Tribunal administratif de Besançon, 13 avril 2011, n° 1000034

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Sur la décision

Référence :
TA Besançon, 13 avr. 2011, n° 1000034
Juridiction : Tribunal administratif de Besançon
Numéro : 1000034

Sur les parties

Texte intégral

TRIBUNAL ADMINISTRATIF aft

DE BESANCON

N° 1000034

___________

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

SARL SCANDALEUSE

__________

M. Fabre AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

Rapporteur

___________

Le Tribunal administratif de Besançon,

M. Pernot

Rapporteur public (1re chambre)

___________

Audience du 17 mars 2011

Lecture du 13 avril 2011

___________

Vu la requête, enregistrée le 6 janvier 2010, présentée pour la SARL SCANDALEUSE, sise 11-15 rue Sébille à Lons-le-Saunier (39000) par Me Marraud des Grottes ; la SARL SCANDALEUSE demande au Tribunal d’annuler la décision du 6 novembre 2009 par laquelle la préfète du Jura a rejeté sa demande d’autorisation de transfert de la licence IV qu’elle exploite au XXX à Beaufort vers l’établissement Auberge des Erables, hameau de l’Emboissieux à La Pesse ;

Elle soutient que :

— la compétence matérielle de l’auteur de la décision attaquée n’est pas établie, le signataire ne justifiant ni d’une délégation de compétence ni d’une délégation de signature ;

— la décision attaquée n’est pas motivée ;

— la décision attaquée repose sur des faits qui ne sont pas matériellement établis dès lors que l’opposition de la mairie de Beaufort n’est pas démontrée pas plus d’ailleurs que n’est démontrée l’existence du repreneur invoquée ;

— la décision préfectorale est entachée d’erreur de droit dès lors que l’opposition du maire de Beaufort ne peut, à elle seule, et en tout état de cause, justifier le refus opposé par la préfète du Jura ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 19 janvier 2010, présenté pour la SARL SCANDALEUSE qui complète ses précédentes écritures et demande au Tribunal :

1) d’annuler la décision du 6 novembre 2009 par laquelle la préfète du Jura a rejeté sa demande d’autorisation de transfert de la licence IV qu’elle exploite au XXX à Beaufort vers l’établissement Auberge des Erables, hameau de l’Emboissieux à La Pesse ;

2) d’enjoindre à la préfète du Jura, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et dans un délai de huit jours suivant le prononcé du jugement à intervenir, de procéder à un nouvel examen de sa demande de transfert ;

3) de condamner l’Etat à lui verser la somme de 2 000 euros en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient que :

— la compétence matérielle de l’auteur de la décision attaquée n’est pas établie, le signataire ne justifiant ni d’une délégation de compétence, ni d’une délégation de signature ;

— la décision attaquée n’est pas motivée alors qu’elle aurait dû l’être ;

— la préfète s’est méprise sur l’étendue de sa compétence et a entaché sa décision d’une erreur de droit, elle s’est en effet considérée comme liée par l’avis des maires concernés alors qu’en application des dispositions de l’article L. 3332-11 du code de la santé publique, elle n’est pas tenue de suivre l’avis desdits maires ;

— la décision attaquée est entachée d’erreur de droit et d’un vice de procédure dès lors que pour connaître d’une autorisation de transfert d’une licence IV, la préfète du Jura a appliqué les dispositions de l’article L. 3322-11 du code de la santé publique relatives au transfert d’un débit de boissons à consommer sur place ;

— aucune disposition législative ne permet à l’administration de refuser un transfert de licence au motif que le maire de la commune du lieu initial de licence est opposé au transfert ;

— la décision attaquée porte atteinte aux libertés publiques et est entachée d’erreur d’appréciation ;

— la décision attaquée repose sur des faits qui ne sont matériellement pas établis ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 9 mars 2010, complété par un mémoire enregistré le 28 avril 2010, présenté par la préfète du Jura qui conclut au rejet de la requête ;

Elle soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;

Vu le nouveau mémoire, enregistré le 19 avril 2010, présenté pour la SARL SCANDALEUSE qui conclut aux mêmes fins que précédemment ;

Elle soutient que :

— la délégation de signature attribuée à l’auteur de la décision attaquée est trop large et générale et donc illégale ;

— la décision attaquée est fondée sur des faits matériellement inexacts ;

— la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir dès lors qu’il s’agit en réalité de défendre les intérêts privés de son bailleur ;

Vu la décision attaquée ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu l’ordonnance du 6 avril 2010 par laquelle la présidente du Tribunal a fixé la clôture de l’instruction de la présente affaire au 30 avril 2010 à 12 h 00 ;

Vu l’ordonnance du 4 mai 2010 par laquelle la présidente du Tribunal a décidé la réouverture de l’instruction de la présente affaire ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu l’arrêté du Conseil d’Etat en date du 27 janvier 2009 fixant la liste des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel autorisés à appliquer, à titre expérimental, les dispositions de l’article 2 du décret n° 2009-14 du 7 janvier 2009 ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l’audience ;

Après avoir entendu au cours de l’audience publique du 17 mars 2011 :

— le rapport de M. Fabre, rapporteur ;

— les conclusions de M. Pernot , rapporteur public ;

— et les observations de Me Marraud des Grottes pour la SARL SCANDALEUSE ;

Considérant que la SARL SCANDALEUSE, dont le gérant est M. Z A, a fait l’acquisition le 21 juin 2007, de la licence IV et du matériel cédés suite à la liquidation judiciaire de la SARL Isidore, prononcée par jugement du 6 avril 2007 par le tribunal de commerce de Lons-le-Saunier, s’agissant du débit de boissons sis XXX sur la commune de Beaufort ; qu’à compter du 16 juin 2007, la société requérante s’est implantée sur la commune de Beaufort et est devenue locataire, d’une part, de la SCI Franchi, pour l’exploitation du restaurant situé au XXX et, d’autre part, de M. X Y, pour l’activité de la discothèque « la Casa del Sol », sise XXX ; que le 30 septembre 2009, Me Bavoux, notaire, a sollicité, pour le compte de la SARL SCANDALEUSE, le transfert de la licence IV associée au débit de boissons, sis XXX à Beaufort, au profit de l’auberge des Erables située au hameau de l’Emboissieux sur la commune de La Pesse ; que la préfète du Jura a alors consulté les maires des communes de Beaufort et de La Pesse, par courriers du 7 octobre 2009 ; que le maire de la commune de Beaufort a fait connaître son avis défavorable au transfert de la licence considérée le 28 octobre 2009 ; que le maire de la commune de La Pesse a quant à lui donné un avis favorable au transfert de licence, par courrier du 12 novembre 2009 ; que par la décision attaquée du 6 novembre 2009, la préfète du Jura a refusé la demande d’autorisation de transfert de licence présentée pour la société requérante ;

Sur les conclusions aux fins d’annulation et sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens de la requête :

Considérant que la société requérante soutient que la préfète du Jura s’est méprise sur l’étendue de sa compétence dès lors qu’elle s’est considérée comme liée par l’avis des maires concernés ; qu’aux termes de l’article L. 3332-11 du code de la santé publique : « Un débit de boissons à consommer sur place exploité peut être transféré dans le département où il se situe. Les demandes d’autorisation de transfert sont soumises au représentant de l’Etat dans le département. Le maire de la commune où est installé le débit de boissons et le maire de la commune où celui-ci est transféré sont obligatoirement consultés. Lorsqu’une commune ne comporte qu’un débit de boissons de 4e catégorie, ce débit ne peut faire l’objet d’un transfert en application du présent article […] » ; que par ailleurs, l’article L. 3331-1 du même code dispose : « Les débits de boissons à consommer sur place sont répartis en quatre catégories selon l’étendue de la licence dont ils sont assortis : 1° La licence de 1re catégorie, dite « licence de boissons sans alcool », ne comporte l’autorisation de vente à consommer sur place que pour les boissons du premier groupe ; 2° La licence de 2e catégorie, dite « licence de boissons fermentées », comporte l’autorisation de vendre pour consommer sur place les boissons des deux premiers groupes ; 3° La licence de 3e catégorie, dite « licence restreinte », comporte l’autorisation de vendre pour consommer sur place les boissons des trois premiers groupes ; 4° La licence de 4e catégorie dite « grande licence » ou « licence de plein exercice », comporte l’autorisation de vendre pour consommer sur place toutes les boissons dont la consommation à l’intérieur demeure autorisée, y compris celles du quatrième et du cinquième groupe » ; que la décision attaquée est ainsi rédigée : « Par courrier reçu le 30 septembre 2009, vous avez sollicité de mes services une autorisation de transfert d’une licence IV appartenant à la SARL SCANDALEUSE et exploitée XXX à Beaufort, vers l’établissement Auberge des Erables – Hameau de l’Emboissieux à La Pesse dans le cadre de l’article L. 3332-11 du code de la santé publique qui prévoit qu’un débit de boissons peut être transféré dans le département où il se situe sur décision du représentant de l’Etat dans le département. J’ai le regret de vous informer qu’après consultations des maires de Beaufort et de La Pesse, je ne suis pas en mesure de vous délivrer l’autorisation sollicitée. En effet, M. le maire de Beaufort souhaite maintenir sur place cette licence, un éventuel repreneur de l’établissement concerné s’étant fait connaître auprès de lui […] » ; qu’il ressort des termes employés par l’auteur de la decision attaquée, et nonobstant l’argumentation présentée en défense, que la préfète du Jura s’est considérée, à tort, comme liée par l’avis défavorable du maire de la commune de Beaufort alors que les dispositions précitées ne prévoient qu’un avis purement consultatif des maires des communes concernées ; qu’au surplus, et en tout état de cause, il ne ressort pas des dispositions législatives précitées que l’administration puisse refuser un transfert de licence au seul motif que le maire de la commune du lieu initial de licence est opposé au transfert, alors que, de surcroît, la préfète du Jura, qui n’avait pas fixé de délai de réponse dans ses demandes d’avis, n’a pas attendu l’avis de la commune de La Pesse avant de prendre la décision attaquée ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à demander l’annulation de la décision du 6 novembre 2009 par laquelle la préfète du Jura a rejeté sa demande d’autorisation de transfert de la licence IV qu’elle exploite au XXX à Beaufort vers l’établissement Auberge des Erables, hameau de l’Emboissieux à La Pesse ;

Sur les conclusions aux fins d’injonction :

Considérant que la société requérante demande au Tribunal d’enjoindre à la préfète du Jura, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et dans un délai de huit jours suivant le prononcé du jugement à intervenir, de procéder à un nouvel examen de sa demande de transfert ;

Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société requérante est fondée à demander à ce qu’il soit enjoint au préfet du Jura de procéder à un nouvel examen de sa demande de transfert ; que, dans le cadre du nouvel examen de ladite demande, il incombe au préfet du Jura de saisir pour avis, dans un délai de huit jours suivant notification du présent jugement, par courrier rédigé en termes identiques, les maires des communes concernées en leur fixant un délai, qui doit être raisonnable, pour présenter leur avis ; qu’une fois ce délai expiré, il incombera alors au préfet du Jura, dans un délai de trois mois suivant notification du présent jugement, de prendre une nouvelle décision, au vu des avis qui lui auront été adressés ; que, dans les circonstances de l’espèce, il n’y a pas lieu d’assortir cette injonction d’une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l’application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative :

Considérant qu’aux termes de l’article L. 761-1 du code de justice administrative : « Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation » ;

Considérant qu’il y a lieu, en application des dispositions précitées du code de justice administrative, de condamner l’Etat à verser à la SARL SCANDALEUSE la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par cette dernière et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La décision du 6 novembre 2009 par laquelle la préfète du Jura a rejeté la demande d’autorisation de transfert de la licence IV exploitée par la SARL SCANDALEUSE au XXX à Beaufort vers l’établissement Auberge des Erables, hameau de l’Emboissieux à La Pesse est annulée.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Jura de saisir pour avis, dans un délai de huit jours suivant notification du présent jugement, par courrier rédigé en termes identiques, les maires des communes concernées en leur fixant un délai, qui doit être raisonnable, pour présenter leur avis. Une fois ce délai expiré, il est enjoint au préfet du Jura de prendre une nouvelle décision, au vu des avis qui lui auront été adressés, dans un délai de trois mois suivant notification du présent jugement.

Article 3 : L’Etat versera à la SARL SCANDALEUSE la somme de 1 500 euros (mille cinq cents euros) en application de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par la SARL SCANDALEUSE est rejeté.

Article 5 : Le présent jugement sera notifié à la SARL SCANDALEUSE et au préfet du Jura.

Copie en sera transmise, pour information, au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration et à Me Marraud des Grottes, avocat.

Délibéré après l’audience du 17 mars 2011 à laquelle siégeaient :

Mme Mazzega, présidente,

M. Duboz, premier conseiller,

M. Fabre, premier conseiller.

Lu en audience publique le 13 avril 2011.

Le rapporteur, La présidente,

X. FABRE D. MAZZEGA

Le greffier,

P. NOBLET

La République mande et ordonne au ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l’exécution du présent jugement.

Pour expédition conforme,

Le greffier

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