CAA de VERSAILLES, 4ème chambre, 5 janvier 2021, 16VE03356, Inédit au recueil Lebon

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Chronologie de l’affaire

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Conclusions du rapporteur public · 13 février 2024

N° 460187 –M. SA... 5ème et 6ème chambres réunies Séance du 19 janvier 2024 Décision du 13 février 2024 CONCLUSIONS M. Florian ROUSSEL, Rapporteur public La sclérose amyotrophique latérale, dite « maladie de Charcot », est une pathologie neurodégénérative rare, sans traitement véritablement efficace à ce jour, qui provoque une paralysie progressive de l'ensemble de la musculature squelettique, puis des troubles de la déglutition, avant d'affecter également les muscles respiratoires. Les témoignages de patients, devenus « prisonniers de leur propre corps », impuissants face à cette maladie …

 
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Sur la décision

Référence :
CAA Versailles, 4e ch., 5 janv. 2021, n° 16VE03356
Juridiction : Cour administrative d'appel de Versailles
Numéro : 16VE03356
Importance : Inédit au recueil Lebon
Type de recours : Plein contentieux
Décision précédente : Tribunal administratif de Versailles, 3 octobre 2016, N° 1407827
Dispositif : Satisfaction partielle
Identifiant Légifrance : CETATEXT000043013841

Sur les parties

Texte intégral

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme E… B… veuve H…, Mme C… H…, Mme F… H… et M. I… A… H…, agissant en qualité d’ayants droit de leur époux et père, M. A… H…, décédé le 20 mai 2012, ont demandé au tribunal administratif de Versailles de condamner le centre hospitalier sud francilien à leur verser une somme de 145 000 euros en réparation des préjudices qu’ils estiment avoir subis résultant des conditions de prise en charge de M. A… H… par cet établissement .

Par un jugement n°1407827 du 4 octobre 2016, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 novembre 2016, Mme E… B… veuve H…, Mme C… H…, et Mme F… H…, représentés par Me Sharr, avocat, demandent à la cour :

1° d’annuler le jugement n° 1407827 du 4 septembre 2016 du tribunal administratif de Versailles ;

2° de condamner le centre hospitalier sud francilien à leur verser une somme de 125 000 euros en réparation des préjudices qu’elles estiment avoir subis ;

3° de mettre à la charge du centre hospitalier une somme de 2000 euros au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

 – la décision d’arrêter les soins n’était pas justifiée alors que l’état de M. H… s’était amélioré ;

 – le centre hospitalier a manqué à son obligation de communiquer le dossier médical, certaines pièces se rapportant à un autre patient et d’autres étant manquantes ou illisibles ;

 – ils n’ont pas bénéficié de l’accompagnement prévu par la loi ;

 – la meilleure sécurité sanitaire n’a pas été assurée, M. H… ayant contracté une infection nosocomiale ;

 – les soins ont été interrompus dans un premier temps avant d’être partiellement repris sur plainte de la famille ; et le décès est intervenu à la suite de la diminution de la ventilation contrairement à ce qui est indiqué dans les rapports quotidiens.

………………………………………………………………………………………………………

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

 – le code de la santé publique ;

 – le code de la sécurité sociale ;

 – le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l’audience.

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du  :

 – le rapport de Mme Le Gars,

 – et les conclusions de Mme Grossholz, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1.M. A… H…, né en 1944, a subi un infarctus le 6 mai 2012. Il a été pris en charge par le SAMU et transféré au centre hospitalier sud francilien au service de réanimation. Il est décédé le 20 mai 2012. Le centre hospitalier a implicitement rejeté la demande de réparation présentée par son épouse et ses enfants. Par jugement du 4 octobre 2016 dont les consorts H… relèvent appel, le tribunal administratif de Versailles a rejeté leur demande de condamnation du centre hospitalier sud francilien à réparer les préjudices qu’ils estiment avoir subis du fait du décès de M. G….

Sur la responsabilité du centre hospitalier :

Sur la décision d’arrêter les soins :

2. Les requérantes soutiennent que la décision d’arrêter les soins prise douze jours après l’hospitalisation de M. H… est illégale dès lors que l’état du patient montrait des signes d’amélioration tels que l’apparition de réflexes cornéen et photomoteur bilatéral. Il ressort toutefois du compte rendu d’hospitalisation que le patient qui a subi le 6 mai 2012 un infarctus du myocarde par occlusion de l’artère coronaire droite, ne présentait toujours pas, au douzième jour d’hospitalisation de signe de réveil après l’arrêt des sédations, et que les réflexes observés relevaient de troubles myocloniques. Une première décision d’arrêt des soins en date du 10 mai 2012 a été prise, sans être mise en oeuvre à la suite de l’opposition de la famille. Le 18 mai, après confirmation du pronostic défavorable de l’encéphalopathie post-anoxique et une discussion collégiale avec quatre médecins, une seconde décision d’arrêt des soins a été prise qui n’a pas davantage été mise en oeuvre en raison de l’opposition manifestée par Mme H…. Le patient est décédé le 20 mai 2012. Il ne résulte pas de l’instruction et notamment des rapports quotidiens, que les soins auraient été arrêtés, même provisoirement, avant le décès de M. H…, ni la ventilation diminuée en dépit des décisions prises. Dans ces conditions les requérantes ne sont pas fondées à soutenir que la décision d’arrêter les soins aurait méconnu l’obligation de continuité des soins ou constituerait une faute ayant entraîné le décès de M. H….

Sur l’obligation de sécurité sanitaire :

3. Aux termes du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique : « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère. »

4. Les requérantes soutiennent que le centre hospitalier a manqué à son obligation d’assurer la meilleure sécurité sanitaire possible dès lors que le patient a contracté une infection nosocomiale, cette rubrique étant cochée à la fin du compte rendu d’hospitalisation. Toutefois aucune infection autre que la pneumopathie d’inhalation du patient lors de son admission, et traitée par l’administration d’un antibiotique, ne figure dans le compte rendu d’hospitalisation ou les rapports quotidiens. A supposer toutefois que la pneumopathie mentionnée ait été contractée par M. H… lors de sa prise en charge, son décès dû aux suites de son infarctus du myocarde n’est pas imputable à une telle infection. Par suite, cette infection n’est pas de nature à engager, en application des dispositions susvisées du I de l’article L. 1142-1 du code de la santé publique, la responsabilité du centre hospitalier.

Sur le non-respect de la dignité des personnes en fin de vie :

5. Aux termes de l’article L. 1110-9 du code de la santé publique : « Toute personne malade dont l’état le requiert a le droit d’accéder à des soins palliatifs et à un accompagnement. » ; aux termes de l’article L. 1110-10 du même code : « Les soins palliatifs sont des soins actifs et continus pratiqués par une équipe interdisciplinaire en institution ou à domicile. Ils visent à soulager la douleur, à apaiser la souffrance psychique, à sauvegarder la dignité de la personne malade et à soutenir son entourage. » et aux termes de l’article R. 4127-38 du même code : « Le médecin doit accompagner le mourant jusqu’à ses derniers moments, assurer par des soins et mesures appropriés la qualité d’une vie qui prend fin, sauvegarder la dignité du malade et réconforter son entourage. (…) ».

6. Les requérantes soutiennent qu’elles n’ont bénéficié d’aucun accompagnement lors de la décision d’arrêt des soins. Toutefois, pour douloureuse qu’elle puisse être, cette décision n’a pas été mise en oeuvre. En outre, il n’est pas contesté que Mme H… a refusé le soutien d’un psychologue proposé à plusieurs reprises. Enfin, si des propos maladroits ont pu être tenus par un médecin et une infirmière et que des rires de personnels soignants dans une salle jouxtant la salle d’attente ont pu être entendus alors que son mari agonisait, ces circonstances insuffisamment précises ne suffisent pas à caractériser une faute dans la prise en charge du patient ou l’accompagnement de la famille, de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier.

Sur la communication du dossier médical :

7. Aux termes de l’article L. 1111-7 du code de la santé publique dans sa rédaction en vigueur : " Toute personne a accès à l’ensemble des informations concernant sa santé détenues par des professionnels et établissements de santé (…)./ Elle peut accéder à ces informations directement (…)  ; En cas de décès du malade, l’accès des ayants droit à son dossier médical s’effectue dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l’article L. 1110-4 » ; qu’aux termes de l’article L. 1110-4 du même code : « Toute personne prise en charge par un professionnel, un établissement, un réseau de santé ou tout autre organisme participant à la prévention et aux soins a droit au respect de sa privée et du secret des informations la concernant./ Excepté dans les cas de dérogation, expressément prévus par la loi, ce secret couvre l’ensemble des informations concernant la personne venues à la connaissance du professionnel de santé, de tout membre du personnel de ces établissements ou organismes et de toute autre personne en relation, de par ses activités, avec ces établissements ou organismes. Il s’impose à tout professionnel de santé (…). Le secret médical ne fait pas obstacle à ce que les informations concernant une personne décédée soient délivrées à ses ayants droit, dans la mesure où elles leur sont nécessaires pour leur permettre de connaitre les causes de la mort, de défendre la mémoire du défunt ou de faire valoir leurs droits, sauf volonté contraire exprimée par la personne avant son décès » ;

8. Il résulte de l’instruction que si le centre hospitalier n’avait pas pour obligation de transmettre l’intégralité du dossier médical, mais les seules informations nécessaires à l’objectif de la demande, Mme G… a dû demander à plusieurs reprises la communication des électrocardiogrammes de son mari. Par ailleurs, certaines pièces transmises comportaient le nom d’un autre patient. Si le centre hospitalier soutient qu’après enquête auprès du SAMU et du service de cardiologie et du service de réanimation, les électrocardiogrammes concernaient bien M. H…, la communication du dossier médical de M. H… qui a justifié l’intervention du médiateur, n’a pas été effectuée dans des conditions satisfaisantes et constitue ainsi une faute de nature à engager la responsabilité du centre hospitalier. Il sera fait une juste appréciation du préjudice moral subi en fixant l’indemnité réparatrice à la somme de 1 000 euros pour chacune des requérantes.

9. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes sont seulement fondées à demander la condamnation du centre hospitalier sud francilien à leur verser une somme de 1 000 euros chacune en réparation du préjudice moral subi.

Sur les frais liés au litige :

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge du centre hospitalier le versement d’une somme de 1 500 euros à verser aux requérantes au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le centre hospitalier sud francilien est condamné à verser une indemnité de 1 000 euros à Mme E… H…, une indemnité de 1 000 euros à Mme C… H…, et une indemnité de 1 000 euros à Mme F… H….

Article 2 : Le jugement n°1407827 du 4 octobre 2016 du tribunal administratif de Versailles est réformé en ce qu’il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier sud francilien versera une somme de 1 500 euros aux requérantes au titre de l’article L.761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

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N° 16VE03356

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