Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 novembre 2020, 19-21.060, Publié au bulletin

  • Evènement irrésistible, imprévisible et inévitable·
  • Contrats et obligations conventionnelles·
  • Responsabilité contractuelle·
  • Exonération du créancier·
  • Exonération du débiteur·
  • Force majeure·
  • Exonération·
  • Définition·
  • Résolution du contrat·
  • Débiteur

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Aux termes de l’article 1218, alinéa 1, du code civil, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Il en résulte que le créancier qui n’a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure

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Sur la décision

Référence :
Cass. 1re civ., 25 nov. 2020, n° 19-21.060, Publié au bulletin
Juridiction : Cour de cassation
Numéro(s) de pourvoi : 19-21060
Importance : Publié au bulletin
Décision précédente : Tribunal d'instance de Manosque, 26 mai 2019
Textes appliqués :
article 1218, alinéa 1, du code civil.
Dispositif : Cassation
Date de dernière mise à jour : 4 novembre 2021
Identifiant Légifrance : JURITEXT000042619557
Identifiant européen : ECLI:FR:CCASS:2020:C100714
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Texte intégral

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION

______________________

Audience publique du 25 novembre 2020

Cassation

Mme BATUT, président

Arrêt n° 714 FS-P+B+I

Pourvoi n° J 19-21.060

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 25 NOVEMBRE 2020

La société Chaîne thermale du soleil, société par actions simplifiée, dont le siège est 32 avenue de l’Opéra, 75002 Paris, a formé le pourvoi n° J 19-21.060 contre le jugement rendu le 27 mai 2019 par le tribunal d’instance de Manosque, dans le litige l’opposant :

1°/ à M. L… H…,

2°/ à Mme F… H…,

domiciliés tous deux […],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Serrier, conseiller référendaire, les observations de la SCP Spinosi et Sureau, avocat de la société Chaîne thermale du soleil, de la SCP Rousseau et Tapie, avocat de M. et Mme H…, et l’avis de M. Lavigne, avocat général, après débats en l’audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Serrier, conseiller référendaire rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, M. Girardet, Mme Teiller, MM. Avel, Mornet, Chevalier, Mmes Kerner-Menay, Darret-Courgeon, conseillers, M. Vitse, Mmes Dazzan, Le Gall, Kloda, Champ, Comte, Robin-Raschel, conseillers référendaires, M. Lavigne, avocat général, et Mme Randouin, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal d’instance de Manosque, 27 mai 2019), rendu en dernier ressort, par acte du 15 juin 2017, M. et Mme H… ont souscrit un contrat d’hébergement auprès de la société Chaîne thermale du soleil (la société) pour la période du 30 septembre 2017 au 22 octobre 2017 pour un montant total de 926,60 euros, payé le 30 septembre 2017. Le 4 octobre, M. H…, hospitalisé en urgence, a dû mettre un terme à son séjour. Mme H… a quitté le lieu d’hébergement le 8 octobre.

2. Soutenant n’avoir pu profiter des deux dernières semaines de leur séjour en raison d’une circonstance revêtant les caractères de la force majeure, M. et Mme H… ont assigné la société en résolution du contrat et indemnisation.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

3. La société fait grief au jugement de prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017 et de la condamner au paiement d’une certaine somme, alors « que, si la force majeure permet au débiteur d’une obligation contractuelle d’échapper à sa responsabilité et d’obtenir la résolution du contrat, c’est à la condition qu’elle empêche l’exécution de sa propre obligation ; qu’en retenant que l’état de santé de M. H… était constitutif d’une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de la société à lui reverser les sommes perçues, quand ces difficultés de santé ne l’empêchaient aucunement d’exécuter l’obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier, le tribunal d’instance a violé l’article 1218 du code civil. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

4. M. et Mme H… contestent la recevabilité du moyen. Ils soutiennent qu’il serait contraire aux arguments développés par la société devant le tribunal d’instance.

5. Cependant la société a contesté l’application de la force majeure dans ses conclusions.

6. Le moyen est donc recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu l’article 1218, alinéa 1, du code civil :

7. Aux termes de ce texte, il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

8. Il en résulte que le créancier qui n’a pu profiter de la prestation à laquelle il avait droit ne peut obtenir la résolution du contrat en invoquant la force majeure.

9. Pour prononcer la résiliation du contrat à compter du 9 octobre 2017, après avoir énoncé qu’il appartenait aux demandeurs de démontrer la force majeure, le jugement retient que M. H… a été victime d’un problème de santé imprévisible et irrésistible et que Mme H… a dû l’accompagner en raison de son transfert à plus de cent trente kilomètres de l’établissement de la société, rendant impossible la poursuite de l’exécution du contrat d’hébergement.

10. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses constatations que M. et Mme H… avaient exécuté leur obligation en s’acquittant du prix du séjour, et qu’ils avaient seulement été empêchés de profiter de la prestation dont ils étaient créanciers, le tribunal a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, le jugement rendu le 27 mai 2019, entre les parties, par le tribunal d’instance de Manosque ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire d’Aix-en-Provence ;

Condamne M. et Mme H… aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt. MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Spinosi et Sureau, avocat aux Conseils, pour la société Chaîne thermale du soleil

Il est reproché à l’arrêt attaqué d’avoir prononcé la résiliation du contrat conclu le 15 juin 2017, à compter du 9 octobre 2017, et d’avoir condamné en conséquence la société Chaine Thermale du Soleil à payer aux époux H… la somme de 522,34 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 17 juin 2018 ;

Aux motifs que :

« L’article 1103 du code civil dispose que « les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits ».

L’article 1218 du code civil dispose que « Il y a force majeure en matière contractuelle lorsqu’un événement échappant au contrôle du débiteur, qui ne pouvait être raisonnablement prévu lors de la conclusion du contrat et dont les effets ne peuvent être évités par des mesures appropriées, empêche l’exécution de son obligation par le débiteur.

Si l’empêchement est temporaire, l’exécution de l’obligation est suspendue à moins que le retard qui en résulterait ne justifie la résolution du contrat. Si l’empêchement est définitif, le contrat est résolu de plein droit et les parties sont libérées de leurs obligations dans les conditions prévues aux articles 1351 et 1351-1 ».

L’article 1228 du code civil indique que « Le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts. »

L’article 1229 du Code civil dispose que « La résolution met fin au contrat.

La résolution prend effet, selon les cas, soit dans les conditions prévues par la clause résolutoire, soit à la date de la réception par le débiteur de la notification faite par le créancier, soit à la date fixée par le juge ou, à défaut, au jour de l’assignation en justice.

Lorsque les prestations échangées ne pouvaient trouver leur utilité que par l’exécution complète du contrat résolu, les parties doivent restituer l’intégralité de ce qu’elles se sont procuré l’une à l’autre. Lorsque les prestations échangées ont trouvé leur utilité au fur et à mesure de l’exécution réciproque du contrat, il n’y a pas lieu à restitution pour la période antérieure à la dernière prestation n’ayant pas reçu sa contrepartie ; dans ce cas, la résolution est qualifiée de résiliation.

Les restitutions ont lieu dans les conditions prévues aux articles 1352 à 1352-9. »

En l’espèce, il appartient aux époux H… de démontrer le cas de force majeure fondant leur demande de résolution du contrat litigieux.

Sur la qualité de partie au contrat de Monsieur L… H…, il ressort des documents fournis que si Madame F… H… apparait effectivement seule sur le contrat signé le 15 juin 2017, il est expressément précisé que seront hébergés deux adultes. En outre, par attestation du 8 octobre 2017, la résidence Le mistral CHAÎNE THERMALE DU SOLEIL a attesté de l’hébergement de Monsieur et madame H… L… du 30 septembre 2017 au 8 octobre 2017 au sein de son établissement. Ainsi, la CHAINE THERMALE DU SOLEIL ne peut légitimement soulever que son seul co-contractant serait Madame F… H….

Or, Monsieur et Madame H… versent aux débats des pièces médicales précises, les certificats médicaux fournis indiquant :

— en date du 4 octobre 2017, « l’état de santé de Monsieur H… L… nécessite l’arrêt total des soins thermaux de façon définitive à partir du 05.10.17 (journées non récupérables-pb de rétentions urinaire avec sondage).

Un bulletin de situation de la clinique du Cap d’or à la SEYNE SUR MER fait état de l’hospitalisation de Monsieur H… du 10 au 13 octobre 2017.

Ainsi, il ne fait aucun doute à la lecture de ces pièces que Monsieur L… H… n’était pas en capacité de poursuivre la cure, au sein de l’établissement LA CHAINE THERMALE DU SOLEIL, et ce à compter du 4 octobre 2017, suite à une « rétention urinaire ». Il est également établi qu’il a été hospitalisé à la SEYNE SUR MER, soit à plus de 130km de GREOUX LES BAINS à compter du 10 octobre 2017.

Il n’est pas contesté par l’établissement que Monsieur et Madame H… ont quitté les lieux le 8 octobre 2017.

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que les problèmes de santé de Monsieur L… H… qui nécessitaient l’arrêt immédiat de la cure, ont rendu impossible l’exécution du contrat conclu avec la CHAÎNE THERMALE DU SOLEIL, le concernant. Si Madame H… a pu rester dans la résidence jusqu’au 8 octobre 2017, son mari étant hospitalisé à proximité, il apparaît qu’elle s’est également retrouvée dans l’impossibilité de poursuivre la cure en raison du transfert de son époux à la SEYNE SUR MER, à plus de 130 km de l’établissement de la CHAINE THERMALE DU SOLEIL.

Or, rien n’indique que de problème de santé de Monsieur H… était prévisible pour Madame H… comme pour son époux, et ce même si celui-ci était âgé de plus de 70 ans au moment des faits. Au surplus, au regard de l’âge du couple, il est possible de dire que madame H… ne pouvait pas, sans aide extérieure, demeure seule à GREOUX LES BAINS tandis que son mari était hospitalisé à des centaines de kilomètres plus loins suite à une soudaine rétention urinaire nécessitant des soins importants.

Ainsi, il convient de prononcer la résiliation du contrat signé entre Madame H… et la CHAINE THERMALE DU SOLEIL le 15 juin 2017, à compter du 9 octobre 2017.

En conséquence, Monsieur et Madame H… sont redevables envers la CHAINE THERMALE DU SOLEIL, pour 9 jours d’hébergement, de la somme de 379,06 euros.

Ayant réglé la somme de 926,60 euros, étant précisé que l’établissement a remboursé 25,20 euros au titre de la taxe de séjour, la CHAINE THERMALE DU SOLEIL devra payer à Monsieur et Madame H… la somme de 522,34 euros, avec intérêt au taux légal à compter du 17 juin 2018. »

1°) Alors que, premièrement, si la force majeure permet au débiteur d’une obligation contractuelle d’échapper à sa responsabilité et d’obtenir la résolution du contrat, c’est à la condition qu’elle empêche l’exécution de sa propre obligation ; qu’en retenant que l’état de santé de M. H… était constitutif d’une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de l’exposante à lui reverser les sommes perçues, quand ces difficultés de santé ne l’empêchaient aucunement d’exécuter l’obligation dont il était débiteur, mais uniquement de profiter de la prestation dont il était créancier, le tribunal d’instance a violé l’article 1218 du code civil ;

2°) Alors que, deuxièmement, pour qu’un évènement de force majeure soit caractérisé, celui-ci doit avoir pour effet de rendre impossible l’exécution de son obligation par le débiteur ; qu’en retenant que l’état de santé de M. H… était constitutif d’une situation de force majeure, empêchant l’exécution de l’obligation pesant sur les époux H…, alors que ces derniers avaient déjà exécuté cette obligation, le tribunal d’instance n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant ainsi les articles 1218 du code civil et 455 du code de procédure civile ;

3°) Alors que, troisièmement, le débiteur d’une obligation contractuelle de somme d’argent inexécutée ne peut s’exonérer de cette obligation en invoquant un cas de force majeure ; qu’en retenant que l’état de santé de M. H… était constitutif d’une situation de force majeure de nature à justifier la résolution du contrat et la condamnation de l’exposante à lui reverser les sommes perçues, quand les époux H… étaient uniquement débiteurs d’une obligation de somme d’argent au titre du contrat litigieux, le tribunal d’instance a violé l’article 1218 du code civil ;

4°) Alors que, quatrièmement, lorsque le débiteur est informé, lors de la conclusion du contrat, de la possibilité de souscrire une assurance annulation couvrant ses éventuelles difficultés de santé, et qu’il refuse d’y souscrire, il ne peut se prévaloir d’un cas de force majeure en cas de réalisation du risque couvert par ledit contrat ; qu’en l’espèce, en s’abstenant de rechercher, comme il y était invité, si en refusant de souscrire au contrat d’assurance annulation proposé lors de la souscription du contrat d’hébergement, les époux H… n’avaient pas accepté d’assumer le risque lié à la survenance de difficultés de santé, en refusant de prendre les mesures permettant d’en éviter les effets, le tribunal d’instance a privé sa décision de base légale au regard l’article 1218 du code civil.

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