménagement, remboursable en 84 échéances de 559,83 euros assurances incluses, au taux de 3,950 % fixe (taux annuel effectif global de 4,96 %), également cautionné par les associés cogérants à hauteur de 50 % soit dans la limite de la somme de 22.430,37 € chacun, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard, selon acte du 5 novembre 2013 (à l’occasion de la signature d’un avenant au prêt du même jour portant les échéances à 367,38 euros assurances incluses sur 118 mois)

— le 7 novembre 2013, un nouveau prêt n°9307746 d’un montant de 38.740 € remboursable en 120 échéances de 408,37 euros assurances incluses au taux de 4,140 % fixe (TEG de 5,34%) pour le financement de matériel et besoin de fonds de roulement, sous la garantie ' outre un nantissement de fonds de commerce – de M. X et Mme Y en qualité de caution (personnelle et solidaire) dans la limite de la somme de 24.700 € chacun, couvrant le paiement du principal, des intérêts et le cas échéant des pénalités ou intérêts de retard.

Par jugement du 13 septembre 2016, le tribunal de commerce de La Rochelle a prononcé le redressement judiciaire de la société Senteur d’épeautre, puis a converti cette procédure en liquidation judiciaire par jugement du 5 septembre 2017, la SCP I J étant désignée comme liquidateur judiciaire.

La Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes, qui a prononcé le 12 septembre 2017 la déchéance du terme des prêts compte tenu de la liquidation judiciaire intervenue, a mis les cautions en demeure, par courriers du 12 septembre 2017 distribués le 15 septembre 2017, de régler les sommes dues au titre des divers engagements.

Elle a déclaré ses créances auprès du mandataire judiciaire par courrier du 4 novembre 2016, pour 374 970 euros à titre privilégié et 42 230,07 euros à titre chirographaire. Cette déclaration a fait l’objet d’une contestation auprès du juge Commissaire de la liquidation de la SARL Senteur d’épeautre, qui, aux termes de trois ordonnances en date du 23 janvier 2018, en a prononcé l’admission pour « le montant du capital restant dû à la date de l’ouverture du redressement judiciaire, auquel sera appliqué le taux contractuel majoré de 1% pour les intérêts de retard ».

La Caisse d 'épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes a fait assigner selon exploit du 19 décembre 2017, devant le tribunal de commerce de la Rochelle, M. X et Mme Y en paiement des sommes dues en leurs qualités de cautions de la SARL Senteur d’épeautre,

Par jugement du 6 mai 2019, le tribunal de commerce de La Rochelle a :

Vu les articles 1103, 1104 (ancien 1134), 1343-2 (ancien 1154), 1902 et suivant, 2288 et suivants du code civil,

Vu les articles L,332-1, L.333-1, L.333-2, L.343-5 et L,343-6 du code de la consommation,

Vu les articles 515, 695, 696, 700 du code de procédure civile,

— dit que les engagements de caution pris par Mme E Y à l’égard de la Caisse d’épargne et

de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et le 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

— dit que les engagements de caution pris par M. C X à l’égard de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et 1e 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

En conséquence,

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 135 684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 135 684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 22 430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 22 430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 24 700 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9307746, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 24 700 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9307746, accordé à la SARL Senteur d’épeautre, ;

— dit qu’il n’y a pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire ;

— condamné la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes à payer par moitié à Mme E Y et à M. C X, la somme justement appréciée de 1 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du CPC ;

— condamné, conformément à ce qu’indique l’article 696 du CPC, la Caisse d’épargne au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe s’élevant à la somme de 88,93 € TTC.

Selon déclaration dématérialisée du 8 juillet 2019, la société coopérative Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions,

sauf en ce qu’il a dit qu’il n’y avait pas lieu d’ordonner l’exécution provisoire.

En cours de procédure et sur requête du mandataire en date du 14 octobre 2019, le tribunal de commerce de La Rochelle a prononcé le 19 novembre 2019 la clôture de la liquidation de la société Senteur d’épeautre pour insuffisance d’actif.

Dans ses dernières conclusions du 2 juillet 2020, la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes demande à la cour de réformer le jugement rendu le 6 mai 2019 par le tribunal de commerce de La Rochelle et de ;

Statuant à nouveau :

— débouter Mme E Y et M. C X de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;

Au titre du prêt n°8987386

— condamner M. C X à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 135 684,90 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 7,20 % à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— condamner Mme E Y à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 135 684,90 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 7,20 % à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— dire et juger que ces condamnations seront exécutées dans la limite de la dette de la société Senteur d’épeautre, soit 288 016,19 euros ;

Au titre du prêt n° 9082981

— condamner M. C X à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 22 430,37 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 6,95 % l’an, à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— condamner Mme E Y à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 22 430,37 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 6,95 % l’an, à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— dire et juger que ces condamnations seront exécutées dans la limite de la dette de la société Senteur d’épeautre, soit 27 188,04 euros ;

Au titre du prêt n° n°9307746

— condamner M. C X à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 24 700 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 7,14 % l’an, à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— condamner Mme E Y à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes la somme de 24 700 euros outre les pénalités et intérêts de retard, au taux contractuel de 7,14 % l’an, à compter du 8 septembre 2017 et jusqu’au parfait règlement ;

— dire et juger que ces condamnations seront exécutées dans la limite de la dette de la société Senteur d’épeautre, soit 32 040,75 euros ;

— condamner solidairement Mme E Y et de M. C X à payer à la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes une indemnité de 4 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

— condamner solidairement Mme E Y et de M. C X aux entiers dépens de première instance et d’appel.

M. C X et Mme E Y demandent à la cour selon conclusions du 18 juin 2020 :

Vu l’article L.332-1 du code de la Consommation, et les articles L.333-1, L.333-2, L343-5 et L343-6 du même code ;

Vu les explications ci-avant et les pièces produites à l’appui des présentes ;

A titre principal,

- confirmer en toutes ses dispositions le jugement entrepris et par conséquent :

— dire que les engagements de caution pris par Mme E Y à l’égard de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et le 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

— dire que les engagements de caution pris par M. C X à l’égard de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et le 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 135.684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 135.684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 22.430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 22.430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 24.700 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°9307746, accordé à la SARL

Senteur d’épeautre ;

— débouter la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 24.700€ outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n°9307746, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

A titre subsidiaire :

— dire et juger que le montant des créances de la Caisse d’épargne au titre des cautionnements ne peut excéder le capital restant dû au titre des prêts garantis à la date du jugement d’ouverture du redressement judiciaire, ni des intérêts de retard supérieurs à 1% conformément aux termes des Ordonnances du juge commissaire du 23 janvier 2018;

— dire et juger que la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes ne rapporte pas la preuve de ce qu’elle aurait rempli ses obligations d’information à l’égard des cautions telles que prévues par les dispositions de l’article L.333-1 du code de la consommation et celles de l’article L.333-2 du code de la consommation ;

— en conséquence, dire et juger que la Caisse d’épargne Aquitaine Poitou-Charentes n’est pas en droit de leur réclamer ni intérêts de retard ni pénalités ;

En tout état de cause,

— condamner la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes à payer par moitié à Mme E Y et à M. C X la somme de 1.500 euros au titre des frais irrépétibles de première instance ainsi qu’à une indemnité de 3000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel en application des dispositions de l’article 700 du CPC ;

— condamner la Caisse d’épargne au paiement des entiers dépens de première instance et d’appel.

Il est expressément référé aux dernières conclusions des parties pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 août 2020.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la disproportion de l’engagement de caution

L’article L.341-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, antérieure à celle issue de l’ordonnance du 14 mars 2016, devenu articles L.332-1 et L.343-4 du même code, dispose qu’un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation.

Au sens de ces dispositions, la disproportion s’apprécie, lors de la conclusion du contrat de cautionnement, au regard du montant de l’engagement ainsi souscrit et des biens et revenus de la caution, en prenant en considération son endettement global dont le créancier avait ou pouvait avoir connaissance, y compris l’endettement résultant d’autres engagements de caution.

En application des précisions apportées par la jurisprudence quant aux conditions de mise en oeuvre de l’article susvisé, il appartient à la caution de démontrer la disproportion alléguée au jour de la

conclusion de son engagement, mais, en revanche, c’est au créancier qui se prévaudrait de la disparition de la disproportion au moment de l’appel en garantie d’en rapporter la preuve.

La disproportion doit s’apprécier en fonction de tous les éléments du patrimoine de la caution, actifs comme passifs, en prenant en considération l’endettement global de la caution y compris celui résultant d’engagements de caution, et l’actif constitué par les parts sociales et la créance inscrite en compte courant d’associé dont est titulaire la caution au sein de la société cautionnée, mais pas au regard des revenus escomptés de l’obligation garantie, et, pour l’appréciation du patrimoine, le créancier peut se contenter de la déclaration effectuée dont il n’est pas tenu de vérifier l’exactitude, en l’absence d’anomalies apparentes. En outre, la disproportion du cautionnement s’apprécie en prenant en considération l’endettement global de la caution au moment où cet engagement est consenti, sans avoir à tenir compte de ses engagements postérieurs.

La disproportion du cautionnement aux biens et revenus de la caution suppose que cette dernière se trouve, lorsqu’elle s’engage, dans l’impossibilité manifeste de faire face à son obligation avec ses biens et revenus, la jurisprudence considère qu’il y a disproportion manifeste dès lors que l’engagement de la caution, même modeste, est de nature à la priver du minimum vital nécessaire à ses besoins et à ceux des personnes qui sont à sa charge.

La charge de la preuve du caractère disproportionné du cautionnement au moment de sa souscription pèse sur la caution. Le créancier professionnel n’est donc pas tenu, par les dispositions susvisées, de vérifier la situation financière de la caution lors de son engagement. Il incombe au créancier professionnel qui entend se prévaloir d’un contrat de cautionnement manifestement disproportionné lors de sa conclusion aux biens et revenus de la caution, personne physique, d’établir qu’au moment où il l’appelle, soit au jour où la caution est assignée, le patrimoine de celle-ci lui permet de faire face à son obligation.

En l’espèce, dès lors que les deux cautions garantissent solidairement la même dette unis par un pacte civil de solidarité et peuvent en conséquence se voir réclamer le paiement intégral de la dette, le caractère manifestement disproportionné de leur engagement s’apprécie au regard des revenus et du patrimoine de chacune d’entre elles..

Pour la détermination du patrimoine des cautions, celles-ci rappellent à bon droit qu’il n’y pas lieu de prendre en compte les revenus qu’elles pouvaient escompter de l’opération financée, et notamment ceux qu’elles auraient pu, selon la banque, se donner dans la nouvelle société Senteurs d’épeautre, nonobstant la constitution de comptes courants associés dans cette société confirmant, selon elle, les prévisions initiales de résultat.

En revanche, c’est à tort que les cautions soutiennent que le montant de leurs comptes courants associés doit être exclu de cette évaluation, dès lors que ces sommes sont disponibles par nature et que la circonstance que les sociétés n’étaient pas en mesure de rembourser (particulièrement ceux auprès de la société Senteurs d’épeautre qui sont des créances irrécouvrables) est sans incidence.

L’actif doit également comme le soutient la banque comprendre la valeur des parts dans la SARL couleur des sables, ainsi que pour les cautionnements postérieurs à sa constitution, la valeur de la société Senteurs d’épeautre. L’évaluation proposée par la banque sur la base du seul chiffre d’affaires (entre 75 et 90 % du chiffre d’affaires net) ne s’applique, selon les pièces n°49 et 50 fournies par la banque elles-mêmes, qu’au fonds de commerce ; elle n’est donc pas transposable à la société, dont la valorisation est fonction des éléments d’actif et de passif. Dès lors, en l’absence de toute allégation de plus ou moins-value latente des éléments d’actif et de passif, le premier juge a justement retenu les capitaux propres, dont le montant est par définition égal à la différence entre l’évaluation de l’actif net et des emprunts et dettes de la société, comme représentatifs de la valeur réelle des parts sociales ; ce critère sera donc retenu pour l’évaluation de la société.

Les cautions soutiennent également qu’il convient de prendre en compte leur engagement de caution antérieur pour 234 000 euros de capital restant dû (228 000 euros au 31 décembre 2011 et 204 283 euros au 31 décembre 2012), soit une charge annuelle de 88 329 euros, ce que la banque conteste au motif qu’il n’est pas démontré qu’ils étaient cautions solidaires du prêt à la Banque populaire, que le capital restant dû sur ce prêt au mois de janvier 2012 était de 222 793 euros et non 234 000 euros comme l’a retenu le tribunal, et que leur cautionnement ne porte pas sur la totalité du prêt.

Sur ce point, la cour rappelle que les cautions, sur qui repose la charge de la preuve du caractère manifestement disproportionné de leur engagement au regard de leurs revenus et patrimoine, ne justifient d’aucun élément permettant de corroborer leur déclaration dans les fiches patrimoniales des 28 septembre 2011 et 17 juillet 2012, dont la sincérité est contestée par la banque, d’un engagement de caution des engagements de la SARL Couleur des sables auprès de la Banque populaire pour un montant de 234 000 euros. S’il est exact que les comptes annuels de cette société mentionnent un prêt en cours auprès de cette banque pour un capital restant dû de 228 553,55 euros au 31 décembre 2011, compatible avec cette déclaration datant de septembre 2011, aucun élément produit ne démontre que ledit engagement était cautionné, ni l’étendue de l’engagement allégué. Il n’y a donc pas lieu d’inclure cet engagement de caution antérieur prétendu dans l’évaluation du patrimoine.

La situation patrimoniale et en termes de revenus des cautions sera évaluée en tenant compte de ces principes pour déterminer, lors de chaque cautionnement, le caractère disproportionné ou non de l’engagement.

Sur le cautionnement de janvier 2012

A la date du 25 janvier 2012, le patrimoine financier des cautions se composait, outre le compte ouvert au nom de M. X à la société BNP Paribas sur lequel se trouvait à la date du 2 janvier 2012, la somme de 69 749,82 euros (selon la pièce n°48 de l’appelante), et pour chacune des cautions, de la moitié du surplus de l’épargne déclarée dans ladite fiche pour le couple, à savoir le surplus des comptes déclarés à la BNP pour 19 910,74 euros, 20 000 euros d’assurance-vie au Crédit agricole, 6 000 euros de livret de développement durable, et 3 000 euros d’assurance-vie à AXA, représentant pour chaque caution une somme de 24 455,37 euros. La banque démontre également par les éditions informatiques produites en pièces 39 à 41 (confirmée par la production de la synthèse client à la date du 18 janvier 2012 et qui sont suffisamment probantes de la réalité de cette épargne) que les comptes ouverts au nom de M. X à la Caisse d’épargne, s’élevaient à 13 683,34 euros au 25 janvier 2012. Il en résulte concernant M. X une épargne totale égale à la somme de 107 888,53 euros et concernant Mme Y une épargne de 24 455,37 euros.

En outre, à la date du 31 décembre 2011, les capitaux propres de la société Couleur des sables s’élevaient à 25 639,61 euros, soit une valeur des parts de chaque caution évaluée à 12819,80 euros.

M. C X percevait à la date de l’engagement des ressources annuelles de 12521 euros (montant déclaré au titre de revenus salariaux ou assimilés sur l’année 2011), correspondant à la moyenne annuelle déclarée dans la fiche patrimoniale, alors que le couple avait la charge d’un enfant, Z née le […] ; son patrimoine se composait de l’épargne précitée, soit 107 888,53 euros, des parts de la société Couleur des sables, soit 12 819,80 euros, et enfin, du compte courant associé à son nom pour 64 061 euros au 31 décembre 2011, représentant un patrimoine total de 184 769,33 euros.

En l’absence de toute preuve d’un passif antérieur, et notamment du cautionnement déclaré dans la fiche patrimoniale auprès de la Banque populaire mais dont ni l’existence à la date du 25 janvier 2012, ni l’étendue n’est prouvée, ce cautionnement de 135 684,90 euros n’est pas disproportionné dès lors que le patrimoine de M. X permettait d’y faire face intégralement et que ses sources de revenus lui permettaient d’assurer le minimum vital pour lui et sa famille.

Mme Y disposait à cette même date de 20 000 euros de revenus salariaux ou assimilés déclarés sur l’année 2011 ' somme justifiée et qu’il convient de retenir malgré sa déclaration pour un montant inférieur dans la fiche patrimoniale – et était titulaire d’une épargne de 24 455,37 euros, outre la valeur de ses parts de la société Couleur des sables pour 12819,80 euros, et les 3800 euros en compte courant dans la même société. Elle était également titulaire de droits dans des biens immobiliers pour avoir reçu donation

— le 27 janvier 2011 de la nue-propriété d’un bien situé commune de Firbeix cadastré section C n°603, 604 et 605, de M. K Y né le […]

— le 26 mars 2007 de la pleine propriété des parcelles situées à Chalus, lieu-dit la Jaligne, cadstrées section C n°103,104,400 et 402 et de la moitié indivise en pleine propriété des parcelles D 102 387 et 389 dans la même commune, de Mme L Y née le […].

Il est établi par la demande de renseignements produite en pièces n°42 et 44 que les biens appartenant à Mme Y ont été évalués à 37 500 euros pour les parcelles C 603 à C 605 au 27 janvier 2011 et 5280 euros pour la donation du 26 mars 2007.

Ces mêmes biens ont été évalués, pour les premiers, le 14 juin 2019 à 75 000 euros pour la pleine propriété, et pour les seconds le 3 septembre 2019 à 6 000 euros, par M. M N, du cabinet Expertissimmo (pièces 43 et 45), soit compte tenu de l’âge des donateurs usufruitiers au 25 janvier 2012 et après application du barême fiscal une valeur de 37 500 euros (50 % de la pleine propriété) et 4 200 euros (70 % de la pleine propriété). Dès lors, ces biens peuvent être évalués, en retenant la date d’évaluation la plus proche du 25 janvier 2012, à respectivement 37 500 euros et 5 280 euros.

Il s’en évince que le patrimoine total de Mme Y s’élevait à 83 855,17 euros. Dans ces conditions, l’engagement de caution de 135 684,90 euros était manifestement disproportionné à son patrimoine et ses revenus dès lors que son patrimoine et ses revenus annuels étaient insuffisants pour y faire face à la date de leur souscription, la privant ainsi de toute possibilité d’assurer sa subsistance et celle de sa famille, notamment de l’enfant à charge.

Sur les cautionnements du 5 novembre 2013 concernant le prêt du 23 août 2012

Il résulte des avis d’imposition pour l’année 2013 que sur cette année, M. X et Mme Y ont respectivement déclaré 8660 euros et 8587 euros de ressources ; si la banque se prévaut de la fiche patrimoniale du 17 juillet 2012 mentionnant des revenus annuels 12 000 euros chacun, cet élément ne peut être retenu compte tenu de l’ancienneté de ce document, de 15 mois antérieur au cautionnement, ce qui empêche qu’il soit opposé aux cautions qui peuvent librement démontrer l’évolution de leurs revenus depuis cette déclaration.

Concernant l’épargne, c’est à bon droit que les cautions contestent le document interne à la banque, qui ne reprend que de simples mentions du chargé de clientèle et non signé par leurs soins quant à la réalité de leur épargne à cette date, de sorte que l’épargne de 128 000 euros dont 104 000 euros en externe qui y est portée ne peut être opposée aux cautions eu égard au principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même dont la liberté de la preuve en matière commercial n’exclut pas l’application. Toutefois, la banque rapporte également la preuve de ce que le PEL de M. X présentait un solde de 10 764,68 euros au 1er mai 2009 et jusqu’au 13 juillet 2016, et que le PEA présentait un solde de 485,63 euros du 18 juin 2013 au 13 février 2014 (mais sans indication de la valeur à cette date du livret A, le justificatif produit ne mentionnant le solde qu’au 31 décembre 2012) ; ces éléments peuvent être retenus en complément des mentions de la fiche patrimoniale relatives à une épargne de 3 000 euros auprès d’AXA et 22508,84 euros auprès de la BNP, de sorte que l’épargne totale de M. X, comprenant le compte n°000300061088 à la BNP ouvert à son seul nom pour 13883,24 euros, et les comptes PEL, PEA à la Caisse d’épargne pour 11 250,31 euros, et la moitié du surplus de l’épargne déclarée auprès d’AXA et de la BNP, soit 5 812,80 euros,

représentait une somme de 30 946,35 euros et celle de Mme Y une somme de 5 812,80 euros. En outre, les capitaux propres de la société couleur des Sables s’élevaient à la date du 31 décembre 2013, la plus proche des engagements souscrits, à 59 244,34 euros, soit une valeur de 29 622,17 euros pour chacun des associés, tandis que ceux de la société Senteur d’épeautre étaient négatifs, de sorte qu’aucune valeur ne peut être retenue concernant les parts sociales.

Il s’évince enfin de ce qui précède que l’éventuel cautionnement du prêt auprès de la Banque populaire, bien que mentionné dans la fiche patrimoniale du 17 juillet 2012 pour 417 000 euros ne peut être retenu comme un passif personnel des cautions. En revanche, c’est à tort que la banque estime qu’il n’y a pas lieu de retenir le premier cautionnement jugé disproportionné, dès lors qu’à la date de souscription du second engagement, il demeurait opposable à la banque.

Au regard de ces éléments et des principes rappelés ci-dessus, à la date de l’engagement du 5 novembre 2013, M. C X disposait de revenus de 8660 euros annuels et d’un patrimoine de 30 946,35 euros d’épargne, 29 622,17 euros de parts sociales, 79 951 euros de compte courant de la société Senteur d’épeautre et 58 312 euros de compte courant dans la société Couleur des sables selon le dernier élément d’évaluation fourni (au 31 décembre 2012) . L’engagement souscrit de 22 430,37 euros, auquel il convient d’ajouter l’engagement antérieur de 135 684 ,90 euros, soit un montant total de 158 115,27 euros, n’est ainsi pas manifestement disproportionné à ses biens et revenus, dès lors qu’il demeure inférieur à son patrimoine total de 198 831,52 euros.

Mme Y, qui disposait de 8587 euros de ressources, avait en revanche à la même date un patrimoine composé de son épargne pour 5 812,80 euros, des biens immobiliers dont l’évaluation pour 42 780 euros est inchangée, des parts de la société Senteur d’épeautre sans valeur positive, 29 622,17 euros de parts sociales de la société Couleur des sables et du compte courant de 285 euros dans la société Senteur d’épeautre, et selon le dernier élément d’évaluation fourni (au 31 décembre 2012), 4278 euros dans la société Couleur des sables, soit un patrimoine total de 82 777,97 euros. L’engagement total de 158 115,27 euros, premier engagement inclus, est ainsi disproportionné à ses biens et revenus.

Sur les cautionnements du 7 novembre 2013

A la date de ce cautionnement complémentaire de 24 700 euros, qui portait le montant total de l’engagement des cautions à 182 815,25 euros, les revenus et le patrimoine des cautions étant identique à ceux du 5 novembre 2013, soit concernant M. X, 8660 euros de ressources et 198 831,52 euros de patrimoine, au regard desquels les engagements, qui laissent subsister l’intégralité des ressources et une partie du patrimoine en cas d’appel total des cautionnements, n’apparaissent pas manifestement disproportionnés.

En revanche, concernant Mme Y au regard des revenus de 8587 euros et du patrimoine de 82 777,97 euros, cet engagement est, comme les deux précédents, manifestement disproportionné.

Sur le patrimoine des cautions à la date de mise en 'uvres des cautionnements

En l’espèce, dès lors que les cautionnements de M. X n’étaient pas, à leur date de souscription, manifestement disproportionnés à ses biens et revenus, il n’y a pas lieu de rechercher si à la date à laquelle cette caution a été appelée, son patrimoine lui permettait de faire face à son obligation.

Concernant Mme Y, la banque soutient à bon droit qu’il convient, pour procéder à cette appréciation, de se situer à la date de l’assignation soit le 19 décembre 2017.

Or sur l’année 2017, Mme Y avait perçu 20 026 euros de salaires et autres revenus salariaux selon sa déclaration d’imposition. Concernant son patrimoine, il demeurait composé de la moitié de la valeur de la société Couleur des Sables, laquelle sera évaluée, non comme le soutient la banque en

fonction de son chiffre d’affaires (méthode d’évaluation de la valeur du seul fonds de commerce et non de la société), mais en fonction de l’évaluation approfondie reposant sur une évaluation non seulement comptable mais encore économique du cabinet Aequalis à la somme moyenne de 136 000 euros (soit 68 000 euros pour Mme Y), outre le compte courant de 15 479,21 euros dans ladite société, et enfin, la valeur des deux immeubles qui sera prise en compte au regard de l’âge des donataires nu-propritéaires à la date du 19 décembre 2017 et conformément aux évaluations produites en pièces 43 et 45 à 37 500 euros et 4200 euros, soit un patrimoine total de 125 179,21 euros. La banque, sur qui repose la charge de la preuve de la détention par la caution d’un patrimoine suffisant, ne produit aucun élément à l’appui de son affirmation selon laquelle l’intéressée disposerait d’une épargne qu’elle ne déclare pas. Enfin, si Mme X fait état à la date du 9 décembre 2019 d’un engagement de caution dont l’encours était de 11 863,30 euros de capital restant dû concernant un prêt personnel à la Banque populaire, jusqu’au 4 septembre 2022, cette somme ne peut être retenue au passif faute de connaissance de la date de l’engagement initial, et de la limite du cautionnement en cause.

Au regard de ces éléments, et sans tenir compte des événements postérieurs dont se prévaut Mme Y (qui sont indifférents dans la capacité de la caution à faire face à ses engagements au moment où elle est appelée), il apparaît que l’engagement initial de 135 684,90 euros, est supérieur au montant du patrimoine et amputant de façon conséquente ses ressources alors qu’elle assume la charge de 3 enfants ( Z née le […], A née le […] et B née le […]) ; dès lors, la banque n’est pas fondée à se prévaloir de ce cautionnement, ni des deux cautionnements ultérieurs majorant le montant du passif.

Il y a donc lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a dit que les cautionnements de Mme Y étaient manifestement excessifs et que la banque ne pouvait s’en prévaloir, et a en conséquence débouté la banque de ses demandes à son encontre, et de l’infirmer en ce qu’il a dit que les cautionnements de M. X étaient manifestement excessifs et a rejeté les demandes de la banque à son encontre.

Sur l’information annuelle

Selon l’article L.341-1 du code de la consommation dans sa version applicable au litige antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-306 du 14 mars 2016 et recodifié aux articles L.333-1 et L.343-5 du code de la consommation, sans préjudice des dispositions particulières, toute personne physique qui s’est portée caution est informée par le créancier professionnel de la défaillance du débiteur principal dès le premier incident de paiement non régularisé dans le mois de l’exigibilité de ce paiement. Si le créancier ne se conforme pas à cette obligation, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retards échus entre la date de ce premier incident et celle à laquelle elle en a été informée.

En outre, selon l’article L.341-6 du même code, dans sa version applicable au litige antérieure à celle issue de l’ordonnance n°2016-306 du 14 mars 2016 et recodifié aux articles L.333-2 et L.343-6 du code de la consommation, le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. A défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information.

En application de ce texte, il incombe à l’établissement de crédit de démontrer par tous moyens qu’il a effectivement adressé à la caution l’information requise mais il n’a pas à établir que celle-ci l’a effectivement reçue ; la facturation de frais d’information de la caution et de son règlement, sans protestation, ou encore la seule production de la copie d’une lettre ne suffit pas à justifier de son

envoi et du respect, par l’établissement de crédit, de son obligation vis-à-vis de la caution. L’obligation d’information prévue par ce texte doit être respectée, même lorsque le cautionnement a été souscrit par un dirigeant de l’entreprise cautionnée qui en connaissait exactement la situation. Cette information doit être donnée jusqu’à l’extinction de l’obligation garantie par le cautionnement, y compris après l’exercice de poursuites et après le titre condamnant au paiement. En outre, la déchéance du droit aux intérêts ne vaut que pour les intérêts conventionnels, et non pour les intérêts au taux légal.

Les cautions soutiennent que la banque n’a pas respecté les obligations d’information prévues par les articles L.333-1 et L.333-2 du code de la consommation et encourt la sanction de l’article L.343-5 et 6 du même code, ce que la banque conteste en indiquant avoir informé les cautions dès le prononcé de la liquidation judiciaire et verser aux débats les courriers d’information annuelle.

Concernant l’information prévue par le premier de ce texte (soit dans sa version applicable au litige l’article L.341-1 du code de la consommation), il résulte des éléments produits aux débats que la première échéance impayée sur les prêts date du 5 septembre 2016 pour le prêt n°8987386 et du 5 octobre 2016 pour les prêts n°9082981 et 9307746 ; or la banque ne justifie d’une information aux cautions de la défaillance du débiteur principal qu’à la date du 17 septembre 2017 ; elle doit donc être déchue des intérêts et pénalités entre ces deux dates.

La Caisse d’épargne démontre en outre par production des pièces 25 et 26 produites aux débats l’édition d’avis d’information annuelle les 15 mars 2016 et 13 mars 2017 conformes aux prescriptions de l’article L.333-2 du code de la consommation, courriers dont les intimés ne contestent pas l’envoi ; en revanche, elle ne justifie pas du respect de cette obligation pour la période antérieure entre l’information devant intervenir au plus tard le 31 mars 2014 et celle devant intervenir au plus tard le 31 mars 2015.

Il en résulte que la banque doit également être déchue de son droit aux intérêts et pénalités, en l’absence de la première information annuelle, de la date de chacun des contrats (soit les 25 janvier 2012, 5 novembre 2013 et 7 novembre 2013) à la première information justifiée le 15 mars 2016, puis à compter du 13 mars 2017.

Compte tenu du cumul temporel de ces deux sanctions, la banque sera déchue de son droit aux intérêts et pénalités, jusqu’au 15 mars 2016, puis à compter du 5 septembre 2016 pour le prêt n°8987386 et du 5 octobre 2016 pour les prêts n°9082981 et 9307746.

Cette déchéance du droit aux intérêts ne fait en revanche pas obstacle au cours des intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017, date de distribution du courrier de mise en demeure conformément à l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil.

Sur les sommes demandées

L’ordonnance du juge-commissaire du 23 janvier 2018, qui a admis les créances de la banque pour le montant du capital restant dû à la date de l’ouverture du redressement judiciaire, auquel sera appliqué le taux contractuel majoré de 1% pour les intérêts de retard, est opposable à la caution sans faire obstacle à l’exception ci-dessus examinée tenant à la déchéance du droit aux intérêts qui lui est personnelle.

Il résulte du décompte produit en pièce n°36 qu’à la date de la liquidation judiciaire entraînant l’exigibilité des sommes dues, le capital restant dû sur le prêt 8987386 s’élevait à 234 282,44 euros, somme excédant à elle seule le montant garanti sans inclusion des intérêts et pénalités ; il convient donc de condamner M. C X au paiement de la somme de 135.684,90 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017.

A la même date, le capital restant dû sur le prêt n°902981 s’élevait à 22620,02 euros excédant également le montant garanti de 22.430,37 € que M. C X sera condamné à payer, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017.

Enfin, concernant le crédit n°9307746, la somme due en capital de 26 958,73 euros excède également le montant garanti de 24.700 €, somme au paiement de laquelle M. O X sera en conséquence tenu, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017.

Dès lors que M. X et la banque appelante succombent partiellement tant en première instance qu’en appel, il y a lieu, infirmant le jugement entrepris sur ce point, de les condamner au paiement chacun de la moitié des dépens de première instance et d’appel exposés et de dire n’y avoir lieu à indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour,

Confirme le jugement du 6 mai 2019 du tribunal de commerce de La Rochelle en ce qu’il a :

— dit que les engagements de caution pris par Mme E Y à l’égard de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et le 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 135 684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 22 430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner Mme E Y à lui payer la somme de 24 700 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9307746, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

Infirme ledit jugement en ce qu’il a :

— dit que les engagements de caution pris par M. C X à l’égard de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes, le 25 janvier 2012, le 5 novembre 2013 et 1e 7 novembre 2013 étaient disproportionnés à ses revenus et à son patrimoine lors de leurs conclusions et aux moments où la caution a été appelée de sorte que cette dernière est déchargée de ses engagements envers la banque ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 135 684,90 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 8987386, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de

condamner M. C X à lui payer la somme de 22 430,37 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9082981, accordé à la SARL Senteur d’épeautre ;

— débouté la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de sa demande de condamner M. C X à lui payer la somme de 24 700 € outre les pénalités de retard et intérêts de retard, au titre de son engagement de caution du prêt n° 9307746, accordé à la SARL Senteur d’épeautre, ;

— condamné la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes à payer par moitié à Mme E Y et à M. C X, la somme justement appréciée de 1 500 € au titre des dispositions de l’article 700 du CPC ;

— condamné, conformément à ce qu’indique l’article 696 du CPC, la Caisse d’épargne au paiement des entiers dépens de l’instance comprenant les frais du greffe s’élevant à la somme de 88,93 € TTC.

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :

— Dit que les cautionnements des engagements de la société Couleurs d’épeautre souscrits par M. C X auprès de la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine et Poitou-Charentes des 25 janvier 2012 (prêt n°8987386), 5 novembre 2013 (prêt n°9082981) et 7 novembre 2013 (prêt n°9307746), ne sont pas disproportionnés à ses biens et revenus ;

— Déchoit la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de son droit aux intérêts au titre desdits cautionnements de M. C X

— jusqu’au 15 mars 2016, puis à compter du 5 septembre 2016 pour le prêt n°8987386

— jusqu’au 15 mars 2016, puis à compter du 5 octobre 2016 pour les prêts n°9082981 et 9307746,

— Condamne M. C X au paiement à la société Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes de la somme de :

—  135.684,90 € avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017, au titre du prêt n°8987386 ;

—  22.430,37 € , avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017, au titre du prêt n°902981 ;

—  24.700 €, avec intérêts au taux légal à compter du 15 septembre 2017, au titre du crédit n°9307746

— Dit que les dépens de première instance et d’appel seront supportés pour moitié par M. C X d’une part, et par la Caisse d’épargne et de prévoyance Aquitaine Poitou-Charentes d’autre part ;

— Rejette les demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

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Cour d'appel de Poitiers, 2ème chambre, 3 novembre 2020, n° 19/02352