Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 7 octobre 2013, 356675, Publié au recueil Lebon

  • Appréciation de la régularité des opérations d'expertise·
  • Condamnation à une indemnité (art·
  • Frais et honoraires de l'expert·
  • Point de départ des intérêts·
  • Recours de plein contentieux·
  • Diverses sortes de recours·
  • Recours ayant ce caractère·
  • Caractère juridictionnel·
  • 2) voie de recours (art·
  • Caractère administratif

Chronologie de l’affaire

Résumé de la juridiction

Le recours dont l’ordonnance par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat liquide et taxe les frais et honoraires d’expertise peut faire l’objet en application des dispositions de l’article R. 761-5 du code de justice administrative est un recours de plein contentieux par lequel le juge détermine les droits à rémunération de l’expert ainsi que les parties devant supporter la charge de cette rémunération. ) L’ordonnance par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat liquide et taxe les frais et honoraires d’expertise revêt un caractère administratif et non juridictionnel…. ,,2) a) Le recours dont elle peut faire l’objet en application des dispositions de l’article R. 761-5 du code de justice administrative (CJA) est un recours de plein contentieux par lequel le juge détermine les droits à rémunération de l’expert ainsi que les parties devant supporter la charge de cette rémunération.,,,Par suite, le requérant ne peut utilement invoquer, pour contester le montant et la mise à sa charge des frais et honoraires de l’expertise arrêtés par l’ordonnance, les irrégularités formelles et procédurales qui l’affecteraient et tenant, d’une part, à son insuffisante motivation, d’autre part, aux circonstances que le président de la formation de jugement ayant prescrit l’expertise n’aurait pas été préalablement consulté, en violation de l’article R. 761-4 du CJA, et que les parties auraient dû recevoir communication par l’expert d’une copie de l’état de ses vacations, frais et débours ainsi qu’être invitées à présenter leurs observations sur cet état.,,,b) Les parties ont la faculté de contester devant le juge la détermination des frais et honoraires de l’expert ainsi que leur répartition, en demandant, au cas où elles n’auraient pas obtenu préalablement la communication de l’état des vacations, frais et débours de l’expert, que celui-ci leur soit communiqué. Par suite, une partie n’est pas fondée à soutenir que son droit à un recours effectif, au sens de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, aurait été méconnu au motif que l’état des frais des vacations, frais et débours de l’expert ne lui a pas été communiqué d’office avant l’intervention de l’ordonnance.,,,3) a) Il n’appartient pas au président de juridiction ou, au Conseil d’Etat, au président de la section du contentieux, taxant et liquidant les frais d’une expertise par décision administrative sur le fondement de l’article R. 621-11 du CJA, ni au juge saisi d’un recours contre cette ordonnance, de se prononcer sur la régularité des opérations de l’expertise.,,,b) Il leur incombe toutefois, dans l’appréciation portée sur l’utilité et la nature du travail fourni par l’expert, de prendre en considération, le cas échéant, les décisions juridictionnelles rendues sur une action en récusation de l’expert ou statuant au fond sur le litige ayant donné lieu à l’expertise…. ,,4) Il résulte des dispositions de l’article R. 621-13 du CJA, dérogeant sur ce point à l’article R. 761-1 du même code, que la répartition des frais et honoraires de l’expert entre les parties intervient dans les circonstances de l’espèce, compte tenu notamment de l’utilité de l’expertise pour ces parties, sans que cette répartition soit déterminée par la seule circonstance qu’une de ces parties l’a demandée ou, à l’inverse, en a contesté le bien-fondé…. ,,5) La décision par laquelle la juridiction administrative met les frais d’expertise à la charge d’une partie ayant le caractère d’une condamnation à une indemnité, au sens de l’article 1153-1 du code civil, les intérêts sur le montant des frais et honoraires de l’expert ne courent qu’à compter de la date à laquelle ils ont été fixés par la décision juridictionnelle.

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Sur la décision

Sur les parties

Texte intégral

Vu la requête sommaire et les mémoires complémentaires, enregistrés les 13 février, 15 février et 14 mai 2012 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présentés pour la société TP Ferro Concesionaria, dont le siège social est situé Carretera de Llesa – Hostalets, GIP 5107 PK, (Espagne), représentée en France par la société Eiffage TP, dont le siège est 2, rue Hélène Boucher à Neuilly-sur-Marne (93336), laquelle est elle-même représentée par ses représentants légaux ; la societé TP Ferro Concesionaria demande au Conseil d’Etat :

1°) d’annuler l’ordonnance n° 321392 du 11 janvier 2012 par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat a, d’une part, liquidé et taxé à la somme de 59 245,29 euros les frais de l’expertise ordonnée par le Conseil d’Etat statuant au contentieux par décision du 24 juillet 2009 et, d’autre part, dit que cette société supporterait la charge de ces frais et honoraires ;

2°) de mettre à la charge de la commune du Perthus les frais de l’expertise ou, à titre subsidiaire, de taxer et liquider le montant des frais et honoraires de l’expert à une somme inférieure à celle de 59 245,29 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Perthus le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

— le rapport de M. François Lelièvre, Maître des Requêtes,

— les conclusions de M. Gilles Pellissier, rapporteur public ;

La parole ayant été donnée, avant et après les conclusions, à la SCP Barthélemy, Matuchansky, Vexliard, avocat de la societé TP Ferro Concesionaria, à la SCP Boré, Salve de Bruneton, avocat de la commune du Perthus et à Me Carbonnier, avocat de M. A… ;

1. Considérant qu’il résulte de l’instruction que, par une décision du 24 juillet 2009, le Conseil d’Etat, statuant au contentieux, après avoir annulé l’ordonnance du 25 août 2008 du juge du référé de la cour administrative d’appel de Marseille et celle du 5 avril 2007 du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier ayant statué sur le fondement de l’article R. 532-1 du code de justice administrative en vertu duquel le juge des référés peut prescrire toute mesure d’expertise ou d’instruction, a ordonné, à la demande de la commune de Perthus, qu’il soit procédé à une expertise aux fins de déterminer notamment les risques de nuisances sonores et vibratoires prévisibles qui pourraient résulter du trafic ferroviaire sur le territoire de cette commune après la mise en service de la future ligne à grande vitesse entre Perpignan et Figueras ; que cette expertise a été confiée à M. B… A… ; que par l’ordonnance attaquée du 11 janvier 2012, prise sur le fondement des dispositions des articles R. 621-11, R. 621-13 et R. 761-4 du code de justice administrative, le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat a, d’une part, liquidé et taxé les frais et honoraires des opérations d’expertise et, d’autre part, mis à la charge de la société TP Ferro Concesionaria ces frais et honoraires ;

2. Considérant qu’en vertu des dispositions combinées des articles R. 621-1 et R. 621-2 du code de justice administrative, la juridiction peut ordonner avant dire droit une expertise et désigner, à cette fin, un ou, si elle l’estime nécessaire, plusieurs experts ; qu’aux termes de l’article R. 621-11 du code de justice administrative : « Les experts et sapiteurs mentionnés à l’article R. 621-2 ont droit à des honoraires, sans préjudice du remboursement des frais et débours. / Chacun d’eux joint au rapport un état de ses vacations, frais et débours. / (…) / Le président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement, ou, au Conseil d’Etat, le président de la section du contentieux fixe par ordonnance, conformément aux dispositions de l’article R. 761-4, les honoraires en tenant compte des difficultés des opérations, de l’importance, de l’utilité et de la nature du travail fourni par l’expert ou le sapiteur et des diligences mises en oeuvre pour respecter le délai mentionné à l’article R. 621-2. Il arrête sur justificatifs le montant des frais et débours qui seront remboursés à l’expert » ; qu’aux termes de l’article R. 621-13 : « Lorsque l’expertise a été ordonnée sur le fondement du titre III du livre V, le président du tribunal ou de la cour, après consultation, le cas échéant, du magistrat délégué, ou, au Conseil d’Etat, le président de la section du contentieux en fixe les frais et honoraires par une ordonnance prise conformément aux dispositions des articles R. 621-11 et R. 761-4. Cette ordonnance désigne la ou les parties qui assumeront la charge de ces frais et honoraires. (…). Elle peut faire l’objet, dans le délai d’un mois à compter de sa notification, du recours prévu à l’article R. 761-5 » ; qu’aux termes de l’article R. 761-1 : « Les dépens comprennent (…) les frais d’expertise, d’enquête et de toute autre mesure d’instruction dont les frais ne sont pas à la charge de l’Etat. / Sous réserve de dispositions particulières, ils sont mis à la charge de toute partie perdante sauf si les circonstances particulières de l’affaire justifient qu’ils soient mis à la charge d’une autre partie ou partagés entre les parties (…) » ; qu’aux termes de l’article R. 761-4 : « La liquidation des dépens, y compris celle des frais et honoraires d’expertise définis à l’article R. 621-11, est faite par ordonnance du président de la juridiction, après consultation du président de la formation de jugement ou, en cas de référé ou de constat, du magistrat délégué. / Au Conseil d’Etat, la liquidation est faite par ordonnance du président de la section du contentieux » ; qu’enfin, aux termes de l’article R. 761-5 : « Les parties, l’Etat lorsque les frais d’expertise sont avancés au titre de l’aide juridictionnelle ainsi que, le cas échéant, l’expert, peuvent contester l’ordonnance mentionnée à l’article R. 761-4 devant la juridiction à laquelle appartient l’auteur de l’ordonnance (…) » ;

3. Considérant, en premier lieu, que l’ordonnance par laquelle le président de la section du contentieux du Conseil d’Etat liquide et taxe les frais et honoraires d’expertise revêt un caractère administratif et non juridictionnel ; que le recours dont elle peut faire l’objet en application des dispositions précitées de l’article R. 761-5 du code de justice administrative est un recours de plein contentieux par lequel le juge détermine les droits à rémunération de l’expert ainsi que les parties devant supporter la charge de cette rémunération ; que, par suite, la requérante ne peut utilement invoquer, pour contester le montant et la mise à sa charge des frais et honoraires de l’expertise arrêtés par l’ordonnance attaquée, les irrégularités formelles et procédurales qui l’affecteraient et tenant, d’une part, à son insuffisante motivation, d’autre part, aux circonstances que le président de la formation de jugement ayant prescrit l’expertise n’aurait pas été préalablement consulté, en violation de l’article R. 761-4 du code de justice administrative, et, que les parties auraient dû recevoir communication par l’expert d’une copie de l’état de ses vacations, frais et débours ainsi qu’être invitées à présenter leurs observations sur cet état ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que les parties ont la faculté de contester devant le juge la détermination des frais et honoraires de l’expert ainsi que leur répartition, en demandant, au cas où elles n’auraient pas obtenu préalablement la communication de l’état des vacations, frais et débours de l’expert, que celui-ci leur soit communiqué ; que, par suite, la société TP Ferro Concesionaria n’est pas fondée à soutenir que son droit à un recours effectif, au sens de l’article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, aurait été méconnu, au motif que l’état des frais des vacations, frais et débours de l’expert ne lui a pas été communiqué d’office avant l’intervention de l’ordonnance attaquée ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu’il n’appartient pas au président de juridiction ou, au Conseil d’Etat, au président de la section du contentieux, taxant et liquidant les frais d’une expertise par décision administrative sur le fondement de l’article R. 621-11 du code de justice administrative, ni au juge saisi d’un recours contre cette ordonnance, de se prononcer sur la régularité des opérations de l’expertise ; qu’il leur incombe toutefois, dans l’appréciation portée sur l’utilité et la nature du travail fourni par l’expert, de prendre en considération, le cas échéant, les décisions juridictionnelles rendues sur une action en récusation de l’expert ou statuant au fond sur le litige ayant donné lieu à l’expertise ; qu’en l’espèce, aucune décision juridictionnelle n’étant intervenue sur une demande de récusation de l’expert ni au fond, la société TP Ferro Concesionaria ne peut demander à être déchargée de toute condamnation au paiement de l’expertise au motif tiré de l’irrégularité des opérations d’expertise à raison de la partialité de l’expert ;

6. Considérant, en dernier lieu, que, d’une part, il résulte des dispositions de l’article R. 621-13 du code de justice administrative, dérogeant sur ce point à l’article R. 761-1 du même code, que la répartition des frais et honoraires de l’expert entre les parties intervient, dans les circonstances de l’espèce, compte tenu notamment de l’utilité de l’expertise pour ces parties, sans que cette répartition soit déterminée par la seule circonstance qu’une de ces parties l’a demandée ou, à l’inverse, en a contesté le bien fondé ; que, d’autre part, la décision par laquelle la juridiction administrative met les frais d’expertise à la charge d’une partie ayant le caractère d’une condamnation à une indemnité, au sens de l’article 1153-1 du code civil, les intérêts sur le montant des frais et honoraires de l’expert ne courent qu’à compter de la date à laquelle ils ont été fixés par la décision juridictionnelle ;

7. Considérant qu’il résulte de ce qui précède qu’il sera fait une juste appréciation de la somme due à M. A… en la fixant, eu égard au montant des honoraires et frais demandés dont il ne résulte pas de l’instruction qu’ils soient inexacts ou excessifs, à 59 772 euros tous intérêts compris au jour de la présente décision ; que les mesures d’expertises ordonnées ayant été, en l’espèce, utiles aux deux parties, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Perthus et de la société TP Ferro Concesionaria la moitié, chacune, de la somme due à l’expert ;

8. Considérant qu’il y a lieu, dans les circonstances de l’espèce, de mettre à la charge de la société TP Ferro Concesionaria et de la commune du Perthus la somme de 1 500 euros à verser chacune à M. A… au titre des dispositions de l’article L. 761-1 du code de justice administrative et de rejeter les conclusions présentées sur le même fondement par la société TP Ferro Concesionaria et la commune du Perthus ;

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La société TP Ferro Concesionaria et la commune de Perthus verseront chacune une somme de 29 886 euros à M. A… au titre des frais et honoraires d’expertise.

Article 2 : L’ordonnance du président de la section du contentieux du Conseil d’Etat du 11 janvier 2012 est modifiée conformément à l’article 1er.

Article 3 : La société TP Ferro Concesionaria et la commune de Perthus verseront chacune à M. A… une somme 1 500 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions de la commune de Perthus présentées au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : La présente décision sera notifiée à la société TP Ferro Concesionaria, représentée par la société Eiffage TP, à la commune du Perthus et à M. B… A….

Copie en sera adressée pour information au président de la section du contentieux du Conseil d’Etat.

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Conseil d'État, 7ème et 2ème sous-sections réunies, 7 octobre 2013, 356675, Publié au recueil Lebon