Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 9 avril 2021, n° 17/06841

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Chronologie de l’affaire

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Sur la décision

Référence :
CA Rennes, 8e ch prud'homale, 9 avr. 2021, n° 17/06841
Juridiction : Cour d'appel de Rennes
Numéro(s) : 17/06841
Dispositif : Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée

Sur les parties

Texte intégral

8e Ch Prud’homale

ARRÊT N°140

N° RG 17/06841, 17/06902 et 17/07010 joints -

N° Portalis DBVL-V-B7B-OIW4

SAS MANPOWER FRANCE

C/

-SA LA POSTE

-M. Z X

Infirmation partielle

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 09 AVRIL 2021

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,

Madame Isabelle LECOQ-CARON, Conseillère,

Monsieur Emmanuel ROCHARD, Conseiller,

GREFFIER :

Monsieur A B, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 14 Janvier 2021

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 09 Avril 2021 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANTE et INTIMÉE :

La SAS MANPOWER FRANCE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :

[…]

[…]

Représentée par Me Camille SUDRON substituant à l’audience Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocats postulants du Barreau de RENNES et par Me Florence FARABET-ROUVIER, Avocat plaidant du Barreau de PARIS

INTIMÉE et APPELANTE :

La SA LA POSTE prise en la personne de ses représentants légaux et ayant son siège social :

[…]

[…]

Représentée par Me Luc BOURGES de la SELARL LUC BOURGES, Avocat postulant du Barreau de RENNES et par Me Khaled AZZI, Avocat plaidant du Barreau de PARIS

INTIMÉ et appelant à titre incident :

Monsieur Z X

né le […] à […]

demeurant […]

[…]

Représenté par M. Stéphane TOMASZEK, Défenseur syndical SUD PTT 44-85, suivant pouvoir

Entre le 13 mai 2003 et le 15 février 2012, M. Z X a travaillé pour La Poste devenue la SA LA POSTE en étant mis à sa disposition par l’intermédiaire de la SAS MANPOWER devenue MANPOWER FRANCE, dans le cadre de divers contrats de travail temporaire.

Le 27 décembre 2012, M. Z X a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes afin de solliciter principalement la requalification de l’ensemble des contrats en un contrat à durée indéterminée à temps complet à compter du 13 mai 2003 et la condamnation de la SA LA POSTE à lui payer diverses sommes.

Le Syndicat SUD PTT LOIRE ATLANTIQUE est volontairement intervenu dans l’instance ouverte devant le conseil de prud’hommes de Nantes, pour solliciter la condamnation de la SA LA POSTE à lui payer des dommages-intérêts en raison du préjudice causé à la profession et à publier le jugement dans le journal d’entreprise.

La SAS MANPOWER FRANCE a été appelée en intervention forcée dans la même instance.

La cour est saisie de deux appels régulièrement formés les 27 septembre et 2 octobre 2017 par la SAS MANPOWER FRANCE et d’un appel régulièrement formé le 5 octobre 2017 par la SA LA

POSTE contre le jugement prononcé le 4 septembre 2017 par lequel le conseil de prud’hommes de Nantes a :

'Dit n’y avoir lieu à prononcer la jonction des instances introduites par M. X avec celles introduites par d’autres salariés opposant les mêmes parties en défense,

' Dit que les mandats présentés par le défenseur des salariés sont recevables, ainsi que les pièces et demandes formées dans ses conclusions,

' Dit que les demandes de requalification des contrats et toutes les demandes qui s’en déduisent ne sont pas prescrites,

' Constaté la recevabilité des demandes de M. X,

' Requalifié le contrat de travail en un contrat à durée indéterminée à temps complet depuis le 13 mai 2003,

' Dit recevable la demande formée par la SA LA POSTE d’intervention forcée et en garantie de la SAS MANPOWER,

' Condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER à payer à M. X les sommes suivantes :

—  5.719,88 € net à titre d’indemnité de requalification,

—  13.444,10 € brut à titre de rappel de salaires sur la période non prescrite,

—  1.344,40 € brut au titre des congés payés afférents,

—  1.617,70 € brut au titre du complément Poste sur la période non prescrite,

—  161,77 € brut au titre des congés payés afférents,

—  164,90 € brut au titre du complément géographique sur la période non prescrite,

—  16,49 € brut au titre des congés payés afférents,

—  214,10 € brut au titre de la prime de technicité sur la période non prescrite,

—  21,41 € brut au titre des congés payés afférents,

—  250 € net à titre d’indemnité par suite des manquements de l’employeur à ses obligations en matière de visites médicales,

' Dit que la rupture du contrat de travail intervenue le 15 février 2012 produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' Proposé la réintégration de M. X dans la SA LA POSTE et, en cas de refus par l’une ou l’autre des parties, condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER à lui payer 9.554 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

' Dit que les condamnations porteront intérêts au taux légal à compter du 4 septembre 2017 avec capitalisation des intérêts pour peu qu’ils soient dus pour une année entière,

' Ordonné à la SA LA POSTE de remettre à M. X un bulletin de paie rectificatif conforme au jugement,

' Condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER à payer à M. X la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

' Débouté M. X de ses demandes visant à ordonner la mise à niveau du salaire au 1er janvier 2013 selon les dispositions conventionnelles et des rappels des salaires au titre du salaire de base, du complément Poste, du complément géographique et de la prime de technicité, y ajoutant les congés payés afférents, pour la période allant du 1er janvier 2013 jusqu’au jugement,

' Débouté M. X de sa demande visant à dire que les livres I et II de la première partie du code du travail s’appliquent à sa situation, de constater l’absence de plan de sauvegarde de l’emploi, d’annuler le licenciement et d’ordonner sa réintégration,

' Débouté M. X de sa demande d’indemnité complémentaire au titre du préjudice moral et financier subi durant la période en mission d’intérim,

' Débouté le Syndicat SUD PTT LOIRE-ATLANTIQUE de toutes ses demandes,

' Débouté la SA LA POSTE du surplus de ses demandes,

' Débouté la SAS MANPOWER de toutes ses demandes,

' Limité l’exécution provisoire du jugement à celle de droit et fixé à 1.592,27 € le salaire mensuel moyen de référence,

' Condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER aux dépens, dont le remboursement à M. X de la somme de 35 € au titre de la contribution à l’aide juridique.

Non intimé, le Syndicat SUD PTT LOIRE ATLANTIQUE n’est pas intervenu dans l’instance d’appel.

Les trois procédures avaient fait l’objet d’un avis de fixation avec une clôture prévue au 17 mars 2020 pour une audience de plaidoirie prévue le 14 mai 2020. En raison de l’urgence sanitaire à ces dates, l’affaire a fait l’objet d’un nouvel avis de fixation, notifié aux parties le 16 juin 2020. Les ordonnances de clôture ont été prononcées le 7 janvier 2021 pour une audience de plaidoirie fixée au 14 janvier 2021.

Vu les conclusions au fond notifiées le 12 juin 2018 suivant lesquelles la SAS MANPOWER FRANCE demande à la cour de :

' Recevoir la SAS MANPOWER FRANCE en ses appels,

' Déclarer la SA LA POSTE non fondée en ses appels principal ou incident, en tant que dirigés contre elle,

A titre principal :

' Annuler le jugement en ce qu’il s’est prononcé sur des choses non demandées,

A titre subsidiaire :

' Infirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SAS MANPOWER FRANCE,

Et en toute hypothèse, statuant à nouveau :

' Prendre acte que M. X ne forme aucune demande à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE,

' Prendre acte que M. X ne formule aucun grief à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE,

' Déclarer la SA LA POSTE irrecevable et à tout le moins non fondée en sa demande de garantie et en l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE,

' Ordonner purement et simplement la mise hors de cause de la SAS MANPOWER FRANCE,

' Condamner toutes parties succombantes aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec distraction pour ces derniers au profit de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS.

Vu les conclusions notifiées le 17 mai 2018 suivant lesquelles la SA LA POSTE demande à la cour de :

' Rejeter la demande de jonction des instances successivement introduites,

' Rejeter les exceptions irrecevables de la SAS MANPOWER FRANCE,

' Déclarer irrecevable et mal fondée la SAS MANPOWER FRANCE en son appel,

'Réformer le jugement en ce qu’il a requalifié le contrat de travail de M. X en contrat à durée indéterminée à temps complet depuis le 13 mai 2003,

' Réformer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER FRANCE à payer à M. X diverses sommes à titre de salaires, accessoires de salaires, primes et indemnités en conséquence de la requalification à temps complet,

' Réformer le jugement en ce qu’il a condamné in solidum la SA LA POSTE et la SAS MANPOWER FRANCE à payer à M. X une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les intérêts et a ordonné la remise d’un bulletin de paie conforme au jugement,

' Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté M. X du surplus de ses demandes,

' Confirmer le jugement en ce qu’il a retenu la responsabilité de la SAS MANPOWER et l’a condamnée à garantir la SA LA POSTE de toute condamnation en principal, intérêts et frais,

Statuant à nouveau :

'Dire irrecevables les conclusions notifiées le 27 février 2018 par M. X, pour violation des articles 954, 960 et 961 du code de procédure civile,

' 'Dire et juger qu’il est impossible pour la Poste de produire des pièces contenant des informations confidentielles dont la méconnaissance est civilement et pénalement sanctionnée',

' 'Dire et juger que la Poste justifie d’un motif d’empêchement légitime lui interdisant de produire les pièces objet du litige et établir que les motifs de recours visés par les contrats objets du présent litige sont réels et conformes aux dispositions légales', qu’elle 'a justifié des motifs de recours dans la mesure de ces contraintes légales’ et que M. X 'refuse de justifier de ses réclamations visées dans ses conclusions',

'Rejeter en conséquence les prétentions de M. X en application des articles 4,5, 9, 15 et 16 du code de procédure civile pour 'atteinte aux droits de la défense et au principe de la contradiction',

' 'Constater que les parties ont exécuté le contrat de travail pendant plus de dix années sans en contester la teneur ni les effets sur la créance de salaire ou la nature de la relation',

' 'Dire et juger que cette exécution sans réserve vaut ratification en application de l’article 1338 alinéa 2 du code civil',

'Dire en conséquence M. X irrecevable à contester la relation contractuelle et à demander la requalification de celle-ci,

Sur le fond :

' 'Dire et juger que la requalification ne peut donner lieu au versement que d’une indemnité unique même si le juge requalifie une succession de contrats',

' Fixer l’indemnité de requalification à une somme équivalente à un mois de salaire en application de l’article L 1245-2 du code du travail,

' Rejeter toute autre demande injustifiée et infondée,

' 'Dire et juger que l’intimée ne démontre s’être tenu à la disposition de l’employeur',

'Dire la demande de requalification à temps complet 'injustifiée et abusive',

' Rejeter la demande de requalification à temps complet ainsi que les demandes incidentes de rappels de salaires, accessoires de salaires, primes et indemnités,

' Rejeter comme injustifiée toute autre demande indemnitaire de M. X,

En tout état de cause et ajoutant au jugement :

' Condamner la SAS MANPOWER à relever et garantir la SA LA POSTE de toutes condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre tant en principal, intérêts et frais à la demande de M. X,

' Condamner la SAS MANPOWER à réparer les préjudices qui pourraient être subis par la SA LA POSTE du fait de l’éventuelle requalification des contrats de mission objets du présent litige et des condamnations qui seraient prononcées à son encontre,

' Condamner M. X et tout succombant à lui payer la somme de 2.500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

' Condamner solidairement M. X et toutes parties succombantes aux entiers dépens de première instance et d’appel, avec distraction pour ces derniers au profit de la SELARL LUC BOURGES.

Vu les conclusions notifiées le 23 février 2018 par M. Z X,

Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions régulièrement notifiées par les parties.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

Il convient de rappeler à titre liminaire que par application de l’article 954, alinéa 3 du code de procédure civile, la cour ne statuera que sur les prétentions énoncées au dispositif des écritures des parties en cause d’appel, ce que ne sont pas au sens de ces dispositions des demandes visant seulement à 'dire’ ou 'constater’ un principe de droit ou une situation de fait.

Sur la demande de jonction des instances

Il y a lieu pour une bonne administration de la justice d’ordonner la jonction des trois procédures d’appel ouvertes dans le litige individuel opposant en cause d’appel la SAS MANPOWER FRANCE, la SA LA POSTE et M. X, ces trois instances ayant trait à la même affaire ayant donné lieu à une seule instance devant le conseil de prud’hommes de Nantes et au seul jugement prononcé à l’égard de ce salarié.

Sur la nullité du jugement

Au visa de l’article 5 du code de procédure civile, la SAS MANPOWER FRANCE fait observer que les premiers juges l’ont condamnée in solidum avec la SA LA POSTE alors même que M. X ne formait aucune demande à son encontre et sans débat contradictoire sur ses manquements à ses obligations, tels que retenus aux motifs du jugement.

La SA LA POSTE rétorque que la question des manquements de la SAS MANPOWER FRANCE a fait l’objet d’un débat contradictoire puisque la SA LA POSTE a formulé des demandes dans le cadre de son appel en garantie suivant ses conclusions, sur lesquelles le conseil de prud’hommes a statué en retenant la responsabilité solidaire de la SAS MANPOWER FRANCE par suite de son intervention forcée.

En droit, aux termes de l’article 5 du code de procédure civile visé par la SAS MANPOWER FRANCE :

'Le juge doit se prononcer sur tout ce qui est demandé et seulement sur ce qui est demandé.'

Au vu des écritures respectives des parties, il est exact que M. X n’a pas sollicité devant les premiers juges la condamnation de la SAS MANPOWER FRANCE. Néanmoins, cette société avait bien été appelée en intervention forcée par la SA LA POSTE qui sollicitait subsidiairement sa garantie pour toute condamnation prononcée à son encontre.

En ce qu’ils ont fait droit à l’appel en garantie formé par la SA LA POSTE qui portait sur l’ensemble des sommes que celle-ci était condamnée à payer à M. X, les premiers juges ayant statué dans la limite des demandes de la SA LA POSTE n’ont pas excédé leur pouvoir au sens de l’article 5 du code de procédure civile.

Par ailleurs, le jugement entrepris contient bien les motifs retenus par les premiers juges pour faire droit à cet appel en garantie.

La SAS MANPOWER FRANCE sera donc déboutée de sa demande en nullité du jugement, étant observé pour le surplus qu’il reviendra à la cour de statuer à nouveau sur le fond concernant les demandes soutenues à l’encontre de cette société et donc sur la condamnation prononcée par les premiers juges.

Sur l’irrecevabilité des écritures de M. X dans la procédure d’appel

A ce titre, la SA LA POSTE soutient que les conclusions notifiées le 27 février 2018 par le défenseur syndical de M. X ne comportent aucune des indications résultant des articles 954, 960 et 961 du code de procédure civile.

Aux termes de l’article 954 du code de procédure civile, applicable à la présente instance d’appel et visé par la SA LA POSTE :

'Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.

Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.

La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.

Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.

La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.

La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée

s’en approprier les motifs.

'

L’article 960 du code de procédure civile, également visé par la SA LA POSTE, est ainsi rédigé :

'La constitution d’avocat par l’intimé ou par toute personne qui devient partie en cours d’instance est dénoncée aux autres parties par notification entre avocats.

Cet acte indique :

a) Si la partie est une personne physique, ses nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance ;

b) S’il s’agit d’une personne morale, sa forme, sa dénomination, son siège social et l’organe qui la représente

légalement.

'

L’article 961 du même code précise :

'Les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la forme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l’alinéa 2 de l’article précédent n’ont pas été fournies. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu’au jour du prononcé de la clôture ou, en l’absence de mise en état, jusqu’à l’ouverture des débats.

La communication des pièces produites est valablement attestée par la signature de l’avocat destinataire apposée sur le

bordereau établi par l’avocat qui procède à la communication.

'

En l’espèce, l’acte de constitution du défenseur syndical de M. X, daté du 25 octobre 2017 et enregistré par le greffe le 26 octobre 2017, comporte bien les indications prévues par l’article 960 a) du code de procédure civile et n’est pas plus précisément critiqué par la SA LA POSTE.

Cependant, force est de constater au vu des conclusions d’intimée notifiées le 27 février 2018 dans l’intérêt de M. X, longues de 249 pages, que celles-ci évoquent tant sa situation que celle de

17 autres salariés également en litige avec la SA LA POSTE et font également état de demandes au nom du Syndicat SUD PTT LOIRE-ATLANTIQUE alors même que ce syndicat, débouté de ses demandes en première instance, n’est pas intimé et n’a pas formalisé une intervention volontaire en cause d’appel, mais que ces mêmes conclusions ne contiennent aucun dispositif récapitulant les demandes de M. X et ne sont donc pas conformes aux prescriptions de l’article 954 du code de procédure civile.

Les conclusions de l’intimé sont donc irrecevables, sans que cette irrecevabilité puisse être couverte par d’autres écritures notifiées à une date postérieure.

Il s’ensuit que par application du dernier alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, M. X qui n’a pas régulièrement conclu en cause d’appel est réputé s’approprier les motifs du jugement déféré.

Sur la requalification des contrats de travail

Pour infirmation à ce titre, la SA LA POSTE soutient principalement que cette demande est irrecevable au visa de l’article 1338 du code civil, du fait que les irrégularités alléguées ont été couvertes par les actes signés en toute connaissance de cause par le salarié et par l’exécution sans réserve des contrats pendant plusieurs années.

Subsidiairement et sur le fond, la SA LA POSTE soutient que le salarié n’a pas été employé de manière continue sur l’ensemble de la période visée et ne démontre pas s’être effectivement tenu à la disposition de La Poste durant les périodes séparant les différentes missions pour y effectuer un travail, de sorte qu’il doit être débouté de sa demande de requalification à temps complet ainsi que des demandes accessoires en découlant.

* Quant à la renonciation par M. X à la requalification des contrats :

Aux termes de l’article 1338 du code civil :

'L’acte de confirmation ou ratification d’une obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en rescision n’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de cette obligation, la mention du motif de l’action en rescision, et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée.

A défaut d’acte de confirmation ou ratification, il suffit que l’obligation soit exécutée volontairement après l’époque à laquelle l’obligation pouvait être valablement confirmée ou ratifiée.

La confirmation, ratification, ou exécution volontaire dans les formes et à l’époque déterminées par la loi, emporte la renonciation aux moyens et exceptions que l’on pouvait opposer contre cet acte, sans préjudice néanmoins du droit des

tiers.

'

En l’espèce, la SA LA POSTE vise essentiellement l’absence d’observation de M. X durant plusieurs années, mais ne produit aucune pièce caractérisant de manière plus précise une action volontaire de nature à établir une renonciation, en connaissance de cause, à la requalification du contrat de travail à quelque période que ce soit.

Le seul fait que de nombreux contrats ont été signés au fil des années ne permet pas de démontrer une telle renonciation au sens de l’article 1338 précité, ce dont il résulte que l’action en requalification formée par M. X ne peut être déclarée irrecevable pour ce motif, peu important à cet égard que les contrats conclus entre les parties aient été ou non conformes aux prescriptions du code du travail.

* Quant à la requalification en contrat à durée indéterminée :

En droit, par application des articles L.1242-1 et L.1251-5 du code du travail, ni un contrat à durée déterminée, ni un contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise.

Il en résulte que même si les contrats de mission successifs mentionnent un motif de recours qui est exact, le salarié peut demander la requalification de la relation de travail en contrat à durée indéterminée lorsque ses missions ont eu pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice.

En l’espèce, il résulte des débats que M. X a été recruté dans le cadre d’au moins 141 contrats de travail temporaire sur une période de 8 ans et 9 mois, de mai 2003 à février 2012.

Les premiers juges ont relevé que la SA LA POSTE ne fournissait aucun élément permettant de justifier de l’accroissement temporaire d’activité, alors que ce motif avait été présenté comme étant à l’origine de la plupart des contrats de travail temporaire, de manière habituelle à compter du 17 octobre 2004.

La SA LA POSTE qui reproche par ailleurs à M. X de ne pas justifier ses demandes, ne produit elle-même aucun autre élément et ne discute en cause d’appel ni le nombre total des contrats et notamment le tableau récapitulatif pris en considération par les premiers juges, ni que les nombreux contrats successifs ainsi conclus sur une longue période ont, dans les faits, pourvu durablement à un emploi lié à une activité normale et permanente.

Le jugement entrepris sera donc confirmé au titre de la requalification de la relation en un contrat à durée indéterminée à compter du premier contrat irrégulier, soit le 13 mai 2003, point de départ du premier contrat.

Par suite, le jugement sera également confirmé quant à la reprise d’ancienneté à cette même date.

* Quant à la requalification en contrat à temps complet :

La requalification en un contrat à durée indéterminée n’implique pas à elle seule celle de la relation de travail en un contrat à temps complet dès lors que les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail sont inchangées.

Néanmoins, le contrat de travail à temps partiel doit être écrit. A défaut ou en cas de non conformité du contrat écrit aux dispositions applicables, il peut être requalifié en un contrat à temps plein si l’employeur ne rapporte pas la preuve de la réalité du travail à temps partiel ; il revient à celui-ci d’établir, par tout moyen, la durée exacte de travail et de démontrer que le salarié n’était pas placé dans l’impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler, ni de se tenir constamment à sa disposition.

En particulier, selon leur rédaction applicable à la date des contrats en cause, les articles L.212-4-3 du code du travail, abrogé par l’ordonnance n°2017-329 du 12 mars 2007, puis l’article L.3123-14 créé par la loi n°2008-789 du 20 août 2008 C que le contrat de travail à temps partiel doit mentionner, entre autres éléments, la durée hebdomadaire ou mensuelle prévue et, sauf pour les salariés des associations et entreprises d’aide à domicile ou ceux relevant d’un accord collectif de travail conclu en application de l’article L. 3122-2, la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

Dans la présente affaire, les premiers juges ont relevé que les contrats de travail signés par M. X C pour une grande majorité d’entre eux un temps complet, ce qui n’est pas plus précisément discuté en cause d’appel.

En outre, la SA LA POSTE n’a produit aucun élément relatif à la répartition effective des horaires de travail dans le cadre des nombreux contrats à temps partiel ; elle n’apporte pas d’autre information permettant de déterminer les durées hebdomadaires ou mensuelles prévues, pas plus que leur répartition et ainsi d’établir que le salarié avait la possibilité de prévoir son rythme de travail et n’avait pas à se tenir constamment à disposition de l’employeur.

Dans ces circonstances, la relation de travail doit être requalifiée en un contrat à temps complet dès le point de départ du contrat à durée indéterminée, soit le 13 mai 2003, le jugement étant également confirmé de ce chef.

Sur les conséquences financières de la requalification

Pour infirmation à ce titre, la SA LA POSTE fait principalement observer que M. X n’a travaillé qu’à temps partiel de manière discontinue et a continué à travailler en intérim pour d’autres employeurs, qu’en outre ses tableaux sont erronés et :

— ne tiennent pas compte de la prescription quinquennale,

— portent sur les 12 mois de chaque année sans tenir compte des périodes non travaillées,

— incluent une demande de complément Poste ne correspondant pas aux règles internes,

— incluent des primes automatiques alors qu’elles doivent être justifiées au cas par cas,

— retiennent une base fixe alors que la base de calcul est variable chaque année.

* Quant à la prescription :

Par application de l’article L.3245-1 du code du travail en sa rédaction issue de l’article 16 de la loi n°2008-561 du 17 juin 2008, antérieure à la loi n° 2013-504 du 14 juin 2013, l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par cinq ans conformément à l’article 2224 du code civil.

En l’espèce, le délai de prescription a été interrompu par la saisine du conseil de prud’hommes effectuée le 27 décembre 2012. Il s’ensuit que les demandes de M. X ne sont pas prescrites, s’agissant de sommes réclamées sur une période postérieure au 27 décembre 2007 soit cinq années avant la saisine du conseil de prud’hommes.

* Quant aux salaires de base restant dus :

En droit, le travailleur dont la relation de travail est requalifiée en contrat à durée indéterminée ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées entre plusieurs missions ou contrats à durée déterminée que s’il s’est tenu à la disposition de l’entreprise pendant ces périodes interstitielles en vue d’effectuer un travail.

En l’espèce, la SA LA POSTE affirme, mais ne démontre pas, que M. X avait des périodes d’inactivité, pouvait effectuer d’autres missions auprès d’autres sociétés et parfois plusieurs missions et contrats de travail simultanément, ce qui ne ressort d’aucune pièce versée aux débats, alors que les éléments d’appréciation retenus par les premiers juges et non autrement discutés en cause d’appel par la SA LA POSTE démontraient qu’au vu de la quantité et de la récurrence des contrats, le salarié était, de fait, maintenu dans une situation lui imposant de se tenir même entre deux contrats à disposition de la SA LA POSTE et l’empêchait ainsi d’organiser à sa guise sa vie personnelle ou professionnelle, cette situation ayant perduré jusqu’au terme du dernier contrat.

M. X était donc fondé à solliciter un rappel de salaire sur l’ensemble de la période non

prescrite, mais seulement jusqu’au 15 février 2012, date d’expiration du dernier contrat, ce qui a été exactement pris en compte par les premiers juges.

Le décompte retenu au jugement entrepris n’est pas davantage discuté par la SA LA POSTE qui ne produit pas d’autre élément chiffré, en ce qui concerne le calcul des rappels de salaire et accessoires.

Au vu de ces éléments d’appréciation, le jugement entrepris sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la SA LA POSTE à payer à M. X un rappel de salaire s’élevant à 13.444,10 € brut sur la période non prescrite et 1.344,40 € brut au titre des congés payés afférents.

* Quant aux compléments de salaire :

Il résulte des débats que des compléments 'Poste’ et 'géographique’ devaient être réglés au salarié sur chaque période travaillée, ainsi que la prime de technicité et le complément pour charges de famille.

La SA LA POSTE critique les montants alloués à ce titre par les premiers juges, faisant suite à la décision de requalification du contrat, mais ne produit là encore aucun élément chiffré à l’encontre des calculs ainsi retenus.

Le jugement entrepris sera donc également confirmé quant à ces montants.

* Quant à l’indemnité de requalification :

Par application de l’article L.1245-2 du code du travail, lorsqu’il est fait droit à la demande de requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, une indemnité doit être accordée au salarié qui en a formé la demande, ne pouvant être inférieure à un mois de salaire.

Au vu des pièces communiquées, le salaire de référence de M. X s’élève au montant de 1.592,27 € brut par mois retenu par les premiers juges.

Compte tenu des circonstances rapportées dont il résulte que M. X a travaillé pour le compte de la SA LA POSTE en additionnant un grand nombre de contrats précaires sur une longue période (près de 9 années au total) sans visibilité quant à son avenir professionnel, il conviendra de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il lui a alloué une indemnité de requalification d’un montant de 5.719,88 € net.

Sur le suivi médical

Pour infirmation à ce titre, la SA LA POSTE fait principalement observer que M. X n’invoque aucun préjudice lié à l’absence de visite médicale d’embauche.

Il est constant que la SA LA POSTE ne justifie d’aucune visite médicale à l’embauche ni d’aucune surveillance de l’état de santé de M. X dans le cadre de leur relation de travail.

Néanmoins, M. X n’a formé aucune demande à ce titre durant l’exécution du contrat de travail ; d’autre part, les pièces soumises à la cour n’établissent aucun préjudice du fait de l’absence de visite médicale ou de suivi médical.

Le jugement entrepris sera donc infirmé en ce qu’il avait fait partiellement droit à cette demande de M. X.

Sur la rupture du contrat de travail

Il ressort des débats qu’aucun acte écrit n’a été établi par l’une ou l’autre des parties pour mettre fin au

contrat de travail à la date du 15 février 2012.

Dès lors que ce contrat est requalifié en contrat à durée indéterminée, sa rupture à cette date correspondant au terme prévu de la dernière mission de travail temporaire s’analyse dès lors en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Force est de constater en cause d’appel qu’aucune perspective de réintégration du salarié ne peut être envisagée de manière réaliste au vu des écritures respectives des parties, 9 années s’étant écoulées après la rupture du contrat. Le jugement entrepris sera réformé sur ce point.

En application de l’article L.1235-3 du code du travail selon sa rédaction applicable au présent litige, si un licenciement intervient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse et qu’il n’y a pas réintégration du salarié dans l’entreprise, il est octroyé à celui-ci, à la charge de l’employeur, une indemnité qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois.

Ces dispositions sont applicables en raison de l’ancienneté de M. X et de l’effectif de l’employeur ayant plus de dix salariés.

Compte tenu d’un salaire de 1.592,27 € brut par mois, de la perte d’une ancienneté de près de 9 années pour un salarié âgé de 47 ans ainsi que des conséquences matérielles et morales de la rupture à son égard, il conviendra d’allouer au salarié une somme de 9.554 € net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Le jugement entrepris sera également confirmé à ce titre.

Sur l’appel en garantie de la SAS MANPOWER FRANCE par la SA LA POSTE

Pour infirmation à ce titre, la SAS MANPOWER FRANCE soutient n’avoir commis aucune faute et fait observer pour l’essentiel qu’elle a seulement proposé des contrats de travail temporaire en fonction des besoins exprimés par la SA LA POSTE, que les contrats étaient réguliers en la forme, qu’elle n’est pas responsable de la gestion des ressources humaines de l’entreprise utilisatrice et ne dispose d’aucun moyen de surveillance et de contrôle de l’usage fait des contrats de mission, de telle sorte qu’aucune obligation ne saurait être mise à sa charge à ce titre.

Pour confirmation, la SA LA POSTE fait observer que la responsabilité de la SAS MANPOWER FRANCE est engagée y compris au titre des conditions d’exécution du travail temporaire et que celle-ci doit ainsi être condamnée à relever et garantir la SA LA POSTE de toutes condamnations prononcées à son encontre à la demande de l’intimé, ainsi qu’à réparer les préjudices subis par la SA LA POSTE du fait de l’éventuelle requalification des contrats de mission, objets du présent litige.

Elle fait essentiellement valoir que la responsabilité de la SAS MANPOWER FRANCE est engagée à l’égard :

— Du contenu des contrats de mission,

— Du non-respect du délai de carence ou de la signature tardive du contrat,

— De la rémunération,

— Des conditions d’exécution du travail temporaire.

En droit, il convient de rappeler que :

— Par application de L.1251-5 du code du travail, un contrat de mission, quel que soit son motif, ne peut avoir ni pour objet ni pour effet de pourvoir durablement un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise utilisatrice,

— L’article L.1251-35 du même code, en sa rédaction applicable du 1er mai 2008 au 19 août 2015, dispose que :

'Le contrat de mission est renouvelable une fois pour une durée déterminée qui, ajoutée à la durée du contrat initial, ne peut excéder la durée maximale prévue à l’article L. 1251-12.

Les conditions de renouvellement sont stipulées dans le contrat ou font l’objet d’un avenant soumis au salarié avant le

terme initialement prévu.

'

— A la même date, l’article L.1251-36 dispose que :

'A l’expiration d’un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin, ni à un contrat à durée déterminée ni à un contrat de mission, avant l’expiration d’un délai de carence calculé en

fonction de la durée du contrat de mission, renouvellement inclus (…)

'.

La SAS MANPOWER FRANCE est fondée à faire observer que dans le présent litige, M. Ya formé à son encontre aucune demande, en première instance comme en appel.

Néanmoins, l’entreprise de travail temporaire qui manque aux obligations qui lui sont propres en concluant avec un même salarié sur le même poste de travail des contrats de mission successifs sans respecter les dispositions légales applicables, peut engager sa responsabilité contractuelle dans ses rapports avec l’entreprise utilisatrice. Il importe en conséquence de rechercher si un manquement de l’entreprise de travail temporaire dans l’établissement des contrats de mise à disposition est à l’origine de la requalification en contrat à durée indéterminée et des condamnations en résultant.

En l’espèce, il résulte des débats que de nombreux contrats de travail temporaire se sont succédés, concernant M. X, pour divers motifs sur une période de près de neuf ans, dans le contexte d’un recours massif et contemporain de la part de la SA LA POSTE à ce type de contrats par l’intermédiaire de la SAS MANPOWER pour un nombre conséquent de salariés.

La SAS MANPOWER FRANCE ne verse aucune pièce relative à l’application du délai de carence dont elle ne conteste pas qu’il n’a pas été respecté. De plus, elle ne pouvait ignorer qu’au regard du nombre et de la durée de ces contrats signés à l’égard de M. X comme des autres salariés concernés, elle contribuait ainsi à l’organisation du travail mise en place par la SA LA POSTE permettant à cette entreprise utilisatrice d’éviter de faire signer à ses salariés des contrats à durée indéterminée afin de pourvoir, en réalité durablement, non à un besoin ponctuel ou temporaire de main-d’oeuvre mais à son activité permanente.

Pour autant, force est de constater à l’issue des débats que sur la même période, la SA LA POSTE recourait simultanément à de nombreux contrats à durée déterminée avec d’autres salariés sans l’intervention de cette entreprise de travail temporaire, mais avec la même finalité.

La SA LA POSTE, dont la dimension et la structuration des effectifs ne permettent en aucun cas de considérer qu’elle n’était pas informée des risques induits par sa politique de gestion des ressources humaines au regard des dispositions du code du travail applicables, ne produit aucun élément de nature à démontrer que le comportement de la SAS MANPOWER en tant qu’intermédiaire lui aurait causé un quelconque préjudice dans les circonstances ainsi rapportées.

Il s’ensuit que la SA LA POSTE doit être déboutée de son appel en garantie. Le jugement entrepris sera donc réformé en ce sens, les condamnations prononcées devant l’être à l’encontre de la SA LA POSTE seule.

Sur le remboursement des indemnités de chômage

Par application combinée des articles L.1235-3 et L.1235-4 du code du travail, lorsque le licenciement d’un salarié survient pour une cause qui n’est pas réelle et sérieuse, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées.

Sur ce fondement, il y a lieu de condamner la SA LA POSTE à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage payées, le cas échéant, à M. X à compter du jour de la rupture du contrat de travail, dans la limite de six mois d’indemnités.

Sur la remise des documents sociaux rectifiés

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a fait droit à cette demande.

Sur la capitalisation des intérêts

En application de l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu’elle est régulièrement demandée ; le jugement entrepris sera également confirmé à cet égard.

Sur les frais irrépétibles

Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant contradictoirement et en dernier ressort par arrêt mis à la disposition des parties au greffe,

ORDONNE la jonction des procédures RG n°17/06841, n°17/06902 et n°17/07010 sous le n°17/06841 ;

DÉBOUTE la SAS MANPOWER FRANCE de sa demande en nullité du jugement entrepris ;

DIT irrecevables les conclusions notifiées par M. Z X dans l’instance d’appel;

INFIRME partiellement le jugement entrepris,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

CONDAMNE la SA LA POSTE à payer à M. Z X :

—  5.719,88 € net à titre d’indemnité de requalification,

—  13.444,10 € brut à titre de rappel de salaires sur la période non prescrite,

—  1.344,40 € brut au titre des congés payés afférents,

—  1.617,70 € brut au titre du complément Poste sur la période non prescrite,

—  161,77 € brut au titre des congés payés afférents,

—  164,90 € brut au titre du complément géographique sur la période non prescrite,

—  16,49 € brut au titre des congés payés afférents,

—  214,10 € brut au titre de la prime de technicité sur la période non prescrite,

—  21,41 € brut au titre des congés payés afférents,

—  9.554 € net à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

DÉBOUTE M. Z X de sa demande au titre du manquement de l’employeur à ses obligations en matière de santé ;

DÉBOUTE SA LA POSTE de ses demandes à l’encontre de la SAS MANPOWER FRANCE ;

CONFIRME le jugement entrepris en ses autres dispositions ;

RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et que les autres sommes à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Et y ajoutant,

CONDAMNE la SA LA POSTE à rembourser aux organismes concernés les indemnités de chômage payées à M. Z X dans la limite de six mois d’indemnités ;

DÉBOUTE la SA LA POSTE de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la SA LA POSTE aux dépens de première instance et d’appel incluant la contribution à l’aide juridique.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.

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Cour d'appel de Rennes, 8ème ch prud'homale, 9 avril 2021, n° 17/06841